La vérité du drame est dans ce pur espace qui règne entre la stance heureuse et l'abîme qu'elle côtoie : cet inapaisement total, ou cette ambiguïté suprême. Saint-john Perse
« AUTAN OCCITAN 1 » – (Série dans l’EPOQUE 2018) – Niala -Acrylique s/toile 46×38
AUTAN EN GARDE L’EVENT
Ou l’on apprend plus tard que l’embouteillage d’une route pour gagner le soleil devait voyager plus loin pour initier le rire profane en montée aux sphères. Comme si le pays cathare tendait son pic à la base
Epreuve initiatique
qui franchit et affranchit sur le pointillé d’une frontière occitane
Un seoir poésie à l’accent chaud qui roule au-devant d’un mauvais virage
Autan le dire voilà un silence qui brasse à la montée de ses pierres comme un raisin foulé aux pieds dont le cru finira par exprimer la quête de l’abeille dans les tentatives du serpent au débusqué de son caillou
Si l’amour à la croisée des chemins Là où se rencontrent âmes et mains Qui se joignent – croyant à leur futur Il pourrait relier ses ouvertures
Et jamais de doux baisers ne se donnent Sans qu’un tendre bonheur ne s’abandonne Sur ces lèvres demeurées inconnues Et sans que toujours on tombe des nues
A la seconde où les regards s’épousent Tramant la seule étoile qui s’y couse Celle qui file en battements de cœur Elle garde une magique lueur
Magnétique musique du partage Qui aimante toutes les belles pages Du livre de la vie pour graviter De bohème en poème puis en beauté
De lire que je serais au point de m’apercevoir de la beauté de ta poésie aurait pu me mettre à terre, si je ne voyais pas là l’énormité du différent stupide qui a causé un dommage qu’il faut réparer. Jamais je n’aurais pu illustrer Les EPOQUES 18/19/20 ET 21 sans être inspiré par la grandeur qui fait la beauté de ta poésie.
Je ne peux , à moins d’accepter de ne plus vivre comme je l’ai fait durant ma longue existence, laisser cette oeuvre sur le bord de sa route. Elle n’a rien de commun avec nos créations séparées. C’est l’absolu que nous avons voulu atteindre ensemble.
Alors pour lever ce quiproquo, je déclare que ton art poétique est puissant.
Qu’il est d’une beauté totale qui ne peut se révéler qu’en face d’un silence où les mots voyagent à la conquête de cet espoir que le quotidien refuse mais que nous atteignons par symbiose.
Aussi il faut dire cette complétude n’existerait pas sans amour.
C’est amplement significatif.
Niala- Loisobleu – 27 Mars 2021
LA PEAU DU MONDE
Sur le fil du désir nous marchons vers un dieu. L’Éternité s’invente à chaque galaxie. Il faudra piétiner les banquises du songe, les vallées de l’espace, les mondes attiédis et les étoiles rouges où l’agonie s’installe, avant de parvenir au cœur d’un tourbillon, originel chaos préparant le cosmos. L’avenir quotidien saura peser nos âmes.
Sous l’écorce nous aimions l’arbre et sous l’arbre le vent. Ils voyageaient ensemble et traversaient les fleuves qui offriraient au loin l’élan de leur vigueur. Parfois leur ambition se perdait dans les sources pour mieux régénérer quelque très vieux désert où s’évaporaient des batailles dont les cris malgré tout étaient encore humains.
Quelquefois une étoile noire macule nos livres d’images, conférant à la maladresse une saveur d’infini comme ces portulans dont l’imprécision même faisait parfois surgir tout l’or d’un continent. Lorsque les galions de nos enfances grises auront pillé l’azur et vaincu l’ouragan, nous rentrerons chez nous pour créer des empires au fond de ces jardins qui nous faisaient si peur.
Bec, ongle, pince et griffe au partage du jour. Un règne lacéré s’installe en nos mémoires où le passé vacille au profit d’un futur à peine immunisé des à-coups de l’Histoire. Serons-nous les mutants des ruines ou du bruit que font la mort violente et le crime lucide ? Notre goût du bonheur serait-il perverti au point de maquiller toute vie en suicide?
Cherchant à expliquer comment naît un désert, nous avons commencé par le feu et la pierre, poursuivi par le vent, la silice et le quartz, pour nous perdre en chemin, à mi-genèse presque, en un autre désert plus vide et plus ancien, bien établi déjà dans son horreur parfaite. Désert civilisé, techniquement au point pour suicider le rêve et flouer la mémoire.
Mannequins effacés, pâles sorciers du doute, l’alchimie du futur envahit votre nom en diluant la mort dans le sang des vivants. Vous devrez affronter votre substance même où le poison se mêle à l’élixir du temps. Devien-drez-vous robots, golems ou androïdes assoiffés de revanche en vos corsets de fer ou cellules à venir d’un homme déjà mûr qui saura, mieux que vous, apprivoiser l’énigme?
Le froid sculpte au hasard des soleils de banquise montés dans le dernier carré d’un ciel vaincu. Un désespoir nous gagne aux fruits mal défendus, certitudes glacées des vérités acquises. Les planètes balancent en un cosmos qui enfle et nous nous épuisons à le suivre en secret vers les confins d’un dieu surgi de l’improbable, instant zéro d’un monde ou trop jeune ou trop vieux.
Un cerveau de roi fou boit chaque ciel qui passe au-dessus du chaos mis sur ordinateur. Le progrès bien nourri programme les famines, résiste quelquefois à la greffe du cœur. Nous autres, courtisans d’un souverain de plume, nous nous habituons aux bonbons de la peur, et quand il nous promet des rasades de lune, notre roi fou se trompe, et de siècle, et de mœurs.
Nouer le maillon d’eau à son maillon de sable fut longtemps le projet de ces minces pêcheurs qui croyaient au bon vouloir des vagues. Cette harmonie factice et corrodée de sel, nous l’avons éloignée sur ces bateaux en flammes porteurs de chefs vikings que dissoudrait la nuit. Leur âme calcinée flottait entre deux règnes où se distinguait mal le présent du futur.
Le temps voyage seul, oubliant les saisons que les grands migrateurs s’échinent à poursuivre en leurs dérives hauturières, poussés par la loi de l’espèce. Le temps voyage seul, faisant de notre vie une gravitation sans escale. Nous-mêmes deviendrons oies sauvages, cigognes, toujours entre deux nids, entre deux continents, mais notre unique loi sera la chute libre sur une orbite calculée pour nous maintenir en éveil dans notre rêve de vivants.
Des puits se sont creusés sous nos pas délébiles et nous ont digérés en un silence noir. Depuis, nos voyageons dans les boyaux du monde, sans savoir si le vide ou l’enfer sont au bout. Cette vie souterraine a collé nos paupières, érodé nos genoux, palmé nos maigres doigts. Nous sommes devenus taupes, racines, larves d’un royaume inversé où la mort a le temps.
L’oeil d’un dieu est inscrit sur l’iris de nos songes, nous évitant ainsi de mutiler le jour. Statues, temples, autels des religions plausibles continuent de bercer notre fuite en avant. Nous nous voulions chasseurs et nous sommes la cible d’étranges microscopes aux lentilles de vent. L’examen est clinique et la conclusion vague: on n’apprivoise pas les bacilles du temps.
La paupière des jours s’est fermée sur la ville, œil cyclopéen soudé au terreau de l’Histoire ou reliefs de festin laissés par les pillards. Nous ne témoignerons ici que de vestiges arasés par le soc, aplanis par le vent. Si des trésors existent, ils sont noyés d’oxyde et si la vie revient, ce sera en secret. Le laboureur triomphe en restant immobile de tous les cavaliers jadis maîtres en ces lieux.
Nous tous éparpillés en atomes de glaise croyons à ce noyau qui nous maintient debout, mais tout en ignorant au centre de quel fruit il affermit sa coque et nourrit sa matière. Certains furent tentés de briser ce noyau afin de déchiffrer le nom et le message. Un éblouissement leur tient lieu de cercueil. Pourtant c’est leur orgueil qui nous permet de vivre.
L’argile du rempart ne résistera guère au limon de l’Histoire amassé par le Vent. Votre sécurité tombera en poussière, peuples nés de la nuit avec du rouge au front. Le fleuve coulera sur vos années-lumière, vos enfants, votre blé garniront les tombeaux et l’or de votre foi ne servira, en somme, qu’à creuser un peu plus notre destin de sourds.
Cette géographie des taches de vieillesse, que nous nous surprenons à lire, quelquefois, sur le dos de nos mains bien à plat sur la table, est semblable, plutôt, à la cosmographie d’étoiles disparues dont la lumière encore est le paradoxal témoignage de vie. Il faut prendre le temps de mourir en avance pour mieux tendre nos mains aux tâches du futur.
Un serpent prisonnier du temps devenu pierre savait encore muer, complice des glaciers quand leur fleuve immobile inondait la matière. Il parvint jusqu’à nous ce reptile en dentelles, mordit notre présent de son venin usé, puis, malgré le sérum que notre ego distille, nous fûmes pétrifiés serpents à notre tour, affublés d’une peau qui ne convenait guère à cette chair à vif dont nous étions sculptés.
Dans une fête ancienne où l’irréel se danse, sous son masque éborgné d’un regard qui balance, une vérité bouge, une fuite prend corps. S’il fallait peser l’âme à l’aune de la mort, nous serions, au matin, ou démons ou prophètes. Mais l’âme a soif d’abîme et l’ange mord la bête. Visage tiraillé entre vide et paroi, nous ne perdrons la vie qu’en sauvant notre tête.
Nous labourions la vie avec plus de rigueur. Il fallait un ordre à nos rêves, une conscience aiguë de nos ahgne-ments. Le temps nous contemplait d’un œil géomètre quand nos calculs humains, que nous voubons exacts, se voyaient engloutis par des coulées de lave. Une ville sombrait dans un magma mortel, sépulture éblouie de nos consciences nettes, abbi pour notre rachat.
Un cerveau d’ouragan s’appropria le monde et le remodela selon ses tourbillons pour transformer la mort en sujet de légende. Le prix du sacrifice à la mémoire fut élevé. Vivre restait le but, avec ce goût du cataclysme que nous portions en nous. Les statues de sel se retournaient sur nos écarts et dans leurs yeux figés un dieu tremblait encore.
Dépositaires des secrets du ciel, comptables des apocalypses, ils étaient les veilleurs, ces anges du refus. Leur orgueil produisit des géants malhabiles, contraints de plier, à la fin, sous le poids du monde avant de gagner l’autre versant de l’éclair. Depuis, sur une terre lasse et repue de cadavres, nous tentons de rêver des genèses plausibles afin de déchiffrer l’écriture du dieu. Nous mitraillons la nuit de déluges en herbe, mais en ignorant tout de ce qui crée la main.
D’une liturgie vague ils célébraient leurs dieux sur
des autels usés par trop de paraboles.
Offrandes-bouquets secs, dons d’aliments moisis
deviendraient le viatique au voyage immobile.
Un néant casanier serait le substitut à leur éternité
enlisée dans le doute.
Respirez fort, ouvrez les yeux,
surveillez l’huile de la lampe,
La nuit des autres nuits envoie ses messagers.
Vous m’aviez indiqué le chemin
avec des portées de musique,
un soleil, une dent de narval.
Je suis venu malgré le poids du monde
et le feu qui nourrit le sang.
J’ai passé avec vous
tant d’années secrètes
que nos rides ont fini
par contraindre la peur à l’exil.
Elle reste avec son secret
tisse autour de sa tristesse
une toile d’aurore légère
que jamais le jour n’atteindra.
Les angles de son visage s’émoussent
dilués dans un désert doux.
Elle aurait voulu être aimée
pour le duvet de ses paupières.
Les vagues de l’espace ont rejeté nos dieux sur ces continents de l’esprit où le temps a changé de signe. Ils vivent en sursis leurs genèses salées, pèsent mal les apocalypses. L’enfer bout à leurs lèvres et leur œil ne voit plus qu’un univers-volcan dont tous les cerveaux fondent en purs diamants de deuil, noire immortalité. Nous balayons l’espoir infatigablement sur le seuil délité de nos consciences floues mais, sachons-le: l’enfer aussi a ses lois.
Nul ne voulait encore y croire:
les déserts se peuplaient de traces familières
semblables à des moments de bonheur.
Une eau pure irriguait la mémoire et des plantes
poussaient sur les cailloux du ciel.
C’était notre futur; il aurait l’expérience du passé
embelli par un regard d’enfant.
Repue de ciel, de vent, la mer était silence. Elle baignait ma nuit, l’immobilisait presque au fond d’une mémoire où des trésors durcis resteraient inviolés. Elle avait fait passer son souffle dans le mien: je glissais doucement vers l’éveil de ma race, redevenais poisson, paramécie, plancton. J’atteignis le grand large où rôdent les abysses pour y couler enfin dans un rêve éclaté d’où j’allais prendre forme et marcher vers le jour.
Vous aurez de la craie pour dessiner mes fuites sur
l’horizon poudreux qu’enflamme un cavalier
Je vous attends
Vous aurez de la mousse à calfeutrer les vides au creux
de mon cerveau en pleine hibernation
Je vous attends
Vous aurez un nuage où le ciel s’emmitoufle quand il
veut adoucir un soleil d’oeuvre au noir
Je vous attends
En compagnie de mes licornes familières
de mes Pégases quotidiens et pour aller chasser
le dragon ou la puce
Je vous attends
Notre ultime forêt il faudra la chercher parmi les algues bleues qui boivent le soleil au temps durci des grottes. La calcite et l’argile dressent là des colonnes dont le style appartient au seul hasard des pluies. Des traces de pieds nus y sont parfois visibles, des empreintes de mains: celles de ces chasseurs voulant signer les gouffres d’une terre d’éveil dont la foudre et l’aurochs se disputaient le poids.
Il y eut un nuage rouge et puis plus rien sur une terre
gaspillée par l’aigu des conquêtes. Les totems, qui
avaient fondu, ressemblaient à des bornes indiquant
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