TEMPS ET PASSAGE – BEATRICE PAILLER ET NIALA-LOISOBLEU


Temps libre sur pierre, l’eau s’écoule du bassin, ventre de la clepsydre. Verse un temps rond, un temps d’eau et de marne. Le temps stagne, la vie fructifie. Monte en graine le désir.

Refermé sur le soir : le temps, sa vigueur opiniâtre pareille au cri de la mésange. L’aigu d’un ongle s’enfonçant dans la paume. S’ouvre la corolle des doigts. Sur l’aile du cri, le temps florissant.

Le temps perdu a saveur de pain. Jamais sec tant la vie le nourrit. Alors la mésange viendra. Son temps n’est pas le nôtre, mais l’attente l’appelle. Elle viendra autour du pain et l’inquiète danse cessera.

Béatrice Pailler

PASSAGE
Bordé dans son jardin, de l’écume au flanc, le temps s’assoit sur la rive du lit. Chante un moulin dans les ailes de Pégase. Le feu n’est pas éteint, il crépite à la frontière d’aujourd’hui à demain. A bord des tiroirs des cales, de nouvelles semailles viennent de prendre billet.

Une nouvelle vie monte sur le marchepied du rez-de-chaussée, à l’appui du tracé punaisé dans la courbure du dos.

L’enfant reste du plus loin le départ du point. Comme la pesée du pain que le boulanger projetait de la bascule en symbole de cet équilibre à ne pas mentir. Avec le rouge-queue, un merle et un couple de mésanges, l’entrée du jardin avance hors de la cage. Les vitres tremblent, les rideaux les protègeront du froid. Il va te falloir franchir la porte du passé en dehors de la durée du temps.

Te voici à la veille de descendre l’escalier sans bagages pour te familiariser aux nouvelles senteurs en complète tolérance. Il y a eu assez de diligences pour finir ce qui reste à pied. L’oeuvre dans le branle transpire des veines de ton chevalet, laisse-le toujours pousser.

Niala-Loisobleu.

30 Janvier 2024

A PETITS PLATS


CHAÏM SOUTINE

A PETITS PLATS

Salle-à-manger universelle

un jour sans consulter l’heure où l’appétit manque

c’est le plat du jour où le fumet s’est dispersé dans la hotte

J’enfile la tenue du cuisinier

dans les poches une recette qui donne au né de quoi vagir

les arbres qui passent à la fenêtre sont aussi fades que la salade de l’information

j’ouvre le placard des épices

laisse le laurier trop malmené

tire de la sauge pour que le lapin sorte du terrier

quelques encouragements d’espelette

pour sortir le cheval des curies et de l’écran plat du soufflé

A se limer les ongles au lieu de rapports faute de libido

la réputation culinaire sort de table comme du lit

Un coin de plage loin du regard des voyeurs en hors-d’oeuvre

de l’ail autour du corail baigné dans la blondeur d’un cru gascon

pour que se débouchent des envies qui justifient la vie sans besoin de frime

Le rideau s’écarte de mon âme

la nappe met la table dans l’herbe

au bord du train qui passe, quelques vaches se partagent les belles images

Regarde l’échine de l’ô séant onduler !

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Niala-Loisobleu.

30 Janvier 2024

RENIFLAGE


RENIFLAGE

Entre les joints des barrages un chien renifleur de la brigade financière passe devant les porte-monnaie vides d’une journée de plus à protester

La légendaire ignorance du président ne s’oppose jamais, elle élude toute demande légitime

Est-ce qu’un puisatier pourrait forer un brin d’écoute, au lieu de claironner que le pays a besoin de bébés ?

Le maître-chien musèle le canin avant qu’il se dresse les oreilles…

.Niala-Loisobleu.

30 Janvier 2024