La vérité du drame est dans ce pur espace qui règne entre la stance heureuse et l'abîme qu'elle côtoie : cet inapaisement total, ou cette ambiguïté suprême. Saint-john Perse
Passe en ce jour idoine l’inconnu du nombre de toiles attelé au vieux cheval depuis les décennies où mon père lui mit le pied à l’étrier. Mousse blanche de l’aubier qui entre l’écorce et le bois croît aux branches comme le sperme que l’arbre éjacule pour parvenir au fruit
L’os ferme et la moelle plus sensuelle qu’un méplat de poitrine à l’approche du canyon ne casse pas dans des colères
De tous aucun des ateliers n’a mis la paume de taire à l’écrasé
Les tours de manivelle donnés aujourd’hui à ma mémoire ont tous conclus au besoin de remonter la toile au chevalet sans cesser de prolonger le cours du fleuve, le vol de l’oiseau, le labourage du cheval et l’élan du chien à la trace de ce qui vit
On perd ce qui n’est qu’attaché au vent
on garde ce qui part de la racine
Le broyé n’est qu’un concours d’incompréhension, l’inadvertance d’un composant de hasard, le vrai franchit jusqu’au trou dernier fermé d’une dalle, luciole plus lumineuse qu’un mot de billet de contrefaçon
Ce qui ramène au départ a le beau de la genèse non lancée à la mer mais navigable
Folie merveilleuse que le raisonnable ne peut dévoyer, comme elle récuse les impressions non séparées de l’abstrait qui tient de l’Art la générosité du beau
Mystère préservé par l’innocence qui ignore les questions subsidiaires et traduit en clair le langage ésotérique.
Maintenant que le monde à sa fin s’achemine Et que je vis parmi les ombres du passé Mon vertige s’arrête aux yeux verts d’une ondine ou dans mon petit coin chez Madame de C.
Mais comment m’esquiver? Mais comment m’effacer? Je crève de ferveur, je sanglote ma vie Vivre de plus en plus dans un monde glacé Jusqu’à n’avoir plus qu’une tombe pour amie?
L’homme cavalier seul sur un cheval sans bride Reprend la navette entre Jésus et Vénus Sous un ciel scintillant de mille feux torrides D’être un homme est-ce donc si triste devenu?
L’image peinte aussi est une poétique Qu’elle vise au reflet d’un rêve intemporel Ou circule au milieu des oliviers tragiques Paysan dont l’humour transcende le trivial?
Toujours la même porte ouverte sur Byzance
La gravité zéro est mon point oméga:
— Donne-moi tout la fleur le fruit et la semence! —
J’vais te dire j’ai mal au cul et au coeur Ça fais trois heures que je glande Dans ce bar d’la rue Delambre Quand j’serais dehors J’en aurais fini pour longtemps avec leurs gueules d’enterrements De croque-morts
Ça fais longtemps que j’roule ma bosse Les honnêtes gens me cherchent des crosses J’suis foutu, yeah À moins qu’tu t’pointes dans ta vieille Rolls Pour m’emmener voir les baby-dolls a Honolulu
Comprend-moi bien ma petite Lulu Depuis qu’j’ai toute cette flicaille au cul Faut qu’j’change d’adresse car dans la presse Vu le portrait qu’ils m’ont taillé Y a plus personne pour repasser Mes chemises
Oh monte le juke-box Allez bosse Pas mal, han Hou Oh écrase
Cela dit qu’je comprends qu’tu paniques Vu qu’t’es l’amie d’l’ennemi public numéro un J’te préviens s’ils t’mettent le grappin dessus T’as qu’à leur dire qu’tu m’as pas vu, parole de flic Oh t’énérves pas
Quand tu recevras cette lettre Je me serais jeté par la fenêtre d’la PJ À moins qu’je n’finisse au cyanure Mélangé à d’la confiture de groseille
Avant qu’les justiciers rappliquent Faut qu’j’te dise où j’ai planqué l’fric De cet escroc de milliardaire Pour que tu t’offres à notre amour Une petite croisière de non-retour Autour, tout autour de la Terre Tant pis pour moi, il est trop tard Pleure pas, j’ai le cafard
L’homme n’est qu’une fleur de l’air tenue par la terre, maudite par les astres, respirée par la mort; le souffle et l’ombre de cette coalition, certaines fou, le surélèvent.
Notre amitié est le nuage blanc préféré du soleil.
Notre amitié est une écorce libre. Elle ne se détache pas des prouesses de notre cœur.
Où l’esprit ne déracine plus mais replante et soigne, je nais. Où commence l’enfance du peuple, j’aime.
xxe siècle : l’homme fut au plus bas. Les femmes s’éclairaient et se déplaçaient vite, sur un surplomb où seuls nos yeux avaient accès.
À une rose je me lie.
Nous sommes ingouvernables. Le seul maître qui nous soit propice, c’est l’Éclair, qui tantôt nous illumine et tantôt nous pourfend.
Éclair et rose, en nous, dans leur fugacité, pour nous accomplir, s’ajoutent.
Je suis d’herbe dans ta main, ma pyramide adolescente. Je t’aime sur tes mille fleurs refermées.
Prête au bourgeon, en lui laissant l’avenir, tout l’éclat de la fleur profonde. Ton dur second regard le peut. De la sorte, le gel ne le détruira pas.
Ne permettons pas qu’on nous enlève la part de la nature que nous renfermons. N’en perdons pas une éta-mine, n’en cédons pas un gravier d’eau.
Après le départ des moissonneurs, sur les plateaux de l’Ile-de-France, ce menu silex taillé qui sort de terre, à peine dans notre main, fait surgir de notre mémoire un noyau équivalent, noyau d’une aurore dont nous ne verrons pas, croyons-nous, l’altération ni la fin; seulement la rougeur sublime et le visage levé.
Leur crime : un enragé vouloir de nous apprendre à mépriser les dieux que nous avons en nous.
Ce sont les pessimistes que l’avenir élève. Ils voient de leur vivant l’objet de leur appréhension se réaliser. Pourtant la grappe, qui a suivi la moisson, au-dessus de son cep, boucle; et les enfants des saisons, qui ne sont pas selon l’ordinaire réunis, au plus vite affermissent le sable au bord de la vague. Cela, les pessimistes le perçoivent aussi.
Ah! le pouvoir de se lever autrement.
Dites, ce que nous sommes nous fera jaillir en bouquet?
Un poète doit laisser des traces de son passage, non des preuves. Seules les traces font rêver.
Vivre, c’est s’obstiner à achever un souvenir? Mourir, c’est devenir, mais nulle part, vivant?
Le réel quelquefois désaltère l’espérance. C’est pourquoi, contre toute attente, l’espérance survit.
Toucher de son ombre un fumier, tant notre flanc renferme de maux et notre cœur de pensées folles, se peut; mais avoir en soi un sacré.
Lorsque je rêve et que j’avance, lorsque je retiens l’ineffable, m’éveillant, je suis à genoux.
L’Histoire n’est que le revers de la tenue des maîtres. Aussi une terre d’effroi où chasse le lycaon et que racle la vipère. La détresse est dans le regard des sociétés humaines et du Temps, avec des victoires qui montent.
Luire et s’élancer – prompt couteau, lente étoile.
Dans l’éclatement de l’univers que nous éprouvons, prodige! les morceaux qui s’abattent sont vivants.
Ma toute terre, comme un oiseau changé en fruit dans un arbre éternel, je suis à toi.
Ce que vos hivers nous demandent, c’est d’enlever-dans les airs ce qui ne serait sans cela que limaille et souffre-douleur. Ce que vos hivers nous demandent, c’est de préluder pour vous à la saveur : une saveur égale à celle que chante sous sa rondeur ailée la civilisation du fruit.
Ce qui me console, lorsque je serai mort, c’est que je serai là — disloqué, hideux — pour me voir poème.
Il ne faut pas que ma lyre me devine, que mon vers se trouve ce que j’aurais pu écrire.
Le merveilleux chez cet être : toute source, en lui, donne le jour à un ruisseau. Avec le moindre de ses dons descend une averse de colombes.
Dans nos jardins se préparent des forêts.
Les oiseaux libres ne souffrent pas qu’on les regarde. Demeurons obscurs, renonçons à nous, près d’eux.
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