
PLEINE EAU
JULIEN GRACQ
Le cri d’un coq traîne par les rues vides, dans cette chaude après-midi de juin où il n’y a personne. Le silence, profond comme un grenier à blé abandonné, gorgé de chaleur et de poussière. Quel désœuvrement sous les voûtes basses de ces tilleuls, sur ces marteaux de portes où bâillent mille gueules de bronze ! Quel après-midi de dimanche distingué, qui fait rêver de gants noirs à crispins de dentelles aux bras des jeunes filles, d’ombrelles sages, de parfums inoffensifs, des steppes arides du cinq à sept ! Seul un petit nuage, alerte, blanc, — comme le nageur éclatant porté sur l’écume ombre soudain de stupidité la foule plantée sur la plage — couvre de confusion tout à coup le paysage endormi et fait rêver d’extravagance au fond de l’avenue un arbre qui n’a jamais encore volé. |
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