TRACES


 

 

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TRACES

 

Je t’ai vu surgir au terme d’un Autan le dire plutôt que d’y rester seule puisque des Corbières tu me fis venir à Toi comme l’aube vient avec son soleil.

Sido

« Car j’aimais tant l’aube, déjà, que ma mère me l’accordait en récompense. J’obtenais qu’elle m’éveillât à trois heures et demis, et je m’en allais, un panier vide à chaque bras, vers des terres maraîchères qui se réfugiaient dans le pli étroit de la rivière, vers les fraise, les cassis et les groseilles barbues.
À trois heures et demie, tout dormait dans un bleu originel, humide et confus, et quand je descendais le chemin de sable, le brouillard retenu par son poids baignait d’abord mes jambes, puis mon petit torse bien fait, atteignait mes lèvres, mes oreilles et mes narines plus sensibles que tout le reste de mon corps… J’allais seule, ce pays mal pensant était sans dangers. C’est sur ce chemin, c’est à cette heure que je prenais conscience de mon prix, d’un état de grâce indicible et de ma connivence avec le premier souffle accouru, le premier oiseau, le soleil encore ovale, déformé par son éclosion…
Ma mère me laissait partir, après m’avoir nommée « Beauté, Joyau-tout-en-or » ; elle regardait courir et décroître sur la pente son oeuvre, – « chef-d’oeuvre », disait-elle. J’étais peut-être jolie ; ma mère et mes portraits de ce temps-là ne sont pas toujours d’accord… Je l’étais à cause de mon âge et du lever du jour, à cause des yeux bleus assombris par la verdure, des cheveux blonds qui ne seraient lissés qu’à mon retour, et de ma supériorité d’enfant éveillé sur les autres enfants endormis.
Je revenais à la cloche de la première messe. Mais pas avant d’avoir mangé mon soûl, pas avant d’avoir, dans les bois, décrit un grand circuit de chien qui chasse seul, et goûté l’eau de deux sources perdues, que je révérais. L’une se haussait hors de la terre par une convulsion cristalline, une sorte de sanglot, et traçait elle-même son lit sableux. Elle se décourageait aussitôt née et replongeait sous la terre. L’autre source, presque invisible, froissait l’herbe comme un serpent, s’étalait secrète au centre d’un pré où des narcisses, fleuris en ronde, attestaient seuls sa présence. La première avait goût de feuille de chêne, la seconde de fer et de tige de jacinthe… Rien qu’à parler d’elles je souhaite que leur saveur m’emplisse la bouche au moment de tout finir, et que j’emporte, avec moi, cette gorgée imaginaire…» Colette

Et vînt L’EPOQUE 2018, fertile comme pas une jachère imaginerait se fire engrosser.

T’y voilà

Saches ô combien ta main a l’empan de la fée de l’écriture et comme je la serre et t’aube en récompense.

 

Niala-Loisobleu – 22/10/18

NOTRE JARDIN BLEU 6


NOTRE JARDIN BLEU 6

L’aube a soulevé ses aisselles

dans l’heure silencieuse pour suspendre

ton image unique aux feuilles du tremble

et l’étoile feinte des séductions charnelles

s’entretient avec le vent de choses éternelles

dans le tendre jardin de la paix blonde.

 

Des mains neuves et sans mémoire

cueillent l’orange bleue du jour

et s’émeuvent de l’amer savoir du monde

en recul sur la vie, en recul sur l’amour.

 

C’est l’heure du pavot et de la cérémonie des coffrets

et l’enfant fiévreux de ton regard rampe

inquiet entre la persistance et l’origine,

s’allonge au berceau tressé de ses racines;

au front, une moiteur que ma main de menthe éponge.

 

Aussi longtemps que s’allumeront les lampes

sur le feu et la faim, la fleur de mon genou

s’offrira comme l’ultime rampe

qui mène aux marches humides de nos songes.

 

 

Barbara Auzou.

 

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Notre Jardin Bleu 6 – 2018 – Niala – Acrylique s/carton toilé 55×38, encadré

 

 

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EN CABRURES


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EN CABRURES

Tu viens de ces levers qui couchent la raison

et leurs mi-graines

sous les ruades du sang de l’espoir

cheval absent

aux quais d’arrivées des erreurs de stationnement

présence des mouchoirs

Muselant à la niche les clochers plantés sur les aiguilles

de la férule de Chronos

ne portant plus au poignet que le pouls de l’allant

Libre d’espaces vers lesquels glisse ton ventre coque

tu t’harponnes toutes cales ouvertes

au devant de ta propre découverte

Troussée des habitudes

usinées aux manufactures de guerre lasse

ficelant l’affranchissement

L’interdit laissé au trompe-l’oeil du décor

tu voles de la couleur mimétique des marées montantes

en sel à la conquête de toi-même

Des bois flottants noués aux orées des pontons

font et tapent d’île en île

la traversée de l’anonyme matricule

Niala-Loisobleu

17 Octobre 2018

DE FEU


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DE FEU

L’attelage à ras d’eau surfe sur le tracé d’un chant de fleurs

Au lin bleu ton châssis vertèbre les mains

du vent te toile

sombre en travers

le cheval saute par-dessus la rivière lascive

 

A la racine de l’autre argile le touret façonne

dans l’émail le feu prépare les reins…

Niala-Loisobleu – 17/10/18

IN TEMPORALIBUS


IN TEMPORALIBUS

Tout autour en plein centre de bas en haut quand l’eau se prenant de démence par la rage d’un abus-d’homme-cause-de-nos-hors, pharaon de boulevard du crime, qu’un Nil porterait en désastreuses conséquences au sommet d’une pyramide tronquée. Tchao pantin ta courte vue, ton mépris de la vérité n’empêchent que je garde malgré la rage au ventre apportée par ton indifférence un espoir insensé. Il faut garder la vie à la vie et non la profaner. 36 ans après je vois les catastrophes naturelles s’enchaîner, panel élargi,  dans un mouvement d’accélération. Stop, il faut freiner. Laissez-nous chanter…
Niala-Loisobleu – 15/10/18
A2-Niala 73
EXULTATE-JUBILATE (Série IN TEMPORALIBUS FINAL n°55)  NIALA/1983
Huile s/toile 195X130
Collection MMme R. DELHOUME
L’ÉCLAIRCIE

La vase sur la peau des reins, le gravier sur le nerf optique, tolérance et contenance.
Absolue aridité, tu as absorbé toute la mémoire individuelle en la traversant.
Tu t’es établie dans le voisinage des fontaines, autour de la conque, ce guêpier.
Tu rumines.
Tu t’orientes.
Souveraine implacable et mère d’un grand muet l’homme te voit dans son rasoir, la compensation de sa disgrâce, d’une dynastie essentielle.

L’invincible dormeur enseignait à ses auditeurs inintéressés que là où le mica était perméable aux larmes la présence de la mer ne s’expliquait
pas.
De nos jours, les mêmes oisifs distinguent dans les fraîches cervelles innocentes les troubles insurmontables de l’âge futur.
Symptômes de l’angoisse à l’extérieur des sépultures de l’ingénuité en extase ; – ô profanation de l’esprit thermidor de famille, aurons-nous le temps de vous
imposer notre grandeur ?


L’intacte chrysalide a recouvré ses propriétés agissantes de vertige.
La perforation des cellules du rayon, la traversée de la cheminée anathématisée, la reconnaissance des créances oubliées se poursuivent à travers les
éclairs, le grésillement et la révélation de l’espèce fulgurante de grain solaire.
Le sort de l’imagination adhérant sans réserves au développement d’un monde en tout renouvelé de l’attractif pourra être déterminé en cours de fouilles dans
les archipels de l’estomac à la suite de la brutale montée, à l’intelligence non soumise, du trésor sismique des famines.

René Char

NOTRE JARDIN BLEU 5


 

NOTRE JARDIN BLEU 5

 

Puisque tu me regardes

Tu sais que les ombres qui s’attardent

Ne peuvent rien contre nos plus fiers chevaux

Lancés à l’assaut de la clarté apaisée

Et que le sabot au sablier

Comme des enfants de grand sommeil

Nous sommes partis pour rester

Par le murmure et le reflet

Fidèles aux fruits vermeils

Et à l’eau volage déroutée

De son lit convenu.

 

 

Puisque tu me regardes d’un oeil nu

Comme une fleur retournée sur la fraîcheur de la terre

Tu sais comme la beauté mène l’obscur à la lumière

Et que rien ne peut la déranger

Qu’un coeur martelé d’un savoir obtus

Porté sur des couches de vêtements usés.

 

 

Le jardin bleu a franchi la fenêtre de la chambre

Comme on s’ajuste aux choses de toujours

Et le ventre des collines a revêtu son ambre

Pour enjamber la margelle du jour.

 

 

Comme un grave écho de toi

Attendant son retour

Regarde-moi.

 

 

Barbara Auzou

 

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NOTRE JARDIN BLEU 5
NIALA/2018
Acrylique s/carton toilé 46×38
Encadré

STASE


 

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STASE

Claquements de draps, un périmètre blanc pointe le jour sur la partie endormie,. Nostalgie concentrée sur la manivelle hébétée.

Les sabots du cheval manquent au bruit rassurant de l’éveil.

Changement d’araire ?

Les parois de l’atelier en suaire tiennent les outils dans un incertain halo, rien ne bouge, la musique a cessé son guet.

Volets tirés, l’imaginaire tient l’odeur de la Muse dans le silence vigilant des heures de veille.

 

Niala-Loisobleu – 12/10/18

 

ENTRE TIEN EMOI 32


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ENTRE TIEN EMOI 32

Les morceaux d’un entourage aux quatre coins. Que l’horizon en est devenu obèse sans sa ligne. Au point que des puanteurs se déguisent en N° de Chat-Nesles. Mélange à l’indécence, con fusion amorale, pornographie de la pureté, on va à la butée du noir…J’ai pas dormi. Besoin urgent de rassembler ce qui de Nous fut dévoyé insolemment. Sans permission.

Libre-arbitre, tolérance sont des vertus qui ne peuvent en aucun cas être galvaudées. La bêtise s’apprête à se faire reconnaître, c’est un édit de roi qui n’hante pas ma République.

La canicule détruit tout sans pitié, le réchauffement de la planète est le paradoxe le plus fort de l’homme-absurde. Plus il s’évertue à faire en sorte, plus la glaciation entre en son coeur. Comme Saturne il fait voeu de manger ses enfants.

Je suis triste

on voudrait écrire la Poésie sur du papier-chiottes

Peindre de la merde en tant qu’Art de la toile

Comme si le Jardin-Terre n’était  plus rentable qu’à exploiter la drogue

Dans mon coin d’idéal

où tu es venue

ma Muse

rejoindre bien d’autres concepts, il faut que nous protègions cet absolu

ma Barbara.

Il est menacé d’incompréhension.

Niala-Loisobleu – 9 Octobre 2018

Il y a eu un roulement d’éclairs au pouls qui ne craint pas l’ô rage


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Il y a eu un roulement d’éclairs au pouls qui ne craint pas l’ô rage

 

Au milieu d’un passage sec un canal sous terrain veille

rien qu’à se retourner les yeux du ciel où tout file

pour voir monter l’herbe aromatique entre ses coudes, au relevé du regard.

Nous marchions, les pendules  aiguillées à d’autres tricots

l’haleine astre à quand le moment est

pourquoi n’irions-nous pas aux pâturages de la transhumance ?

Il y a eu un roulement d’éclairs au pouls qui ne craint pas l’ô rage et que l’averse transporta d’un flot fertile jusqu’aux confins du delta.

 

Mains tenant des crêtes d’écume dressent la chair de poule en arc-en-ciel  au duvet…

Niala-Loisobleu – 08/10/18

 

 

 

AUX OISEAUX


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AUX OISEAUX

Paroares, rolliers, calandres, ramphocèles,
Vives flammes, oiseaux arrachés au soleil,
Dispersez, dispersez, dispersez le cruel
Sommeil qui va saisir mes mentales prunelles!

Fringilles, est-ce vous, euphones, est-ce vous,

Qui viendrez émouvoir de rémiges lumières

Cette torpeur qui veut se croire coutumière

Et qui renonce au jour n’en sachant plus le goût?

Libre, je veux enfin dépasser l’heure étale,
Voir le ciel délirer sous une effusion
D’hirondelles criant mille autres horizons,
Vivre, enfin rassuré, ma douceur cérébrale.

S’il le faut, pour briser des tristesses durcies,
Je hélerai, du seuil des secrètes forêts,
Un vol haché de verts et rouges perroquets
Qui feront éclater mon âme en éclaircies.

Jules Supervielle