Mois : juin 2020
LES MAUX PEINTS
LES MAUX PEINTS
Au loin, au trait de l’horizon, la fumée du train cache un temps les larmes-vapeurs
les arbres crient de douleur de leurs torses paisibles
un mas accroché dans les ocres sanguines sent le toro d’un autre combat
Région de riches, la Provence, qu’aucun n’a su peindre comme Vincent, étale ses villas de milliardaires sans une toile de lui
mais que de Soulages et de malfaisants de l’art d’un commerce florissant y ont élus domicile et professent leur froideur charnelle.
Niala-Loisobleu – 30 Juin 2020
CHANSON DU JOUR ET DE LA SUIVANTE NUIT
CHANSON DU JOUR ET DE LA SUIVANTE NUIT
Ils se rencontrent à minuit
Ils s’embrassent en silence
Ils s’étreignent jusqu’au matin
Tout le jour passe et la suivante nuit
Et le jour suivant tout pareil
Le jour au jour et la nuit à la nuit
Ils échangent les fleurs d’amour
Ils échangent les herbes odorantes
L’estragon du rêve et le cerfeuil de la tendresse
Tout le jour passe et la suivante nuit
Et le jour suivant tout pareil
Le jour au jour et la nuit à la nuit
Et puis ils cassent leurs verres vides
Sur les bouteilles qu’ils vidèrent
Et vident encore d’autres bouteilles
Tout le jour passe et la suivante nuit
Et le jour suivant tout pareil
Le jour au jour et la nuit à la nuit
Et puis ils dorment avec fureur
Les lèvres ensanglantées lui du sang d’elle
Elle de son sang à lui
Tout le jour passe et la suivante nuit
Et le jour suivant tout pareil
Le jour au jour et la nuit à la nuit
Ils se rencontrent à minuit
Les lèvres ensanglantées lui du sang d’elle
Et vident encore d’autres bouteilles
Ils s’embrassent en silence
Ils échangent des herbes odorantes
Et puis ils cassent leurs verres vides
Tout le jour passe et la suivante nuit
Et le jour suivant tout pareil
Le jour au jour et la nuit à la nuit
Celle-là qui fit cette chanson
N’est pas prête à casser son verre
Son verre est toujours plein toujours pleine sa bouteille
Et qui donc qui lui remplit le verre et la bouteille?
Celui-là qui change chaque jour la forme des étoiles,
Un cœur battant solide sous un sein frémissant
Frémissant tout le jour et la suivante nuit
Et le jour suivant tout pareil
Le jour au jour et la nuit à la nuit
Robert Desnos
FOR YOU LOVE – SAVAGE ROSE
FOR YOU LOVE – SAVAGE ROSE
Qui vous transporte
Dans un endroit sûr et frais
Qui soulage l’arbre qui pleure
Repousse vos chaussures sanglantes
Qui réconforte
Votre amoureux pâle et fin
Homme-enfant
Le monde pleure
POUR VOTRE AMOUR
POUR VOTRE AMOUR
Les feuilles chuchotent
Une tempête va se lever
Laissez venir il
déteste La haine les mensonges le crime
Réveillez-vous éveillez
Le matin jeune et nouveau
Homme-enfant
Avec vous
POUR VOTRE AMOUR
POUR VOTRE AMOUR
POUR VOTRE AMOUR
POUR VOTRE AMOUR
JOUR DE FAITES
JOUR DE FAITES
Faites pas chier avec vos problèmes, vos petits chagrins, vos manques de jouir, vos vies traîne-godasses, j’ai mon dos, mes jambes de mon âge qui veulent en corps porter, courir, rire en revenant de voter où je vous ai pas vu
Et puis peindre une vie d’oiseau dans un monde d’oiseleurs. Et encore faire l’amour parce que la bonne santé de ma libido me donne pas de mal blanc purulent, juste des herbes magiques, des sels pas pour le ben, pour les glandes, sans produit conservateurs, rien que du net et sans aucune idée de rapport
mon cul n’est pas à vendre.
Pour toutes tes fêtes oubliées mon Coeur accepte ces quelques fleurs…
Niala-Loisobleu – 29 Juin 2020
L’AUTOMNE
La lumière a trouve d’autres armes.
Après la lucidité violente
des lieux communs, voici l’effusion
tranquille d’un soleil
fort de sa pâleur.
A la stupeur de tous, les discussions interminables de l’été n’ont suscité aucune vérité.
Seuls les fruits ont émergé.
La nature est fanatisée.
Son entendement en souffre.
Elle se complaît dans le résidu des couleurs et les tristes velléités des couchants.
Il est peut-être indécent d’être en sa compagnie.
Le hêtre agite ses bras enflammés.
Il célèbre la dernière fête du feu.
Dans le lointain, les
fanes se consument dans
une odeur doucement impérieuse.
Ce qui ne participe pas devient bruine.
La saison a dépensé son soleil.
Il va falloir goûter le temps avec des papilles d’ombre.
Il faudra réapprendre le savoir-vivre parcimonieux des dormeurs.
La clarté achève de tromper.
La fabuleuse volupté du visible a déjà perdu la futaie.
L’art d’aujourd’hui s’épuise dans les douces immensités de la fin.
Le déplaisir s’empare des hirondelles.
Elles songent à un voyage dans d’autres nuances du temps.
Elles affrètent la vapeur des jours et s’en vont.
Il vaut mieux se nourrir d’abandons que de pulpe qui surit.
La forêt découvre qu’il n’est pas nécessaire d’être aimée.
Elle sait que l’on peut être belle sans le faste inquiet de l’apoplexie.
La douceur de n’être rien pour personne la dispense des ornements de la passion.
L’arbre entre dans un sommeil qui le vieillit.
Certes, la feuille lui reviendra, comme un boomerang.
Mais quel sera, entre-temps,
l’autre appât
pour les ivrognes du réel?
Les jours sont touchés par un au-delà qui nie les bienfaits de la matière.
Ils se complaisent dans une sérénité peureuse.
L’introspection va gagner les poires.
J’entends l’arbre exalter l’économie de l’expression.
Pendant une saison, il va se consacrer à parfaire sa monotonie.
Son silence l’emporte déjà sur la lutte de l’homme pour le mot juste.
L’aube a la fraîcheur des faïences.
Les vents brusques auront tôt fait de ce vase en fibres de brume.
L’image va se rompre en tessons d’arbre.
La suavité est le patriarche des poisons.
Son chef-d’œuvre consiste en un fruit attentivement mûri.
Elle l’éclairé d’une saveur
qui ouvre les portes tomenteuses
de la mort.
Les eaux verdissent.
Les feuilles mortes y meurent davantage.
Il leur est fait une sorte d’apothéose visqueuse.
Les fonds glauques et malhabiles sont refermés sur les reflets.
La jaune transparence des capucines est usée.
Trop de veilles solaires ont épuisé leur provision de panache.
Il ne reste plus qu’un peu de safran au fond de leurs yeux.
L’existant est séduction en soi.
Lorsque le chêne allume son four, l’apparence atteint la pureté de l’émail.
En automne, le réel est cette superbe rousseur que l’on voit en filigrane entre la pensée et l’espace.
L’eau qui faisait les délices du printemps et l’abondance de l’été n’inspire plus le jardin.
On l’évite comme une caresse marécageuse.
C’est en vain que l’on tente de réveiller l’excentricité de la croissance.
On a jeté l’ancre de la tristesse.
On attend sur une mer de vapeurs songeuses.
Une perle immense et taciturne roule sur l’horizon.
Les premières feuilles tombent sur les dernières larmes de félicité.
Le soleil sourit encore aux géraniums.
La brume acquiert de la rondeur.
Une ivresse dont personne ne se garde tue le cœur.
Elle l’entraîne dans une demeure tapissée de feuilles d’or chaud et de rumex rouillé.
Là règne une infaillible décadence
La vérité y est inexorable comme dans l’âme des lâches.
Dans le verger se tient un vieillard dont le visage est éclairé par le passé.
Il sourit à la pensée d’être inconsolable.
Les passions d’autrefois lui ont laissé une impérieuse immobilité.
Il s’enrichit de ses regrets.
Un soir, une bourrasque vint qui portait plus que la pluie.
Elle remuait une vieille invitation.
Les arbres savaient déjà.
Ils étaient appareillés et se mouvaient comme des mâts sévères et sereins.
Je regardais les cordages de l’ombre.
La forêt avançait.
Il n’est plus possible d’être loin.
La distance est réduite à l’indistinct.
La forêt ne participe plus à l’horizon.
L’arbre attise une feuille et marque sa limite.
Les oiseaux ont enlevé les portes de l’espace.
Ils ont aboli la perspective du froid.
L’exode leur tient heu de pensée.
Ils voient déjà la mer.
Les propos du monde sont gênés par un lapsus qui ramène tout à l’humide.
On ne trouve plus les termes précis pour soutenir une fraise.
La fleur va enfin oublier
la folie qui crée le lendemain.
Elle ignore que mourir est une autre manière de déguiser le poids de la vie.
Il est, dans l’air, un mal héréditaire qui empêche de détruire ou de partir.
Fous d’ennui, les oiseaux s’en vont comme des jets de fronde.
Mon intention était de partir aussi, de suivre ce qui conduit hors de l’être.
Il aurait fallu que je renouvelle mon art d’abandonner.
J’envie rageusement ces frondaisons pour qui la mort semble suffire.
La feuille jongle avec l’air et meurt de son art.
Ce qui était vaste devient intime, c’est-à-dire intolérable.
Le plaisir se fait rare.
Il ne dure guère plus longtemps que la chute d’un fruit.
Les invités de l’arbre sont morts.
Ceux qui demeurent sont paralysés dans leur illumination.
Jamais absence ne fut autant visible que dans les entrailles du peuplier.
Ses branches sont vides de tout commentaire.
Cette réalité dévitalisée satisfait un aspect peu connu des sens.
L’arbre savoure l’indescriptible bonheur de perdre.
Il use de sa dépossession avec cette précaution colorée qui fait les bouquets inoubliables.
La joie du vide l’inonde comme un vin dépouillé de son orgie.
Le bleu a perdu le secret du bleu.
On erre dans l’espace pâle
à la recherche
d’une nuance qui adoucit
l’absence.
On redoute la transparence, cette furie de l’abîme.
Le soleil se lève mourant.
Il s’appuie sur un coussin de fougères et prononce une phrase, un apophtegme doré où l’intention est colossale, mais la signification diffuse.
Il se souvient à peine du monde.
Rien n’est irrémédiable, semble-t-il.
Pourtant, on aspire à l’éternité une dernière fois.
Tout est devenu très discret.
Le brouillard commence à danser.
C’est une légèreté qui prend corps pour dissimuler le passage de la matière à l’invisible.
Nul encore ne dramatise.
La rose n’attend plus rien de son époque.
Les amants ne hantent plus les lieux suscites par son parfum.
Son infini est sans force.
La passion de la mort est sans analogue chez ceux qui ont aimé.
A la fin, l’arbre se ravise et s’oriente au-delà des couleurs.
Il voit que le ciel cesse de nacrer le monde.
Il tend désormais vers des certitudes sans prisme ni formule.
Le soleil est las tel un violoniste vieilli.
Sa chanterelle est pulpeuse.
L’instrument n’a plus cette glotte de feu aigu qui embrasait le taillis de l’ouïe.
D’ici peu, on sera réduit à la gamme des gouttières.
La fleur s’attendait à l’éternité.
Ce n’est plus qu’un moment de couleur qui s’amincit.
On lui demande de faire épanouir un paradoxe: vivre et témoigner de la mort.
La nostalgie est l’enluminure d’une existence qui ne fut jamais vécue.
Celui qui contemple le désert pourpre que laisse l’automne baigne dans une clarté analogue.
Il est une teinte qui sied à ceux qui aspirent à souffrir de l’immensité.
La saison est réduite à un jeu de lustre.
Le pigment dégradé flatte l’impéritie des arbres.
Il y a complaisance à vouloir décrire et affiner ce qui meurt.
Le ciel s’éteint.
L’argument selon lequel on peut vivre sans lumière gagne du crédit, mais devient douloureux.
Les lueurs qui résistent avivent la fougère en pure perte.
La fin se met à vivre.
On perçoit son souffle dans le silence des oiseaux.
On se donne à la fougue naissante de la ruine.
L’arbre le plus fruste
est gagné par la distinction
déraisonnable du vide.
La beauté était une cruauté remise à neuf.
La chair était un habit rapiécé de framboises.
L’automne connaît sa première déception.
La marche arme le bras de ] contemplation.
Dans les feuilles, mes pas fomentent un fin ravage.
Je goûte ces aigres applaudissements.
Ils m’accompagnent durant l’interminable saison du reste de la vie.
François Jacqmin
ENTRE LE MUR ET L’AFFICHE
ENTRE LE MUR ET L’AFFICHE
Le bouquet dans la robe
colle à la peau
Le ragondin remue le fond du marais
une grenouille change enfin de temps
les lentilles vont reprendre couleur
ça mouille
Les mûres affichent la couleur des tâches au menu
Je m’assieds
pour rassembler l’éclat des couleurs que tu m’as découpé
au travers de différentes images remontées de musique au centre de la clairière
j’ai besoin de les lire une à une
le taille-mine à portée pour tirer plus loin la saveur
quand à la gomme je l’ai jeté après qu’elle eut ôté le superficiel des situations douteuses
en incliné « italique » tu es toujours plus lisible dans le couloir qui t’habite
Niala-Loisobleu – 28 Juin
Il y a des ailes:
L’Aile Sud,
L’Aile Nord,
L’Aile qui va de l’Est en Ouest.
Dans le couloir,
Il y a des anges
Qui se déplient,
Qui se déploient,
Disparaissent derrière des portes,
La 2, la 6 ou la 23.
Dans le couloir
Il y a des anges
En sandales
Et en blouses blanches
Qui portent, accroché
Sur leur coeur,
La douceur de leur prénom.
Dans le couloir,
Il y a des rires,
Des chuchotés
Et des éclats.
Y a des pâleurs,
Y a des urgences.
La chambre 12 qui s’en va.
Dans le couloir,
Y a des appels
Qui s’inscrivent en lampes bleues
Sur un grand tableau de milieu.
Il y a des odeurs,
Y a des lourdeurs de fleurs fanées.
Il est midi.
Y a le bruit des chariots qui grincent
Et les odeurs de ragoût froid.
Il y a des pas.
Il y a des voix
Dans le couloir,
Devant la 12.
Y a des…
LA PETITE ECUYERE A DEUX MAINS
LA PETITE ECUYERE A DEUX MAINS
Qui l’eut Gruss
au village d’un trou normand
le cirque monte chapiteau à hauteur d’église
pour qu’à la nuit venue
craint blanc montre qu’il n’a rien du singe savant
Gribouille qui aboie quand les voleurs ont quitté la maison
Auteure de poésie scolaire
Parents idiots qui exigent d’autres palmes pour leur fait néant
Au signal de la trompette l’orchestre fait sa première passe dans la Reine
le petit-ça-voyeur ramone
et le couple royal , lui en Auguste, elle en clown blanc
se met la main au panier pour la quête
Ernesto
en M.Loyal fait sortir les parents
on amène la pièce montée en haut de laquelle l’oiseau est perché
les enfants font l’aronde en chantant pour le quatre-heures…
Niala-Loisobleu – 28 Juin 2020
LE TANT, L’AMER ET QUE CE QUI CONTE
LE TANT, L’AMER ET QUE CE QUI CONTE
A la bascule
pèse et balance la vie correspondante au marché imposé
Soulages est l’exemple
de l’outre-noir qui fait son beurre
Sinistre et cynique payent mieux que poétique et optimiste
Approche-toi l’estuaire
que je me noie dans ton récif de corail
en gardant la certitude que je suis un bon à reins
résidant en lune
le dernier des mots piquants de l’Arbre à Médecine, des enfants peints dans des seins bals, une bouche amérindienne pour l’Appel, le ventre canopée rempart touffu
Monte à cru ma Belle
fuis
l’Amazone
c’est un gang de malfaiteurs..
.
Niala-Loisobleu – 28 Juin 2020
PROCREATION
PROCREATION
Pilotis érigé
le plancher du jardin flottant respire la bouche ouverte
la motte riche parcelle
à la jambe qui pilote la rame
Regard face à face à l’enfant
le vieil homme dans la mère
baleine l’Esprit d’un jet vertical
Dans la fermeture des lumières l’écran s’allume
des hordes équines traversent la salle
un poulain tenu par l’aqueux, accompagné d’une meute de gardiens
à quai est aux pores
Eternité bloquée aux tympans, la pierre taille sa présence.
Niala-Loisobleu – 27 Juin 2020
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