LE PETIT BONHEUR
Chanterelle, chardon, cuscute.
Où l’herbe nage,
ne dresse aucun étai.
Je me souviens d’une femme
qui vendait des sabots.
Contient de la chitine.
Dors dans la coque
du cargo qu’on oublie.
Sans passion, sois l’ami
des carmes déchaux, des filles
au bord des larmes.
Le douze mai, tu pars:
une touffe de fines herbes
est ton seul aveu.
Perdus, nous devenons utiles et cherchons les outils rouges, et cherchons les maisons où nous pourrions vivre, maisons à clefs, à verrous, maisons de courte paille où nous
cachons nos dés.
Flûtes, osselets font frémir les chats et les femmes.
Dans le temple du sabot, j’ignore vendanges et récessions.
Affluent les feux, le miel.
Cent faux coupent la toison des vergers engloutis et muets.
Qu’enfume-t-on dans l’étable?
Les porcs, je les caresse et les couche en ma peau.
Nul fait ne confirme la rixe à laquelle je pris part.
Mon nom ne vous dit rien : je suis couteau, soc ou rotule.
Je lis l’écriture penchée, je cloue les mots-corneilles et le papier pourrit.
Les ciseaux coupent l’encre des doigts et des sabots : on file doux sous les arbres.
Nul bourreau n’avoue forfaits, simagrées.
J’introduis dans ma chambre oiseleurs et larrons.
Le gui dort dans l’œil des chats et des voleuses.
Voici le dieu du gel qui me serre les tempes.
Nue, la neige aujourd’hui, a odeur de lavande.
Un regard neuf pourfend soldatesque et police.
Le petit bonheur nous appelle.
La treille, et, sous la treille, un monceau de citrons…
Les bœufs qu’on caresse, dont l’haleine enfouit les petits enfants de brume, conspirent, têtus. Élais-je au bord du
Tage?
Je mentais pour mentir loin du pays des guêpes.
La pluie, l’herbe et les lèvres, le feu qui – myosotis – siffle, font ici ronde sourde.
Pommes sans nom gardent l’odeur, le verger.
Bernard n’affûte aucune sentence.
Le puits au fond du puits fait grincer la poulie.
Et
Colette n’encolle aucune lampe de thé.
Mars clôt le bec des oiseaux enchantés.
Tout délivre la liberté.
Jacques Izoard
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