PAPIER-PEINT


GEORGES ROUAULT – FILLE AU MIROIR (1906)

PAPIER-PEINT

Des souris à l’étage

par la fente des plinthes

m’arrachent un frisson du fond des chaussettes au décolleté du marcel

Renversée au pied du lit, la panière libère un miaulement félin au moment où Chet enfonce ses doigts dans l’inspiration jazzitique de son instrument

Couleur de poumons du papier à musique, dans le coin de la table de toilette, le marbre se veine de la cruche en cherchant la bassine

C’est un râle dirait le cerf si nous étions à l’orée du Bois de Boulogne, mais là c’est juste un trait d’humanité de l’artiste envers la prostituée au milieu du lit défait

ce Grand Pierrot reste mon Maître

Les draps blancs dans l’aube annoncent le répit d’une soumission qui retient les pierres de lapider la Madeleine

gardant à ses seins cette beauté que seules savent façonner les lèvres sorties de l’injure

Sous les tomettes le jugement de Dieu se trouve déjointé

le miroir a bon tain.

.

Niala-Loisobleu.

27 Décembre 2023

BLEU EN VERT


BLEU EN VERT

Un clin d’oeil fébrile sur le numérique

met les boules et cette guirlande en branle

au prétexte de converser

dans le cochon paraît que tout est bon

Chet attrape sa corne et souffle de quoi denser proprement

Noël version blues voilà de quoi allumer plus que le sapin

la pluie a repris position

mais laissant croire que ça mouille pour une bonne action

voila ton ange en gardien qui se découvre le don de stripteaseuse-maison

je reconnais que dans l’intention douteuse

le génie de Baker sort de l’ornière et monte à jouir du rêve

la plage se retouve vraiment dans UN HOMME ET UNE FEMME au volant !

.

Niala-Loisobleu.

21 Décembre 2023

CHET BAKER – DEPART


CHET BAKER – DEPART

Dans la transpiration de ton corps sur les murs

le lit rince des souvenirs

n’essaie pas de rattraper la voiture

c’est entré dans le rouge

d’un fond de culotte

ya plus que de la trompette pour se glisser dans tes pores

prendre les parties qui surnagent

.

Niala-Loisobleu.

18 Décembre 2023

DE L’UNITAIRE A L’AMBLE


DE L’UNITAIRE A L’AMBLE

Au bouchon qui plonge

l’ombre devant la lumière

sont accrochés des pianos du pauvre

qu’un disque dore en l’absence de bretelles

Les deux façades aux flancs de l’entrée principale en arrière-plan

genre vase de Médicis où l’ô stagne

avec au script du film ce qui trame son coup d’état

Un crapeaud-buffle

dépasse de la lucarne, une envie de boeuf en libre-expression

A la fourchette sortir l’oeuf du plat

de la sainte-table

et crever les bulles de ce que nous savons de Marseille

afin de suivre le cerceau qui n’a que l’enfant dans la main

L’oiseau-empaillé enlevé de la cheminée

dans un bouche-à bouche amazonien au fond de ta forêt non-rasée

Regarde sur le haut de la vague tout ce qu’on doit sortir du fond

que ce soit du phare d’Alexandrie comme partout ailleurs

sans concevoir une autre pyramide aux guichets du Louvre.

Niala-Loisobleu.

15 Janvier 2023

AU DEBUSQUE DES SALADES, UN COSMOS


AU DEBUSQUE DES SALADES, UN COSMOS

Le bateau de papier déplie la passe

l’horizon se déshabille dans la marge

les oiseaux-marins qui croisent savent tout des cailloux qui n’émergent pas

il n’y a plus d’herbe à brouter mais devant le rose des rochers la lande est plus douce sous les pieds qu’un regard douanier qui fouille à l’intérieur du bagage d’une culture polluée

Le noir qu’un mazout veille à charger sur le rail tanker glisse entre les feux-naufrageurs d’une fausse-lumière

Chet tire du cuivre chaud de l’obscurité de la défonce, marqué par la vérité du blues , portant dans les poches de son costume blanc des pensées de Pierrot mises en orbite d’une voix extra-terrestre

Le cosmos au fil du vent troue le film noir de couleurs d’espoir

Sur le dos du cheval l’oiseau traverse la baie et signe sur la vitre

« Bienvenue la barrière est ouverte »

Niala-Loisobleu – 11 Juin 2021

ALMOST BLUE


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ALMOST BLUE

A la remontée d’un fond de gorge corne un chaud de cuivre

la trompette de Chet ramasse le tourment du coeur en dérive

raccommodeur de faïence  le jazz tient les reins du coton débouchés

dans le bugle assis au bord du lit

l’amour égaré trouve le caillou dans la poche du vélo

Niala-Loisobleu – 25/09/19

LA VOIX


LA VOIX

Qui chante là quand toute voix se tait?
Qui chante avec cette voix sourde et pure un si beau chant?
Serait-ce hors de la ville, à
Robinson, dans un jardin couvert de neige?
Ou est-ce là tout près, quelqu’un qui ne se doutait pas qu’on l’écoutât?
Ne soyons pas impatients de le savoir puisque le jour n’est pas autrement précédé par l’invisible oiseau.
Mais faisons seulement silence.
Une voix monte, et comme un vent de mars aux bois vieillis porte leur force, elle nous vient sans larmes, souriant plutôt devant la mort.
Qui chantait là quand notre lampe s’est éteinte?
Nul ne le sait.
Mais seul peut entendre le cœur qui ne cherche la possession ni la victoire.

Philippe Jaccottet