J’ai pas d’regrets – Serge Reggiani/ Boris Vian


J’ai pas d’regrets

Serge Reggiani/ Boris Vian


J’ai pas d’regret
D’avoir fait c’que j’ai fait
Je pouvais plus vivre avec sa peine
Jetez-moi la pierre
Si vous n’avez jamais
Tant souffert comme moi je souffrais
Par grande misère
Elle avait oublié
Ce que c’est pour de vrai quand on s’aime
Mon soleil d’hiver
Mon eau fraîche en été
Ma Nelly… je l’aimais… je l’ai tuée
Emmenez-moi
Dans toutes vos prisons
Mettez-moi dans le fond d’un cachot
J’y vais pourrir
Et j’y pourrai mourir
Car je n’ai plus de goût pour le jour
Mais j’y r’verrai
Lorsque je serai seul
Mes premiers vrais cadeaux de mariage
Sa main dans la mienne
Et son corps dans mon lit
Et son souffle mêlé à ma vie

Couplet
Cette complainte que j’entends
C’est un air de limonaire
Qu’un invalide débonnaire
Me serine en passant
Fait divers sans apprêt
Tragédie élémentaire
Histoire éternelle et sommaire
De pauv’gens qui s’aimaient


Son coeur, mon coeur
Et l’espoir qui se meurt
Le travail peu à peu vous sépare
La nuit, le jour
On se cherche toujours
Et l’amour crève au fond d’une cour
Vous qui souffrez
Fallait pas vous aimer
Fallait pas écouter les poètes
Souffrir à deux
C’est pas plus merveilleux
Que d’souffrir sans personne et sans feu
Et vous gueulez
Et vous vous entêtez
Moi aussi, je veux rire à la fête
Emmenez-moi
Ne m’abandonnez pas
Je veux mordre au bon pain de la joie
On reste en plan, et l’amour fiche le camp
En tournant sur un air de manège
On reste là et l’on ne comprend pas
Et l’on pleure une vie qui s’en va…

Source : LyricFind

Paroliers : Benjamin WALTER / Boris VIAN

A L’EAU REPONDEZ-MOI


A L’EAU REPONDEZ-MOI

lci et là, tous ces regards qui balancent des mains

Leurs fleurs artificielles en bout quai

Et l’atmosphère noyée dans le canal St-Martin, l’Hôtel du Nord dérive

Sur l’assiette faïencée de la statue équestre le roi en rit et tombe poignardé, ail

Le pari actuel ne vaut pas une messe

Miracle dans la cour de l’école Roberto professe l’insolence

Ah larmes au secours

Pendant du marronnier la fleur en grappe du poème rosit dans la rouille des saisons

C’est dur pour l’Adam

Mais l’Eve son aube aux genoux communie.

Niala-Loisobleu – 18 Janvier 2022

SENSITIVE EMISSION


SENSITIVE EMISSION

Du jour en début d’éveil sortent des manifestations qui se sont trempées dans le catalogue des Allégories. Façon propre à l’épiderme de sentir la rosée venue au pied de sa mise en marche

Le premier moulin tourne l’évent du premier galop

Sur le banc deux amoureux tête-bêche se donnent à boire sous la quille du bateau qui passe

Debout sur le trapèze prête à jeter les mots rebattus, la poétesse remonte depuis l’enfance pour donner au peintre matière à retenir le mouvement du pétale que la tige soulève du chant sec

Quelque chose est à se défaire de la pesanteur

la voile se détache du corps-mort au passage des oies-sauvages

Apparaissent les formes de ta nudité

tu découpes l’horizon

Bouche pleine de ta langue je pose tes odeurs intimes sur la palette.

Niala-Loisobleu – 18 Janvier 2022

TRESSAGE D’ATTENTES PAR MICHEL BUTOR


TRESSAGE D’ATTENTES PAR MICHEL BUTOR

C’est un provençal qui rêvait de pluies normandes

A l’ombre de vieux imprudents sublimes

Dans les pérégrinations des solitaires en convoi

Entre la précipitation et le délai

A l’écoute du sensible aux aguets du balbutié

Dans les investigations des laboratoires en détresse

Entre la lenteur et l’explosion

Astronome chroniqueur enlumineur éclairagiste

Dans les révolutions des pays en exil

Entre le paraphe et le commentaire

Calligraphe parodiste portraitiste météorologue

Trouvant le germe où d’autres n’avaient fouillé que des tombes

Entre l’aspersion et la bibliographie

glossateur artisan jardinier constructeur

Trouvant le dialogue où d’autres n’avaient prévu que la joute

C’est un écrivain qui transcrit les peintures pour la rumeur

Patient fouineur aventurier organisateur

Trouvant le passage où d’autres n’avaient bâti que des chicanes

C’est un peintre qui interroge les écrivains sur les peintres

Au fil du foyer au coeur de la marge

Trouvant l’oeil ou d’autres n’avaient cherché que des échos

C’est un parisien se baignant dans des pépites d’Italie

Au soleil de jeunes mémoires imperturbables

Dans les multiplications des imaginations de l’amour.

Michel Butor