Jacques Bertin – Un Grand Châle Lilas


Jacques Bertin

Un Grand Châle Lilas


D’abord un grand châle lilas
Sorti du fond de mon grenier
Pour tes épaules gelées
Et puis un grand collier de glands
Récoltés en des chemins
Après la fin de leur saison
Après la fin de nos chemins

Et puis un grand peigne de bois
À l’heure où le vent te revient
Tes mèches sont désemparées
Une seule bague à ta main
Pour laquelle j’aurais plongé
Au fond du puits d’un vieux couvent
Et tu me donneras ta main

Un vieux cheval compréhensif
D’une étable de Moncontour
Et devant moi tu es grimpée
Un sentier oublié des hommes
Un chemin au long des vergers
Une reinette un peu fripée
Pour croquer au long des chemins

Une barque sur un canal
Un enfant le long du halage
Dans une blouse démodée
Et puis les herbes de l’étang
Et puis les reflets de l’étang
À l’heure où remonte le froid
Et où nous allons nous baigner

Nous irons par le froid
D’une saison passée
Où tout renaîtra
Vêtus de vieux habits
De vieux moments d’un autrefois
Comme le feu renaît des braises
Comme la fleur perce-gel

AU SEIN DE MES PAUMES


AU SEIN DE MES PAUMES

La grande chemise, la petite culotte

l’herbe son grain de folie

le broc plein de tes cuisses où je remplis la cuvette de ma boucjhe

cet oiseau que rien ne bafoue

le pain qu’on casse

la dilatation de la grosse veine

sa brune couronne

le brûle-parfum de tes menthes

la balançoire de tes seins

sur la chaise du piano en colonnes l’avenir debout

jusqu’au ventre l’embrun enfonce son clou

tout à coup ses arbres androgynes

du caillou guérissent l’errance

frémis pour le mobile de la croupe chevaline

il y aura de la farine pour le peint

j’ai rêvé que l’enfant déshabillait ses billes du sac des méchants

au joint du lit de pierre le limon pose son foetus en sédiment

pourquoi refaire le monde quand tu offres la traversée du lit de la rivière à l’estuaire

ce qu’ils m’ont dit de mal de mon oeil n’altère pas la promenade à ne rien perdre de ton cor

j’ai les doigts vers

la commode ouverte au plus secret des tiroirs je reconnais ne rien valoir en dehors de toi

me coupe en quatre dans tous les sens sans tronçonner l’arbre.

Niala-Loisobleu – 9 Décembre 2021

ACCROCHE-COEUR


ACCROCHE-COEUR

Laurier grimpeur

ce gris qui grouille réclame de l’arôme au ban de la crémaillère

Quelques dalles pour caler les chenets retiennent la flamme contre la fourrure

Par l’aisselle ouverte s’échappe alors le désordre du défilé de mode désuet

Sous la jupe jupe longue d’une couverture où la cuisse s’enrhume, je devine que le chat s’asphyxie

La lumière toussote

Arrive alors en génération spontanée le nom attendu d’une fleur blanche à bonne température

Pendant qu’il ne cesse de pleuvoir cette tristesse de remplissage de bassine bascule en gouttière

Couleur d’anémone elle allonge sur la table son catalogue de voyage pour partir en été de l’autre côté du globe.

Niala-Loisobleu – 9 Décembre 2021

ENTRAIN CORAIL (REPRISE)


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ENTRAIN CORAIL (REPRISE)

Juste ciel accorde

ton archet aux couleurs du Temps

un peu de musique de trottoir en bonnet dans ses oreilles

remettrait assez de roulement dans les billes de ma marelle

Mon carré de craie s’attache aux doigts des falaises dans une image d’Etretat

Monet-Monet

on dirait la guitare d’une étape de St-Jacques par la porte basse d’un autre trip

comme quand il y avait des couloirs aux grandes lignes des voyages de noces à Venise

et des couchettes dans les trains de marchandises

Toi émoi au coeur d’une meule en files de grues

de soupe à l’oignon…

Niala-Loisobleu – 31/01/18

RENCONTRE DICTAPHONE


RENCONTRE DICTAPHONE

Dans un coin la mer et dans l’autre la cloison de vers percée de trous par lesquels ils parlent en laissant l’entente s’échapper. Quelqu’un peut-il lui dire où ils veulent en venir ?

Elle s’est accrochée à l’oiseau assise à son bord

Cette chose inhumaine qui vocifère arrive même à masquer le phare tellement ça ne parle que pour elle sans savoir autre chose que son intérêt

Dès le matin un vol de coucous a squatté l’entrée de la plage pour revendiquer le droit d’asile dans un domaine qu’ils ignorent

Ils se plaignent

Rien n’est à leur convenance

Là où on aurait pensé voir des petites tortues casser l’oeuf, on ne voit plus que du crabe qui se piétine

Non Elle ne se pissera pas dessus, au fond elle est loin de se sentir battue

Dans le couloir la seule issue qui se dessine c’est la pendule qu’Elle ne quitte pas du regard

Ernesto rentre sur son tri porteur et l’enlève avant que le Samu intervienne

Elle respire, ça sent bon l’âne

Brave Ernesto

Il bouche le dictaphone pour lui laisser que le son et la couleur du rivage rédempteur

Sous le marronnier la marelle lève la patte, ça soulage…

Niala-Loisobleu – 9 Décembre 2021