PAR LE CHEMIN DE PEINDRE


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PAR LE CHEMIN DE PEINDRE

Peindre

donner à son âme

le droit de représentation

en tous endroits

en toutes circonstances

d’acte et de pensée

par rapport au froid et au chaud de son poil

par le lien que la sensibilité capte, rapport émotionnel

par la spontanéité du geste mu des stimuli reçus

de l’heur de son horloge interne

Devenir siamois du pigment

étreint du pinceau

buvant le médium

qui nargue le couteau

d’un désir d’empâtement

qui peut se faire vapeur d’eau pour pierre

Matière de soi

née du quelque part d’autres

Sensualité affichée

par l’érection d’une forme

donnant l’orgasme à la composition

Peintre montre-toi nu

plus déshabillé que ton modèle

Dis ton combat pour trouver

ce que ton humilité doit taire

Couleur

tu es le teint du tant

dans l’humeur de ta souffrance du peu

Peindre avec l’alphabet de son écriture

du A comme je t’aime aujourd’hui

au Z comme en corps hier à deux mains

La peur unique au ventre

la peur qui crée

la peur qui stimule d’une poussée animale

la peur qui fait surmonter sa peur inadéquate

la peur qui veut que tu la lises espoir

contre l’arrêt brutal de courant pot au noir

désarroi

un rond à remplir de jaune

souligné de bleu vertical

Miroir du ressenti

de la présence

Rien ne se délie du touché ressenti

du vent porteur la vague peut tourner soudain en dérive

changement de direction

une onde passant d’un milieu dans un autre entraîne la réfraction qui dévie…

Niala-Loisobleu – 06/09/18

La Chambre


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La Chambre

À Colomba.

 Je vais te parler des chambres où nous avons vécu. Des chambres que nous n’avons fait qu’apercevoir dans un rêve. Des chambres d’un jour; des chambres d’un mois; des chambres d’une année. Des chambres froides où nos mains se cherchaient effrayées et glacées. Des chambres étouffantes donnant sur une mer tropicale. Des chambres silencieuses comme des tombes. Des chambres bruyantes comme des foires. Chambre blanche de Raguse, les murs sont de vastes miroirs pour le sommeil mouvant des vagues. La craie des mouettes écrit des mots magiques sur le tableau noir de notre souvenir. Chambre vieille de Vienne, sentant le moisi et le renfermé; je suis couvert de sueurs dans le lit et j’ai froid et tu appelles affolée un médecin. Chambre terrible, chambre déserte de Soubolitza en Yougoslavie où notre cœur se déchire entre le désir de retourner en arrière et celui d’aller plus loin. Il n’y a que quelques brindilles pour le feu, et le froid est si grand que nos voix sont comme des morceaux de glace dans nos bouches. Chambre de Venise pesante, lourde comme un tapis plein de broderies et de monnaies anciennes; la mer comme une tireuse de cartes fait sa réussite multicolore. Chambre au baldaquin haut de Pavie, les murs ont un regard de pierre. Chambre de Kaspitcheak en Bulgarie, sentant la terre fraîche et le fumier. O! Chambre vaste et lumineuse de tes parents dans le quartier sud de Bucarest, la nuit comme une main chaude, le dernier fiacre qui s’en va en rêvant sous les fenêtres. Et la chambre inhospitalière dans cet hôtel de Berlin. Et ces chambres qui sont la seule chose que nous avons connue d’une ville; chambre de l’hôtel de Varsovie où les bras des neiges nous ont enlacés et où nous sommes restés de minuit à sept heures du matin. Chambre de Zagreb où par la fenêtre se dessinaient les montagnes. Nous avons rêvé de monter sur les cîmes et de crier au soleil: Hé, nous voici, Soleil! Mais nous n’y sommes jamais revenus. Chambres de Nantes, de La Rochelle, de Bordeaux, du Havre et ô! les chambres de Paris où nos années sont restées comme en des coffres secrets: chambre désolée et vide de la rue Brancion, chambre comme une plage dévastée de la rue Jonquoy. Chambres étroites comme des cercueils où la voix des voisins était haineuse comme la voix des morts. En Suisse, à Vevey, nous avons passé une nuit dans une chambre de vivants; les draps étaient très blancs et à travers les rideaux le lac nous invitait vers son ciel noble. La matin le bon café et le beurre, les confitures ô! belle aube de Suisse. Mais je tremble, une main serre mon cœur comme une éponge. J’entends mon sang qui coule goutte à goutte dans une grotte: je vois la chambre d’hôpital, tu es là après l’opération, tu as un regard si bon, si doux, tu me pardonnes de t’avoir menée dans cette salle hostile. Ta voisine est une petite fille, en face il y a une femme qui te ressemble et son mari qui me ressemble, ils se tiennent les mains, ils ne se disent rien, ils se regardent, c’est peut-être nous-mêmes car nous aussi nous nous taisons, nous nous tenons les mains, nous nous regardons. J’ai peur et je cache ma peur. Dehors les peintres sont en train de peindre les murs, ils sont habillés de blanc, les infirmiers aussi sont habillés de blanc, ce sont peut-être des peintres eux aussi et ils blanchissent à la chaux nos âmes. Quand je m’en allais je rôdais autour de l’hôpital et j’emportais en moi la chambre avec ses lits et ses malades comme un tiroir dans une armoire. Ô ! Il y a aussi les chambres trop vastes qui dépassent les frontières du monde, et celles qui tombent comme des navires au fond de nous et celles où l’on aime revenir pour retrouver son propre visage: Ai-je beaucoup changé? Il y a les chambres où je suis allé avec des femmes de passe et ton souvenir me faisait mal et donnait un goût très amer à l’amour, je fuyais ensuite par les rues et la chambre avec son odeur étrangère cognait les parois de ma tête et ne voulait pas s’en aller, ne voulait pas…

Chambre, je n’ai été en toi que quelques heures
Mais toi, tu resteras, toute ma vie, en moi,
Certes, nous sommes comme ces boissons qui gardent
Longtemps le goût de terre de la cruche qui les a contenues.

Les visages d’aucuns sont comme les cartes
Où se lit le dessin des chambres qu’ils habitent.
Il y a des chambres trop larges comme des pardessus d’emprunt
Il y a des chambres où l’âme doit se voûter comme un dos.

Il y a des chambres si aérées, si claires
Que rien ne les sépare des montagnes qui les entourent.
La forêt, les étoiles s’approchent des fenêtres,
On prend le thé avec des amis sur la terrasse.

Il y a la chambre où est enfermée ton enfance
Elle se méfie, elle ne te reconnaît plus très bien,
Il y a la chambre où ton père a été malade
Trois mois il a attendu la mort, et elle est venue.

J’ai passé à travers beaucoup de chambres
En les quittant je paraissais le même, mais les murs,
Les miroirs fumeux, les objets qu’enchaînait l’ombre
Gardaient, chaque fois, mon visage secret.

Ceci était ma chair et ceci fut mon sang
Versé de verre en verre, distribué à table,
Parfois je me surprends au milieu d’une chambre
Faisant le pas, le geste venant d’une autre chambre.

Il y avait une porte ici? Il n’y en a plus.
Et la fenêtre où est-elle donc? Il y avait
Un aboiement comme un linge à sécher dans la cour,
De l’autre côté du mur, une voix animée.

Mais ce n’est peut-être partout qu’une même chambre
Que l’on porte avec soi et qui s’adapte aux murs,
Dans les palaces, ou dans une mansarde, ou au fond d’une cave,
Elle sort de nous et recouvre tout de son étoffe.

Chambre qui donnait vers une cour sombre,
Chambre où résonne encore la voix de l’ami,
Lui, il est déjà moins qu’une ombre,
Mais sa toux, sans poitrine, s’affole en cette chambre.

J’ai connu aussi la chambre au retour de voyage
Et cette odeur de cuir et de départs,
La chambre entourée d’orages,
Et envahie par la mer de toutes parts,

Il y a vraiment des chambres qui ne veulent pas de vous,
Qui vous vont mal, qui vous tolèrent à peine,
Il y en a d’autres où l’on se sent à l’aise,
Le cœur tranquille, un livre ouvert sur les genoux.

Car il faut que l’on se mêle à la chambre,
Que l’on se perde en elle comme en un nuage,
Qu’il y ait entre vous et elle un courant continu,
Que l’on s’aime et que l’on se ressemble,

Alors l’âme déploie, confiante, sa lumière,
La chambre devient vaste ou étroite, selon votre désir,
Les murs sont affectueux et au-dessus du lit
Le plafond tend les toiles d’un sommeil paisible.

Ilarie Volonca  (1939)

 

A LA NOTRE

A l’ô, tel un bateau, notre chambre voyage …elle porte le N° Tresse pour que je te peigne sans cesse. Aux trottoirs d’ici et de là-bas, les marchés étalent leurs quatre-saisons. D’un jour lourd se faisant échelle pour un tant meilleur. D’une odeur non coupée, parfum d’intimité dévoilé. A quai, jetées, nos étreintes se font chenal pour sortir du couloir.

N-L  (15/12/16)

LACUSTRES


LACUSTRES

D’un tremblement indicible, la maison court de long en large

au plus reculé du village Que d’années à se sortir de l’arrière-cuisine

Retournant la chambre d’amour de fond en comble,

loin des enfouissements des pilotis

qui pourtant,

contre toutes apparences,

continuent à nager

nous visons la rive

L’odeur de jasmin s’entête à escalader le tertre.

Est-ce par l’alchimie des peaux retournées,

par l’élargissement des brisures à corps défendant,

ou par la brûlure des zéniths décalés,

que du clocher le coq sonna ce jour après qu’il se fut levé ?

Rien en particulier, tout

chez Soi

est à prendre ensemble

pour désengorger.

Des glacis transparents, liquéfiés aux écoulements internes

la couleur se débat pour reprendre

matière

éclat

lumière

vigueur

et rejoindre d’un bond la main d’un esprit commun

qui élargira les fissures par où évacuer

les accommodements de tons rabattus imposés par l’Académie…

Entre deux eaux, deux aiguilles face à face

pendulent

en croisant le faire d’un cap et d’épais, vent à tâtons.

Tandis

que paisiblement grimpés sur le récif,

les traits mis ensilent pour deux mains…

Niala-Loisobleu – 6 Décembre 2016

 

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Dédicace à Vénus


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Dédicace à Vénus

L’alphabet qui s’est arrêté devant la porte du riche sort
d’un trou de terre entre deux terres
du hoquet d’un trèfle boiteux
de la toux d’un cerfeuil grabataire
 
on lui a parlé de livres qui dorment debout comme les chevaux
de pages serties de pierreries comme ciel d’août
comme tiare de sultan aimé de son harem
 
les enluminures saignent lorsque la lampe par mégarde incendie
une luciole
des centaines d’ailes expriment rage et désapprobation
les hommes ne peuvent en dire autant

Vénus Khoury-Ghata

(Extrait de « Quelle est la nuit parmi les nuits », Ed. Mercure de France, 2004)

 

Si ce n’était la pluie battante que le vent pousse de tressauts la main aux fesses, on se croirait dans une histoire de label au bois-dormant. Carglass est bien le seul a jurer qu’abonné on gagne un pare-brise avec ses essuyeurs. C’est con, j’ose pas dire lamentable vu les paramètres du langage actuel, où les lambdas sont debout avant que le chanteur sans voix commence à me faire croire que 3 secondes de Louane font plus de rendement qu’une boîte de bleu en pilules. Je bande à part c’est pas nouveau.A propos de quoi merci, comment, oui tout va bien siou plaît.

Ma sexualité comme je la respire est conforme à son genre féminin, je la conjugue sans foutre la merde dans l’ordre des gamètes et sans confondre le présent du subjectif avec le passé isthme du réac. D’un côté il y a les modes de l’autre la nature. De tous les mécréants je pense être celui que je connais qui a le plus de foi.

« Le fauteuil des vénérabl’amants » pourrait être le sous-titre du « 7° Aux jardins de mon Amour ». je le dévoile d’encre ici avant de retourner dans l’atelier poser la peinture. Des mots-peints ne crissant pas sous le poids d’une plume d’A propos tendancieux ne voulant que vanter d’aboutir à l’exploit du mâle aimé. Mon concept de l’Art reste totalement lié au sacré dénudé de toute obédience dogmatique. La Femme en étant le premier symbole. Mes canons ne sont pas visibles de par son extérieur. La laideur se voyant au premier coup d’oeil, je laisse l’effet domino de la catastrophe au système que je désavoue.. La Beauté demeure ainsi dans toute son essence poétique. Uniquement installée dans l’âme. Je marche toujours enfant-mature-lucide.

Vénus lustre de cristal suspendu entre le bas et le haut, mouvement taillé de vibrations sonores que le souffle d’amour fait chanter en mille et un tressaillements de couleurs, ton pied à terre est un vol permanent de femme-oiseau qui s’est débarrassé dans la douleur de tous les archétypes qui font le bonheur des imposteurs.

 

Niala-Loisobleu

25 Février 2016

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