LE JARDIN


LE JARDIN

 

L’orage tient son impatience en point d’interrogation

D’un soleil fil à plomb

Ton débardeur baille à dessein

Le poids de la respiration prend l’air

Au cœur du timbre

Un jardin creuse sillon

Du ventre déchiré l’orange d’un rouge jaune tourné vers le bleu est sorti m’emmenant à l’atelier. A peine étais-je entré que le chevalet se dressait. Le tapis le démangeait. Jaloux de lui-même, la peau nue offerte au couteau en grand écart des trottoirs de la pénombre.

N-L – 08/06/18

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LA SEMAISON


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LA SEMAISON

 

 

 

I

Nous voudrions garder la pureté, le mal eût-il plus de réalité.

Nous voudrions ne pas porter de haine, bien que l’orage étourdisse les graines.

Qui sait combien les graines sont légères redouterait d’adorer le tonnerre.

II

Je suis la ligne indécise des arbres

où les pigeons de l’air battent des ailes :

toi qu’on caresse où naissent les cheveux…

Mais sous les doigts déçus par la distance, le soleil doux se casse comme paille.

III

La terre ici montre la corde.
Mais qu’il pleuve un seul jour, on devine à son humidité un trouble dont on sait qu’elle reviendra neuve.
La mort, pour un instant, a cet air de fraîcheur de la fleur perce-neige…

IV

Le jour se carre en moi comme un taureau : on serait près de croire qu’il est fort…

Si l’on pouvait lasser le torero

et retarder un peu la mise à mort!

V

L’hiver, l’arbre se recueille.

Puis le rire un jour bourdonne et le murmure des feuilles, ornement de nos jardins.

Pour qui n’aime plus personne,
La vie est toujours plus loin.

VI

ô premiers jours de printemps jouant dans la cour d’école entre deux classes de vent!

VII

Je m’impatiente et je suis soucieux :

qui sait les plaies et qui sait les trésors

qu’apporte une autre vie?
Un printemps peut

jaillir en joie ou souffler vers la mort.


Voici le merle.
Une fille timide

sort de chez soi.
L’aube est dans l’herbe humide.

VIII

A très grande distance,

je vois la rue avec ses arbres, ses maisons,

et le vent frais pour la saison

qui souvent change de sens.

Une charrette passe avec des meubles blancs

dans le sous-bois des ombres.

Les jours s’en vont devant,

ce qui me reste, en peu de temps je le dénombre.

IX

Les mille insectes de la pluie ont travaillé toute la nuit; les arbres sont fleuris de gouttes, l’averse fait le bruit d’un fouet lointain.
Le ciel est pourtant resté clair; dans les jardins, la cloche des outils sonne matines.

X

Cet air qu’on ne voit pas porte un oiseau lointain et les graines sans poids dont germera demain la lisière des bois.

Oh! le cours de la vie entêté vers en bas!

XI

Le fleuve craquelé se trouble.
Les eaux montent et lavent les pavés des berges.
Car le vent comme une barque sombre et haute est descendu de l’Océan, chargé d’un fret de graines jaunes.

Il flotte une odeur d’eau, lointaine et fade…
On

tremble, rien que d’avoir surpris des paupières qui s’ouvrent.

(Il y avait un canal miroitant qu’on suivait,

le canal de l’usine, on jetait une fleur

à la source, pour la retrouver dans la ville…)

Souvenir de l’enfance.
Les eaux jamais les mêmes,

ni les jours : celui qui prendrait l’eau dans ses mains…

Quelqu’un allume un feu de branches sur la rive.

XII

Tout ce vert ne s’amasse pas, mais tremble et brille, comme on voit le rideau ruisselant des fontaines sensible au moindre courant d’air; et tout en haut de l’arbre, il semble qu’un essaim se soit posé d’abeilles bourdonnant; paysage léger où des oiseaux jamais visibles nous appellent, des voix, déracinées comme des graines, et toi, avec tes mèches retombant sur des yeux clairs.

XIII

De ce dimanche un seul moment nous a rejoints, quand les vents avec notre fièvre sont tombés : et sous la lampe de la rue, les hannetons

s’allument, puis s’éteignent.
On dirait des lampions lointains au fond d’un parc, peut-être pour ta fête…
Moi aussi j’avais cru en toi, et ta lumière m’a fait brûler, puis m’a quitté.
Leur coque sèche craque en tombant dans la poussière.
D’autres

montent, d’autres flamboient, et moi je suis resté dans

l’ombre.

XIV

Tout m’a fait signe : les lilas pressés de vivre

et les enfants qui égaraient leurs balles dans

les parcs.
Puis, des carreaux qu’on retournait tout

près, en dénudant racine après racine, l’odeur de femme travaillée…
L’air tissait de ces riens une toile tremblante.
Et je la déchirais, à force d’être seul et de chercher des traces.

XV

Les lilas une fois de plus se sont ouverts (mais ce n’est plus une assurance pour personne), des rouges-queues fulgurent, et la voix de la bonne quand elle parle aux chiens s’adoucit.
Les abeilles travaillent dans le poirier.
Et toujours demeure, au fond de l’air, cette vibration de machines…

Philippe Jacottet

RÊVES ASSUMÉS


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RÊVES ASSUMÉS

Que suis-je alors, lorsque je ne rêve plus ?
Un désir de pluie fine sur des fleurs fragiles ?
Une dune de sable sous une promesse inutile ?
Serais-je encore moi-même sans tant de larmes tues ?

Accrochée à des lunes d’une autre galaxie
Je balance sans fin entre Terre, Ciel et Ombre
Creusant, avec la mer qui verse de mes yeux sombres,
Des falaises de dentelle contre vents d’autres vies.

Les guerres intérieures ne signent d’armistice
Que sous l’étoile jaillie de tes lèvres passagères,
Puis dans l’aurore grisée des lumières de cimetières
Elles grondent encore plus fort de leur nouveau supplice.

De ta bouche coule encore l’instant de paix nocturne.
Je lèche le fil d’argent goûtant ta liberté.
Cet instant de mensonge que tu changes en pureté
Prolonge un peu mon rêve dans l’obscure commissure.

Non, je ne suis pas sûre d’être, si je ne rêve plus.
Peu importe les fleurs exorcistes des boues
Peu importe le sel et le vent qui le sculpte
Mes larmes abreuvent les rêves qui me tiennent debout.

Colette Grondin
Extrait de:

« Recueil en vers et contre tout »

A travers ses cils je laisse nager mon oeil aux poils lacustres de son train de bois. Les vaisseaux de guerre de l’armada nuageuse menacent des sabords, la gueule mise-à-feu en bordées défiant le crachoir. Quand l’ombre d’un regard fouineur colle à nos serrures nous sentons le sol perdre sa clef. Où que nous allions, là d’où nous venons reste et demeurera étranger au copié-collé d’un mode à ficelles ordonnancé par tout pouvoir. Notre rêve n’est-il pas d’abord l’aveu même de notre libre-arbitre. A l’intérieur duquel l’Amour majuscule. Au titre d’un Absolu, fait syllabe de notre souffle. Les assèchements respiratoires des aléas d’un quotidien prolifique en la matière ont beau faire, nos bouches trouvent l’une dans l’autre la langue du rêve assumé.
Niala-Loisobleu – 31 Mai 2018

VOIX DE BICYCLETTE


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VOIX DE BICYCLETTE

Des godasses lacées aux quat’coins des touffes d’herbes, me regardent sans fatigue

plus crottées qu’un lustre de faux-semblant

elles ont des marnes qui collent à la betterave

des macadams fumeux comme un bitume de fourneau de pipe

sans omettre les vis de tous ces escaliers de service qu’elles ont tant de fois tournées à l’envers comme à l’endroit

plaines de craies des vignes tordues que le calcaire entartre aux fossiles

petits chemins planqués à l’abri d’une frise de mûres

couvert d’un pré haut dans une cour de communale

où les osselets des évasions dansent point macabres

de temps à autre en plein chant au pupitre

école des filles et colles des garçons

une petite gare plantée au travers d’une vague d’épis

rouge bleuet bleu coquelicot

folle avoine

voies secondaires

roulis d’un boulonnais ouvrant le ventre de la terre d’un coup de soc être

chaussettes en accordéon dans la tête ailleurs

des boutons de culotte dans les batailles

puis moins ludiques ces jeux d’adultes comme y disent

où que les grenades sont séparées des arbres en vergers

et des frères par un côté blanc et un côté rouge

une tranchée au beau milieu d’un assaut de mites railleuses

qui ne laisse que des alignements de croix blanches

souvent anonymes comme une flamme qu’on doit rallumer tous les matins

et en corps qui s’en souvient

de quoi ça à pu servir de donner sa vie

les grandes forêts où mon grand-père puis mon père

vivaient insoumis en francs-tireurs pour pas perdre leur image d’hommes

c’est qu’on y tenait à sa dignité d’exister

quand le ventre refuse

y donne des ruades sans savoir lire verboten

mais dans mes godasses y a plein d’espadrilles qui font les moissons

pendant les grandes vacances où que les dunes dressent leurs oyats

face à la mer et à toute la famille

tout au long des côtes sauvages à bronzer intégral

pieds nus

la p’tite Zézette et le Titoeuf sans culottes

j’aime pas les bottes

elles ont un bruit qui explose dans mon coeur

en écrasant toujours le sang à renfort de wagons dans les plis des chemises noires

qui arrachent les enfants comme de la mauvaise herbe

lessivent au gaz

bouillent l’innocence dans des crématoires

laissant les habits à rayures sécher au bout d’une corde

mais voilà les galoches qui sentent bon le bois

elles faisaient un somme dans les toiles d’araignées du grenier où j’habite

avec ma boîte à couleurs

mes plumes

mon encre

mon bateau en papier

les bassins du Luxembourg et des Tuileries

et sur le pont mon Capitaine

qui se tient sur la grand roue d’un vélo dépassé par les événements

Au revoir cabane, bonjour le Nouveau Jour

Niala-Loisobleu – 18 Mai 2018

 

VIE PRIVEE 39 –  JE SUIS INCOMPATIBLE


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VIE PRIVEE 39 –  JE SUIS INCOMPATIBLE

Moins d’un an est passé depuis le 38 de ma Vie Privée, c’était le 18 Juin 2017. Jour d’Appel. N’empêche qu’à un jour près du n’importe lequel où tu reviens dans ton existence, en pas une heure tu peux la voir se retourner. Monsieur de La Pallice 1 minute encore avant de mourir il était vivant…

Il y a un an j’errais dans mon échec électoral, le Macron avait gagné, bien que cela ce soit fait sans surprise, de le savoir au pouvoir j’en trouvais plus l’endroit où poser mes pieds. Rien depuis n’est venu me contredire, je m’étais pas trompé. Personne n’y comprendra quelque chose, mais de pas me tromper en fait ça ne m’arrive jamais – dit sans prétention – sauf sur moi-même où régulièrement je me plante. Il y a toujours l’amour qui soulève et qui crac, boum, pu, me pète à la gueule un beau matin, comme on raccroche d’un coup sec au prétexte d’un reproche. J’ai la vue basse sur ce que je dois réellement être. Au vu de ce que je récolte c’est manifeste, disant toujours que ce qui aime donne et ce qui n’aime pas demande. J’ai rien d’mandé…Mais pas de doute aujourd’hui comme avant, ce que j’ai donné c’était pas ce qu’on attendait de moi. Je suis le salaud qui s’ignore. Je vais pas faire de procès. C’est fini, ça m’a coûté 3 fils, je suis pas partant pour aller au devant d’une nouvelle défaite. Il me reste à analyser mon concept de la poésie. Il ne me reste qu’elle. Je dis depuis longtemps, surtout quand je clame l’hypocrisie de langage et de comportement de ce monde que seule elle pourra sauver le monde. Le doute m’assaille. Si on triche avec elle comme avec le quotidien ? Où est l’espoir ? Je suis carré, donc incompatible avec ce monde. Tout le problème se trouve là et pas ailleurs. J’ai eu tort de lasser paraître la série noire qui me colle aux basques. Seulement, rompu à aider les autres à sortir des leurs, je sais trop bien qu’en parler est le seul moyen de l’évacuer. Surtout quand on n’en gémis pas. Alors si le crabe et la cabane dérangent ça n’a pas été volontaire, mais ne regrette rien. Au fond moi je me sens propre.

Niala-Loisobleu – 16 Mai 2018

 

 

PROMESSE D’UN JARDIN


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PROMESSE D’UN JARDIN

 

Tout ramassé, hors du sac, leur amour survit à la destruction de masse

la tige des fleurs du soleil rayonne

qu’on dirait un chant de vélo quand la robe arrivée aux épaules de la montée, montre la vigueur des cuisses

Le souffle en pédale sans faire sauter la chaîne

Le monde à part s’indique en ouvrant les chemins sans monnaie, une odeur de Givenchy dans les nymphéas qui fait le Jeu de Paume hardi comme la main de masseur dans la culotte mais sans le zouave laissé au maintien du pont

Quand viendra le Soi

pas d’inquiétude à avoir

il aura bien trouvé son Jardin.

 

N-L – 11/05/18

JARDIN RICHE


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JARDIN RICHE

D’un peint

les mains dans la terre

tout ce matin

j’ai pétri la motte

pensant à tout ce qui y entre et et en sort…

Niala-Loisobleu – 21 Avril 2018

 

ENTRE ACTES


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ENTRE ACTES

 

Je suis assis, la fenêtre est debout en plein ciel

sur le carrelage rouge une plante verte s’étire fort et vierge

le rideau fait une scène bucolique

côté jardin

tout doucement un trombone coulisse

bruits de tireuse, une odeur  seins tétiques précède la nourrice

halètements

la concierge est dans Lacour, ne pas déranger…

 

Niala-Loisobleu – 20/04/18