CONTE D’UN POÈTE BARBU


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CONTE D’UN POÈTE BARBU

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Barbu j’ai des atomes crochus avec les pluies et les étoiles, les souffrances et les fêtes de tous mes foyers d’origine.

Dans une histoire masquée ma barbe risquait d’être un palmier aveugle à vie au lieu d’un conte de fées.

Pour la barbe des poètes

il n’y a pas de commandant en chef

ni d’ayatollah cubain inspiré

ni de gestionnaire du sacré.

Mes poils gris sont des racines qui voyagent partout avec moi : je les porte, les pieds dans la boue, la tête dans la conscience émerveillée.

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Sans la barbe je serais la proie d’un rude travail de deuil et de nostalgie ; ma barbe me tient à l’abri du panier de vipères et de crabes des exilés.

Venue de la mer caraïbe ma barbe a les pieds sur la terre et pour plaire au clair de lune il lui arrive aussi de voler.

Proche des sept femmes de l’arc-en-ciel la nuit ma barbe est phosphorescente ; pour célébrer le lotus de la femme aimée ma barbe est un imaginaire qui bande bien.

 

René Depestre

Aède, aède, aède…!


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Aède, aède, aède…!

Il est une de ses heures qui sont toujours disponibles pour une discussion sans intérêt. Qu’importe le jour, ça peut aussi bien être aujourd’hui qu’hier. La seule certitude est que ce sera jamais demain. Campons-en la scène avant que le clap crie: on tourne. Elle arrive, c’est un jardin public, il est assis c’est un banc à rien déjà condamné dans le passé. Avant même qu’ils se soient vus ils avaient décidés qu’ils se feraient passer pour et par. Excellent moyen pour laisser entendre une connaissance de toute pièce. L’intime dont on parle braguette ouverte et jupe troussée sur ficelle-string mérite qu’on en vérifie l’orthographe car il enferme sans nul doute une sacrée faute d’orthographe des mots « Je t’aime » . Les patinettes roulaient de vieux gosses à l’électricité, là où des chevaux-de-bois s’étaient mis en rond. D’une famille sans recul, modeste, pas fortunée, elle avait été mise au monde par une mère qui n’avait pu retenir le visage du père dans l’absence de lumière. Ainsi livrée, l’être humain devient chose. Quant au monsieur les fortifs de la zone lui avaient appris comment on désosse une voiture plus vite qu’un chacal déshabille un gnou qui a eu le malheur de s’y frôler. Il serait assez vite arrivé qu’on ait envie de partir avant que l’autre se réveille. Pour le moment l’un et l’autre avait un compte à régler avec ses glandes. Passé les préliminaires en quatrième vitesse, ils s’étaient arrachés le vestimentaire et satisfaits debout. Ce que l’alcool pris avant donnerait de marge pour un coup supplémentaire n’était qu’une question d’accueil du plumard parce qu’il faudrait passer à dormir. Lui ronflait déjà qu’elle avait un retard de plafond, Sans doute les deux gosses qu’elle avait mis la veille chez leur grand-mère, qui sans ménagement lui dansaient dans la pensée, avec leurs questions de savoir t’était avec qui ? Et les cartons des affaires de leur père qu’elle avait pas vidé. Un sale goût qui arrive plein la gorge. Elle renonce à dormir et file. L’autre doit rêver qu’il est supermâle. La radio en boucle d’un voisin, conte. Un mariage royal, ça donne un espoir à finir la semaine, après…faut pas avoir des idées pareilles. Apollon guérissait dans son temple, c’est beau comme là-bas, à BASSAE chez les grecs.

Aède, aède, aède…!

 

Niala-Loisobleu – 15 Mai 2018

https://www.youtube.com/watch?v=L_D6GTLkAwo

 

LA BOÎTE A L’ÊTRE 21


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LA BOÎTE A L’ÊTRE 21

LES CONTES DE L’INVISIBLE

Il y a une fois

qu’il était

un point suspendu se balançait

cerf-volant croisant dans son paradis Bleu

S’il s’interrogea des fois, mit long  à comprendre qu’à vouloir trouver réponse à tout on s’éloigne du Centre, droit dans le mur du Triangle des Bermudes

Bien sûr il y a

les parents

les frères

les soeurs

le mari ou l’épouse

les enfants

le patron

l’épicier

la voiture

les godasses à changer

et l’abscons qui répond toujours pas au téléfon

Mais mon dos

il me fait bien moins mal

quand j’écoute mon coeur à vélo hâler

et que je marche dans le sens de mon âme à bois

en sortant mon oeil de l’herpès pour gratter le besoin de Lumière

J’ai toujours le même âge

dans l’état civil

mais

la vérité

c’est qu’à devoir traverser

mieux vaut garder son tablier et ses culottes courtes

en déchirant tous ses papiers

puisque mourir pour mourir

vaut mieux vivre

Elle est là grande ouverte

a pas bougé

au bord de l’Amour

Ma qu’Aime

large

baie entre

regardant de la bonne moitié de la bouteille

tendue comme un promontoire

pour que j’habite chez Elle

Rut de la Plume d’Encre.

Niala-Loisobleu – 9 Janvier 2013

 

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L’Âne à Nasse et le Paon Peu Mousse


27.02.16 - 1

L’Âne à Nasse et le Paon Peu Mousse

La côte grimpait selon le sens, ou descendait selon l’autre, enlacée, serrée, quelque soit le jour. Du sommet on apercevait la côte en vagues images, surtout les jours de grand brouillard, Quand au porc qu’il fasse soleil ou qu’il y ait de la brume, sans même le voir on le sentait à vue de nez bien plus qu’avant 17h.. Et vînt ce matin las,  fatigué avant d’avoir commencé.

Il traînait au lit, ce qui pourrait expliquer pourquoi cette histoire est à dormir debout. Elle contient suffisamment d’éléments douteux pour qu’on la croît sur parole.Mieux vaut donc la lire, ça repose des recommandations oiseuses arrivant de tous les côtés de face surtout de dos.

Est-ce un conte, demanda la voie bêlante d’un vieux sentier de chèvres que les doux âniers empruntaient lorsqu’un Pape tentait de passer une mule en contrebande avec son omélie.

Appelez ça comme vous voudrez, mais moi fit l’âne, je dirais que c’est plutôt une chanson de marins pêcheurs, qui raconte dans la langue ouste, le premier enrôlement du paon Peu Mousse.

Plus têtu que l’âne à nasse, son Capitaine, un morveux vaniteux qui voulait à tout prix barrer l’embarcation en faisant assaut sur la roue. Tout allait de travers. Babord arrière, sur tribord avant, la barcasse allait dans tous les sens, au point qu’on se demandait pourquoi avoir quitté la terre, si c’était pour tourner en rond de la même manière.

Avisant mon père spirituel croisant par là je lui fis l’état des lieux pour tenter d’y voir clair.

Être Ange me répondit-il

Être ange

C’est étrange

Dit l’ange

Être âne

C’est étrâne

Dit l’âne

Cela ne veut rien dire

Dit l’ange en haussant les ailes

Pourtant

Si étrange veut dire quelque chose

étrâne est plus étrange qu’étrange

Dit l’âne

Étrange est

Dit l’ange en tapant des pieds

Étranger vous-même

Dit l’âne

Et il s’envole

Jacques Prévert

Ce monde est étrange, il marche sur la tête, alors qu’il n’en a point, raison pour laquelle il pense avec ses pieds, Un âne qui vole c’est plein d’espoir, rien que le contraire d’un homme qui dérobe et pille à plat-ventre sans scrupules.

A quelque temps d’ici, j’avais une mignonne petite fleur sauvage dans mon pré.Pas toujours bien peignée, de la boue aux bottes et du vent plein les jupes. Elle avait de la campagne plein les mirettes et du tripoux dans la palette, La Véronèse, c’est comme ça que je l’appelais, à cause de son âne et de ses pommes qui poussaient du côté de Rodez, A Midi, on entendait les Pyrénées, parler occitan, des senteurs d’ail dans les commissures du sourire. A l’exception de ceux qu’on fait les écoles, là-bas, même les ânes ont l’accent. Causses toujours comme ils disent, nous ont a de la garrigue dans le cervelet, on panse pas, on chante. Comme Maître Jacques, qui navigua longtemps sous les ponts de Paris avant de se mettre en cale-sèche en Normandie. Un fameux ânier celui-ci de qui j’appris que plutôt que de s’en remettre mieux vaut s’y coller.

Niala-Loisobleu – 29/03/16

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LA GRAND CONCHE


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LA GRAND CONCHE

Je me sens né à chaque instant

à l’éternelle nouveauté du Monde…

[…]

Le Monde ne s’est pas fait pour que nous pensions à lui

(penser c’est avoir mal aux yeux)

mais pour que nous le regardions avec un sentiment d’accord…

Fernando Pessoa

(Le Gardeur de troupeaux et autres poèmes, trad. Armand Guibert, p.40, nrf Poésie/Gallimard)

Vois comme un arrêt sur image ça met en voyage. Je n’irais pas cueillir de gui plus de lustre où l’accrocher. Quand nous dansions aux tombées des ans, cocagne tendait son mât, jusqu’au petit matin le branle hennissait du sabot. Des rubans aux cannes on embrassait la Mère avant d’aller s’en tailler un autre d’une cayenne à l’autre. Compagnon, y es-tu ? A croire que le cours de la vie a remis les portes basses à jour.L’humilité fait défaut. On ne fait plus qu’utiliser le mot à toutes les sauces. Mascarades, pour trouver l’embarcadère faut creuser un puits, sans garantie que la vérité y sera pas tarie.

Laisse-moi ventiler ces odeurs de graillou, goûtes mon poisson à laisse cabêche, il est cru sur parole. Suis au carré du matin au soir. Dis-moi, t’aurai-je un jour menti de la bouche en cessant de ne m’adresser à Toi qu’avec les doigts ? T’aurais-je laissée boutonnée, zippée comme une trappiste sans jamais descendre à la mine ? Hein et aux foins, t’ai-je jamais dit à partir de main tenant on épile ? Comme si faux-cul j’aurais pu me convertir aux faux-seins….Ah label église, y a de quoi voir rouge.

J’suis l’pirate de Vallières. Ce matin-là où, quittant mon Paname, je mis sac à terre à St-Georges de Didonne, je renouais avec mon début dans la navigation sous pavillon noir. Un bail, mon Amiral.

Tu vois c’est quand j’ai senti ton souffle au travers des boutons de ta nuisette, que mon pyjama avait du quelque temps avant, se lier d’amitié avec la chaise. A te voir ainsi, comme une figure de proue, ça m’a mis l’étrave cap à peindre. Une nouvelle histoire de mots chauds à te servir au lit mon Amour. T’inquiètes, le grand bruit que tu viens d’entendre c’est le quotidien et sa gueule de raie que je viens de pousser dans l’escalier. On va y voir clair en courant sur la grand conche !

 

Niala-Loisobleu

27 Décembre 2015

 

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Carnets z’Intimes d’un Pêcheur à Pied / Folie picturale & poétique / Emile Nelligan / La Cayenne


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Carnets z’Intimes d’un Pêcheur à Pied / Folie picturale & poétique / Emile Nelligan / La Cayenne

Mon Aimée Muse,

Je tourne autour d’ici à là-bas, pour au moins déjà dire, à quel point de n’être qu’avec Toi me délire du mal et me livre au bien j’en voudrai être sûr ? Inutile, je suis pincé. Impossible à en déterminer l’à-part ça qu’est-ce qui reste, faute de pouvoir le trouver. L’absence a le pouvoir de faire tout ressentir et son contraire. J’espère que chaque instant de ce ce que tu traverses se passe bien. Sens-tu la machine à café, non c’est vrai que tu ne bois que du thé, alors la vapeur des repassages, l’ô de toilette ? J’sais pas, tiens, la tendresse des enfants,  là c’est certain. La campagne est froide, l’alcool ambre de l’automne ayant fait place à la vodka de l’hiver, il flotte dans l’air un bruit de luge imaginaire vu la température ayant pris tendance au bain de mer. Tes jambes se rapprochent quand je me déchausse. Ne bouge plus. Je te peins Nicolas de Staêl dans l’idée d’une correspondance à t’étreindre de vrai, ton poil aux doigts pour trouver mieux que les outils  de l’atelier-fictif.

« Voilà. Je ne peux pas te raconter tout ce qui me passe par la tête, les yeux, les mains au sujet de ton livre. Il faudrait autant de temps que celui qui nous sépare sur le calendrier depuis ton départ et te barber de considérations esthétiques, du papier à la couleur, des rapports de la boîte à l’agate à la litho de tranche ; impossible. Je fais le plus simple possible et c’est cela qui est si difficile pour moi… »

(Correspondance René Char/Nicolas de Staël)

Au moins étant la seule à savoir quantifier la folie qui m’habite – seul remède ayant un peu d’effet pour m’aider à supporter mes souffrances physiques d’un monde qui s’effrite – tu me lis sans t’arrêter à la première diagonale.

Je n’aime pas la neige, cette année au moins c’est ça de pris, y en pas, je peux donc me faire bronzer l’évasion, mon imaginaire en ayant un besoin permanent. L’hiver ici, c’est la bonne période pour me rendre en Asie du Sud-Est. Bien qu’ici, j’ai le couchant qui brille sur les ors de la Vallée des Temples. Mais j’ai une nouvelle à t’apprendre, Madame lit m’a parlé d’Emile Nelligan. Je suis allé lui rendre visite. En découvrant son appartenance lointaine avec les maudits, j’ai retenu une chambre pour deviser avec lui. Sais-tu qu’il est névrosé jusqu’à la moelle, un don d’ubiquité sans pareil, rends-toi compte, mourir à 20 ans et avoir en si peu de temps compris la vraie nature de  ce monde. Las par dégoût de ses moeurs.Nous devions nous rencontrer, c’était écrit.


Ah! comme la neige a neigé!
Ma vitre est un jardin de givre.
Ah! comme la neige a neigé!
Qu’est-ce que le spasme de vivre
Ô la douleur que j’ai, que j’ai!

Tous les étangs gisent gelés,
Mon âme est noire: Où vis-je? où vais-je?
Tous ses espoirs gisent gelés:
Je suis la nouvelle Norvège
D’où les blonds ciels s’en sont allés.

Pleurez, oiseaux de février,
Au sinistre frisson des choses,
Pleurez, oiseaux de février,
Pleurez mes pleurs, pleurez mes roses,
Aux branches du genévrier.

Ah! comme la neige a neigé!
Ma vitre est un jardin de givre.
Ah! comme la neige a neigé!
Qu’est-ce que le spasme de vivre
A tout l’ennui que j’ai, que j’ai!…

Émile Nelligan

Schizophrène jusqu’au bout de l’ongle, il s’en ait émasculé l’à venir. Au moins voici deux choses qui nous différencient, j’aime  la vie et pas la neige.Voilà un sacré temps que je m’efforce de le faire savoir.

Il avait certainement une cabane, au Canada, c’est incontournable, dixit Line. Moi la mienne a flotte, bord de Cayenne, l’huître parlant claire. Point commun, elle est à vol d’oiso à toucher Brouage, là d’où Jacques Cartier, s’en alla pour le Saint-Laurent et n’en plus revenir.

Je t’embrasse l’oeil en feu de soleil maritime, un vol de rieuses dans le sel de mes larmes, nous irons deux mains leur porter le bon vent.

Niala-Loisobleu

26 Décembre 2015