ÊROS SUSPENDU


ÊROS SUSPENDU

René Char

La nuit avait couvert la moitié de son parcours.
L’amas des cieux allait à cette seconde tenir en entier dans mon regard.
Je te vis, la première et la seule, divine femelle dans les sphères bouleversées.
Je déchirai ta robe d’infini, te ramenai nue sur mon sol.
L’humus mobile de la terre fut partout.

Nous volons, disent tes servantes, dans l’espace cruel, — au chant de ma trompette rouge.

René Char

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Où que je vive


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Où que je vive

 

Où que je vive, je te vois
Toi, ton toit de tuiles et ta voix
Je vois des flocons, des Afriques
Le surplace de la République

Le cadran de la gare du Nord
Des mâts de bateaux, plein le port
Beaux comme des jeux de Mikado
Et un poisson rouge dans ton dos

Je vois l’oreiller de tes bras
Où que je vive, je te vois
Il était un jour plein de foi
Où que je vive, je te vois

Où que je vive, je te vois
La maison bleue qui nous tutoie
Et Venise et la tour de Pise
Le sourire de la banlieue grise

J’ vous vois Vancouver et Dakar
La musique des autocars
Sur la route de Casamance
Et des ponts d’Avignon qui dansent

Je vois l’Ardèche et Courbevoie
Où que je vive, je te vois
Il était un jour, une fois
Où que je vive, je te vois

Où que je vive, je te vois
Des pas, des rails, des convois
Des saisons, le Nil et la Seine
Le sang transparent des baleines

Je vois des caresses qui chôment
Dans le ciel fatigué des paumes
Un canal, un champ de tulipes
Et les pommes bleues de Magritte

Je vous vois, le bout de tes doigts
Où que j’habite, je te vois
Il était un jour, tant de fois
Où que je vive, je te vois

Allain Leprest

Dans l’Un certitude de l’Autre


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Dans l’Un certitude de l’Autre

 

Les recherches de la lune avaient cessé depuis bien avant la saison des pluies. La hauteur de l’espoir ne se calculant pas à la grosseur des bourses, se plaisait à dire un incroyant plus foi-yeux qu’un abonné de la grand-messe du dimanche. On peut être dans l’ombre sans rien perdre de sa lumière. L’image plus elle est hôte, plus l’altitude du sentiment se tient profondément dans la racine au sol.

LES BALUSTRADES DES PALIERS SONT UNE ALTERNATIVE AUX ESCALIERS, AFIN QUE LE SOUFFLE DEMEURE DANS SON APPARTENANT. VOUS ÊTES PRIES D’ALLER VOUS FOUTRE EN L’AIR LE PLUS LOIN POSSIBLE D’ICI

balançait la pancarte accrochée à la béquille de la loge de la concierge, absente par éthique pour  la profession.

Elle se penchait sur sa partie pétrifiée, en pose Belle au Bois-Dormant, les seins pointés genre clavier pour les veillées, « Alors, racontes… » quelques notes du Petit-Gilbert laissées vierges avec le crayon sur le bloc. Genre si vous passez, laissez-moi un bécot.

On pourrait dire que cette veille tenait de la recherche d’éternité. Ce monde vide stigmatisant plus facilement qu’il porte à croire. Hélas. L’innocent est pris en charge dès la naissance par l’Education (Nationale et Privée). Qui le moule si bien, qu’à la fin de ce qui s’appelait autrefois ses humanités est aujourd’hui une usine à clones. Certainement la plus prospère d’une économie si rapia, que l’Avare est autodafé.

La poussière docte-crasse étendue de tout son long, l’armada plumitive prit le bouillon quand son encre passa par le net. Des ténèbres on vit clairement l’imposture du sentiment. Alors l’Ailleurs sortit l’arche de l’amer.. Un Noé pour les poètes, une île pour les naufragés, ces Mutants que personne ne peut atteindre, malgré tous les moyens de destruction connus et avenir que l’Homme est seul à connaître de toute la race animale la plus cruelle.  Revoyant Cocteau – merci Barbara – parler de l’écriture paradoxale qu’il eut dans un coma profond, j’ai trouvé qu’il y avait plus d’amour que de religion dans cette poésie musicale. L’Art c’est le Sacré. L’Artiste n’a jamais été d’ici. Ceci, mon Coeur, m’explique la pugnacité de vivre en aimant. Merci.

Niala-Loisobleu – 25 Janvier 2018

Etat des Lieux 16


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Etat des Lieux 16

Dans ce matin qui traîne à lever son jour, au cellier je pense hâler. La pomme qui attend toute fripée sur sa claie a bien plus à raconter que le vernis de ce fruit mis en montre à l’étal.

Tes seins me remplissent l’assiette comme des yeux de gosse découvrant l’arbre, ils cavalent dans ma tête, attelés en équipage à ma pensée-voyage.

Je t’ai dit le seuil du bout du couloir. Comment un éboulis de ciel noir aurait pu le noyer dans sa pluie ? A moins d’écrire de vent sur le sable, je ne vois pas comment ma bouteille n’atteindrait pas la côte où tu me tiens, semble–il effacé de ta communauté.

S’il reste temps d’amour en moi c’est essentiellement la faute à ma folle constance d’imbécile s’efforçant d’être heureux. Survivance instinctive entre les barbelés flottants des pluies dérivantes…

Niala-Loisobleu – 25 Janvier 2018