UN BON JOUR
Opaque étoilé. Entre les montants du châssis des tempes, le marteau de la pensée brise la cécité.
On sent sans voir, dans cet état animal, qui met aux naseaux des yeux perçants, et aux yeux le touché de l’odeur à pister. Rien n’est tout à fait clair, le lucide s’infiltre dans tous les pores du flou. C’est pour moi, le moment où le cerveau passe le relais au coeur. Préemption naturelle.
L’oeuvre est présente, et elle me pénètre pas à pas. Déshabillage sans effort, sans fausse pudeur de l’intellect. Le raisonnement n’a pas la faculté de conduire à la Beauté. Il en masque l’essentiel, la partie cachée. Le creux où en passe d’absolu il mûrit. Par macération de l’instinct gardé animal.
Je suis programmé comme tout un chacun. C’est bien pour aller chercher le pain, faire pisser le chien, dire « Bonjour, comment ça va », sans que ça engage en quoi que ce soit. Merci M. Pavlov….
Et j’arrive devant la toile blanche. Cet espace aux côtes supposées définies, est en réalité une ouverture sur l’infinité des possibles. Je peins, rien de ce qui m’entoure au plus près ne figure sur la toile, l’ouvrage s’est introduit à l’intérieur d’une cavité inaccessible à la vue. La relation se veut intime. Le cerveau réunit les compétences dans son espace émotionnel pour donner carte blanche à l’innocence, qui prend le haut commandement des opérations. On accède pas au mystère par d’autres voies que celles du sensible.
Mes doigts touchent sans distance, sans obstacles de tous ordres, l’impalpable, le méconnu du raisonnement. Mes doigts trempent dans l’encre.Le sang de ma Muse. L’acte est charnellement spirituel, c’est l’union transcendante,.Elle a les pieds en Baie de Somme, je la salicorne Atlantique, les frissons qui rident la dune-peau en biseau, le piquant de l’oyat au violet du chardon – nous sommes dans les claies par le vide des barreaux du portail, musique du vent, moulins à eau – les arbres tendent l’oreille, le radeau flotte sur la canopée, un sherpa affranchi confie le courrier aux galops des chevaux sauvages, abreuvés par nos couleurs broyées aux mortiers des ventres assemblés. Des chiens aux têtes de gueules cassées d’un holocauste mordent pour chasser le faux-semblant. Les barbelés doivent être coupés avant les lauriers. Et les miradors débranchés des engins à rafales. Sais-tu qu’il peut venir une érection à tête-chercheuse en peignant ? Les moments de la licorne où ça pointe, disais-je quand j’avais des élèves à poil devant le modèle encapuchonné. Le saute-à-tout-crin sortait, décontenancé d’avoir perdu ses railleries. La couleur de Blanche sortait son arc-en-ciel du cumulus,..à dire chut sans remuer les lèvres. Les puanteurs de métro au levé du jour, et les passées 17 h se disloquent dans la nuit des tunnels. Ce bruit de rail du grincement des dents devient luge. Tout ça pour ne pas dire…
Ce jour, un rayon de soleil m’a tiré de dessous la marquise, je ne lui ai pas demandé des nouvelles. Ce que je vais vivre est affaire d’atelier. Du travail sur l’amour à poursuivre.
Niala-Loisobleu – 22 Janvier 2018

Vous devez être connecté pour poster un commentaire.