CLOTÛRE AUX LEVRES ROSES


affiche

CLOTÛRE AUX LEVRES ROSES

Aux yeux des vitrines

Les strates

De jours mal choisis

En rigole

Vont

Passer les grilles

Battues en brèches

Les cernes repoussés

D’où seraient-ils venus sinon de ce sillon

qui sorti de la nuit

porte la graine du jour en lui ?

Enveloppe sphérique paisible

où la lave cautérise la griffe

Sa plaie

Son infection

Son agression

La palme débarque la pâques et ses oeufs cernés

de la Trinite

A l’étiage du bénitier

Il pleuvait

D’un gris uniforme

Quand du rideau de leurs paupières

sortirent les trois coups solaires

Et là

Dans les Recollets

Les Bleus-Blancs Matins

Nous mirent au m’aime soleil

Pour que naissent les Reflets d’Estrans

mon Capitaine

En appareillage

Pour une aube

Que le silence projette au coeur d’un absolu échange

Troublé en rien par les battements sonores des coeurs

Peindre pour voir la couleur enfanter
Recule d’ô tant la pensée de mourir

En donnnant

Mains tenant

Le désir de renaître en corps et encore à l’amour !
Loisobleu
31 Octobre 2015

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https://www.youtube.com/watch?v=EidJV2mb9h8

L’AMOUR EN VISITE


10524595_551212468323667_4076843486314232645_n_Milan Josipovic

L’AMOUR EN VISITE

Donnez-moi une jeune femme avec sa harpe d’ombre
et son arbuste de sang. Avec elle
j’enchanterai la nuit.
Donnez-moi, vivante, une feuille d’herbe, une femme.
J’embrasserai ses épaules, la petite pierre
du sourire d’un moment.
Femme comme incréée, mais avec la gravité
des deux seins, le poids lubrique et triste
de la bouche. J’embrasserai ses épaules.

Chanter ? Chanter longuement.
Une femme avec laquelle boire et mourir.
À l’heure où s’ouvre au-dehors l’instinct de la nuit
que traverse un oiseau transpercé par un cri maritime,
et où les vagues envahissent le pain –
son corps brûlera doucement sous mes yeux palpitants.
Lui – haute et vertigineuse image d’une certaine pensée
de joie et d’impudeur.
Son corps brûlera pour moi
sur un drap que mordent fleurs et eau.

En chaque femme il y a une mort silencieuse.
Tandis que le dos imagine, sous les doigts,
les refrains de la mélodie,
la mort monte par les doigts, navigue le sang,
se répand en ivresse dans le cœur affamé…

…Donnez-moi une femme aussi jeune que la résine
et l’odeur de la terre.
Avec une flèche dans le flanc, je chanterai.
Et tandis qu’une vigne de sang jaillira de ma chair,
je chanterai son sourire ardent,
ses mammes de pure substance,
la courbe chaude de ses cheveux.
Je boirai sa bouche, pour ensuite chanter la mort
et la joie de la mort.

Donnez-moi un torse courbé par la musique,
un léger cou de plante,
là où une flamme commence à fleurir l’esprit.
Sur son visage affleurera le mouvement des eaux,
au creux de son visage sera gravée la pierre de la nuit.
– Alors je chanterai la joie exaltante de la mort…

…C’est pourquoi nous mourons dans la bouche
l’un de l’autre. C’est pourquoi
nous nous diluons dans l’arc de l’été, dans la pensée
de la brise, dans le sourire, dans le poisson,
dans le cube, dans le lin,
dans le moût ouvert
– dans l’amour plus terrible que la vie…

…De la nouveauté de mon cœur s’élève la vie entière,
le peuple renaît,
le temps gagne l’âme. Mon désir dévore
la fleur du vin, couvre tes hanches d’une écume
de crépuscules et de cratères.
Ô corolle de lin méditée, femme que la faim
ravit par la nuit équilibrée, impondérable
– en chaque spasme je mourrai avec toi.

À la joie diurne j’ouvre les mains.
Se perd entre le nuage et l’arbuste l’odeur âcre et pure
de ton abandon. Des bêtes s’inclinent
vers l’intérieur du sommeil, des roses se dressent respirant
contre l’air. Ta voix chante
le jardin et l’eau – et je vais par les rues froides avec
le lent désir de ton corps.
J’embrasserai en toi la vie énorme, et en chaque spasme
je mourrai avec toi.

Herberto Helder
L’amour en visite, dans la Cuillère dans la bouche