La Chanson De Margaret par Germaine Montéro


La Chanson De Margaret par Germaine Montéro

C’est rue de la Crique que j’ai fait mes classes
Au Havre dans un bar tenu par Chloé
C’est à Tampico qu’au fond d’une impasse
J’ai trouvé un sens à ma destinée
On dit que l’argent c’est bien inodore
Le Pétrole est là pour vous démentir
Car à Tampico quand ça s’évapore
Le passé revient qui vous fait vomir
Oui j’ai laissé là mes joues innocentes
Oui à Tampico je me suis défleurie
Je n’étais alors qu’une adolescente
Beaucoup trop sensible à des tas d’profits
Les combinaisons ne sont pas toujours bonnes
Comme une vraie souris j’ai fait des dollars
Dans ce sale pays où l’air empoisonne
La marijuana vous fout le cafard.

On m’encourageait j’en voyais de drôles
Je vidais mon verre en fermant les yeux
Quand j’avais fait le plein j’voyais le pactole
Et les connaisseurs trouvaient ça curieux
Une fille de vingt ans, c’est pour la romance
Et mes agréments semblaient éternels
Mais par-ci par-là quelques dissonances
M’en ont mis un coup dans mon arc-en-ciel
C’est là que j’ai laissé derrière les bouteilles
Le très petit lot de mes petites vertus
Un damné matelot qui n’aimait que l’oseille
M’en a tant fait voir que je me reconnais plus
Oui, il m’a fait voir le ciel du Mexique
Et m’a balancée par un beau printemps
Parmi les cactus, dans le décor classique
Où le soleil vous tue comme à bout portant.

Un cock shangaïé, un soir de folie
A pris mon avenir comme un beau cadeau
Il m’a dit « petite, il faut qu’on se marie
Tu seras la fleur d’un joli bistrot
De tels boniments démolissent une femme
Je vivais déjà derrière mon comptoir
Les flics de couleur me disaient « Madame »
Bref, je gambergeais du matin au soir
Mon Dieu ramenez moi dans ma belle enfance
Quartier Saint François, au bassin du roi.
Mon Dieu rendez-moi un peu d’innocence
Et l’odeur des quais quand il faisait froid
Faites moi revoir les neiges exquises
La pluie sur Sanvic qui luit sur les toits
La ronde des gosses autour de l’église
Mon premier baiser sur les chevaux de bois.

Pierre Mac-Orlan

GRANDS FONDS 2 – Juliette Gréco:Jean De La Providence De Dieu


C’était en l’an dix-neuf cent deux
Quand Jean d’ la Providence de Dieu
Ouvrit la porte sans carte blanche
Son front était cuit et recuit
Par le soleil et les soucis
Son sac était lourd sur sa hancheMais la mer du Nord s’engouffra
Dans l’ bar où tenions nos états :
Y avait Machin, Chose et Langlois
Y avait Frances, et c’était moi !

Nous étions tous les cinq à l’aise
Dans le vieux bar de l’Irlandaise !

En ce temps-là, y avait Langlois
Machin et Chose, l’Irlande et moi

Le vent qui soufflait de la mer
Nous a pris dans ses bras de fer
Pour en emporter deux en douce
Il ne resta dans l’ cabaret
Après qu’ils se furent taillés
Car ils avaient l’ diable à leurs trousses
Que Langlois, moi et ce curieux
Jean de la Providence de Dieu !
Y avait donc Jean, et Cætera
Langlois, et la môme qu’était moi
Langlois, très fauché, mit les voiles
Pour retrouver sa bonne étoile
Alors nous ne fûmes plus que deux
Moi et la Providence de Dieu !

On m’ nomme aussi « Saint-Jean bouche d’or »
Me dit ce grand matelot du Nord
Et quand je chante ma complainte
Au petit jour, passé minuit
Ici ou là, comme un défi
Toutes les garces se croient des saintes !

Puis il disparut en chantant
Autant en emporte le vent…
Y avait Machin, Chose et Langlois
Maintenant, il n’y avait plus que moi !

J’étais seule devant les bouteilles
Elles m’offraient d’autres merveilles !
En souvenir de Jean, j’en bus deux
Et tout l’ reste à la grâce de Dieu !

Que sont devenus mes copains ?

À dire vrai, je n’en sais plus rien
L’Irlandaise a fermé boutique
Machin et Chose ont disparu
Dans le décor des inconnus
C’est la faute au vent hystérique :
Il fit entrer ce Jean de Dieu,
Sa Providence et ses bons vœux !

Ah, les bistrots des ports de mer !
Lorsque le vent pleure en hiver
Et vous prend pour toute la vie
Avec ses orgues de Barbarie !
C’était en l’an dix-neuf cent deux
Au Rendez-vous des amoureux

Pierre Mac Orlan

ORIGINE


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ORIGINE

Déplacer l’austérité de murs sales photographiés sur le vif d’un voile sur la musique d’une conquête

C’était déjà le recul andalou du cheval d’école, les fleurs gitanes à l’odeur de crépon manquent de rein dans le claquement d’étalon, passer par Bénidorm sent la colonisation britanico-germanico-batave

Ambroise a tellement d’orgue dans ses rues qu’en Mac Orlan sent la frite, vieux loubard des quais où Mimi se fait reluire sous le pont

Ne rien laisser à la nitre qui dévore, debout sur les jambes qui échappent, un bus 52 pour passage du poil hagard à la taille du rasoir, demain a d’hier , Alain rappelle-toi ta grand-mère qui te disait qu’avant de donner faut pas se perdre à refaire le monde, quand tu rejoins les roses jaunes pense au prix non marchand que ça coûte. Les héliotropes sont du bon côté de la page, gratte la guitare à sa source.

Niala-Loisobleu – 9 Septembre 2019

 

 

DU VENT QUI SE MORFOND, MA


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DU VENT QUI SE MORFOND, MA

 

Ma,

J’te sors un reste d’espoir

de ma musette

pour que tu connaisses mieux mon trottoir

l’eau y étais bonne à boire

que ça m’a gardé vivant face aux inciviques du boulevard du crime

De la rue qui m’a fête peint d’épices

prends mon amour pour tout à toi

c’est de loin devenu denrée rare…

 

Niala-Loisobleu – 03/09/19