La vérité du drame est dans ce pur espace qui règne entre la stance heureuse et l'abîme qu'elle côtoie : cet inapaisement total, ou cette ambiguïté suprême. Saint-john Perse
Lorsqu’on renverse la tête sur le sable, et que le jour décroît Soudain les yeux s’entrouvrent : c’est le bleu Du ciel immense, l’espace transparent du ciel bleu, pays De la lumière vive au-dessus de la joie de l’arbre, Et le héron prudent pose une patte circonspecte, risque l’autre Sur le mercure miroitant; la flaque réfléchit l’impavide, l’immense, L’absolu bleu. Nous oublions Les luttes d’un cœur épris d’amour et les distances. Le bleu Traverse l’air impalpable, visite la branche immobile qui le salue Se laisse étreindre par les yeux qui le pénètrent. Dans le vitrail éclate la fanfare du jour, La rosace infusant le doux acquiescement de la lumière. Même un nuage infime et haut fait concevoir Les éloignements sans fin de la distance où glisse Au pli de la tenture une aiguille suivie D’un fil qui s’effiloche. Une invisible main Tente de coudre à l’aube enfuie le crépuscule, Puisque emporté par son poids, le soleil Déchire la mandorle où le temps le suspend Et que le bleu pâlit à l’horizon. La mer Répand sur ses genoux qui tremblent Le vaste drap où flambent ses ciseaux, Berçant infiniment nos cœurs qui se désolent D’être mortels encore sous l’azur éphémère. Philippe Delaveau
Vous savez bien ces nuits très douces; les abeilles
Conspirent en silence dans la ruche du ciel
Au miel des blondes paix. La lune
Est immobile. Qui chuchote dans l’orme attentif?
L éternité jette a travers le siècle sa mésange
Qui nous tient éveillés. Pendant un court instant,
Le cerf qui a sailli lève sa tête couronnée parmi
Les branches; l’étang laiteux ausculte le vestige
Sur le sang de l’argile où le renard a bu. Mais vainement,
Icare tente de rassembler sur l’aile son plumage,
Et de pétrir la cire déchirée par le soleil jaloux;
Il darde de si haut cette colère. Pour qui l’ordre
Sur la campagne plate cousue de bout en bout, avec les murs
Coupant le vent qui secoue l’or de ce qui meurt;
Les intrépides sont heureux de ce larcin, levant dans la
Ciélée leurs branches; d’autres, le bras trop court
Crachent dans l’eau qui réfléchit le ciel; Septentrion lèche les
pans Des toitures arides de sa bile, qui ne se plaignent pas. L’absolu ne se contente pas d’un rapiéçage; l’emblavure D’hiver seule parle du pays sous l’armure des neiges;
Il faut oser plus loin et haut, comme l’aigle céleste, Plutôt qu’aux profondeurs du puits sur lequel l’arbre veille, Où l’ingrate poulie jette sa voix geignarde, obéissant Aux bras de la servante, ignorante du nombre, soumise aux lois
De la maison carrée dans le vent fort.
Et les fenêtres grimaçant dans la douleur des bois
Que la pluie gonfle, aimée du sol qui draine les vivants
Dans l’ombre où se défont les morts, mêlant les ongles
Et les vers, je les défie! Et la bouche tordue, les jambes vaines,
Il tombe au bas du gouffre où les villages
Éteignent leurs fenêtres l’une après l’autre, cessant
D’attendre le retour du prodigue, fils oublié, fils
Ingrat, banni trois fois depuis les Ides de novembre; et sa
photo jaunie Se gonfle dans l’enclos des porcs qui le reniflent. Le prophète Annonce avec les premiers froids le retour imminent De ce frère à demi voyageur, aimant l’horizontale des rivières, Les carrefours baignant dans la lumière orange des banlieues. Les mauvais coups, la fièvre dans les bouges; pleurant Sur les ordures le nom de son village, son père avec un aiguillon De sauge hâtant les bœufs sur le sol gras, avant La pluie près d’assiéger, au loin, l’orangeraie grise de Zabulon. Sur la grand-route les peupliers alignent leur carrure Pieuse, au chapeau bosselé, qu’agrémente l’épingle d’un corbeau noir
Moquant l’aurore aux pieuses liturgies. Le maire
Et ses notables ne veulent plus de désordres
Qui heurtent la sobriété des bourgs paisibles.
Rien ne doit dissiper le pacifique agencement de l’heure,
Rythmée par les horloges, enregistrée dans les archives
Par l’employé qui tire en s’appliquant la langue sur le livre.
Il ne reviendra plus. Le prophète se moque, disent les vieilles,
Debout sur le seuil obscurci, en fichu noir et rouge, de leur
bouche Qui siffle : et que nous sert d’entendre l’oracle du Puissant? La soupe fume dans les salles, nous ne désirons rien. La guerre A fini par mourir comme le feu de branches, sous la petite
pluie. Le vent se lève, mais les foins sont rentrés. Nous avons fait nos comptes; les affaires vont bien. Une banque S’installe à l’entrée du village. A quoi sert aux grenouilles de la douve, aux crapauds de
guetter La route blanche qui se perd dans les complications de l’ombre? Et si dans l’enclos l’étalon roux lève des yeux craintifs, Il oubliera l’herbe à ses pieds, sans notable profit. Seul le prodigue a vu dans le ciel une étoile qui hurle Muette, tombant depuis des millénaires, suspendue Entre les voies lactées, ténébreuses et froides, et l’arc Des pluies tambourinant sur la vitre des mers; ne cessant de
lancer L’invective que vomit son ventre, il a compris lorsque le soir L’appelle en sortant de la ville, quel remords le poursuit; Et lève en vain ses bras, que la cendre des nuits Cache ma nuit rebelle, ma tête si coupable, mes mains Qu’ébrèchent les écales des assiettes sur la décharge, Où je ronge à genoux l’os rouillé du poulet, les épluchures Liquoreuses, le fruit pourri, tombé de la table des riches. J’accourrai, m’agenouillant de loin sur la terre vétusté; Il ne saura pas même qui je suis, et je dirai quand les chiens Pourchasseront le puant : ce jouet de bois qui traîne Sur le sol du grenier, ce fut le mien, cheval qui m’emportait
déjà Sur les foudres obliques des chemins. Pitié pour moi, engen-dreur
De ma mort, ô père! Et peut-être en pleurant la servante
ânonnant Dans l’arrière-cuisine, aveugle, sur mon crâne Reconnaîtra la chute, son effroi, en ces temps éloignés de nos
rires.
II
L’illustre maître de la moisson,
Qui pose une main large sur le flanc de l’épouse,
Et promène ses doigts vigoureux sur les brebis, est taciturne
Et triste en traversant les sillons parallèles; sous l’arbre,
La lumière pénètre dans la cave de l’ombre, violette sur les
feuilles Accumulées. Midi est l’heure des olives, du vin Vieux qu’on boit la tête chavirée, les yeux clos en songeant Aux bonheurs que l’été entremêle dans l’herbe, Avec les crottes noires des lièvres bruns, les lents insectes Qui aiguisent la chaleur sur le cuir des cailloux. Il songe A la splendeur du ciel, aux noms des rois et des étoiles, A sa génération qui dort le ventre pénétré de racines, De cailloux blancs qui se confondent dans le rêve De la mer proche et bleue, agitée de courants, de tourbillons. Pourquoi le brusque saut dans l’inconnu, cette part que l’on ôte
Aux communes splendeurs que l’on se passe de toujours, de
fils En fils, sur le lit rude au moment de figer son regard Sur les abîmes? Pourquoi, sans prévenir, pendant l’aigreur de
l’aube
Qui sent le lait de chèvre, s’en aller, bousculant la servante Qui balaie le dallage du corridor, et s’arrête soudain, surprise Tenant de ses deux mains blanchies et crevassées par les lessives
Le bâton sur lequel sont arrimées les branches du fagot; Par la porte le jour pénètre avec le cri des poules, L’orgueil du coq sur le sommet du mur, et dans le ciel, L’étrange signe d’une gloire, comme ces barbes qu’octobre Arrache aux plantes d’or, semées de graines, expirant. Plus que l’aile grandiose et morte des galaxies, le chemin Arrêté dans les gouffres de la comète, il navigue Entre la mort et la lumière, le gouffre et le froissement bleu De la mer froide, présage illuminant le monde pacifique, L’ordre des blés qui penchent leurs têtes victimales Consacrées, même au petit matin, quand l’alouette s’envole Après les premiers coups de l’aube sur l’horloge De l’arbre, frémissant et disert. Pourquoi? Même en poussant La porte qui racle les dalles, plus haut qu’elle, portant Sa fortune sonnante dans un sac, sur une épaule, et lourd De tous les songes qu’il n’a cessé d’assembler dans sa chambre À l’étage; elle sait bien qui écoute la nuit, le silence Peset sur les toitures; connaît au loin les bruits réguliers Des fontaines; l’ordre qui règne dans la pesanteur de l’étable, Le chuintement des poulaillers, barrières closes; même le cri Dans le vieux marronnier de la chouette ergotante, aux yeux Fouailleurs; et la saveur très verte de la nuit, habillée de Grenouilles que la lune très tard, loue doucement de sa lumière Blanche et fait sortir des républiques de la boue. Il allonge le pas et de la cour contemple dans le ciel Alourdi du passage des oiseaux qui hantent les semailles, L’autre qui tombe depuis des millénaires de défi, Suspendu à la voûte du ciel comme la plume Au roc, parmi la cendre, après que l’aigle A fracassé sur le granit sa proie.
III
Il tombe infiniment, et voit
Son crime dans le chant bleu des gouffres qui l’aspirent, Continue néanmoins de se moquer, dieu pour lui-même, s’ado-rant
Sur le miroir exubérant des abîmes déserts, seul, procréant La mon qu’il se donne, libre (ou se croyant tel), grevé de
haine, Plus solitaire que l’idolâtre
Qui vénère une tragique idée pour combiner le monde Avec son rêve; son père, le tragique, en l’engendrant A détesté ce fils servile que la gloire a tenté, comme lui Qui s’est fait ange avec l’idée, la lumière et cette fausse neige Des oiseaux qui traversent dans le vent rouge l’étendue, Pour revenir aux terres antérieures. Ils auraient bien gagné Les terres oubliées, aimant l’ascèse; la matière, Ils l’ont proclamée vile et le soleil s’approche Comme un œil que l’on crève, alors, dans la nuit revenue… Mais le soleil n’a pas voulu de ce théâtre, la lumière N’a pu se résoudre à vivre désormais cachée. Il me reste, dit-il, À te haïr pour ce mensonge. Sur la terre, au petit jour, Le père est généreux dont on se remémore Des exemples sans fin de justice; il est un fils, ainsi, Regrettant peu son frère, irréprochable et pieux, qui n’hésite Jamais sur le devoir, et tient, le dimanche, à la grand-messe, L’harmonium, avec la femme du notaire (contralte) et la vieille Baronne aux cheveux teints (soprane). Il n’a jamais omis de faire
Ce qu’il doit faire, et sur les prés, pour empêcher les vaches
De s’enfuir, il plante des piquets et des clôtures : c’est un très
bon Garçon. Nous nous passerons donc de celui qui s’exclut; Chacun est libre, il a choisi. Même il enlève Sur la table dressée l’assiette de l’absent, nous aurons davantage; Il épluche les noix entre ses sèches mains; s’essuie L’extrémité des lèvres du coin de la serviette Pour ne pas la salir; on le dit économe et le père a raison D’en être satisfait : la servante, les bœufs, le cheval roux L’ont adopté pour maître.
IV
Les routes ne furent jamais si longues; l’horizon Jamais n’attiédit tant les terres aimées que l’on retrouve Après les longs exils ; et des boules de gui décorent les trembles Qui encadrent la route. J’avais si faim mais je ne mangerai
pas; Le ciel est bleu au-dessus de ma tête. Pourquoi te résoudre à
rentrer, Crie de sa prison transparente, de son enfer de feuilles, Icare? Il marche sur la douleur de son ombre effilée, tente D’apprivoiser la douleur de sa tête, ses ongles douloureux.
Solitude, Tel est le nom de l’ombre; il n’y a plus d’image dans mon
cœur;
D’eux je serai l’esclave puisque je les aime. Avec les porcs,
Ils me tiendront dans la cabane aux auges débordantes ; comme la truie
J’aurai une génération de soupirs pour me plaindre et peut-être
Ils me diront : prends une place dans la boue,
Sur le fumier tiens-toi; les épluchures seront
Mon royaume de pénitent; l’aube froide
Sera mon seul toit; la nuit
Le dieu que je vénère, bras
Croisés sur mes os qui aspirent à rentrer
Dans le ventre animal de la terre,
Avec ma mère et ma lignée. Ce père
Aux larges mains est ce que je connais de grand,
De terrible, de beau; sa voix est une profusion
De feuilles sur le vieil arbre. Je lui dirai
Ce mot et peut-être ma nuit, il la réchauffera. Quel est le père
Qui pardonne, a crié l’autre avec la grêle. Donne aux pourceaux
Ton cœur; saigne tes veines dans l’orage : il n’est pas de torrent
Suffisant pour emporter les villes satisfaites. Je veux aimer
Sans l’artifice de ton rire, ô malheureux et solitaire,
Sans l’œil du juge habile : je serai simple et pauvre, j’aimerai.
Avant même que ton frère approche, je l’ai vu; Avant même qu’il me prévienne, je sais son retour. Matin Nimbé de gloire, l’aurore est douce, que le jour Au chemin long et rude soit clément! Fais dire à la servante D’apprêter le veau gras; d’oindre de graisse la volaille Qu’elle a plumée sur le seuil des cuisines. La neige rousse tombe
Sur le seuil de la cour; et les légumes chantent sur le feu. Ainsi
Le laboureur pressent à l’odeur de la terre, à la couleur Du vent sur les bruyères, le retour du printemps Que guident à la proue de son vaisseau, les hirondelles. Fais dire à la servante de hâter son pas. Nous irons convoquer Les voisins, les notables. Que le curé sur son échelle aille atteindre
Au clocher les bourdons qui entonnent
De quoi émerveiller le bleu de la campagne, et toute une
journée. Que le maire abandonne l’inspection des fossés, le tour de la
commune; Il mariera plus tard. Va dire à la servante De mettre sur la table une nappe si blanche Que l’aube hésitera même à nous réveiller. Je veux des fleurs, des feuilles, du houx vert, le gui Des peupliers; enlevons le fumier où se vautrent les porcs. Qui donc me balaiera la cour, les marches du perron? Bouchonnez le cheval que j’aille sur la route, Je veux être celui, malgré mes pauvres yeux, qui le voit Le premier. Les cailloux du chemin éreintent ses sandales. Va dire à la servante d’étendre les tapis sur les cailloux aigus, De préparer le bain, les huiles odorantes. Qu’elle ouvre les
armoires, Les fasse joyeusement grincer; je veux du linge neuf, des sachets De lavande; une serviette onctueuse où le vent a rôdé. Va dire
à la Servante d’ôter son tablier : il n’y a plus, demain, de maître, De servante; je crains les seules larmes sur mes yeux fatigués. Saurai-je à sa venue m’agenouiller assez, le voir De mes tremblantes mains, caresser sous mes doigts Le grain de sa peau; sur ses cheveux trop longs. Perdre sans fin mes lèvres? Va dire à la servante… Pourquoi cet œil si dur, ces lèvres serrées, ce pli sévère Sur le front?
Vi
L’amour traduit l’épuisement des faibles; c’est leur arme. Pardonner engage aux fautes plus terribles, rejoins-moi. Les mâles
Ne sauraient nullement s’abaisser à des pensées coupables : Courber le front devant celui qui t’a craché aux morts amères. Rejoins-moi; la hauteur où je me tiens, je l’affirme sublime. Le jugement impitoyable, de mon domaine sans pitié, je le jette
En châtiment aux sols qui ont cru pardonner, quand ils abandonnaient
La vieille loi. Aime ce que tu édictés; comme la foudre Aie la parole sans merci; défie le vieux faussaire Qui parcourt en rôdant les campagnes honnies, l’exubérant, L’aimé des houles et des pailles : soleil, je t’apprendrai ma
loi: Je crèverai sans fin ton seul œil qui repère La prière du juste et l’ennui du menteur. Unissons la splendeur De nos stérilités. Laisse aux faibles le seul amour, Source connue des désordres, feu qui ne réchauffe pas Le froid où je grandis, yeux et cœur révulsés. Mais tu N’écoutes pas! et tu t’éloignes.
VII
Je ne lui ferai pas de reproches; ne dirai pas : je t’avais
Prévenu. Je ne hausserai ni la voix, ni le sourcil.
Même saurai-je dire : fils? m’abstraire,
Etre infime, montrer que tout lui appartient — mon royaume,
Le nom, le temps et toutes les douceurs; l’implorerai.
Je me tiendrai mendiant dans l’ombre, à peine
Osant lever mes yeux faibles du côté qu’il se tient :
Je lui tendrai ma main calleuse, car il est riche. Vois,
Si je possède ceci que tu désires, je suis ton pauvre qui mendie;
Je veux être le roi couvert de cendre, celui qui piétine la boue
Sans gémir, et pose sur la plaie sa main pour la guérir; et tu
Me guériras. Mes vêtements ne sont pas douloureux
Pour ta douleur, ni assez beaux pour t’honorer, lorsque tu
paraîtras Dans la fraîcheur du soir, vêtu de blanc et l’âme parfumée. Pénètre en ta maison, et je courbe la tête. Unis les cicatrices de tes joues
À mon visage vieux. Viens t’endormir sur mon épaule, Et sois l’enfant que je chéris. Mais toi qui t’en reviens, Pourquoi demeurer sur le seuil? J’étais triste Et tu m’as consolé; mais c’est lui qui m’a fait renaître. Père j’étais, comme l’arbre impuissant pour ses feuilles qui
tombent; Désormais, par sa grâce à mes mains l’appelant, je viens De naître au plus profond, père éternel
Prendre un chemin qui sort des accès barrés. Les travaux routiers dorment le week-end, ça aide à rechercher par où passer. J’ai choisi le calme de la Charente pour y voir clair et me rendre paisiblement au meilleur parti prendre en fonction de la situation d’ensemble. Ne m’étant pas levé de toi, besoin de rien faire qui m’en sortirai. Resserrer l’intime au magnétisme du derme, fermer la radio des autres, ta musique est d’aisselle ma préférée. Avant de voir quand la senteur émet, une force se déploie d’elle-même dans tout le corps. Le chevalet parle, dressé comme l’échelle menant à notre grenier, lit de paille et couverture de cartons pleins d’ébats. Je commence à dire.
La vierge à la tortue d’ivoire
Sur la table à vos pieds, cette tortue d’ivoire
Qui chemine immobile, lève une tête lourde, et tente
D’observer, de sous sa carapace dure et blanche et suave
À la main qui caresse, le jour dehors qui glisse de côté,
L’allongement des ombres par la fenêtre grise, les pages
Couvertes de ratures.
Le temps s’enfuit; la vie s’écoule
Et la mort passe ayant déjà choisi les siens.
Quel nom
Lorsque l’aurore éclaire
Londres, nos lèvres dans le psaume
Ont trois fois murmuré?
Car il nous fait concevoir la montagne,
Sous la neige et dit notre pitié. Ô vous,
Aux douces mains, plus douces que l’ivoire,
Ayez pitié de la tortue aux pattes lourdes sur la table
Où la page s’ajoute à l’autre page, aridement;
Dans les immensités de l’ombre, ayez pitié de celui qui vous
chante
Une hymne maladroite avec de pauvres mots :
Sans doute le langage est blessé, les images
Sont pauvres, mais comme la tortue, plus chétif et plus lent,
N’ayant pas même de l’ivoire la douceur,
Il lève ses mains vides, ses yeux insatisfaits,
N’osant pas même regarder le grand papier désert. Ô jeune fille au blond matin que salue l’Ange,
Sans une grâce que vos mains nous ont value,
Que pourrait-il écrire celui qui peine, sur la page?
Philippe Delaveau
Je te veux humide buvard oublié. Il me semble que ce qui est objet conduit à te garder de toutes les manières. Mais tout de toi est bien vivant. A la fois prétexte à me rendre, comme à demeurer, alibi à donner ou pas d’excuses à trouver. Ce ne n’est que diversité en continu. Pas de peine à t’écrire que je t’aime.
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