LA PETITE INFANTICIDE PAR JULES LAFORGUE


LA PETITE INFANTICIDE PAR JULES LAFORGUE

Ô saisons d’Ossian, ô vent de province,
Je mourrais encor pour peu que t’y tinsses
Mais ce serait de la démence

Oh ! je suis blasée

Sur toute rosé

Le toit est crevé, l’averse qui passe
En évier public change ma paillasse.
Il est temps que ça cesse

Les gens d’en bas
Et les voisins qui se plaignent
Que leur plafond déteigne

Oh !
Louis m’a promis, car je suis nubile
De me faire voir
Paris la grand ville
Un matin de la saison nouvelle
Oh ! mère qu’il me tarde
D’avoir là ma mansarde…

Des
Edens dit-il, des belles musiques
Où des planches anatomiques passent…
Tout en faisant la noce
Et des sénats de ventriloques

Dansons la farandole
Louis n’a qu’une parole

Et puis comment veut-on que je précise

Dès que j’ouvre l’œil tout me terrorise.

Moi j’ai que l’extase, l’extase

Tiens, qui fait ce vacarme ?…
Ah ! ciel le beau gendarme
Qui entr’ par la lucarne.

Taïaut ! taïaut !
A l’échafaud !

Et puis on lui a guillotiné son cou.

Et ça n’a pas semblé l’affecter beaucoup

(de ce que ça n’ait pas plus affecté sa fille)
Mais son ami
Louis ça lui a fait tant de peine
Qu’il s’a du pont des
Arts jeté à la
Seine

Mais un grand chien terr’ neuve
L’a retiré du fleuve

Or justement passait par là
La marquise de
Tralala,
Qui lui a offert sa main
D’un air républicain.

Jules Laforgue

Des chemins clairs qui figurent sur le plan, parfois des noms de rues s’effacent, se glissent alors des impasses aux fonds baptismaux induisant une erreur de naissance…


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Des chemins clairs qui figurent sur le plan, parfois des noms de rues s’effacent, se glissent alors des impasses aux fonds baptismaux induisant une erreur de naissance…

Me levant du ban de mon existence, je me souvins que j’avais abandonné mes clefs dans l’appartement avant d’en claquer la porte. La cage d’escalier ne laisse plus passer le moindre bruit de conversation. Lurette qu’aux paliers, DO NOT DISTURB, ça balance comme à pari à la ficelle de chaque poignée de porte. A qui demander « Où par là ça mène-t-il ? »

Nib de Gaston, pas plus qu’un autre pour répondre au téléfon.

Angoisse.

Entrant dans mon jardin secret, derrière le gros cerisier, je trouve le rossignol faisant passe pour tous mes tiroirs

Soudainement un bruit de roues sort du plafond de la cage, le câble des cordes vocales de l’ascenseur, en se tendant, perdait les zoos.

Je me dis, ouf ça va renaître

-Alors qu’est-ce qui t’arrive ? demande Aurore

Passé le frisson d’impression d’au-delà, je reprends conscience. La petite fille de la femme austère est devant moi, elle me tend son sourire. Puis tourne sur les pointes. »Salto tout l’monde »qu’elle dit en riant comme un petit rat dans ses grands égards… Pas Degas n’apparait de derrière les rideaux. Donc pas de vieux salaces dans l’entr’acte. Les lumières me montrent le plafond.

Un émerveillement !

Il est empli de Chagall. Je tremble, pleure, l’émotion me coule des tripes. Plus de fantôme de l’ô qui paiera comme l’injustice l’exige. Il s’est fait avaler par le trou du souffleur. L’instant d’après icelui-ci me dit « Remballe les films d’épouvante, remonte l’heur à la voile, hisse la trinquette et tire un bord, cap au large. On déhale des cons, on s’écarte des lises, des étocs, des naufrageurs, des-on-m’a-dit-que-vous-êtes-au-courant, on casse la mire de la télé-bobards, des émissions qui montrent les richards dépouilleurs d’îles désertes aux SDF, genre la Tessier & Nikos and co, merde à vos bans comme aurait dit Léo !

Aurore me saute au cou, son parfum de gosse me tourneboule. C’te môme à m’sort la barbe de l’attente de la toison d’or.

Le Petit-Prince, son frère Théo au ciel, la p’tite soeur Line agnelle, les roses, les épines, le serpent et le renard, le désert, la serpette et la belette gonflent les binious genre fez noz que ça gigue du talon dans les Monts d’Areu. Me v’là r’venu à Brocéliande. Merlin assis au centre de la ronde clairière me dit :

« Vas ton odyssée jusqu’au bout de la confiance, elle cédera pas, t’es assez un Pi pour muter croyant en ta foi ».

La mer sort de l’épave et remet taire à flots

Du château de sable un don jonc tresse la corbeille de la mariée.

Le matin referme les portes de la nuit

Je la chevauche à cru

J’tiens d’bout

Niala-Loisobleu – 26 Août 2016

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Médiocrité


MEDIOCRITE

Dans l’Infini criblé d’éternelles splendeurs,

Perdu comme un atome, inconnu, solitaire,

Pour quelques jours comptés, un bloc appelé Terre

Vole avec sa vermine aux vastes profondeurs.

Ses fils, blêmes, fiévreux, sous le fouet des labeurs,

Marchent, insoucieux de l’immense mystère,

Et quand ils voient passer un des leurs qu’on enterre,

Saluent, et ne sont pas hérissés de stupeurs.

La plupart vit et meurt sans soupçonner l’histoire

Du globe, sa misère en l’éternelle gloire,

Sa future agonie au soleil moribond.

Vertiges d’univers, cieux à jamais en fête!

Rien, ils n’auront rien su. Combien même s’en vont

Sans avoir seulement visité leur planète.

Jules Lafforgue

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Non, je ne venais pas de faire un cauchemar

J’étais bien sur Fesses de Bouc

Triste réalité du temps creux

Résonance de l’absence

Ah mais y a des merveilleux poètes

si simplement beaux

qu’on faillirait ne pas les voir

si on s’attardait qu’à dire « j’aime » sans savoir pourquoi…

Niala-Loisobleu – 21/04/16