D’UN AUTRE COMME DE LIN


D’UN AUTRE COMME DE LIN

A la remonte des toiles chevalet attelé

fleurs bleues du lin

un oiseau à la charrue

Tant mort de l’absolu les feuilles descendent des branches se tapir

sur le chemin marqué de nids de cigognes

Pas loin des cabanes où les huîtres tiennent leur perle fermée

aux colliers des cuisses des vagues amarrées basses autour du phare

règne une certaine pagaille

On aurait vu de la jetée venir une baleine, l’évent porteur d’eau, grâce au signal ultra-son des déchets plastiques

Nous sortirons des enfants de maternelle les faire boire à l’Île de Sein

après dans un conte de Noël on leur montrera la paille dans l’oeil qui crèche chez Nicolas

Et puits s’il en reste on remontera la vérité du seau, s’il est possible de filtrer les boues de cochon, marée-noire actuelle qui arrive de loin pour séparer les genres violemment

Depuis que les enfants se tuent en bande que faire pour redonner une place normale à la croissance ?

Niala-Loisobleu – 27 Novembre 2021

VAGUE A BONDS SOLAIRES


VAGUE A BONDS SOLAIRES

Au tant qu’emporte le vent, le bateau ivre, s’entortille la trajectoire

Gens qui pleurent

J’en kiri

L’hume heur enfume sans que rien ne parvienne à devenir une pipe

Imprévisible à s’habiller comme il convient j’en perds ma chemise sans retrouver nues

C’est en 1936 que René Magritte fit ce calligramme ô combien expressif du questionnement philosophique que les revirements de l’homme lui manifestèrent à cette période cruciale

Amis de nombreux philosophes et visionnaire incontestable, il témoigne par cet autoportrait de l’annonce qui nous fut faite et parvient aujourd’hui à terme

La vague versatile de l’an brun nous sombre aux lumières d’un tango Titanic.

Niala-Loisobleu – 27 Novembre 2021

AU CŒUR DU MONDE (FRAGMENT RETROUVÉ) PAR BLAISE CENDRARS


AU CŒUR DU MONDE

(FRAGMENT RETROUVÉ)
PAR BLAISE CENDRARS


Ce ciel de
Paris est plus pur qu’un ciel d’hiver lucide de froid

Jamais je ne vis de nuits plus sidérales et plus touffues que ce printemps

Où les arbres des boulevards sont comme les ombres du ciel,

Frondaisons dans les rivières mêlées aux oreilles d’éléphant,

Feuilles de platanes, lourds marronniers.

Un nénuphar sur la
Seine, c’est la lune au fd de l’eau
La
Voie
Lactée dans le ciel se pâme sur
Paris et l’étreint
Folle et nue et renversée, sa bouche suce
Notre-Dame.
La
Grande
Ourse et la
Petite
Ourse grognent autour de

Saint-Merry.
Ma main coupée brille au ciel dans la constellation

d’Orion.

Dans cette lumière froide et crue, tremblotante, plus

qu’irréelle,
Paris est comme l’image refroidie d’une plante
Qui réapparaît dans sa cendre.
Triste simulacre.

Tirées au cordeau et sans âge, les maisons et les rues ne sont
Que pierre et fer en tas dans un désert invraisemblable.
Babylone et la
Thébaïde ne sont pas plus mortes, cette

nuit, que la ville morte de
Paris
Bleue et verte, encre et goudron, ses arêtes blanchies

aux étoiles.

Pas un bruit.
Pas un passant.
C’est le lourd silence de

guerre.
Mon oeil va des pissotières à l’œil violet des réverbères.
C’est le seul espace éclairé où traîner mon inquiétude.
C’est ainsi que tous les soirs je traverse tout
Paris à pied
Des
Batignolles au
Quartier
Latin comme je traverserais

les
Andes
Sous les feux de nouve

Des étoiles, plus grandes et plus

consternantes,
La
Croix du
Sud plus prodigieuse à chaque pas que l’on

fait vers elle émergeant de l’ancien monde
Sur son nouveau continent.

Je suis l’homme qui n’a plus de passé. —
Seul mon

moignon me fait mal. —
J’ai loué une chambre d’hôtel pour être bien seul avec

moi-même.
J’ai un panier d’osier tout neuf qui s’emplit de mes

manuscrits.
Je n’ai ni livres ni tableau, aucun bibelot esthétique.

Un journal traîne sur ma table.

Je travaille dans ma chambre nue, derrière une glace

dépolie,
Pieds nus sur du carrelage rouge, et jouant avec des

ballons et une petite trompette d’enfant :
Je travaille à la fin du monde.

Blaise Cendrars