LA VIE DE VOYAGE PAR JULIEN GRACQ


NIALA – ETUDE 13/04/24

LA VIE DE VOYAGE PAR JULIEN GRACQ

Nous quittions la ville vers trois heures du matin, quand les maisons ténébreuses des avenues se relancent de façade en façade les oiseaux de nuit, comme un tir aux pigeons
de coussins de soie. L’aube se levait en ruban de lumière bleue sur les rails d’un tramway des faubourgs, — mais, dès avant la terre promise, le ciel change ! c’est la pluie sur
les vitrages d’un hôtel désaffecté de la plage, le déjeuner de pain gris sur lequel la mer fait le bruit des larmes.

A qui s’en prendre ? tout désorientés, perplexes, nous faisons les cent pas sur l’estacade, en jetant nos morceaux de pain dans la mer. Voici : maintenant j’ai jeté sur mes
épaules la pèlerine des pauvres, rattaché mes chaussures au coin amer d’une borne, et, tout seul maintenant sous la gargoulette des gouttières, j’attends l’heure de
l’ouverture des épiceries.

Julien Gracq

SOMNOLENCE


EMILIO GRAU SALA

SOMNOLENCE

A l’horizon de ses trottoirs

elle ne tourne aucun de ses regards.

Absente à tout ce qui se passe

détachée des mouvements

prise dans son inerte attitude

Rien ne l’affecte

pourtant elle se sent vide.

.

Niala-Loisobleu.

13 Avril 2024