La vérité du drame est dans ce pur espace qui règne entre la stance heureuse et l'abîme qu'elle côtoie : cet inapaisement total, ou cette ambiguïté suprême. Saint-john Perse
Mais quelle est la juste distance ? Il y a celui qui ferme obstinément les yeux, cherchant La mesure de l’âme comme d’un mur blanc, et l’autre Qui entre en suffoquant dans les premiers plis de la mer. Entre eux j’ai posé mon vélo contre un pin violet qui
craque Et je tiens l’horizon entier dans l’empan d’une main, sous
la fumée Oblique d’une cigarette. Mais qui tient Dans son empan l’incessante mobilité d’insecte où se perd
mon regard. Et la courbe de mort où s’inscrit la route surgie Des flots de la forêt vers les frondaisons de la mer ? Vite j’ouvre les bras pour déborder ce qui m’enferme, Debout dans l’enjambée du ciel. Mais que saisir Et mesurer sinon, au flanc mobile de la dune, L’empreinte de ce corps que le vent réensevelit ?
Pablo Auladell est né à Alicante en 1972. Autodidacte, il travaille comme illustrateur (notamment des contes de Grimm et d’Andersen) et auteur de bandes dessinées, notamment pour les éditions Sinsentido, Anaya et Ponent. En 2008, son album Soy mi sueño, sur scénario de Felipe Hernandez Cava, a été très remarqué. La Torre blanca (La Tour blanche) avait reçu le prix de la révélation au Salon de Barcelone en 2006, tout en étant également nominé dans les catégories « meilleure œuvre » et « meilleur dessin ». La version que nous traduisons correspond à la deuxième édition revue et augmentée. Son unique livre en français à ce jour est Le Rêve de Pablo, publié par La Joie de Lire. dessinateur atypique, il publie « Le Paradis perdu » d’après l’oeuvre de John Milton et au ski « le cuirassé Potemkine ».
Du matin sans autre parti pris que celui de la route ouverte, va défiler le paysage dans tous les sens de la pensée
Belle métaphore, ou le chien assis sur la plage-arrière de custode, n’opinera pas bêtement de la tête
il faut laisser le chauffeur regarder à l’avant sans détourner la tête
Apparaît alors la muraille du ventre humain qui a gardé au moins l’esprit de contenant , celui de contenu relevant d’une autre paire de Manche
Pont-levis baissé l’air herse la Motte-Picquet, Grenelle y con pris
Je respire
La muraille montre cuisses ouvertes, un aspect métaphysique pas du tout hors-sujet
C’est autre chose de pénétrer au coeur des pensées, de les suivre dans leurs périples, allant du jovial au pessimisme, de l’amoureux aux frigide, chaud-froid de poulet mis en vitrine d’Amsterdam, puis l’exorcisme de la pensée novatrice, genre histoire de femme qui au départ est née homme, ah la galère. Il y a la parole de celui qui ne profane pas. Plus rare. Debout sur la béquille robotique de l’être femme qui ne se ménage pas. Ah le saint qu’on dévoile chez le fleuriste, si on le cachait, mais le petit-gommerce alors que deviendrait-t-il ?
Allez, trève d’insolence, par la porte ouverte la mer est là qui s’étale et remonte
J’utopise
Putain c’est bon parce qu’en m’affûtant le cortex ça me fait voir sans aigreur inutile, le côté réellement déplorable des traditions civiles d’une société armée pour tuer
Je dirai tout en pensant qu’instruire est le pire ennemi que craignent les exploiteurs
Il reste de tous les monuments construits par l’homme une défense immortelle de sa présence
L’âme semble un couloir où des pas hésitants résonnent, Mais personne jamais ne vient. Dehors, l’ombre qui
tremble Dans les encoignures de porte et sous les escaliers, C’est l’âme encore, quand la nuit fige le long des murs Les flots d’eau pâle et froide où l’on est heureux de
descendre. Et qui donc parlait de salut ou de perte pour l’âme. Alors qu’elle est blottie en son frisson et cependant Toujours plus dénudée au vent qui souffle en ce couloir ? Qu’elle se cache ou rôde, écoute : elle s’égare, étant L’habitante et le lieu d’une solitude sans nom.
Coulures d’une nuit qui s’use les yeux à chercher , près de la cabane la plus proche commencent les tours de passe-passe
Le cheval est passé derrière, le moineau qui se réchauffe dans son crottin chaud témoigne de son existence
Personne ne bouge autour de l’écurie. Les chasseurs sont partis avant le levé du jour
La mise-en-scène élaborée la veille est programmée pour 06h00 de pair avec la cafetière, laissant ainsi un temps de récupération à l’innocence après le stupre de la soirée
En coulisses l’équipe de machinistes après avoir graissé les manivelles tend les cordes des cintres. Aujourd’hui c’est un rideau bucolique que les esclaves ont peint sur les rotatives d’une météo blanchie et nourrie par la mère maquerelle chargée de l’éducation des jeunes séminaristes
Un pape est maure, un autre est appelé à régner
Dans la buanderie Cendrillon passe le carrosse au tampon gex. Faut que tout soit nickel avant que les frangines viennent la faire chanter en la menaçant de dire publiquement qu’elle est vierge. C’est surtout l’aînée qui est la plus cruelle. Elle est sadique. Plus méchante qu’un sanglier qui se serait convaincu qu’on on lui en voulait et persuadé qu’on lui avait menti. Imagine…
Au moment crucial ma boîte de couleur a débarrassé la table des restes de craies mâchées et des tubes d’un hit de merde pour une grande toile neuve que la muse avait accouché. L’âne a braie…
Poitrine de l’olivier où l’arbre de patience est en son plus doux caressé par le temps d’aventure. Je m’y suis taillé un pan d’écorce
À votre semblance autrefois quand dans votre front l’été se cherchait encore —je l’ai enflammé ;
Un brasier très pur comme d’un holocauste plein de signes et de chants morts, j’y ai promené l’ombre de mes mains
Longtemps pour qu’elles soient sauves de toute tache et puis j’ai écrit à destination des sereins épan-deurs de joie votre nom tel qu’il était avant le lever du vent d’angoisse:
Avant moi.
Je n’ai jamais connu dans sa vérité ce qui m’était cher;
je brûlais d’absolu je m’inventais nécessaire
à son devenir. C’était hier.
Je passais près de la source sans voir le rouge-gorge y boire
en silence, économe de sa chanson pour ses amours du soir ;
je n’écoutais que la rumeur là-bas de l’embouchure mariage en moi de l’onde et du divin de la mer. Maintenant à ces jours morts qui tombent de mes épaules sans même rider l’eau je possède le dur savoir ;
Le pain des joies ne se fait que du levain de l’aléatoire : pour l’avoir ignoré je meurs de faim. Temps enfui.
Chacun à l’heure d’aimer regarde le soleil en face tel l’aigle en sa légende
et puis ferme les yeux sur une étoile du tard, l’humble et l’habile
la tamisante qui fait durer l’espoir en son leurre, le tranquille.
J’ai regardé jusqu’au vertige.
Temps enfui, cristal rebondissant en son écho de cristal en cristal, aveugle désormais de ne mirer que le convexe et l’oblique.
De lourds loriots anciens, cendres de leur chant encore convoient le matin vers son nom d’été.
Le révolu vit de proies humbles endormies sous le sommeil des haies ; il n’est là que pour témoigner
d’un homme parti de lui-même depuis plusieurs années.
La cécité des larmes est la plus profonde ces yeux dans les yeux qui en calme tumulte ne fixent que l’amour et la mort.
Christ, nuit d’Orphée, syllabe arrêtée du chant d’adieu, hier y ressuscitait dans le remords Eurydice ;
où maintenant est-il? Je tourne et tourne en vain dans de rondes ténèbres. Où sont sa croix, ailes clouées du Verbe, et mon reniement
qui l’avait plantée ? Je ne sais.
Déferlement d’eau longue : la mémoire ne s’oriente plus et s’aveugle.
Qu’ai-je été, qu’ai-je désiré, quelle est cette ombre
un matin venue avec l’aube m’aborder pour me rendre si seul ?
Déferlement, déferlement d’eau longue ; j’y ai perdu jusqu’au toucher, je ne peux même plus en suivre le contour.
Ni ombre peut-être ni personne : seulement un dessin de mon souffle
sur une vitre tachée, ma jeunesse.
Chacun du sel de ses larmes sécrète peu à peu lucidement sa tombe.
Où se dresse la mienne et quelle est-elle
au bout de quel sentier du vent?
Je me souviens à peine, comme au fond d’une autre vie, d’effluves tendres
qui me guidaient vers ma fin, me bâtissaient ma prison à la fois d’immobilité et d’audace
et de lendemain.
Comme au fond des sargasses d’une autre vie. Comme aux marches d’une éternité que je ne gravirai qu’à reculons
condamné à ne jamais montrer mon visage aux étoiles de rémission.
La ronce dans midi se déchire à son ombre saigne petit christ d’interdit
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