La vérité du drame est dans ce pur espace qui règne entre la stance heureuse et l'abîme qu'elle côtoie : cet inapaisement total, ou cette ambiguïté suprême. Saint-john Perse
De cette saison qui s’achève sans avoir montré d’elle que d’hétéroclites images sans rapport autre qu’un penchant pour la mort, je me place face à la porte de l’automne. L’esprit tout enfoncé au symbole. Conscient d’un nécessaire changement de renaissance, non pour refaire le monde, mais en sauver la nature pour moi-même et revenir aux fondamentaux
Des Marguerite en brasse
et du vain répandu
Becker avance sa clairvoyance et délivre
LA DÉLIVRANCE ATTENDUE
La fenêtre est tendre comme un couteau
Le miroir est profond d’épaules noires
on voit des pieds nus sous le rideau
et la route est très loin dans le mur
la tête coupée
est sur le lit
Je me rappelle ou je rêve
que ton front est comme ces belles journées
où il n’y a pas un signe de mort
où la lumière se rassemble sur les sources
le pont monte de l’herbe
et fait une grande blessure au-dessus de l’eau
le dormeur est toujours couvert
de ses paupières collées
comme des fruits privés d’air
les ombres sortent et laissent longtemps
leurs tempes contre les murs.
Lucien Becker
Ainsi du dessin naîtra la peinture, chair fraîche de la couleur de soie qui racine l’arbre, du cheval qui va au labour sans regarder d’abord l’âge et de l’oiseau qui du vent aspire la poussée sans chercher de renfort
L’enfant du mordant de Marthe et de l’Art de Louis
qui joint les seins pleins aux creux des mains et poile pour empêcher l’appeau de s’exhiber
Des maisons sur le pore la mère pour horizon
sans masque le fruit mis aux claies pour le goût d’apprendre à éradiquer l’intolérance dans tous ses exercices.
L’élégant Marco Oliveira (né en 1988) s’est fait connaître très jeune comme fadiste, s’accompagnant lui-même à la guitare, son instrument de prédilection, accompagnant à l’occasion d’autres fadistes tels que Hélder Moutinho ou Ricardo Ribeiro. Son répertoire et son style de chant dépassent cependant largement le fado. En voici un exemple avec cette chanson de l’auteur-compositeur-interprète espagnol Amancio Prada (né en 1949).
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Marco Oliveira | Tengo en el pecho una jaula. Amancio Prada, paroles & musique. Marco Oliveira, chant & piano. Enregistré sur un piano Schiedmayer du début du XXe siècle. Vidéo : Marco Oliveira, réalisation. Portugal, ℗ 2020.
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Tengo en el pecho una jaula, en la jaula dentro un pájaro. El pájaro lleva dentro del pecho un niño cantando en una jaula lo que yo canto.
Dans la poitrine j’ai une cage, Dans cette cage un oiseau. L’oiseau porte dans sa poitrine un enfant qui chante dans une cage ce que je chante.
El viento quisiera ser. El viento que pasa y deja un paisaje estremecido en tus ojos y en el oído el eco. El eco de una voz que viene de muy lejos y muy dentro de ti te canta que eres tú también el viento cuando pasa.
Je voudrais être le vent. Le vent qui passe et qui laisse dans tes yeux un paysage tremblant et dans tes oreilles un écho. L’écho d’une voix qui vient de très loin et qui, au plus profond de toi, te chante que toi aussi, tu es le vent qui passe.
Tengo en el pecho una jaula…
Dans la poitrine j’ai une cage…
La noche quisiera ser. La noche que con agujas de cristal teje tus sueños y el delirio que te enciende* cuando más sola estás y nada esperas, contigo a solas soñando el negro sauce** de la noche que te envuelve.
Je voudrais être la nuit. La nuit qui, avec des aiguilles de cristal tisse tes rêves et le délire qui t’embrase* quand tu es au comble de la solitude et que tu n’attends rien, seule avec toi qui rêve le saule** noir de la nuit qui t’enveloppe.
Tengo en el pecho una jaula…
Dans la poitrine j’ai une cage…
La lluvia quisiera ser. La lluvia mansa que cae como un rumor de manzanas en el desván de tu infancia lejos… Y las primas jugando a casa casa Para el ardor del alma la lluvia fresca en el valle del silencio.
J’aimerais être la pluie. La douce pluie qui tombe comme un bruit de pommes au loin, dans le grenier de ton enfance… Et tes cousines qui jouent à petite maison Pour la brûlure de l’âme, la pluie fraîche dans la vallée du silence.
Pero tengo en el pecho una jaula, en la jaula dentro un pájaro, el pájaro lleva dentro del pecho un niño cantando Tengo en el pecho una jaula, en la jaula dentro un pájaro, el pájaro lleva dentro del pecho un niño cantando, en una jaula, lo que yo canto.
Mais dans la poitrine j’ai une cage, Dans cette cage un oiseau. L’oiseau porte dans sa poitrine un enfant qui chante. Dans la poitrine j’ai une cage, Dans cette cage un oiseau. L’oiseau porte dans sa poitrine un enfant qui chante dans une cage ce que je chante.
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Amancio Prada (né en 1949). Tengo en el pecho una jaula (1988). *Chanté : envuelve (« enveloppe ») **Chanté : manto (« manteau ») .
Amancio Prada (né en 1949). Dans la poitrine j’ai une cage. Traduit par L. & L. de Tengo en el pecho una jaula (1988). *Chanté : envuelve (« enveloppe ») **Chanté : manto (« manteau »)
Comme toujours palpitant quand tu me ramènes à la grande vague hispano-portugaise « JE PLEURE SANS RAISON QUE JE POURRAIS VOUS DIRE »…
« Je pleure sans raison que je pourrais vous dire, c’est comme une peine qui me traverse, il faut bien que quelqu’un pleure, c’est comme si c’était moi. » M. D.
Σωτηρία Μπέλλου [Sotiría Béllou] • Αντιλαλούνε τα βουνά [Antilaloúne ta vouná]
30 AOÛT 2020
tags: Antilaloúne ta vouná, Eftychía Papagiannopoúlou, Αντιλαλούνε τα βουνά, Βασίλης Τσιτσάνης, Ευτυχία Παπαγιαννοπούλου, Σωτηρία Μπέλλου, Sotiría Béllou, Vassílis Tsitsánis
Septembre est désormais inéluctable. Mais la voix puissante et singulière de Sotiría Béllou (1921-1997) est là pour conjurer cette rentrée qui s’avance. Αντιλαλούνε τα βουνά [Antilaloúne ta vouná] (« Les montagnes me font écho ») est un rebétiko de Vassílīs Tsitsánīs.
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Σωτηρία Μπέλλου [Sotiría Béllou] (1921-1997) • Αντιλαλούνε τα βουνά [Antilaloúne ta vouná]. Βασίλης Τσιτσάνης [Vassílīs Tsitsánīs], paroles et musique. Paroles parfois attribuées à Ευτυχία Παπαγιαννοπούλου [Eftychía Papagiannopoúlou].
Σωτηρία Μπέλλου [Sotiría Béllou], chant ; Σούλα Δάκη [Soúla Dákī], deuxième voix ; instrumentistes innommés.
Vidéo : ΕΡΤ [ERT] (Ελληνική Ραδιοφωνία Τηλεόραση, [Ellinikí Radiofonía Tileórasi]), production. Grèce, date inconnue.
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Αντιλαλούνε τα βουνά,
σαν κλαίω εγώ τα δειλινά
περνούν οι ώρες θλιβερές
σ’ ένα παλιό ρολόι
κι εγώ τους αναστεναγμούς
τους παίζω κομπολόι
Les montagnes me font écho
Le soir lorsque je pleure
Les heures sombres s’écoulent
Sur une horloge fatiguée
Et j’égrène mes soupirs
Comme sur un chapelet.
Αντιλαλούνε τα βουνά,
σαν κλαίω εγώ τα δειλινά
Les montagnes me font écho
Le soir lorsque je pleure.
Στενάζω απ’ τις λαβωματιές
κι απ’ τις δικές σου μαχαιριές
λαβωματιές με γέμισες
και μ’ έφαγαν οι πόνοι
και στη φωτιά που μ’ έριξες,
τίποτα δε με σώνει
Je gémis sous tes blessures
Sous tes coups de poignard
Je ne suis plus que blessure
Éperdue de douleur
Et de cette fournaise où tu m’as jetée
Nul ne peut me sauver.
Αντιλαλούνε τα βουνά,
σαν κλαίω εγώ τα δειλινά
Les montagnes me font écho
Le soir lorsque je pleure.
Εμπάφιασ’ απ’ τα ντέρτια μου
κι απ’ τα πολλά σεκλέτια μου
κουράγιο είχα στη ζωή,
μα τώρα που σε χάνω
θα είναι προτιμότερο για μένα να
πεθάνω
Je n’en peux plus de ma souffrance
Ni de mes tourments infinis
J’avais foi en la vie
Mais puisque je te perds
Il ne me reste
Qu’à mourir.
toute danse étreignant deux fins lambeaux d’étoiles
les ciseaux de lumière après la
Tour
Eiffel
et le printemps déjà qui déjà déjà luit
traînant sous ces arceaux un corps toujours revêche ce corps enfin s’adjoint ce corps qui l’avait fui la chair où court le sang la chair de toute nuit et les courbes marquant le
trajet des mains rêches
obscur mangeur de jour ces deux mains unité
la longueur d’un maintien la chaleur des deux paumes
Fermer le temps présent le temps nécessaire à s’en purger pour se replacer au bon endroit, besoin de ça pour sortir de ce temps de merde où tous, hommes et éléments s’accordent pour conduire à rien. Cézanne en premier pour héberger la révolte constructive. Des murs solides et vivants chassant les faiseurs de mots maîtres de la phrase creuse. Puis Marguerite pour approcher la netteté allant au but en sachant que peu comprendrons, mais ce peu devenant le tout il faut le jeter. Je ne peux peindre un monde qui base sa vérité sur un mensonge. Le non-dit actuel s’en prend à tout sans mesurer. Ce sens étant totalement dépassé. Personne ne veut plus se reconnaître. Nous sommes dirigés par un homme qui erre et dans cette reconnaissance de son inaptitude pense à démissionner pour se faire réélire. Ce n’est même plus pitoyable, c’est la loi du néant, son pouvoir totalitaire. Je vais pas me pisser dessus et me vomir, non je veux arrêter cette déchéance au moins sur le plan personnel.
Arrêter juste pour séparer le désastre d’un suicide au profit d’un choix de l’ignorance globale qui se vante de savoir. Pouvoir se sauver et non vouloir le pouvoir d’en profiter. Internet héberge ce deuxième pouvoir, celui que je répudie.
Je ne veux pas perdre ma vitalité en vivant mon quotidien dans l’inaction d’aimer au premier chef. Le sujet onirique est affaibli par un autre virus. Celui d’une réalité matérialiste prête à tout pour occuper l’espace de marché. Réduite à ne plus pouvoir prendre en compte la stricte mesure de précaution.
L’économie mondialiste reprend autorité sur l’existence des individus pour n’être plus.
J’écrirai la couleur du vivre, la vigueur d’aimer isolé de la masse pas de mon idéal, pour sauver le seul concept qui vaille.
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