La vérité du drame est dans ce pur espace qui règne entre la stance heureuse et l'abîme qu'elle côtoie : cet inapaisement total, ou cette ambiguïté suprême. Saint-john Perse
L’arbre se mélange aux fruits venus de branches écartées du goût de la reconnaissance
confusion du poème avec l’avis de mobilisation générale probable mais pas éventuelle
quand je sentis sans le voir, le tétras disparaître une promotion de canard venus de la grippe aviaire tombait sur les médias
Je suis ici
Où sont les autres?
Echo de geste en geste
Chaîne électrisée ou inerte
Rupture du rythme solitaire
Quels sont ceux qui meurent et ceux qui naissent
Pendant que ma plume court sur le papier?
Vicente Huidobro
Alors de sous ta jupe j’ai tiré l’échelle meunière et suis monté au refuge du soleil
mon dernier oeil en besoin d’entendre la présence non artificielle des feuilles, des torrents, des sensations de rideaux qui se lèvent, du souffle quand l’herbe se prépare à faire rire un enfant
la chaleur de la ligne qui va d’un bout à l’autre de l’empan
sans le moindre regard aux fuseaux déserteurs des pendules.
» Tout est près. Les pires conditions matérielles sont excellentes. Les bois sont blancs ou noirs. On ne dormira jamais. » André Breton, Manifeste du surréalisme, 1924.
Chant 1 (extrait)
Ne vois-tu pas que tu tombes déjà? Lave ta tête des préjugés et de la morale Et si voulant t’élever tu n’as rien atteint Laisse-toi tomber sans freiner ta chute sans peur au fond de l’ombre Sans peur au fond de ta propre énigme Tu trouveras peut-être une lumière sans nuit Perdue dans les crevasses des précipices.
Tombe Tombe éternellement Tombe au fond de l’infini Tombe au fond du temps Tombe au fond de toi-même Tombe aussi bas qu’on peut tomber Tombe sans vertige A travers tous les espaces et tous les âges A travers toutes les âmes tous les désirs tous les naufrages Tombe et brûle en passant les astres et les mers Brûle les yeux qui te regardent et les cœurs qui t’attendent Brûle le vent avec ta voix Le vent qui se mêle à ta voix Et la nuit qui a froid en sa grotte d’os Tombe en enfance Tombe en vieillesse Tombe en larmes Tombe en rires Tombe en musique sur l’univers Tombe de ta tête aux pieds Tombe de tes pieds à ta tête Tombe de la mer à la source Tombe dans l’ultime abîme de silence Comme le navire qui sombre en éteignant ses lumières
Manuscrit original d’Altazor en français. Le texte final est écrit en espagnol.
Chant IV (extrait)
Il n’y a pas de temps à perdre Et si l’instant banal survient Qu’il suive la meilleure voile. Maintenant que je m’assieds et me mets à écrire Que fait l’hirondelle que j’ai vue ce matin Signer des lettres dans le vide? Quand je bouge le pied gauche Que fait du même pied le mandarin chinois? Lorsque j’allume un cigare Que font les autres cigares qu’apportent le navire? Où pousse la plante qui brûlera plus tard? Et si je lève les yeux maintenant Que fait de ses yeux l’explorateur debout sur le pôle? Je suis ici Où sont les autres? Echo de geste en geste Chaîne électrisée ou inerte Rupture du rythme solitaire Quels sont ceux qui meurent et ceux qui naissent Pendant que ma plume court sur le papier?
Chant V (extrait)
Ainsi tu es moulin à vent Moulin du lieu du vent Qui tisse les nuits et les matins Qui file les brouillards d’outre-tombe Moulin aux ailevents et aux ventailes Le paysage se gonfle de tes folies Et le blé va et vient De la terre au ciel Du ciel à la mer Les blés aux vagues d’or Où se vautre le vent Cherchant la caresse des épis
Traduction de l’espagnol (Chili) par Fernand Verhesen. Altaigle, Draguignan, Éditions Unes, 1996 (Avec une préface d’Octavio Paz). Édition originale: Altazor o el viaje en paracaídas, Madrid, Compañía Iberoamericana de Publicaciones, 1931.
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