UN JOUR PARMI TANT


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UN JOUR PARMI TANT

Déluge de soleil
nous ne voyons rien mais voyons tout
Corps sans poids sol sans épaisseur
montons-nous ou descendons-nous ?

Ton corps est un diamant
où es-tu ?
Tu t’es perdu dans ton corps
Cette heure est un éclair immobile sans griffes
enfin nous sommes tous frères
nous pourrions nous dire bonsoir
même nous les Mexicains nous sommes heureux
et les étrangers aussi

Les automobiles ont la nostalgie de l’herbe
Marchent les tours

…………………le temps s’est arrêté
Deux yeux ne me quittent pas
c’est la mer sur les rochers couleur de colère
c’est la furie de juin et son manteau d’abeilles

Soleil lion du ciel
toi qui la regardes

…………. regarde-moi
Idole qui ne regarde personne
……………………………………regarde-nous
le ciel tourne et change et reste identique
où es-tu ?
Je suis seul face au soleil et aux gens
tu étais corps tu fus lumière tu n’es rien
Un jour je te rencontrerai dans un autre soleil

Tombe le soir
…………………………….grandissent les montagnes
nul ne lit les journaux
dans les bureaux jambes entrouvertes
les jeunes filles prennent le café en bavardant
J’ouvre mon bureau
………………………………..il est plein d’ailes vertes
il est rempli d’élytres jaunes
Les machines marchent toutes seules
tapent sans relâche la même ardente syllabe
La nuit guette derrière les gratte-ciel
c’est l’heure des étreintes cannibales
Nuit aux longs ongles
que de rage dans des regards remémorés !
Avant de s’en aller
le soleil embrase les présences

Octavio Paz, Salamandre [Salamandra], [traduction de l’espagnol par Jean-Claude Masson], dans Œuvres, édition établie, présentée et annotée par Jean-Claude Masson, Bibliothèque de la Pléiade, 2008, p. 235-236.

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ENTRE TIEN EMOI 65


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ENTRE TIEN EMOI 65

J’ai laissé le chemin ouvert derrière Nous le tambour de la porte  tourne encore et un coin au bord de l’eau est loin des parkings de supermarchés. Sur le tronc du palmier un fruit juteux transporte mon bateau. Ouvertes les palmes en coiffent les longues mèches. Danse, tu vallonnes la plaine en rizières. L’enfant resté assis  se dandine en attendant l’heure du bain, qui l’emmènera plus loin, bien plus loin. Jour où de visite en découverte nous rejoindrons la circulation de notre vie intétieure. Je vois se réchauffer la journée. Dans la glace, l’encornet sors les tentacules, en soufflant sur ses doigts. Mon croque mitaine est en attente à la sortie de la pelote de laine.

Niala-Loisobleu – 13/04/19

 

Visites Octavio Paz

A travers la nuit urbaine de pierre et sécheresse
la campagne entre dans ma chambre.
Elle allonge des bras verts couverts de bracelets d’oiseaux,
de bracelets de feuilles.
A la main une rivière.
Le ciel de la campagne entre aussi,
avec son panier de joyaux fraîchement coupés.
Et la mer s’assied à mes côtés,
elle étend sa traîne si blanche sur le sol.
Du silence jaillit un arbre à musique.
De l’arbre pendent tous les mots superbes
qui brillent, mûrissent, tombent.
Sur mon front, grotte qu’habite un éclair…
Mais tout s’est peuplé d’ailes.
(Trad: Colette)
                                Photo Colette

Visitas Octavio Paz

A través de la noche urbana de piedra y sequía
entra el campo a mi cuarto.
Alarga brazos verdes con pulseras de pájaros,
con pulseras de hojas.
Lleva un río de la mano.
El cielo del campo también entra,
con su cesta de joyas acabadas de cortar.
Y el mar se sienta junto a mí,
extendiendo su cola blanquísima en el suelo.
Del silencio brota un árbol de música.
Del árbol cuelgan todas las palabras hermosas
que brillan, maduran, caen.
En mi frente, cueva que habita un relámpago…
Pero todo se ha poblado de alas.

Dire Faire Octavio Paz


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Dire Faire Octavio Paz

Entre ce que je vois et dis,

Entre ce que je dis et tais,

Entre ce que je tais et rêve,

Entre ce que je rêve et oublie

La poésie.

Se glisse entre le oui et le non :

elle dit

ce que je tais,

elle rêve

ce que j’oublie.

Ce n’est pas un dire :

c’est un faire.

C’est un faire

qui est un dire.

La poésie se dit et s’entend :

elle est réelle.

Et à peine je dis

elle est réelle

qu’elle se dissipe.

Plus réelle ainsi ?

Idée palpable,

mot

impalpable :

la poésie

va et vient

entre ce qui est

et ce qui n’est pas.

Elle tisse des reflets

et les détisse.

La poésie

sème des yeux sur les pages.

Les yeux parlent

les mots regardent

les regards pensent.

Entendre

les pensées

voir ce que nous disons

toucher

le corps

de l’idée.

Les yeux

se ferment

Les mots s’ouvrent.

(Trad: Colette)

Decir, Hacer de Octavio Paz

A Roman Jakobson

Entre lo que veo y digo,
Entre lo que digo y callo,
Entre lo que callo y sueño,
Entre lo que sueño y olvido
La poesía.
Se desliza entre el sí y el no:
dice
lo que callo,
calla
lo que digo,
sueña
lo que olvido.

No es un decir:
es un hacer.
Es un hacer
que es un decir.
La poesía
se dice y se oye:
es real.

Y apenas digo
es real,
se disipa.
¿Así es más real?
Idea palpable,
palabra
impalpable:
la poesía
va y viene
entre lo que es
y lo que no es.

Teje reflejos
y los desteje.
La poesía
siembra ojos en las páginas
siembra palabras en los ojos.
Los ojos hablan
las palabras miran,
las miradas piensan.

Oír
los pensamientos,
ver
lo que decimos
tocar
el cuerpo
de la idea.
Los ojos
se cierran
Las palabras se abren.

JE REVIENS DE CABANE « LA BAIE DU CIEL »


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JE REVIENS DE CABANE

« LA BAIE DU CIEL »

« Glissant », je dois  te dire, à toi Edouard et à sel qui se reconnaîtra ô combien par tous mes pores, je vous suis intégral nu d’amour. Nous sommes la m’aime chair de cet archipel qu’hier j’ai nommé d’Utopies. Tout simplement par la foi qui prête à croire que la fraternité humaine est l’unique moyen de vivre en complète harmonie avec la nature et les hommes. La Beauté est omniprésente dans l’arbre qui borde une ornière , dans le caillou où l’on trébuche, dans la couleur d’une ondée que le vent retourne en soleil, la couche mousseuse qui couve le champignon, la roche que les reins déplace pour accéder au feu qui brûle à l’intérieur de l’âtre, la main qui tend le verre à trinquer, la guitare qui se fait intestine au pincement du frisson, le coup d’gueule qui demande à l’oeil de ne point fuir, l’étreinte qui froisse les draps sous les soubresauts de deux corps en amour, puis dans l’eau qui détarit le ventre stérile pour jeter le premier cri du nouveau-né…

Et tant de choses encore, si simples, qui devraient annihiler la complexité des plans d’investissements douteux, des échafaudages branlants, chevaux de Troie louches, diarrhées verbales des marchands du temple en quête de pouvoir, fins prêts à abjurer la plus avérée des impossibilités pour être élus…

LA BAIE DU CIEL
Elle, miroir, et si gardée
Que les herbes atroces fuient
Où vont l’attente la torture.
Un arbre ne tient dans la main creuse du chemin
Qui de vieillesse devient route.

Elle a gemmé, femme sur l’eau
Immobile à la surface, goémon
Nue, aveu de l’air qui de plaisir devient orage.

(Édouard Glissant, La terre inquiète, 1954)

Je reviens de cabane, transfusé une fois encore, sang neuf pour dire aimez-vous c’est ce qu’il y a de plus chair au prix le moins élevé.

Niala-Loisobleu – 3 Avril 2017

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Des chemins clairs qui figurent sur le plan, parfois des noms de rues s’effacent, se glissent alors des impasses aux fonds baptismaux induisant une erreur de naissance…


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Des chemins clairs qui figurent sur le plan, parfois des noms de rues s’effacent, se glissent alors des impasses aux fonds baptismaux induisant une erreur de naissance…

Me levant du ban de mon existence, je me souvins que j’avais abandonné mes clefs dans l’appartement avant d’en claquer la porte. La cage d’escalier ne laisse plus passer le moindre bruit de conversation. Lurette qu’aux paliers, DO NOT DISTURB, ça balance comme à pari à la ficelle de chaque poignée de porte. A qui demander « Où par là ça mène-t-il ? »

Nib de Gaston, pas plus qu’un autre pour répondre au téléfon.

Angoisse.

Entrant dans mon jardin secret, derrière le gros cerisier, je trouve le rossignol faisant passe pour tous mes tiroirs

Soudainement un bruit de roues sort du plafond de la cage, le câble des cordes vocales de l’ascenseur, en se tendant, perdait les zoos.

Je me dis, ouf ça va renaître

-Alors qu’est-ce qui t’arrive ? demande Aurore

Passé le frisson d’impression d’au-delà, je reprends conscience. La petite fille de la femme austère est devant moi, elle me tend son sourire. Puis tourne sur les pointes. »Salto tout l’monde »qu’elle dit en riant comme un petit rat dans ses grands égards… Pas Degas n’apparait de derrière les rideaux. Donc pas de vieux salaces dans l’entr’acte. Les lumières me montrent le plafond.

Un émerveillement !

Il est empli de Chagall. Je tremble, pleure, l’émotion me coule des tripes. Plus de fantôme de l’ô qui paiera comme l’injustice l’exige. Il s’est fait avaler par le trou du souffleur. L’instant d’après icelui-ci me dit « Remballe les films d’épouvante, remonte l’heur à la voile, hisse la trinquette et tire un bord, cap au large. On déhale des cons, on s’écarte des lises, des étocs, des naufrageurs, des-on-m’a-dit-que-vous-êtes-au-courant, on casse la mire de la télé-bobards, des émissions qui montrent les richards dépouilleurs d’îles désertes aux SDF, genre la Tessier & Nikos and co, merde à vos bans comme aurait dit Léo !

Aurore me saute au cou, son parfum de gosse me tourneboule. C’te môme à m’sort la barbe de l’attente de la toison d’or.

Le Petit-Prince, son frère Théo au ciel, la p’tite soeur Line agnelle, les roses, les épines, le serpent et le renard, le désert, la serpette et la belette gonflent les binious genre fez noz que ça gigue du talon dans les Monts d’Areu. Me v’là r’venu à Brocéliande. Merlin assis au centre de la ronde clairière me dit :

« Vas ton odyssée jusqu’au bout de la confiance, elle cédera pas, t’es assez un Pi pour muter croyant en ta foi ».

La mer sort de l’épave et remet taire à flots

Du château de sable un don jonc tresse la corbeille de la mariée.

Le matin referme les portes de la nuit

Je la chevauche à cru

J’tiens d’bout

Niala-Loisobleu – 26 Août 2016

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Je ne compte pas, la peruve je t’aime


Je ne compte pas, la preuve je t’aime

Des jours qu’il fait un tant sans calories, les semaines ont du mal à se tenir debout. L’anémie d’un mois en détresse ne renforce que le mauvais globule. Au point que les blancs voient rouge. Preuve que ça tourne à contresens. Hier pris de violentes douleurs mon ventre s’est sorti l’intestin comme un tuyau d’arrosage pour nettoyer le fard qui en masquant la peau, cache son satin sous une aimerie lapidaire. J’ai les marques du cri personnel pour repousser les chants des sirènes. Je pousse un coup de gueule pour que les imitations qui soulèvent des désirs à côté ne se croient pas chez elles. Les calendes ont leur mémoire. Ce qu’elle a dans ses tiroirs est la vraie image de toi. Les déguisements posent de grotesques masques sur l’attitude. Bien sûr que le malheur est là. Pas la peine d’être grand-clerc pour s’en apercevoir. Mais entrer dans la perversité de ce jeu de scoumoune ça ne peut rien faire d’autre que ne plus rien voir du vrai qui a sa part d’espoir. J’ai condamné le placard de Barbe-Bleue. Aucune femme ne s’y trouve enfermée en quoi que ce soit.

UN JOUR PARMI TANT

Déluge de soleil
nous ne voyons rien mais voyons tout
Corps sans poids sol sans épaisseur
montons-nous ou descendons-nous ?

Ton corps est un diamant
où es-tu ?
Tu t’es perdu dans ton corps
Cette heure est un éclair immobile sans griffes
enfin nous sommes tous frères
nous pourrions nous dire bonsoir
même nous les Mexicains nous sommes heureux
et les étrangers aussi

Les automobiles ont la nostalgie de l’herbe
Marchent les tours

…………………le temps s’est arrêté
Deux yeux ne me quittent pas
c’est la mer sur les rochers couleur de colère
c’est la furie de juin et son manteau d’abeilles

Soleil lion du ciel
toi qui la regardes

…………. regarde-moi
Idole qui ne regarde personne
……………………………………regarde-nous
le ciel tourne et change et reste identique
où es-tu ?
Je suis seul face au soleil et aux gens
tu étais corps tu fus lumière tu n’es rien
Un jour je te rencontrerai dans un autre soleil

Tombe le soir
…………………………….grandissent les montagnes
nul ne lit les journaux
dans les bureaux jambes entrouvertes
les jeunes filles prennent le café en bavardant
J’ouvre mon bureau
………………………………..il est plein d’ailes vertes
il est rempli d’élytres jaunes
Les machines marchent toutes seules
tapent sans relâche la même ardente syllabe
La nuit guette derrière les gratte-ciel
c’est l’heure des étreintes cannibales
Nuit aux longs ongles
que de rage dans des regards remémorés !
Avant de s’en aller
le soleil embrase les présences

Octavio Paz (Salamandre)

Quelque part dans la pulpe des mangues, je me laisse porter par les épices de ta pensée-positive. L’ombre bien derrière ta lumière qui fait piste. Pugnace comme l’ailé fan que je suis, j’ai mis un autre paysage sur le dos de mon équipage.Ces pierres ne sont pas tombées d’un mets tes hors. On les a fondées et montées une à une. Ceci est ma mémoire vive.Et je ne compte pas, la preuve je t’aime.

Niala-Loisobleu – 28 Mai 2016

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