La vérité du drame est dans ce pur espace qui règne entre la stance heureuse et l'abîme qu'elle côtoie : cet inapaisement total, ou cette ambiguïté suprême. Saint-john Perse
Ce fut un long détour ce murmure de poésie Avant le quai d’embarquement écrasé de lueurs, Les plaintes des essieux sous les caisses, les enfants À l’écart et si beaux, si dociles dans la terreur Mais prêts à croire encore en quelque bonté de la fourche, Et le feu qui m’enveloppait comme un vêtement rouge, Ma gloire dans l’exquise odeur de soufre, ma chaleur : Long détour vers la vérité sanglante du cœur, de la patrie. Et soudain le silence au matin dans la petite pluie, La mer comme une route en détresse par les labours Roulant innocente sous les dernières fumées. Au bord d’un autre monde et d’une mémoire déserte, J’errais avec l’éternité nuageuse. Une barque Viendrait plus tard, beaucoup plus tard. J’avais le temps D’arrondir mon discours pour les convaincre, les rameurs Taciturnes. Plus tard. Quand la fatigue et la justice Auraient tressé pour moi la bonne corde, chauffé le four. Mais pourquoi fallut-il si longtemps pour que le cœur se crache, Et ce fil sanglant qui du ciel à la terre interdite Inutilement coud les lèvres de la blessure : À quoi bon maintenant s’ils ne sont plus, résorbés dans le gris Avec la petite valise, du sucre et les photos, déjà La tringle en travers de leurs corps sans sommeil Entre les projecteurs et l’éclair souterrain qui profane? – À la place du cœur l’espace des cohortes, le vent Dans la porte enfoncée et la pente de l’expulsion ; L’œil unique de l’ours ami contre la joue et qui fixe À jamais la douceur égorgée. Ils ne sont plus. Mais comme un jour d’été sur la ligne de fuite les nuages, Sur le rail opulent du bleu les convois de nuages, Un chœur s’enfle et m’apaise. Ici la paix, entre les faux ; Étroite ; pas un geste ; à peine un murmure de fou Qui n’a plus pour maison, dans un désert de dieux et d’arbres, La tour tremblant au fil de la rivière comme un oiseau, Mais l’aire où je dansais dans la fraîche couronne de flammes Avant ce long détour.
— après cela (je commence, je commence toujours, mais c’est aussi toujours une suite), après cela j’avais essayé de quitter ma vie. Elle s’était en réalité déjà séparée de moi, comme une maison rejette ses habitants à l’occasion d’un tremblement de terre. Bien sûr aucune maison ni cette vie ne m’avaient appartenu. Cependant je restais pris sous les décombres. Il y avait dans cet écrasement encore de la protection et de la chaleur. J’aurais dû me tenir tranquille. Des événements plus sourds se préparaient dehors. Insensiblement le temps s’était remis en marche dans sa poussière. Moi j’imaginais sans bouger un grand bond par-dessus ce désastre, ma disparition d’un seul coup sur les rails où fonce une seule étoile déchiquetée. Mais tout s’accomplit à son heure, on décide peu. De nouveau j’entrepris des petits voyages. Humbles, oui, et parfois de trois quatre kilomètres aux alentours (tous ces hérissons qui séchaient sur le bord de la route, transformés en galettes), puis d’autres plus considérables mais guère différents pour le fond, renouant prudemment avec mon vieil espoir de le trouver à l’arrivée, l’autre aussitôt reconnu et qui après un signe de connivence imperceptible (mais vu, compris), s’éloigne et je le suis jusque dans le couloir d’une sordide baraque à un étage où il faut faire vite : un pas lourd au plafond ébranle des planches, précipite du plâtre, mais j’ai le temps d’apercevoir un vitrail de sureaux qui flambe sur les gravats. Alors il chuchote : C’est vous ? — C’est moi.
Et nous échangeons ces pronoms comme des passeports volés à l’ambassade, avec les vrais tampons et le bleu brumeux de l’avenir dans chaque page, intact. Puis : les dernières recommandations, les derniers vœux, l’accolade virile avant de nous perdre, chacun de son côté, dans la végétation déjà ténébreuse des rues. Jamais rien de ce genre évidemment ne se produisait. Je tombais trop tard ou trop tôt dans d’immenses villes abandonnées. En général trop tard, par l’omnibus dont les étapes à travers les banlieues divisaient à n’en plus finir la moitié de la moitié d’une distance obstruée par la nuit. Souvent, inexplicablement ou peut-être à titre d’épreuve, on restait bloqué sur un pont, juste entre la rambarde et le souffle plein d’arrachements d’étincelles violettes des convois de sens inverse qui cherchaient à nous culbuter, et je ne distinguais plus en bas qu’un remous pauvre aspirant le regard et l’espace avec l’eau du fleuve elle-même au fond du gouffre. Et j’avais peur, un peu. Mais ne possédant pas de montre j’étais patient, surtout quand au lieu de la lune tirée comme un boulet incandescent par un silo ou une cheminée, luisait comme pour soi, pour la pluie, l’écheveau des triages qui dans la plus compacte obscurité réfléchissent des bolides en proie sous l’horizon au silence dévastateur de leur vitesse. Très loin brillait l’angle d’un mur.
Et contre, pour obéir à l’attraction du centre, dans un halo de ces becs de gaz les avenues encore indécises viraient en se prononçant pour l’équilibre, et rameutaient ce troupeau de l’étendue bâtie vers son foyer. Mais un centre, à vrai dire (ce que moi j’appelais centre depuis qu’on m’avait expulsé du mien), les villes en ont un rarement. Ou du moins elles le cachent, à la longue elles l’oublient, elles l’ont perdu ; et comment le découvrir sinon par hasard ou par chance ; et si ce que l’on trouve alors n’est pas un simulacre, on le devine à la trouble douceur de déconvenue où s’étouffe le pressentiment : c’est un simple fragment qu’il faudrait combiner à d’autres (ces pavés dans une arrière-cour, ces yeux qu’on a croisés et qui semblaient savoir, d’une science aussi ancienne et obtuse que celle des choses), pour obtenir enfin du désordre apparent qu’on a remué de rue en rue la figure occulte et logique dont les lignes innombrables se recoupent en un seul point. J’explorais des périphéries.
Alerté puis déçu, puis appelé de nouveau comme si un cataclysme n’avait laissé debout que les ruines d’une volonté pareille à une phrase encore claire dans le mot-à-mot, mais qui faute d’un verbe rétroactif maîtrisant l’émiettement du sens demeure intraduisible, ainsi je comprenais tour à tour la courbe en surplomb d’un boulevard, du buis dans une impasse, la gaieté d’un sentier ; ailleurs un sous-sol sans maison rempli de cartons et de ferrailles, une façade sans immeuble, des moteurs au milieu d’un pré ; ensuite un gros pneu dans un saule, deux enfants devant une affiche aux lions désabusés et, de chaque côté d’une usine éventrant par désœuvrement ses carreaux au soleil puni, des maïs en papier jusqu’à de fulgurantes citernes. Et ensuite encore une rue, des maisons, plus de maisons, des jardins, plus de rue, plus personne, rien que du ciel comme moi partout présent et partout égaré ; du ciel guettant le ciel sous des buissons, dans la profondeur des fenêtres ; du ciel dévalant au bas d’une côte où vibrait le bord de l’horizon dans l’herbe comme un fil, puis sautant vers le ciel un instant fixe, vertical, avant de crouler avec la soudaineté d’une intuition nocturne ou d’une bête. J’étais porté. Mais la loi qui le dirigeait renversait aussi bien le mouvement de cette fuite en spirale, et à certains indices (non, je n’avais jamais faim, j’étais stimulé par la pluie), encore dans l’hésitation de la lumière qui gonfle sur les derniers chantiers, je savais qu’il me reconduisait vers l’intérieur, dans les quartiers que la fin du jour saisit d’une puissante hébétude. Là des palais, des musées, des pelouses, des banques, des ministères délimitaient l’aire bientôt déserte où je pensais que le centre en peine viendrait traîner peut-être avec la nuit. En tout cas je me reposais quand à force de marcher j’avais touché la pointe anesthésique de la fatigue, et m’abandonnais sur un banc à l’inertie tournoyante de la planète et des corps des millions de dormeurs autour de moi qui veillais dans la cataracte en suspens de tant de silence. Qu’est-ce que j’ai retenu? Sans grande passion pour l’histoire, observateur médiocre (ou je m’éprends une à une de toutes les briques d’un mur, ces briques crues des temps qui tiennent juste au creux de la main avec le poids et l’or et la tiédeur d’un petit pain retournant par-delà des siècles à sa farine), seul et sombre comme illettré dans les accords fondamentaux des musiques que font les langues, mais j’écoutais; confiant en d’absurdes systèmes établis sur les goûts des tabacs (car une odeur autant qu’un lieu pouvait me livrer le centre — et les poches alors bourrées de dix variétés de cigarettes, les moins chères, celles qui sous de naïfs emblèmes cosmopolites perpétuent la dérive de journées de chômage et de samedis de bals à tangos), je flottais avec ma fumée et n’en sortais que comme une fine antenne promenée par la ville elle-même, une lanterne qu’elle portait en rêve au travers de sa propre masse pour en sonder l’énigme et l’épaisseur. Quant au centre j’en parle, j’en parle, mais après coup. Je suivais une pente. Qu’elle m’ait aspiré jusqu’à lui, et je ne serais pas ici tranquillement à relever encore ses traces, puisqu’il accordait cela du moins, traces ou signes par l’antenne aussitôt en éclair vers le cerveau pour y cristalliser la distraction en vigilance. Oui, tout cela prompt, furtif, car si centre il y a, ce n’est rien que ravalement d’une indifférence féroce. Il m’aurait englouti. Par exemple je me souviens d’une porte : elle battait au fond d’un couloir et j’ai vu beaucoup d’autres portes, mais c’était donc celle-là ; une autre fois, à Bologne, près d’une basilique en agglomérés de lune, un petit théâtre d’ombre et de linge improvisait pour un buste d’Hermès aux yeux rongés, et c’était ce drame. Puis quand le soleil poussait du front sur les potagers aujourd’hui défoncés en haut de Belleville; quand cette galerie qui obliquait encore à Prague entre des magasins se transformait en église et, pour finir, en square où des couples muets déambulaient dans la chaleur, sous la lueur des globes exténuée d’avoir franchi les poussières du songe : c’était là, je ne bougerais plus, bien que ce ne fût ni le but ni l’étape, mais cette déception en somme réconfortante d’avoir pour un moment trouvé l’enclos dont j’aurais pu, après tant d’heures usées contre du vent, contre des pierres, devenir pierre et vent à mon tour le génie sans identité qui sous un ciel de glace, les rayons déclinants, allume entre l’inerte et les yeux obscurcis une étincelle. Alors on connaît sans savoir. On connaît que des êtres passent, et que des événements s’infiltrent. Alors j’ai pénétré des cœurs, entendu le déclic prémonitoire dans le retrait d’existences vouées à la désolation ou à la sauvagerie. Et de quel droit? Celui qui peut connaître ainsi, malgré soi qui fracture, l’équité voudrait qu’il assiste ensuite : or lui s’en va. Je repartais, en effet, attiré de nouveau dans les faubourgs par cette lampe qui de relais en relais au sommet des immeubles révèle et dérobe à la fois l’éclat du centre inaccessible. Et toujours cependant, à voix basse imitant la mienne, quelqu’un me demandait d’attendre encore, encore un peu, mais il fallait que je m’en aille, amalgamant sans m’en douter quelque chose de ma substance à ces blocs d’inconnu. Ensemble nous avons produit de l’angoisse et du danger, des lambeaux d’illusion qui puisent à mes dépens dans leur détresse de n’exister qu’à peine une sorte d’énergie. Car en contrepartie la mienne s’amoindrissait. Et maintenant, comme moi j’avais erré à la recherche du centre, obsédées par l’oubli des mots qu’elles avaient voulu me dire, que j’avais refusés (et qui étaient le passeport, peut-être, la formule de l’échange avec l’autre et notre délivrance), ces empreintes à moitié vivantes de mon passage s’étaient mises à rôder. Comment faire pour les aider, et qu’elles me pardonnent ?
Souvent elles apparaissent, consternées au grand jour, sans arrêt, comme à coups de pelle, qui vient les déterrer, mais pour ne pas gêner, pour se donner l’air hypocrite de tout le monde, elles vont manger une gaufre près de la consigne aux bagages, s’attarder sans motif dans les bazars où elles achètent n’importe quoi d’inutile pour elles comme une lime à ongles et des savons, des savons. Elles ont honte, je sais, mais c’est ma honte qu’elles endurent, et la honte ou déjà la peur m’empêchaient de les rejoindre quand j’étais sûr qu’elles m’avaient fait signe à cette façon de brandir là-bas la manche d’un manteau vide, au rideau qui bougeait derrière la vitre d’un de ces vieux bistros confits dans les relents de la soupe et du pétrole. Je me méfiais. J’aimais mieux écrire des lettres et même les expédier, scrupuleusement affranchies quoique sans adresse. Tant bien que mal essayant de me justifier. Mais ces explications me jetaient du haut en bas des pages comme dans des rues, et le virage automatique au bout de la ligne m’abattait avec des pans de phrase entiers dans le brouillard. À cela aussi je renonçai. Puis il y eut une série d’incidents que je ne dois pas rapporter. Je n’osais plus sortir ni décrocher le téléphone. Enfin, rassemblant mon courage avec ces objets modérés qui nous soutiennent quand nous lâche le reste — un seul livre, la casquette, la brosse à dents — une fois de plus je résolus de partir. Où j’irais, peu importe. Mais là-bas tout recommencerait peut-être, et déjà tout recommençait. Un train aux horaires fumeux montait vers la frontière, dans cette zone où les haltes en fin de journée se multiplient. La nuit aussi montait. Sous les entablements obscurs, des rayons d’intelligence et d’amour touchaient le front des bêtes rencontrées. À chaque arrêt on voyait sourdre la lueur basse et puissante qui dort au fond des murs. Les regards en étaient protégés par des visières, et les paupières des enfants qui ne cessaient de fumer sur les déblais restaient baissées. Une averse, toujours devant, brassait dans l’odeur des lilas celle de la fumée et d’essences plus rares dont la vigueur, avec le cristal des appels, signifiait l’extrême altitude. La gare où l’on s’attardait à présent était exactement semblable aux précédentes, peut-être plus foncée. Mais on avait monté encore, et rien n’était changé dans l’intensité de camouflage de la lumière. Seule la pluie avait dû basculer vers des ravins ; un souffle par contrecoup achevait de s’épuiser en gros tremblements de portes. Quelqu’un fit observer que les orages ne passaient jamais la frontière. D’autres phrases prononcées comme en rêvant flottèrent dans le wagon — puis de nouveau le silence appuyé sur la vibration décroissante des vitres, les craquements des ressorts. Des sommets élevaient sur nous leur braise interminable. Brusquement j’empoignai mon sac pour descendre, comme sans réfléchir. Le billet servirait plus tard, si je continuais ce voyage.
Personne, d’ailleurs, ne me le réclama. Les employés s’étaient tassés près du fourgon de tête, devant l’interruption du quai parmi des herbes dont luisaient les tiges encore sensibles sous le vent. Ils formaient un groupe bien dense, bien noir, où de seconde en seconde un geste, qui semblait le dernier, éclatait saisissant comme le poing plongé dans une eau trop limpide. Je les regardai longtemps. C’était une émeute immobile. J’allais comprendre quand la nuit tomba d’un seul coup. II y avait un hôtel en face de la gare, juste au coin d’une rue qui allait se perdre vers des sapins. Du portier somnolent sur les pages de son registre, la voix ne me parvint qu’après avoir tâtonné dans les chambres, cherchant celle où j’irais dormir. Mais j’avais le temps, tout le temps désormais plus lourd et plus stable que la montagne. Alors j’ai raccroché la clé numéro 9 sur le tableau. J’escaladais maintenant cette rue qui décourage vite les maisons : au niveau des toits ce n’est plus qu’un sentier, après un coude abrupt précipitant le village. La montagne allait devant moi, claire comme une pensée qui se sait condamnée et qui résiste. Au bord d’un ressaut étroit je me suis adossé contre sa masse et, tout en bas, dans le train qui prenait la courbe vers la frontière, à trois reprises j’ai vu le compartiment que j’avais laissé vide s’éteindre, se rallumer. J’ai dit doucement : bon voyage. Trois fois aussi le calme absolu de l’hôtel cette nuit m’a réveillé. Je sens le poids de la montagne. La lumière profonde a disparu. Mais, sur la place, luit encore tout ce qui peut luire avec modestie et confiance : une étoile, l’anse d’un seau. Je recommence.
Et pourtant c’est ainsi : l’on voit, par la porte battante, Une lumière qui s’approche, hésite puis s’éteint. Souvent l’attente se prolonge. Et seul, à qui sourire En silence? Personne. Et qui nous répondrait de loin Si l’on criait ? Personne encore. Un jour on croit rêver, Un autre jour mourir — et vraiment c’est un songe, et
c’est Aussi la mort. Passent parfois deux lévriers timides Et plutôt soucieux qui font mine d’en savoir long Sur le sens de la vie. Incidemment, la porte cesse De battre et l’on se dresse en criant plus fort dans le noir ; Ou bien la clarté s’établit, et l’on distingue enfin, Pour un instant, ce qu’on ne peut pas dire ni comprendre.
Je cherchais comment l’eau, les rochers, les oiseaux, les
arbres Font pour tenir ensemble, et les nuages qui figurent Le monde vagabond, rythmique, engendré, s’engendrant Comme le même songe instable au fond d’yeux jamais
clos. Je savais qu’à beaucoup se refuse la gloire d’une herbe Au sommet d’un talus, pesant le dos large du ciel Qui nous supporte, et que le vent chasse dans la lumière Les signes des cristaux de neige pour la boue.
— Ô tête Ici de tout soutien privée, où est le mur? (Un mur À défaut d’une mère, et dormir dans les ruines de son
flanc.)
Et je voyais le vide entrer dans l’apparence avec Les bourgeons qui toujours pour la première fois reviennent. Poussés par la force d’oubli qui de sa couche arrache Et féconde ce vaste corps tumultueux d’étoiles Puis l’abandonne à notre porte ouverte, comme un dieu
Encore enfant mais bien trop haut pour nous, hôtes déjà Qui hébergeons et nourrissons le dieu de notre mort.
Du seuil, je relevais d’oiseaux et d’arbres quelques traces Au fond de la combe où le soir tout à coup se rappelle — Et c’était l’heure où, des enfants, brillent à contre-jour Les bicyclettes, quand
Le plus petit au carrefour tombe dans un remous De lueurs qui vont l’engloutir en larmes dans la mémoire ; Et touchant de la nuit la bouche dépravée j’ai dit : Quel long désastre en bouquets éclatant qui saluent L’éveil jamais surgi dont nous sommes le souvenir Les messagers perdus dans les distances inhabitables.
L’âme semble un couloir où des pas hésitants résonnent, Mais personne jamais ne vient. Dehors, l’ombre qui tremble Dans les encoignures de porte et sous les escaliers, C’est l’âme encore, quand la nuit fige le long des murs Les flots d’eau pâle et froide où l’on est heureux de descendre. Et qui donc parlait de salut ou de perte pour l’âme. Alors qu’elle est blottie en son frisson et cependant Toujours plus dénudée au vent qui souffle en ce couloir ? Qu’elle se cache ou rôde, écoute : elle s’égare, étant L’habitante et le lieu d’une solitude sans nom.
— après cela (je commence, je commence toujours, mais c’est aussi toujours une suite), après cela j’avais essayé de quitter ma vie. Elle s’était en réalité déjà séparée de moi, comme une maison rejette ses habitants à l’occasion d’un tremblement de terre. Bien sûr aucune maison ni cette vie ne m’avaient appartenu. Cependant je restais pris sous les décombres. Il y avait dans cet écrasement encore de la protection et de la chaleur. J’aurais dû me tenir tranquille. Des événements plus sourds se préparaient dehors. Insensiblement le temps s’était remis en marche dans sa poussière. Moi j’imaginais sans bouger un grand bond par-dessus ce désastre, ma disparition d’un seul coup sur les rails où fonce une seule étoile déchiquetée. Mais tout s’accomplit à son heure, on décide peu. De nouveau j’entrepris des petits voyages. Humbles, oui, et parfois de trois quatre kilomètres aux alentours (tous ces hérissons qui séchaient sur le bord de la route, transformés en galettes), puis d’autres plus considérables mais guère différents pour le fond, renouant prudemment avec mon vieil espoir de le trouver à l’arrivée, l’autre aussitôt reconnu et qui après un signe de connivence imperceptible (mais vu, compris), s’éloigne et je le suis jusque dans le couloir d’une sordide baraque à un étage où il faut faire vite : un pas lourd au plafond ébranle des planches, précipite du plâtre, mais j’ai le temps d’apercevoir un vitrail de sureaux qui flambe sur les gravats. Alors il chuchote : C’est vous ? — C’est moi.
Et nous échangeons ces pronoms comme des passeports volés à l’ambassade, avec les vrais tampons et le bleu brumeux de l’avenir dans chaque page, intact. Puis : les dernières recommandations, les derniers vœux, l’accolade virile avant de nous perdre, chacun de son côté, dans la végétation déjà ténébreuse des rues. Jamais rien de ce genre évidemment ne se produisait. Je tombais trop tard ou trop tôt dans d’immenses villes abandonnées. En général trop tard, par l’omnibus dont les étapes à travers les banlieues divisaient à n’en plus finir la moitié de la moitié d’une distance obstruée par la nuit. Souvent, inexplicablement ou peut-être à titre d’épreuve, on restait bloqué sur un pont, juste entre la rambarde et le souffle plein d’arrachements d’étincelles violettes des convois de sens inverse qui cherchaient à nous culbuter, et je ne distinguais plus en bas qu’un remous pauvre aspirant le regard et l’espace avec l’eau du fleuve elle-même au fond du gouffre. Et j’avais peur, un peu. Mais ne possédant pas de montre j’étais patient, surtout quand au lieu de la lune tirée comme un boulet incandescent par un silo ou une cheminée, luisait comme pour soi, pour la pluie, l’écheveau des triages qui dans la plus compacte obscurité réfléchissent des bolides en proie sous l’horizon au silence dévastateur de leur vitesse. Très loin brillait l’angle d’un mur.
Et contre, pour obéir à l’attraction du centre, dans un halo de ces becs de gaz les avenues encore indécises viraient en se prononçant pour l’équilibre, et rameutaient ce troupeau de l’étendue bâtie vers son foyer. Mais un centre, à vrai dire (ce que moi j’appelais centre depuis qu’on m’avait expulsé du mien), les villes en ont un rarement. Ou du moins elles le cachent, à la longue elles l’oublient, elles l’ont perdu ; et comment le découvrir sinon par hasard ou par chance ; et si ce que l’on trouve alors n’est pas un simulacre, on le devine à la trouble douceur de déconvenue où s’étouffe le pressentiment : c’est un simple fragment qu’il faudrait combiner à d’autres (ces pavés dans une arrière-cour, ces yeux qu’on a croisés et qui semblaient savoir, d’une science aussi ancienne et obtuse que celle des choses), pour obtenir enfin du désordre apparent qu’on a remué de rue en rue la figure occulte et logique dont les lignes innombrables se recoupent en un seul point. J’explorais des périphéries.
Alerté puis déçu, puis appelé de nouveau comme si un cataclysme n’avait laissé debout que les ruines d’une volonté pareille à une phrase encore claire dans le mot-à-mot, mais qui faute d’un verbe rétroactif maîtrisant l’émiettement du sens demeure intraduisible, ainsi je comprenais tour à tour la courbe en surplomb d’un boulevard, du buis dans une impasse, la gaieté d’un sentier ; ailleurs un sous-sol sans maison rempli de cartons et de ferrailles, une façade sans immeuble, des moteurs au milieu d’un pré ; ensuite un gros pneu dans un saule, deux enfants devant une affiche aux lions désabusés et, de chaque côté d’une usine éventrant par désœuvrement ses carreaux au soleil puni, des maïs en papier jusqu’à de fulgurantes citernes. Et ensuite encore une rue, des maisons, plus de maisons, des jardins, plus de rue, plus personne, rien que du ciel comme moi partout présent et partout égaré ; du ciel guettant le ciel sous des buissons, dans la profondeur des fenêtres ; du ciel dévalant au bas d’une côte où vibrait le bord de l’horizon dans l’herbe comme un fil, puis sautant vers le ciel un instant fixe, vertical, avant de crouler avec la soudaineté d’une intuition nocturne ou d’une bête. J’étais porté. Mais la loi qui le dirigeait renversait aussi bien le mouvement de cette fuite en spirale, et à certains indices (non, je n’avais jamais faim, j’étais stimulé par la pluie), encore dans l’hésitation de la lumière qui gonfle sur les derniers chantiers, je savais qu’il me reconduisait vers l’intérieur, dans les quartiers que la fin du jour saisit d’une puissante hébétude. Là des palais, des musées, des pelouses, des banques, des ministères délimitaient l’aire bientôt déserte où je pensais que le centre en peine viendrait traîner peut-être avec la nuit. En tout cas je me reposais quand à force de marcher j’avais touché la pointe anesthésique de la fatigue, et m’abandonnais sur un banc à l’inertie tournoyante de la planète et des corps des millions de dormeurs autour de moi qui veillais dans la cataracte en suspens de tant de silence. Qu’est-ce que j’ai retenu? Sans grande passion pour l’histoire, observateur médiocre (ou je m’éprends une à une de toutes les briques d’un mur, ces briques crues des temps qui tiennent juste au creux de la main avec le poids et l’or et la tiédeur d’un petit pain retournant par-delà des siècles à sa farine), seul et sombre comme illettré dans les accords fondamentaux des musiques que font les langues, mais j’écoutais; confiant en d’absurdes systèmes établis sur les goûts des tabacs (car une odeur autant qu’un lieu pouvait me livrer le centre — et les poches alors bourrées de dix variétés de cigarettes, les moins chères, celles qui sous de naïfs emblèmes cosmopolites perpétuent la dérive de journées de chômage et de samedis de bals à tangos), je flottais avec ma fumée et n’en sortais que comme une fine antenne promenée par la ville elle-même, une lanterne qu’elle portait en rêve au travers de sa propre masse pour en sonder l’énigme et l’épaisseur. Quant au centre j’en parle, j’en parle, mais après coup. Je suivais une pente. Qu’elle m’ait aspiré jusqu’à lui, et je ne serais pas ici tranquillement à relever encore ses traces, puisqu’il accordait cela du moins, traces ou signes par l’antenne aussitôt en éclair vers le cerveau pour y cristalliser la distraction en vigilance. Oui, tout cela prompt, furtif, car si centre il y a, ce n’est rien que ravalement d’une indifférence féroce. Il m’aurait englouti. Par exemple je me souviens d’une porte : elle battait au fond d’un couloir et j’ai vu beaucoup d’autres portes, mais c’était donc celle-là ; une autre fois, à Bologne, près d’une basilique en agglomérés de lune, un petit théâtre d’ombre et de linge improvisait pour un buste d’Hermès aux yeux rongés, et c’était ce drame. Puis quand le soleil poussait du front sur les potagers aujourd’hui défoncés en haut de Belleville; quand cette galerie qui obliquait encore à Prague entre des magasins se transformait en église et, pour finir, en square où des couples muets déambulaient dans la chaleur, sous la lueur des globes exténuée d’avoir franchi les poussières du songe : c’était là, je ne bougerais plus, bien que ce ne fût ni le but ni l’étape, mais cette déception en somme réconfortante d’avoir pour un moment trouvé l’enclos dont j’aurais pu, après tant d’heures usées contre du vent, contre des pierres, devenir pierre et vent à mon tour le génie sans identité qui sous un ciel de glace, les rayons déclinants, allume entre l’inerte et les yeux obscurcis une étincelle. Alors on connaît sans savoir. On connaît que des êtres passent, et que des événements s’infiltrent. Alors j’ai pénétré des cœurs, entendu le déclic prémonitoire dans le retrait d’existences vouées à la désolation ou à la sauvagerie. Et de quel droit? Celui qui peut connaître ainsi, malgré soi qui fracture, l’équité voudrait qu’il assiste ensuite : or lui s’en va. Je repartais, en effet, attiré de nouveau dans les faubourgs par cette lampe qui de relais en relais au sommet des immeubles révèle et dérobe à la fois l’éclat du centre inaccessible. Et toujours cependant, à voix basse imitant la mienne, quelqu’un me demandait d’attendre encore, encore un peu, mais il fallait que je m’en aille, amalgamant sans m’en douter quelque chose de ma substance à ces blocs d’inconnu. Ensemble nous avons produit de l’angoisse et du danger, des lambeaux d’illusion qui puisent à mes dépens dans leur détresse de n’exister qu’à peine une sorte d’énergie. Car en contrepartie la mienne s’amoindrissait. Et maintenant, comme moi j’avais erré à la recherche du centre, obsédées par l’oubli des mots qu’elles avaient voulu me dire, que j’avais refusés (et qui étaient le passeport, peut-être, la formule de l’échange avec l’autre et notre délivrance), ces empreintes à moitié vivantes de mon passage s’étaient mises à rôder. Comment faire pour les aider, et qu’elles me pardonnent ?
Souvent elles apparaissent, consternées au grand jour, sans arrêt, comme à coups de pelle, qui vient les déterrer, mais pour ne pas gêner, pour se donner l’air hypocrite de tout le monde, elles vont manger une gaufre près de la consigne aux bagages, s’attarder sans motif dans les bazars où elles achètent n’importe quoi d’inutile pour elles comme une lime à ongles et des savons, des savons. Elles ont honte, je sais, mais c’est ma honte qu’elles endurent, et la honte ou déjà la peur m’empêchaient de les rejoindre quand j’étais sûr qu’elles m’avaient fait signe à cette façon de brandir là-bas la manche d’un manteau vide, au rideau qui bougeait derrière la vitre d’un de ces vieux bistros confits dans les relents de la soupe et du pétrole. Je me méfiais. J’aimais mieux écrire des lettres et même les expédier, scrupuleusement affranchies quoique sans adresse. Tant bien que mal essayant de me justifier. Mais ces explications me jetaient du haut en bas des pages comme dans des rues, et le virage automatique au bout de la ligne m’abattait avec des pans de phrase entiers dans le brouillard. À cela aussi je renonçai. Puis il y eut une série d’incidents que je ne dois pas rapporter. Je n’osais plus sortir ni décrocher le téléphone. Enfin, rassemblant mon courage avec ces objets modérés qui nous soutiennent quand nous lâche le reste — un seul livre, la casquette, la brosse à dents — une fois de plus je résolus de partir. Où j’irais, peu importe. Mais là-bas tout recommencerait peut-être, et déjà tout recommençait. Un train aux horaires fumeux montait vers la frontière, dans cette zone où les haltes en fin de journée se multiplient. La nuit aussi montait. Sous les entablements obscurs, des rayons d’intelligence et d’amour touchaient le front des bêtes rencontrées. À chaque arrêt on voyait sourdre la lueur basse et puissante qui dort au fond des murs. Les regards en étaient protégés par des visières, et les paupières des enfants qui ne cessaient de fumer sur les déblais restaient baissées. Une averse, toujours devant, brassait dans l’odeur des lilas celle de la fumée et d’essences plus rares dont la vigueur, avec le cristal des appels, signifiait l’extrême altitude. La gare où l’on s’attardait à présent était exactement semblable aux précédentes, peut-être plus foncée. Mais on avait monté encore, et rien n’était changé dans l’intensité de camouflage de la lumière. Seule la pluie avait dû basculer vers des ravins ; un souffle par contrecoup achevait de s’épuiser en gros tremblements de portes. Quelqu’un fit observer que les orages ne passaient jamais la frontière. D’autres phrases prononcées comme en rêvant flottèrent dans le wagon — puis de nouveau le silence appuyé sur la vibration décroissante des vitres, les craquements des ressorts. Des sommets élevaient sur nous leur braise interminable. Brusquement j’empoignai mon sac pour descendre, comme sans réfléchir. Le billet servirait plus tard, si je continuais ce voyage.
Personne, d’ailleurs, ne me le réclama. Les employés s’étaient tassés près du fourgon de tête, devant l’interruption du quai parmi des herbes dont luisaient les tiges encore sensibles sous le vent. Ils formaient un groupe bien dense, bien noir, où de seconde en seconde un geste, qui semblait le dernier, éclatait saisissant comme le poing plongé dans une eau trop limpide. Je les regardai longtemps. C’était une émeute immobile. J’allais comprendre quand la nuit tomba d’un seul coup. II y avait un hôtel en face de la gare, juste au coin d’une rue qui allait se perdre vers des sapins. Du portier somnolent sur les pages de son registre, la voix ne me parvint qu’après avoir tâtonné dans les chambres, cherchant celle où j’irais dormir. Mais j’avais le temps, tout le temps désormais plus lourd et plus stable que la montagne. Alors j’ai raccroché la clé numéro 9 sur le tableau. J’escaladais maintenant cette rue qui décourage vite les maisons : au niveau des toits ce n’est plus qu’un sentier, après un coude abrupt précipitant le village. La montagne allait devant moi, claire comme une pensée qui se sait condamnée et qui résiste. Au bord d’un ressaut étroit je me suis adossé contre sa masse et, tout en bas, dans le train qui prenait la courbe vers la frontière, à trois reprises j’ai vu le compartiment que j’avais laissé vide s’éteindre, se rallumer. J’ai dit doucement : bon voyage. Trois fois aussi le calme absolu de l’hôtel cette nuit m’a réveillé. Je sens le poids de la montagne. La lumière profonde a disparu. Mais, sur la place, luit encore tout ce qui peut luire avec modestie et confiance : une étoile, l’anse d’un seau. Je recommence.
L’âme semble un couloir où des pas hésitants résonnent, Mais personne jamais ne vient. Dehors, l’ombre qui
tremble Dans les encoignures de porte et sous les escaliers, C’est l’âme encore, quand la nuit fige le long des murs Les flots d’eau pâle et froide où l’on est heureux de
descendre. Et qui donc parlait de salut ou de perte pour l’âme. Alors qu’elle est blottie en son frisson et cependant Toujours plus dénudée au vent qui souffle en ce couloir ? Qu’elle se cache ou rôde, écoute : elle s’égare, étant L’habitante et le lieu d’une solitude sans nom.
L’air d’automne est si clair qu’au-dessus de la ville On entend craquer les forêts d’Alsace et de Lithuanie Et passer des renards dont l’œil a la tendre sauvagerie De ce ciel dénudé qui tremble au milieu de la rue. Un barrage a cédé très haut dans les gorges du levant, Libérant le bleu sans rumeur qui déborde les cheminées Et, par la porte ouverte au cœur étouffant de septembre. Voici le vent couleur d’averse du matin qui rentre Avec son odeur de terrier, de bois mouillé, de gelée blanche, Et sa stature d’autrefois dressée comme une promesse. •Je tends les bras dans ce retour de milliers d’ailes Vers ce qui fut promis par la cloche aiguë du collège sous
le brouillard. Vers les anges dépossédés qui guidèrent mes pas parmi
les bogues de l’allée, Et la gloire d’octobre à genoux dans les feuilles mortes.
Vous m’écrivez qu’on vient de supprimer le petit train d’intérêt local qui, les jours de marché, passait couvert de poudre et les roues fleuries de luzerne. Devant le portail des casernes et des couvents. Nous n’avions jamais vu la mer. Mais de simples champs d’herbe Couraient à hauteur de nos yeux ouverts dans les jonquilles. Et nos effrois c’étaient les têtes de cire du musée, Le parc profond, les clairons des soldats, Ou bien ce cheval mort pareil à un buisson de roses. Des processions de folle avoine nous guidaient Vers les petites gares aux vitres maintenant crevées, Abandonnées sans rails à l’indécision de l’espace Et à la justice du temps qui relègue et oublie Tant de bonheurs désaffectés sous la ronce et la rouille. Depuis, nous avons vu la mer surgir à la fenêtre des rapides Et d’autres voix nous ont nommés, perdus en des jardins. Mais votre verger a gardé dans l’eau de sa fontaine Le passé transparent d’où vous nous souriez toujours
Les bras chargés d’enfants et de cerises.
Je pense aux jours d’été où vous n’osez ouvrir un livre
À cause de ce désarroi de cloches sur les toits.
N’oubliez pas.
Dites comme nos mains furent fragiles dans la vôtre —
Mais quelle est la juste distance ? Il y a celui qui ferme obstinément les yeux, cherchant La mesure de l’âme comme d’un mur blanc, et l’autre Qui entre en suffoquant dans les premiers plis de la mer. Entre eux j’ai posé mon vélo contre un pin violet qui
craque Et je tiens l’horizon entier dans l’empan d’une main, sous
la fumée Oblique d’une cigarette. Mais qui tient Dans son empan l’incessante mobilité d’insecte où se perd
mon regard. Et la courbe de mort où s’inscrit la route surgie Des flots de la forêt vers les frondaisons de la mer ? Vite j’ouvre les bras pour déborder ce qui m’enferme, Debout dans l’enjambée du ciel. Mais que saisir Et mesurer sinon, au flanc mobile de la dune, L’empreinte de ce corps que le vent réensevelit ?
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.