UN SIGNE
Comme il est appelé au soir en un lieu tel que les portes battant sans fin facilitent ou dénouent le tête-à-tête
hors de la crypte forestière il la traîne au grand jour, ou plutôt il lui parle
il la dénude parmi les rafales de vent
ou plutôt il commence à se taire
avec une telle fureur dans les rayons
ae la lumière verticale
une lelle émission de silence comme un jet de sang
qu’elle se montre nue dans sa parole même et c’est un corps de femme qui se fend
Par une allée d’iris et de boue écarlate descendant à la fontaine la tarir…
mais toute l’humidité antérieure
revêtait la roche comme si
nos lèvres s’étaient connues
jadis
sans le feu de la rosée qui monte,
sa dot, l’innombrable et l’évanouie..
transparence têtue elle flambe
elle environne de ses tresses
un pays qui reprend souffle et feu
N’être plus avec toi dès que tu balbuties
la sécheresse nous déborde
le cercle de tes bras ne s’entrouvre que pour mieux
ne rien dire
selon l’heure et le parfum
et quel parfum se déchire
vers le nord, l’issue dérobée…
peut-être ton visage contre le mien,
quand bien même tu me mènerais,
encapuchonné, sur ton poing,
comme aux premières chasses de l’enfer
Au-delà du crissement d’une sandale dans l’allée
soustraite au silence elle a glissé elle aussi à cet oubli de soi qui culmine
et s’inverse en un massif de roses calcinées
aveuglante énumération de ses haltes et de ses périls
réciprocité de dentelles entre son visage et la nuit
j’extrais demain
l’oubli persistant d’une rose
de la muraille éboulée et du cœur sans gisement
Plus lourde d’être nue
ses vocalises meurtrières son rire au fond de mes os
notre buisson quotidien les balafres de la lumière
A se tendre à se détendre sur les traces secourues
omis se dégager femme tout à fait du bestiaire indistinct qui la presse
parmi tant de pieux incantatoires fichés dans le matin roule et grossit le soliloque
de la noue
fade usurpatrice elle dort et me hait j’ai négligé son dénuement elle se tient un peu plus haut
ombre démesurée d’une roue de charrette sur le mur lourdement vivant
Nulle écorce pour fixer le tremblement
de la lumière
dont la nudité nous blesse, nous affame, imminente
et toujours différée, selon la ligne
presque droite d’un labour,
l’humide éclat de la terre ouverte…
étouffant dans ses serres l’angoisse du survol le vieux busard le renégat incrimine la transparence vire
et s’écrase à tes pieds
et la svelte fumée d’un feu de pêcheurs brise un horizon absolu
Sinon l’enveloppe déjà déchirée avec son précieux chargement
le heurt sous un angle stérile de la hanche qui luit
comme si l’étrave en était lisse sous la ligne de flottaison
mais
Je mouvement de la barque rendit
plus assurés l’écriture l’amour
tels un signe tracé par les oscillations du mât
au lieu des étoiles qui sombrent entre le rideau bruyant
et l’odeur de ses mains sur la mer
Sous le couvert la nuit venue mon territoire ta pâleur
de grands arbres se mouvant comme-un feu plus noir
et le dernier serpent qui veille en travers du dernier chemin
fraîcheur pourtant de la parole et de l’herbe comme un souille la vie durant
Ce qu’une autre m’écrivait
comme avec une herbe longue et suppliciante
toi, toute, en mon absence, là, dans le pur égarement d’un geste hostile au gerbier du sang, tu t’en délivres
tel un amour qui vire sur son ancre, chargé
de l’ombre nécessaire,
ici, mais plus bas, et criant
d’allégresse comme au premier jour
et toute la douleur de la terre
se contracte et se voûte
et surgit en une chaîne imprévisible
crêtée de foudre
et ruisselante de vigueur
Musique éclatée ciel sifflant dans un verre fraîcheur du soleil sous la brûlure de la peau
le même sifflement mais modulé jusqu’au silence qui sourd de tes plissements de granit, scintillante écriture le même sifflement
lance le tablier du pont sur ses piles de feu
où tombera-t-il noir le fruit méridien si je franchis le bras de mer
une pierre l’étreint et s’efface
le livre ouvert sur tes reins se consume avant d’être lu
Agrafes de l’idylle déjà exténuée pour que ce qui fut immergé respire à sa place, dans l’herbe, à nouveau,
et de la terre, toute, presque anéantie
ou comblée bord à bord
par l’enracinement de la foudre
sauf la respiration de cette pierre nocturne, le théâtre tel que je me vois, l’anticipation d’un brasier
sans son cadavre retourné
un autre traversera la passe
dans la mémoire de grandes étendues de neige
brillent
entre chaque massacre
Sorbes de la nuit d’été
étoiles enfantines
syllabes muettes du futur amour
quand les flammes progressent de poutre en poutre sous nos toits
exiguë
la définition du ciel
Nous dégageant, nous, de l’ancienne terreur
ou de cet enrouement par quoi les racines mêmes
s’expriment,- s’allégeant…
que ce soit le silence ce qui était présent, là, trop exposé depuis l’aube, sur le sol fraîchement retourné, l’ingratitude ou la légèreté des
hommes, avec le vent,
je me dresse dans l’étendue, seul, contre cette lumière qui décline, le bâillon rejeté
… que ce soit le silence lentement déployé qui règne déjà nécessaire, déjà opprimant
Par la déclivité du soir le secret mal gardé
je la blesse au défaut de sa lecture le vent répare les accrocs
enclume ou catafalque d’étincelles
avec ce qui naît et meurt au bord
de sa lèvre acide
ciel pourpre et montagne nue
elle se penche et je vois au-delà de la ligne de son épaule
mon enfance troglodyte
dans la paroi violette où le soleil couchant se brise comme un pain.
elle se penche je vois…
Jacques Dupin
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