mouvances


PIERRE BONNARD

MOUVANCES

Se sentir pris par la vague

d’un trafic se promenant entre humide et sec

un pied dans l’eau

l’autre au sec

au moment où le ventre projette cette tubérance

d’où sortent les chapiteaux d’une Chanson de Geste exaltée

ce bosquet noir mis derrière

sur le chemin de feu menant à l’embarcadère de la rivière

en laissant bouillonner la source

au bord de la voie espérée.

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Niala-Loisobleu.

23 Mai 2023

RUEE VERS L’HORS


PIERRE BONNARD

RUEE VERS L’HORS

Dans l’axe printanier

la frondaison redessinée partage sa zone libre hors de la pauvreté du devenir

Des gîtes qui apparaissent entre les barreaux des troncs de la forêt

les cerises reviennent s’accrocher aux oreilles tendues de cette foi qui refuse d’abdiquer

On retiendra le moindre indice qui fait palpiter le côté gauche du décolleté

cadencée par le métronome des marées.

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Niala-Loisobleu.

21 Mai 2023

TIGANESTI PAR GREGORY RATEAU


PIERRE BONNARD – PAYSAGE EN NORMANDIE

TIGANESTI

PAR GREGORY RATEAU

La campagne éteinte
La pluie claque
Souffrent les arbres tordus et suppliants qui,
Dans une diagonale ridicule,
Un dernier sursaut de dignité
S’arrachent de leurs lits pour prendre leur envol
Les animaux aux regards fous
S’exilent vers des déserts hypothétiques
Seule la terre exulte
Elle avale goulument
Une soif impossible à étancher
Au point que la Garla d’habitude plutôt calme et marron claire
Déborde d’agitation et devient couleur de pierre
Refluent à sa surface
Des cadavres de vélos rouillés
Des jouets déréglés
Les seules silhouettes perdues dans le lointain
Plongent dans la brume jusqu’à la taille
Commérages des feux de cheminée
Les fenêtres sont comme des écrans opaques
Ombres gesticulant d’une pièce à l’autre
Buées de souffre et de misère
Ce sont les verres qui claquent à présent
Un tintement continu
Parfois, des voix encore humaines remontent vers le ciel
Et rencontrent l’écho du tonnerre
Les bancs en bois devant les portails sont vides
Leurs pieds sont rongés jusqu’à la moelle
Les mauvaises herbes s’y installent
Se liquéfient les traces de pas
Les chiens errants boivent leurs empreintes
La forêt dévêtue dévisage impuissante
La vie se calfeutrer
Les rires se murer dans l’hiver

Grégory Rateau

COMME DEUX GOUTTES D’EAU PAR PAUL ELUARD


PIERRE BONNARD

COMME DEUX GOUTTES D’EAU

PAR

PAUL ELUARD

On a brisé le globe alpestre

Où le couple erotique semblait rêver

Une petite fille était figurée

Sur ses flancs pâles

Elle riait d’un mariage ridicule

D’une vie enviable

Deux yeux deux fois deux yeux
Ne sont jamais deux fois semblables
La femme était toujours tournée
Vers le plus sombre du sombre
Protée
Qui fuyait les hommes

Jeunesse à ne savoir quand elle prendrait fin

Sourires dessinés par des caresses

Douleur déchirée par des caresses

Les jours n’étaient mauvais que pour les autres

femmes
Ils brûlaient d’un grand feu aveugle
Et ne reconnaissaient rien.

En cherchant des salamandres

Des flammes vertes

Des flammes noires

Un été pâle

A réduire un grand chagrin

Pendant les vacances

Buvant du lait

Dans les prairies

Comme un enfant

Mourra la nuit

Pour s’en passer
Que faut-il dire
Cristal de roche
Fauve éventé
Bonds des collines
Ma belle en liberté
Eparpille des herbes
Des moires de parfums
Des bêtes trébuchantes
Des prunelles gelées

Éblouissante et nue
A la cuisse une abeille
Rires peur de la peur
Dans les bras d’un frisson
En plein jour le corail
Borde l’écume des forêts
Un buisson de neige s’envole
Je n’ai pas d’ombre à t’opposer
Sous ton masque de larmes
Tu n’es que plus visible
Sur leurs plages de perles
Tes yeux sont plus beaux

L’œuf de l’aube lâche ses oiseaux

Fils des reptiles au cœur de marbre

Aux yeux de griffes

Que faut-il taire

Pour t’écouter

Chaîne des ponts

Comme une paille

Tremblante d’air

Le corps très frais les cheveux tièdes

Le front lustré

Tu tournes au beau temps

Et quand le soleil s’oriente

Dans le ciel du matin

Tu souris dans mes plaintes.

L’homme

Ses bizarres idées de bonheur l’avaient abandonné

Il imposait sa voix inquiète

A la chevelure dénouée

Il cherchait cette chance de cristal

L’oreille blonde acquise aux vérités

Il offrait un ciel terne à des regards lucides

Leviers sensibles de la vie

Il n’attendait plus rien de sa mémoire qui s’ensablait

L’amour unique tendait tous les pièges du prisme

Des sources mêlées à des sources

Un clavier de neige dans la nuit

Tour à tour frissonnant et monotone

Une fuite un retour nul n’était parti

Tout menait au tourment

Tout menait au repos

De longs jours étoiles de colères

Pour de longs jours aux nervures de baisers

L’enfance à travers l’automne d’un instant

Pour épuiser l’avenir

Et cent femmes innocentes ignorées ignorantes
Pour préférer celle qui resta seule
Une nuit de métamorphoses
Avec des plaintes des grimaces
Et des rancunes à se pendre.

Installez ici les gradins les estrades

Les lampes des musiciens

Gravez partout des personnages ridicules

D’un trait pur d’un trait vif

Enviable

Accrochez les fleurs les grands oiseaux

Tout près des danseuses polies

Et de leurs robes creuses

Tout près des seins aux étranges vertus

Aux maladresses nonchalantes

Jetez des brassées de statues fragiles

Sur de grandes pierres sûres d’elles-mêmes

Pour déchaîner la gaieté

Pour composer un monde involontaire

Tendre et solide

On y trébuche en plein jour

Où suis-je j’y voudrais rester

La moindre ligne blanche
Près d’une tache noire
Une lampe pour un voyant

Un albinos

Sous les baisers des couleurs

Découvre son regard traqué

Sa candeur

Une couronne diaprée

De violettes roses
De boutons d’or fanés

II a le goût d’autres décors
D’une clarté moins rassurante
Plusieurs petites mains rapprochées
Sous un arbuste pâle
Carrelage de paumes innocentes

Touche aux mains pour toucher à tout
Sans laisser de traces

Pourquoi tant d’égards
Fouillez les gouttes d’eau
Les graines en haillons
Fouillez les mains prodigues
La prudence n’est qu’un jeu
Sur la table d’un enfant

Les arabesques lentes des poitrines et des lèvres

Les rides de l’écho

Derniers sentiers de la parole

Parmi les bruits de la campagne

Soir sans allure
Grand laboureur de ruines
Bourreau descendu des îles solitaires
Avec le vent dans la poussière
De mille vieillesses craquantes

Terre exécrable

Aux grimaces décolorées

Inextricable nœud d’horizons

Ma colère comme un sanglot la fin de tout
Puis dans le noir interminable
L’abandon d’un regard
Dont tout avait le goût

Ses paupières sont prises dans la cire de l’ombre

Et n’y retrouvent rien

Ni la tendresse ni la vie même l’ancienne

Qui n’était pas la nôtre

Pas plus la solitude que l’oubli.

De tout ce que j’ai dit de moi que reste-t-il

J’ai conservé de faux trésors dans des armoires vides

Un navire inutile joint mon enfance à mon ennui

Mes jeux à la fatigue

Un départ à mes chimères

La tempête à l’arceau des nuits où je
Suis seul

Une île sans animaux aux animaux que j’aime

Une femme abandonnée à la femme toujours nouvelle

En veine de beauté

La seule femme réelle

Ici ailleurs

Donnant des rêves aux absents

Sa main tendue vers moi

Se reflète dans la mienne

Je dis bonjour en souriant

On ne pense pas à l’ignorance

Et l’ignorance règne

Oui j’ai tout espéré

Et j’ai désespéré de tout

De la vie de l’amour de l’oubli du sommeil

Des forces des faiblesses

On ne me connaît plus

Mon nom mon ombre sont des loups.

Filles de rien prêtes à tout

Sœurs des fleurs sans racines

Sœurs des enfants rebelles

Minuscules

Indifférentes

Réduites à l’intelligence

A la raison à en mourir

Réduites dans vos secrets

Etrangères délaissées

Mes lointaines compagnes

Aux chairs sentimentales

Belles à peine belles mais toujours belles

Plus simples que le malheur

Plus précieuses que la beauté

De vos lèvres abattues

De votre sourire effondré

Vous me confiez vos poisons

O mithridatisées

Et j’oppose à l’amour
Des images toutes faites
Au lieu d’images à faire.

Paul Eluard

OF COURSE


PIERRE BONNARD

OF COURSE

Les commissions s’alignent sur ma liste pour ne pas oublier de se nourrir bien ces prochains jours

de ce qui a le mérite de faire tenir en vie

Au bord du précaire le doute glisse d’un rien son emprise malsaine

J’aimerais bien qu’elle trouve l’air qui lui ôterai cette grosse pierre de sa poitrine

Pâques rendu aux œufs de la rieuse enfance en chocolat

Reste à franchir le pavé mosaïque des carreaux….

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Niala-Loisobleu.

7 Avril 2023

UN JE NOUS SUR LA CHAISE


PIERRE BONNARD

UN JE NOUS SUR LA CHAISE

Ce jour tiré de l’armoire

me fait penser au retour de l’abeille du côté de l’Observatoire

faisant la manche au trottoir de Montparnasse

Les chansons à texte comblent le vide de la levée des corps du virtuel

Il était une foi

sous les sabots d’un poulain

que le printemps traverse au centre de l’estuaire

par la mosaïque des carreaux au lit-clos du fleuve

Le pied s’enfonce par le poil d’un spalter qui caresse les toiles du coude au poignet

j’ai été jusqu’au bout du jardin

reconnaître l’atelier…

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Niala-Loisobleu.

20 Mars 2023

DANS LA SALLE DE BAINS


PIERRE BONNARD

DANS LA SALLE DE BAINS

Bonnard se saisit de la lumière pour se glisser dans la sphère spirituelle

le corps exulte de l’esprit qui lave

Au coeur du jardin fruitier je me trace le seul chemin qui m’attache

La mer est joyeuse comme un poisson qui vole

et de ce qui coule de ma poitrine il me provient un chant d’oiseau bleu…

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Niala-Loisobleu.

7 Mars 2023

PRIS AU FOND DU REFUS DE VIDE


PIERRE BONNARD

PRIS AU FOND

DU REFUS DE VIDE

Dans l’âge qui hausse les épaules

sans penser à empêcher les seins de descendre du train

la table est mise

sur l’herbe qui sort des rides du passage trop piétiné

Autant de treilles que d’oies qui traversent la pergola dans un vol de nuages

le raisin pris par les vrilles jusqu’en haut des cuisses de la colline

et voilà les pieds qui foulent une virginité

je te mange à table

Depuis la distance l’impossible avance la main entre les je nous

assez de fleurs pour coudre l’odeur de vivre aux aisselles du point de départ

Tout autour des raisons avancées de se poser des questions

quant je ferme ma bouche sans façon à la tienne

je n’entends que le remous des vagues de nos ventres

et nos bateaux sur leurs jambes laissant bon goût sur la langue…

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Niala-Loisobleu.

12 Février 2023

CET AMOUR SERA BEAU, DÉLICAT, PASSIONNE ET SECRE PAR CAMELIA DINORA


PIERRE BONNARD

CET AMOUR SERA BEAU, DÉLICAT, PASSIONNE ET SECRET

PAR

CAMELIA DINORA

J’aimerais juste une fois
passer une nuit auprès de toi,
être l’ange de ton sommeil,
te protéger jusqu’au réveil,
et tendrement en douceur,
ouvrir les portes de ton coeur…
Il est trop tard, vous m’aimez, j’ai vu vos peurs partir et revenir, vos timides mots qui ne demandaient qu’à caresser ma vie, vous tournez autour de mon coeur comme un ballon lâché à l’air libre qui n’ose pas encore frôler mon corps.
Il est trop tard, je le sais, vous m’aimez, oui vous m’aimez même après mes blessures involontaires, vous me faites l’amour sur les mots que j’écris, vous m’aimez d’un amour qui n’a pas encore vu le jour et cet amour sera beau, délicat, passionné et secret.

Camélia Dinora

ROUE A AUBE


PIERRE BONNARD

ROUE A AUBE

La campagne traversée d’un vol, l’oeuf fait ni une ni deux et ovalise la table du couvert de l’aile

les rides des vieilles chaises se retendent au souvenir des fesses qui s’y sont assises

comme les herbes quand le pas est allé remplir plus loin son saut

la vigueur de l’appétit suit le fumet de la cuisine

Au troisième bouton tu laissais voir un sillon assez profond pour lancer l’élan au papillon

le chien dresse la tête, les oreilles jusqu’au groin dans le sillage de ce qui répond à l’attente

entre la couleur des fruits de l’amour mûr et les fleurs qui viendront poursuivre de leurs fossettes

cette fenêtre reste ouverte sur le côté jardin

chapeau de paille et bretelles aux ailes du moulin bord à bord aux meules.

Niala-Loisobleu.

22 Janvier 2023