BOUCHE A FEU


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BOUCHE A FEU

C’est dans le trou le manque

l’évidement évidemment

l’évidement intérieur qui creuse

jusqu’au boulet tassé contre la poudre,

c’est dans le vide cerclé de bronze

là où devrait naître un grand poème

un grand tonnerre parodique

une grande fureur tragique

bien à l’étiage de ce temps-ci

où des orgues de neuve barbarie

imposent d’ignobles requiems,

c’est dans le doute ne pas s’abstenir

et dans la bouffonnerie oser

porter la voix en altitude

la voix au-dessus de soi

comme un tourment qui danse,

c’est dans l’absence marquer le cri

au fer rouge la souffrance

avec ses yeux plus grands que le ventre

et qui sait qu’il n’est que de tourner le dos

pour boire un peu de sang,

c’est à bout de silence la blessure

presqu’une honte à dire ce qui est

dans les mots et le monde dans le moule des morts la morale des marchands,

l’âme se trouve à la bouche des canons

au passage du feu du souffle du plomb

au centre noir d’une atroce lumière

pareille à un désir muré

à une plainte sous l’aubier

à une source dévoyée

pareille à l’ombre d’un soleil en songe

que nul ne verra plus,

qui parle en ton nom se trahit

qui semble t’ignorer se renie doublement

rien n’est aussi cruel que ta parure ton leurre

cet appelant à faire hurler ou rire

brûler aimer mordre ou maudire

cet appelant sans miroir ni crécelle

cet appelant sans appel

mais qui jette sous le ciel

une brèche violente,

tu n’es qu’un principe de néant

un évident vertige à la conquête

du dedans des résonances sous la peau

de ce qui vibre et ment

de ce qui vit en aimant

de ce qui se lève dans le corps de la nuit

tu es ce qui ne peut être

tu es ce que l’on dément

tu es tout ce que l’on nie,

île d’insomnie sur le vieil océan marque de sable contre les dents

il est de l’autre côté de la page

un murmure à bout de sens

un arc-en-ciel en terre en friche

une errance de couleurs et de sons

une incantation d’espace un diapason,

l’éclair là qui dure et signe

la chute de reins de l’horizon

la courbe nue du violoncelle

une passion où se déchaîne

si fragile le regard nécessaire

la part sensible de l’invisible,

on peut chemin sans croix

gravir par défi et plaisir

les pentes du mont
Sabir

tout en armant son pas

à mille lieues de
Ta’izz

ne plus parler langue raisonnable

ne plus mâcher écorce de syllabes

et cracher tout son qat

et taire toute voix

entendre par-devers soi la houle

d’outre-Levant le secret

d’avancer sans croire à l’outre-cime

et marcher à l’oreille comme d’autres à l’énergie,

lutte résonne comme l’accord

des deux mains du potier

du pêcheur qui brise une tortue marine

ou de cette manière de lutin

que les ongles caressent et qui n’est

que de corde et de bois,

lutin des déserts

des cours des quatre coins du monde

lutin exilé nomade ou troubadour

pandura sitar dombra guitare de lune

pi’pa biwa guembri vihuela damano

métamorphose du même dans toutes ses solitudes

c’est deux planches entre les bras

qui mettent on ne sait quoi en feu

on ne sait quoi en fuite

et de l’aube sur les fleurs du temps,

c’est sous le pied droit du chevalet

moins que rien entre table et fond

une écharde de fibre grossière un écart

où s’éveille un état d’effraction

une âme qui n’a pas

de place réservée d’ancrage ni d’attache

et qu’un outil d’acier très fin deux fois courbé

guide à l’aveuglette n’écoutant que le son

l’écho plus que parfait d’un nom

de falaise hantée,

luth violon alto contrebasse

peu de sapin d’érable d’ébène

peu de boyau peu de crin

et tant de sortilèges

d’alcools espérés de visages de tempêtes

de fortunes perdues d’ascèses retrouvées

d’éclats de chair de nerf de songe

de partage insensé et d’accueil prodigue

quelque chose qui tient d’une folle majesté

quelque chose qui vient plus magicien que nous

ouvrir avec un double un accès au sublime,

en ré mineur le quatuor

dit plus qu’il n’est possible

comme si se pouvait vivre une vie négative

un amour trop fort qui couvrirait la mort

d’alertes et d’alarmes et de baisers sans âge,

la jeune fille est passée qui passe

dans l’absolu des choses —

pas de salut quand elle vient

ni d’adieu quand elle part

car elle ne vient jamais quand elle vient

car elle ne part jamais quand elle part –

la jeune fille est passée qui passe

dans l’absolu des corps

l’absolu périssable l’harmonie et encore

à renaître à renaître.

 

André Velter

ILS DISENT


Ils disent je t’aime avec tant de haine à peine cachée que ma voix tremble rien qu’à vouloir panser ces trois mots

C’est pas que dire « je t »aime »
que je murmure en un m’aime cri
à se ronger les ongles à l’indifférence
J’ai dit le tant des fleurs aux carreaux de mes tabliers
quand buissonnant les trains qui se croisent à côté des robinets secs
j’hâlais aux lés aux lés remorquer les chalands du long de la Seine.

A quoi ça m’a servi
à qui ça n’a pas profité ?
Puisque le combat d’un idéal
c’est pas d’être élu mais de voter tel qu’on est soi. J’en ai rien caché de tout ça mettant à poil la condition humaine
ses hauts-fourneaux, colonne vent dôme, terrils de lapin, filatures pieds et nique-les, air tétées front populaire
pose-toi là Petite-Môme,j’ai ma bouée, lancais-je con comme innocent
tu m’fais l’oeil tout humide tant le soleil gîte dans tes fenêtres
au point d’être retourné de sentiments
oh non
pas à cause de tes revenus ni de ton joli minois, j’aime rien des grosses,
non rien qu’à cause de toutes tes gourances du croyant bien faire que t’as accumulée sans lésiner jusqu’avant que ça devienne de l’entêtement

J’ai rien à t’offrir
sauf un épouvantail qui fait pas peur aux oiseaux, Je tremble de plus d’peurs que de certitudes
aimer ça se situe au poil prêt entre scoumoune et mauvais saure
que mon battant gamberge
à c’que mon odeur à te rapprochera où t’étendra sur place ou mieux, te mettra en marche
Un ticket pour l’ailleurs de ce monde en ruines
un aller simple sans retour pour la Poésie. J’en voulais pas plus….mais voilà…c’était trop demander.

Niala-Loisobleu – 16 Mai 2017

Vents divers…


Vents divers…

 

Quand au chavire tout, le même jour change de tenue plusieurs fois entre les heurts d’un vent déménageur, se tenir debout dans l’idée demande une conviction d’un autre tant.

Un temps périt…

La nature humaine est ainsi faite. Elle a ses saisons où l’attirance est solidement ancrée, puis les moi émoi où faut passer un ravin soudainement apparu. Sur un pont de singe qui vous vide l’estomac tellement ça balance.

A qui la faute ?

Bah, je laisse les prédicateurs savants dans l’art de profiter du moment de faiblesse idoine, se faire leurs courses. Un être humain qui souffre (les motifs sont tellement nombreux…) c’est une sensibilité exposée au pire. Prise par l’impératif de sortir du sinistre. La peur n’est pas le visage du vil que la littérature dispense. Moi je crois que c’est le premier sentiment qui arrive à la naissance et qui reste jusqu’à la mort.

La peur elle est le témoin du bien et du mal.

On ne vit pas sans elle, on vit avec ailes.

Ce que je mords de mes dents tellement j’y tiens, peut se relâcher l’instant d’une carie qu’il faut soigner. Ce qui n’a rien à voir avec l’os auquel je tiens.

Je n’oublie rien de ce qui me fait chien.

Niala-Loisobleu – 22 Novembre 2014

 

carcassonne-chien

 

 

LETTRES DE PANDORA « 5 »


LETTRES DE PANDORA « 5 »

Ce matin Pandora

s’il-te-plaît boucle-là

au nom de tout, pour tout le rien qui s’étale à la hune…

Allez loup ya, Pandora, remballe ta boîte à malices, avec tes certitudes nouées à tes doutes, tes affirmations biffées de ratures, tes engagements désertés, c’te berceuse à mitraille, les serments de la trahison, tout le panel de l’imposture en baise-position, le blanc plus noir que mort-né mis en pro jet. L’haut-le-coeur  de l’hypocrisie quand du vomis jaillit de mes narines d’avoir qu’à repousser les couleuvres de promesses rampantes faites par intérêt…

J’veux qu’Léonard soit tout seul à dire

que la vie c’est plus fort que la mort
Alléluia

Il paraît qu’un accord mystérieux
Que jouait David plaisait à Dieu
Mais la musique ne t’intéresse pas, n’est-ce pas ?
Ça fait comme ça :
La quarte, la quinte,
Le mineur tombe, le majeur monte,
Le roi surpris composant Alléluia
Alléluia, Alléluia
Alléluia, Alléluia

Tu voulais des preuves malgré ta foi.
Quand elle se baigna sur le toit
Sa beauté au clair de lune te subjugua
A un tabouret elle te lia
Ton trône brisa, tes cheveux coupa,
Et de tes lèvres tira cet Alléluia

Je suis déjà venu m’étendre
Et j’ai marché dans cette chambre.
Car je vivais seul avant de te connaître.
Sur le porche j’ai vu ton fanal.
L’amour n’est pas marche triomphale.
C’est un froid et c’est un meurtri Alléluia
Alléluia, Alléluia
Alléluia, Alléluia

Jadis, tu ne me cachais pas
Ce qui se passe ici en bas,
Mais maintenant ce n’est plus le cas, n’est-ce pas ?
Souviens toi, lorsqu’en toi j’entrais
De même la colombe sacrée
Chacun de nos râles était Alléluia
Alléluia, Alléluia
Alléluia, Alléluia

Tu dis qu’en vain j’ai pris le nom
Mais je ne connais pas le nom
Et puis, qu’est-ce que ça peut te faire, au fond ?
Dans chaque mot brille une flamme
Et qu’importe que l’on proclame
Le sacré ou le meurtri Alléluia
Alléluia, Alléluia
Alléluia, Alléluia

A faire de mon mieux j’ai cherché
Ne pouvant sentir, j’ai touché
Je t’ai dit vrai : je n’suis pas venu tricher.
Tout est allé mal et pourtant
Je viens devant le Dieu du Chant
Sans rien d’autre à mes lèvres que Alléluia
Alléluia, Alléluia
Alléluia, Alléluia
Alléluia, Alléluia
Alléluia, Alléluia
Alléluia, Alléluia
Alléluia, Alléluia
Alléluia, Alléluia
Alléluia, Alléluia
Alléluia

Et qu’on pour qu’on

Alléluia

on ne pleure pas que de ce qu’on reste indifférent

mais qu’on chante

Alléluia

tout l’espoir qu’au delà de tout on porte en soi !!!

So long Léonard

Niala-Loisobleu – 11 Novembre 2016

Un camp décence…


Un camp décence…

Rien ne se répare sinon les mots
s’il n’y avait pas les mots
il n’y aurait que la mort
mots anti-mort mort anti-mots
rien ne se creuse sinon le lit
où coule l’eau torturée
chaque goutte perdant la vie
en touchant la goutte suivante

et ainsi et ainsi dans le fleuve des mots
qui se nomme Histoire
on se fout pas mal que
réparation soit due aux peuples
jamais ne se regonfleront
les mollets les enfants les martyrs
les morts de faim
un quelconque mai
on peut tirer en leur honneur
des salves d’adjectifs
qui ne les concernent pas
il n’y a que des transferts
jamais de justice
à moins que la douleur ne soit une justice
dans ce cas
plus besoin de mots.

Thérèse Plantier

Alors je revins à la racine de ta pilosité

restait ses gouttes qui font les bébés-nageurs

Alors que le tremble était immobile

d’un coup de rin je fis tout

Et quand ton râle couvrit la forêt bien au-delà de l’Arbre de Vie

me parvint le clapot des feuilles soulevé par tes nageoires

Nous ne sommes et resterons rien que

Nous

race d’Homme de couleurs confondues…

Niala-Loisobleu – 25 Octobre 2016

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Des Hommes Pareils


Des Hommes Pareils

Vous, vous êtes et nous, nous sommes
Vous, vous êtes et nous, nous sommes
Des hommes pareils

Plus ou moins nus sous le soleil
Mêmes cœurs entre les mêmes épaules
Qu’est-ce qu’on vous apprend à l’école
Si on y oublie l’essentiel ?
On partage le même royaume
Où vous, vous êtes et nous, nous sommes…Moi, j’ai des îles, j’ai des lacs
Moi, j’ai trois poissons dans un sac
Moi, je porte un crucifix
Moi, je prie sur un tapis
Moi, je règne et je décide
Moi, j’ai quatre sous de liquide
Moi, je dors sur des bambous
Moi, je suis docteur-maraboutEt nous sommes
Des hommes pareils

Plus ou moins loin du soleil
Blancs, noirs, rouges, jaunes, créoles
Qu’est-ce qu’on vous apprend à l’école
S’il y manque l’essentiel ?
Semblables jusqu’au moindre atome
Vous, vous êtes et nous, nous sommes…

Moi, je me teins et je me farde
Moi, mes chiens montent la garde
Moi, j’ai piégé ma maison
Moi, je vis sous des cartons
Moi, j’ai cent ans dans deux jours
Moi, j’ai jamais fait l’amour
Nous, enfants neveux et nièces
On dort tous dans la même pièce

Quelque soit le prix qu’on se donne
On nage dans le même aquarium
On partage le même royaume
Où vous, vous êtes et nous, nous sommes
Où nous sommes des hommes pareils
Plus ou moins nus sous le soleil
Tous tendus vers l’espoir de vivre

Qu’est-ce qu’on vous apprend dans les livres
S’il y manque l’essentiel…?
S’il y manque l’essentiel…?
J’aime mieux ce monde polychrome
Où vous, vous êtes et nous, nous sommes…
Des hommes pareils…

 
Francis Cabrel
 
J’étaie une foi que j’échafaude à mon tracé de cathédrale, pierre brute au tympan sculpté d’animaux monstrueux où l’Homme trône. La gargouille tend le coup à Quasimodo en lui faisant la cour des miracles genre Esméralda dans la grille du l’ô tôt.
Je fais la buissonnière des colles pour que Théo r’aime étudier comme on sent les choses et non comme on veut nous les imposer. L’enfant que je ne cesserai jamais d’être a suivi les bords durs de trottoir, les deux pieds dans l’ô en chantant sous la pluie !
Niala-Loisobleu – 17 Septembre 2016
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Les vidanges du Diable


Les vidanges du Diable

Parti tôt plantés

les cris reviennent de loin

semelles qui chuintent dans la fange

sur l’immensité des non-dits

Voici que s’avance le re-culons d’un fantasme horloger

Ah du sable dans l’oeil ça vaut poutre.

Pas le moindre fétu où s’emmancher à califourchon, fouette cocher sur la paille au coeur de la meule

Relais de poste, remettez-moi aux brancards des chevaux frais

Le petit scout bi doux  licorne-t-il  au lit ?

De l’amour ça ?

Un blues me trempe Mississipi John Hurt, secousse, faisant reins coton, grande maison coloniale toute blanche en colonne de non de diou maudit soit-il.

Des enfants invités à aller faire leurs devoirs, à chacun son sien errant

l’animal en soutane demeure à ébranler l’alcôve

où la ménagère lui empèse son col de lubricités mouchetées

Dieu est grand, merde manquait plus que chelui-ci, lancine la voix off du péri en mère.

Au loin un glas décalotté luit de son mauve de deuil

Bang, bang, bang

ça cogne lugubre au judas du confessionnal, mon saigneur de Lyon, toujours prêt,  se taille une autre rondelle.

Qui veut se faire bénir la rosette, approche en toute innocence.

On plaide non-coupable.

Niala-Loisobleu

16/03/16

https://www.youtube.com/watch?v=i7v6-hNzMJs

LA NUIT TALISMANIQUE QUI BRILLAIT DANS SON CERCLE


LA NUIT TALISMANIQUE QUI BRILLAIT DANS SON CERCLE

Nous n’avons pas plus de pouvoir s’attardant sur les décisions de notre vie que nous n’en possédons sur nos rêves à travers notre sommeil. À peine plus. Réalité quasi sans choix, assaillante, assaillie, qui exténuée se dépose, puis se dresse, se veut fruit de chaos et de soin offert à notre oscillation. Caravane délectable. Ainsi va-t-on.

Soudain nous surprend l’ordre de halte et le signal d’obliquer. C’est l’ouvrage.

Comment ramener au liseron du souffle l’hémorragie indescriptible ? Vaine question, même si un tel ascendant avait eu son heure dans nos maisons dissimulées. Il n’est pire simplicité que celle qui nous oblige à chercher refuge. Pourtant la terre où nous désirons n’est pas la terre qui nous enfouit. Le marteau qui l’affirme n’a pas le coup crépusculaire. Ô mon avoir-fantôme, qu’ils se couchent et qu’ils dorment ; la chouette les initiera ! Et maintenant, c’est moi qui vais t’habiller, mon amour.

Nous marcherons, nous marcherons, nous exerçant encore à une borne injustifiable à distance heureuse de nous. Nos traces prennent langue.

René Char

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