UNE INFINIE TENDRESSE – CATHERINE RIBEIRO


UNE INFINIE TENDRESSE – CATHERINE RIBEIRO

Brisée mais non vaincue
J’observe mes entrailles
Et mon coeur et mon corps
Partout couvert de traces
Par nous ensanglatés
Par nous mes hommes, mes femmes
Par vous mes tant aimées
Par vous mes libertés

Oh, donnez-moi, donnez-moi
Dix hommes desespérés
Oh, donnez-moi, donnez-moi
Dix hommes desespérés
Oh, donnez-moi, donnez-moi
Dix hommes desespérés…

Je suis dans l’ombre le reflet
De vos vies sacrifiée
Ma liberté dépend
De vous entièrement
Vos mots vos désespoirs
Sont forces vives en moi
Mes craintes, mes angoisses
Vos raisons d’espérer

Oh, donnez-moi donnez-moi
Cinq hommes désespérés…

Je connais nos faiblesses
Déclins crépusculaires
Formidables courages
Que nos vies en survie
Brûlons les abattoirs
Levons nos poings serrés
Craquelons nos carcans
Déchaînons nos enfants

Oh, donnez-moi, donnez-moi
Deux hommes desespérés
Oh, donnez-moi, donnez-moi
Deux hommes desespérés
Oh, donnez-moi, donnez-moi
Deux hommes desespérés…

Donnez-moi, donnez-moi
Des hommes desespérés
J’en ferai des montagnes
Des soleils, des brasiers
Des puissances d’amour
Des infinies tendresses
Des sexes gigantesques
J’en ferai des grands fours

Des aliénés d’amour
Des armures de combat
Des fous de poésies
De grandes symphonies
Nous serons là vivants
Témoignages vivants
D’un amour infini
D’une infinie tendresse

BIENVENUE AU JARDIN 1


BIENVENUE AU JARDIN 1

Toujours au bord du chemin de retour à l’écurie, le cheval passera par le lavoir se rafraîchir la mémoire

Bientôt 22h30 la peur de se manquer plus forte à cet endroit du ventre où les liaisons nerveuses se rencontrent empressées

un creux d’omoplates prêt à déshabiller la montée de toutes les fragrances de chaque mouvement osseux de la moelle

Le mollet est dans la course derrière le papillon sorti des sacoches en diagonale. La tête qui s’enfonce change de visage au fur et à mesure que la position varie de genre. Et de l’herbe où la menthe approche verdissent de nouvelles contrées.

Niala-Loisobleu – 8 Mai 2022

DOUBLE-COQUE


ODILON REDON

DOUBLE-COQUE

Antique navigation autour du bleu des maisons-blanches, au rivage de l’île où le prao me dépose

le silence des chiens dans mon transport d’enfant en me couchant au pied de la porte, a semé un trouble dans la lecture du destinataire des signaux lancés de l’embarcation

à qui s’adresse l’ohé-codé du navire et à quel genre

l’émoi qui porte le tapis à décoller du sol en toute bonne foi, doit être mis à la bonne température pour continuer son bon voyage dans le bon cap

L’atelier s’est ouvert ce matin sous la pulsion heureuse d’Odilon.

Niala-Loisobleu – 2 Mai 2022

LE NUAGE SAUVAGE


LE NUAGE SAUVAGE

Des germes en guise de fenêtres pour les récoltes ayant un sens navigable, qu’il s’agisse de se faire remorquer par l’envie qui choisit de se faire fluviale où la comparaison mythologique de cette main pariétale qui s’attoucha la caverne pour combattre un froid que le feu ignorait en corps

Les grands boulevards des rives transversales avant la naissance du cinéma n’ignoraient rien du muet, pas plus que le mime Marceau et ses gestes blanc de blanc en lumière noire

Avant Gutenberg la craie existait dans les terres à vigne. Que d’histoires vaporeuses ont t-elles mises en étiquettes sur des fillettes et autres dames-jeannes

Devenu vagabond dans tes chemins broussailleux je dois dire que de tous les jardins aux hautes-herbes tu demeures le seul où je ne me soucies jamais des bêtes rampantes. Les grenouilles y abondent, j’aime quand elles battent les cigales au crochet mais devenu spécial depuis que l’ennui menaçait aux veillées je suis plus aqueux d’arbre en arbre que le premier essai de poisson-volant

Il y a autour des troupeaux cet instinct qui privilégie le musc autour des jarres

L’argile dont tu es faite me tourne le sang brut ou verni par passion , l’aspect décoratif de ton utilitaire devient une forme de culture où l’humanisme dit sans se taire

Je me refuse à croire que nous ne faisons que passer tant le vide de ce qui se développe se moque de ne rien garder. Tous ces enfants nés de multiples erreurs à quoi ça serre ?

Niala-Loisobleu – 28 Avril 2022

« LA FEMME TAPIE DANS L’ATELIER » – NIALA 2022 – ACRYLIQUE S/TOILE 61X50


« LA FEMME TAPIE DANS L’ATELIER »

NIALA 2022

ACRYLIQUE S/TOILE 61X50

Les chercheurs d’hors ayant colonisé, l’art se trouva en quête du Mont dit Parnasse dans sa baie débarrassée des anges

S’étendit alors ce tapis-volant doux elle s’allongea dans l’anémone correspondante à ces deux-là, légende de beauté gâchée par l’absurde évolution de société

Prenant la manivelle du chevalet elle fit du peintre l’encrier par où sortir de l’impasse

Olympe d’un sport de combat qui rougit de bleu tendu de l’éperon vers l’obstacle

Surréalisme émancipé qui franchit l’inaudible, l’absence d’une sensualité forte d’érotisme atteint, le sourd de l’oeil vers franchissant, le doigt atteignant la cuisse au plus profond, l’herbe sauvage qui dévore les tontes polluantes et gagne au rêve des jours poursuivant les nuits sans interruption

L’amour cause tout seul leur poésie

elle est là

son lin cotre l’autre.

Niiala-Loisobleu – 28 Avril 2022

AURORALES


RAOUL DUFY

AURORALES

Contre mont d’une bouffée

ouverte à deux battants te descendre de cet en droit de Seine d’un collège de France pour un seul havre sur estuaire

Deniers voiles au pied d’Etretat porche de Claude Monet sur Givenchy iris flamboyants lâchés de la verrière de St-Lazare bon apôtre depuis le confrère parisien Dufy que les chevaux ne fréquentent pas Vaugirard mais Chantilly

Ainsi du premier train d’où je pars une maison retrouver à la sortie du grand virage

du jeune Mai en clochettes (en têtante odeur)

Nos enfances arrimées en un début de phrase que ta main continue d’écrire et la mienne passe au bleu des lavages au bout d’Avril qui pointe cette grande herbe folle pour tenir le sel en fleur au sable.

Niala-Loisobleu – 28 Avril 2022

ACTES PAR MICHEL DEGUY


LA DAME EN JAUNE – AMEDEO MODIGLIANI

ACTES PAR MICHEL DEGUY

préparatifs de repas de mariages de passions de toilettes de maison de rangement d’opinions ils se tassent les uns
à côté des autres

redresse enfin monte écouter le chef d’exode qui d’un geste les décapite ouvre l’ouïe à l’absence puis greffant une parole à leur corps les ravive

Moïse confié aux phasmes
Invente pour eux leur homologue
La ville le peuple l’histoire

Voyons l’esprit nomade allons l’accueillir
Avec honneur avec préparatifs
Sortons au-devant de lui est-ce lui

Sur le chemin tout le jour qui monte à
Damas
Sa voix reconnue comme la voix d’un autre
Alors entra ce qui était là
Les murs firent un pas en avant
Les meubles se présentèrent dans l’horloge ininterrompue

Le silence fut chez lui

Ce que ça coûte d’écrire, comme vous dites, vous ne le soupçonnez pas, le taedium, l’endurance du jeûne.
Tristesse, te voici.
Je te reconnais à la lisière de l’orage avec tes habits de
Sologne.
Oui, l’humeur vague où vous baignez je la crispe en paroles; mes yeux sur vos épaules pour vous aviser :

une certaine attention que vous n’apprîtes pas, et c’est pourquoi la sourde déception vous entoure souvent.
Ce qui au vol vous échappe, je suis là pour vous le dire — trop tard.
Il vous a échappé ceci, qui s’est posé pour moi comme une semence de platane; ceci qui fait que je peux saluer la tristesse : il y avait je ne sais quelle résignation de la
très petite fille pendant que la mer cernait cette dune avancée ; le large évacué soudain comme le mail sous l’orage, et tandis que la bouche d’un oncle retombait, un de vos
fils rejetait sa mèche en silence; il y avait l’angle de son cou et l’automne amené de force par l’océan comme un tri de taureaux camarguais; tout ce que vous ne savez pas
joindre et qui vous tourmente maintenant comme un profond parasite; ces relations rapides dont vous êtes victime; je veille, vous me trouvez silencieux.
J’appelle la circonstance porche de septembre.
Vous me trouvez taciturne, j’attends comme un serviteur d’accueillir ces lignes que vous négligez; la douleur même de mon épaule et l’oisiveté d’un enfant qui transforme, le
temps d’un dactyle, la chaux en mur lamentable; l’entrée de la mouette de dos dans le taillis de l’averse; l’éternel retour, fugitif, inattendu, des motifs dans notre cirque de
courbes, il me faut veiller sur la lampe à huile pour l’attendre tard et qu’il me trouve prêt malgré tout à remarquer le signe rapide dont il honore; vous êtes sombres
parce que vous n’avez pas su — vous en êtes innocents, et pourtant malheureux — que c’était à saisir, ce bas aparté contemporain d’un if qui se rejette, et, j’y
reviens, les deux bras silencieux de la très petite fille acceptant soudain sa mère et son père, mais la fenêtre battait, le gardien des vaches siffle, une main retombe au
premier plan, et ce geste pour chasser l’insecte, qu’on prend pour une larme, et voici la tristesse entre ses deux parois qui nous invite à traverser.
C’est à quoi je m’emploie.
La tapisserie défaite et retissée, l’étrange filet tendu pour vous mais vous ne le relevez pas, de silhouettes de contes, de rameaux en couleurs, d’alertes chez les oiseaux,
d’entrailles de jusant, de pages écorchées, d’assonances fanées qui revivent, car tout est rencontre beaucoup plus surprenante que celle d’un tesson et d’une fleur dans le
même réseau, et l’art de nos époques rejoint ce qu’il y a, la concroissance instantanée de regards et de branches, ces alignements d’amers : votre manche, le bouton noir de
la fenêtre, un cri de gibier; cette carte marine changeante : quelles hauteurs de tons différents dans le faisceau qui se défait aussitôt de nos phrases, on dit «
conversation », le vent ouvre un livre, et c’est
Pindare que la couverture recache, un avion s’enivre, la voile rouge de
Thésée double le cap de
Branec, la chanson à la mode croise la rue, les sœurs échangent des propos méchants, tristesse te voici.

Art poétique

Le corps et sa charade
Quand le vent s’enroule dans les veines
Un vivant crucifié

Le haut lui passe, un tuteur aux épaules
Ii marche pendu
Contre la pesanteur

Le nom et la chose

Disant à son fils le nom d’une fleur

(S’il n’oublie pas son premier vers le poème décline)

Liseron mais pourquoi, fragte er,

Cette fleur ne s’appelle pas blanche?

Albe liseron grimpacée

Le nom qui convient mimerait quelle genèse

Le voyage

Au pays où les hommes sont pieux

Et la lune croissante
Les morts les corbeaux les cyprès fortifient ensemble
Un argument contre l’idéalisme (j’ouvris un livre sur la déportation : celle à qui fut donné de vivre dans son tombeau ses jambes se séparaient)

L’œuvre et le nom

L’Aurige au visage d’Aurige

Doucement staring at

(toutes levées vers lui les consultantes

cerclant sa figure orbitante)

Enseignait que l’œuvre ne déçoit pas son nom

I^e poème et son espérance

Entre l’or et le ciel un grand vent

Il rendrait la justice sur la litière du bateau

Les oiseaux sans compte auguraient

Ce qu’un poète a fait

Un autre ne peut le défaire

Le mot chargé d’horreur, d’aimant
Prête son nom à ce qu’il intitule
Nef chargé de sel, de distance
Prête son nom au bateau confondu avec lui
Tandis qu’il passe en secret alliance
Avec bleu — lui déguisé en échantillon —
Ils tolèrent le commerce fructueux
De leurs homonymes pseudonymes

(Topposerais-tu, lecteur (ici tutoyé comme naguère), lecteur que les statistiques disent soupçonneux envers les vers, t’opposerais-tu à ce que nous feignions, non sans
jovialité, de distinguer entre types de poèmes?)

Poème pour (re)poser questions qu’on ne pose plus en dehors du poème, même pas la « phénoménologie », qui doit choisir ses phénomènes,..

Les chiens vont sur la terre comme nous sur le tapis

de la mosquée
Pour courir « comme eux » il faut le long métier

d’athlète «
D’un bond » l’un, s’il est distancé, un chien
Rejoint silencieusement l’autre
II n’est pas lourd
Mais simplement comme un bateau ou plutôt
La terre est une étrave et leur course la houle discrète
Que veut dire ergo la lourdeur des hommes?

Il y a aussi des histoires de famille :

Souvent quand elle ferme la porte
Ma fille rentre plus précoce
Elle porte son image devant

Comme le feu dans la férule

Visages apparentés font comprendre les masques
Un souffle de verrier creusant le plasme les promut
Vide enceint d’os la face comme la terre
Que tu t’excentres en vain pour voir
Le masque des «
Deguy » des «
Balubas »
Devant « soi » crocheté à la cimaise de l’axis

De toi tu parles à la première personne
L’eau me coulait sur la bouche
Et c’est peu supportable

Des notes prises au cours de vivisection quotidienne :

Les greniers du ciel se remplissent

La mort dans la main gisante se réveille

Les jours un fardeau de bûches
Qui disparaît par le col des épaules

Les yeux se rejettent
Avant l’os qui va suivre

Le stère du temps s’écroule
Comme un visage du
Greco

Des fables :

Traité de l’équilibre des liqueurs

Entre les paumes le vase d’air, entre les côtes
Le vase de bronches, entre les ailes ce vase,
Entre les hanches ce vase d’arachide, entre
Les ailettes ce vase d’os fin, entre les myocardes
Ce vase de sang, entre les amis ce vase de cendre

Entre les lèvres ce vase courtois, entre les oreilles ce
Vase de lignes, sur la tète cette urne bleu ciel
De sorte que si tu renverses un verre les femmes s’affolent

Des moments de nostalgie :

Fin dans les villes sur le dos
Du fleuve d’où la ville se découvre
Ovide
Lucrèce
Gœthe
Suarez
La
Renaissance la
Rhétorique
Hardes qui vêtent sur les ponts
Le cynisme qui change d’échelle
Sous l’urne bleue des restes du ciel

Des autoportraits :

C’est fait de la même manière un endroit

Rio quand vous y êtes ou
Neuville ou
Lima

Le linge de
Cusco d’églises sur la pente

Les naïades
Varig dans les agences transparentes

Le grain des bords le temps de tourner la rue

Je ne peux congédier le grand souk du transept
Il n’est fidélité dont je ne sois capable
Ici des hommes qui s’appellent
Rivière

(Quand deux poètes se font face

Il vaudrait mieux que ce fût

Deux lutteurs turcs à culotte graissée

Oiseaux du même sexe étonné

Eux s’évitent comme deux métamorphosé»)

Des moments de rêverie, portée au refrain, au blason, au souvenir :

Où la
Loire abrite
Comme un nuage
Où la carte ressemble
A la carte du tendre
Le
Loir et
Montrésor

« ô tours ô chambres ô femmes ô cavaliers ô jardins et palais »

Cette affluence que
L’enfant doit voir
Du féminin et de son masculin
Cet échange que l’enfant doit savoir
Du masculin et de son féminin

Car la rivière est
Loir

Et le fleuve est la
Loire
Tandis que dort leur homonyme
Dans l’autre règne et dans l’autre saison

« ô tours ô chambres ô femmes ô cavaliers ô jardins et palais »

Jeanne est un synonyme

Une femme une rivière

Où s’agenouille le lavoir

Au creux de notre histoire

En cette langue patriotique où riment

Loire gloire et croire et
Loir et soir

« ô tours ô chambres ô femmes ô cavaliers ô jardins et palais

Non des fleurs ou des songes

Mais cherchant le langage de langue

Car si j’écris victoire

Ce n’est pour que vous voyiez rouge

Mais pour que vous entendiez
Loire

« ô tours ô chambres ô femmes ô cavaliers ô jardins et palais »

Et, pourquoi pas, donc, des jeux d’anagramme :

As-tu remarqué comme les bêtes tiennent leur distance?
A peine entrons-nous, elles se dérobent, reculant jusqu’aux bords : corbeaux, cervidés, chats même, ces ailes entrevues qui décroissent; de sorte que pour les voir il fallut
les lier à la maison, poissons qui détalent, bêtes évanouissantes tant que les enfants ne savent pas leurs noms et qu’ainsi, vivant sur la terre, elles demeurent
inconnues.

Le loup alors, le loup que des lunettes même ne suffisent à rapprocher, et qui se métamorphose en berger dès que nous l’encageons, le loup posé sur la lisière de
la nuit entre chien et crépuscule, le loup serait un des noms de la bête incapturable ; plutôt, il nomme l’imminence de ce qui nous frôle, la noirceur, tout près de
nous, de toute quasi présence à contre-jour; car la lampe dissipe l’ombre, mais il suffit d’un couloir, d’un resserrement, de quelque coude qui cache la vue pour que les’ enfants
pressentent son embuscade.
Et pour chacun quand il s’agit de paraître dans une identité défiant toute connaissance, à la faveur de la fête on se masque avec sa peau.
Le loup dévore son antonyme la poule blanche, ronde, étourdie ; son blason contrasté offre cette étrange figure de l’intérieur qui échappe à toute
révulsion : sa peau retournée ne le livre pas; la mort ne le menace pas.

Aujourd’hui que l’homme-loup de
Frazer ou de
Gordon pend dépecé dans les musées de l’Homme, l’enfant et le loup, l’enfant-loup en un comme le
Mino-taure, que la chronique inquiète tire parfois d’une forêt-monstre du
Dekkan, l’enfant qui surveille les bonnes versions de la fable, l’enfant-joue, l’enfant qui se change en cache et que fascine la simple irruption, pareil aux insectes qui se médusent par
leurs ocelles, l’enfant dont le cri de jeu n’est qu’une longue assonance au loup, l’enfant hou-ou, pour lui le noir est métaphore du loup, tout lieu reculé son anagramme…

Le loup de profil, figure de ce qui va surgir de tout angle, le loup en oreilles, jaloux triangulaire omni-absent comme la face cachée des choses, doublure ombreuse au verso de ces
retournements même qui cherchent à débusquer tout le non-vu et s’imaginent que l’inouï va bientôt être tiré au clair, c’est de son pas que s’approche, la
langue l’atteste, à la faveur de l’obscur tout l’envers innommable dont le secret ne peut pas être levé.

(Que le poème enveloppe une valeur de grammaire première, refondation de tropes, naissance de l’usage ou pouvoir de la langue dans ses possibilités.)

Maintenant

Elle peut venir à tout instant

«
Maintenant nous voyons en figure »

Il n’y a qu’une seule figure

La genèse est de mise :

Nous sommes dépossédés —

De la distance du génitif

Comparution
Comparaison

Maintenant elle peut paraître à tout instant

«
Cette chose formidable

Disait l’Homme-qui-rit
Une femme en son nu »
Métaphore est anagramme
D’Aphrodite anadyomène

O promise ô saisissante
Le n’-approche-pas de ton lever
Met en état le poète dessaisi
De soutenir l’apparition

«
Comme en un jour de fête »

Le poème commence fête rythmique par son ouverture ouvragée qui fait le silence, et nous aurons des mots pleins d’odeur légère…
Car un poème est une sorte d’anagramme phonique de ce « mot de lui-même » qu’il ne livre pas autrement, ce mot crypté en lui comme l’acrostiche sonore qui se cache,
cette arcature qu’il cherche en avançant comme le sourcier de sa propre source, une sorte de variation paronomastique sur son propre ton-clé qu’il fraye aveuglément à
soi-même; le poème se fait sonner pour ausculter son cristal.

Michel Deguy

ENCOMBREMENT


ENCOMBREMENT

Maintenir son espace dans les angles

sans le brider au milieu

la tête enfoncée dans son choix

intime volonté du premier instant qui traverse les mains au contact du matin….

Niala-Loisobleu – 23 Avril 2022

DERNIERES NOTES


DERNIERES NOTES

Le fil de la phrase est au pied du mur sans que la seule mouche qui tourne à cette heure n’est de rapport avec elle. Le cendrier sur la table à coupé court à son activité quand l’entretien s’est arrêté. Ainsi les choses s’arrêtent où continuent d’elles-mêmes

Des trains passent sans qu’on sache comment et pourquoi on a fait une partie du trajet avec certains et pas avec d’autres. Pourtant il arrivent sans qu’on y pense que les choses tiennent ensemble. C’est rare, surtout dans les conversations à deux où chacun se parle à lui seul

Suivre un oiseau comme on s’attache à savoir jusqu’où ira le nuage qu’on regarde, ça remue de l’arbre jusqu’au reflet qui passe devant les vitres. Un instant la fleur de la jardinière devient perchoir, ou le linge qui sèche passe une manche autour du bras de l’oiseau

Le temps en se laissant prendre par le rêve sera sorti d’une habitude pour innover. Ainsi je peux sortir de chez moi sans savoir et aller plus loin que si j’étais monté en avion

Des gens vont dormir au cinéma , pendant que d’autres gravissent la Tour Eiffel à pied par l’extérieur

Il faut que je fasse la liste de mes fleurs on va pas avoir de soleil durant plus d’une semaine, il faut à manger pour les abeilles.

Niala-Loisobleu – 21 Avril 2022

Là où nous nous habitons


Là où nous nous habitons

De la grande bassine à fleurs du soleil où nous habitons, à trois gouttes de l’estuaire, toi tu es la jarre à trous de la graine à fraise que j’aspire à suspendre, la dotant d’ailes pour que son espace ne soit jamais limité

Aucune ombre n’aura atteint le sol , les sables du désert ne comptant pas puisque ta goutte d’ardoise y est imperméable et que le gué qu’elle forme ricoche des marées aux échelles que ta réflexion dresse

Les premiers bourgeons des racines sont sortis avant que le chien ne prenne son élan jusqu’au tertre, tandis que les tuiles s’ocrent au feu du soleil

Ruisselantes tes vertèbres ont puisées la palmeraie des argiles des derniers grands forts de l’Atlas

Tes chameaux ont ouverts la route de la soie, j’étais sur l’échafaudage de ta poitrine, si haut que mes

yeux ont pu apprendre l’autre rive avant d’y entrer

J’en ai gardé la clef universelle, celle des petites maisons blanches qui logent les guitares à l’étage des nuits d’amour où les dallages sont couverts de coussins pour l’assemblage des peaux

La nuit quand tu dors, collé à ton moucharabieh je sirote ta respiration sans craindre les grands fauves qui vont boire

Et laisse les matins venir t’écouter au centre de l’émotion qui t’entoure

Peindre n’a pas d’âge

j’ai commencé avant d’apprendre

laissant ma chair de poule couver les oeufs de l’imaginaire qui sauve de toutes les pénuries et refuse les guerres.

Niala-Loisobleu – 19 Avril 2022