GEORGE NINA ELIAN – LA CHEMISE DE TON ATTENTE


GEORGE NINA ELIAN

LA CHEMISE DE TON ATTENTE

je faisais du vélo entre deux colonies
étrangères. je ne savais pas ce que je cherchais

(peut-être l’amour tordu comme
un arbre de Patagonie, peut-être l’immobilité au
cœur de l’angoisse)

je marchais extrêmement lentement comme
si j’allais entrer
dans un monde complètement inconnu et parallèle

je m’asseyais quelque part et j’écrivais, espérant
que mes morts me reviendraient

dans un matin blanc et transparent comme
la chemise de ton attente

(penche-toi sur son bord et regarde !)

George Nina Elian

ACCROCHE PAR LE FIL DE FAIRE


NIALA

ACCROCHE

PAR LE FIL DE FAIRE

C’est soleil au bout des clous

ces matins de tableaux

où les mots-peints sont venus dire

l’impossible faut y croire

parce que

c’est le rossignol qui se moque des serrures…

Niala-Loisobleu.

6 Février 2023

SERGE REGGIANI – SI C’ETAIT A RECOMMENCER


Si c’était à recommencer?
Si je devais refaire ma vie?
Je voudrais naître en Italie?
Au mois de mai?
Je voudrais être ce gamin?
Qui courait pieds nus au soleil
?Parmi les chèvres et les abeilles
Ne changez rien

Si c’était à recommencer
Dans un monde à feu et à sang
Je voudrais être l’émigrant
Que j’ai été
J’aim’rais repasser la frontière
Et sans capuche ni manteau
Redébarquer à Yvetot
Un soir d’hiver

Si c’était à recommencer
J’aim’rais un jour avoir vingt ans
Etre con et perdre mon temps
Dans les cafés
J’aimerais traîner mes illusions
Dans des décors de cinéma
Même s’il faut avoir l’estomac
Dans les talons

Si c’était à recommencer
J’aim’rais revoir tous mes amis
Même celui qui m’a trahi
C’est oublié
Je voudrais revivre ces heures
D’espérance et de désespoir
Ces nuits blanches et ces matins noirs
Un vrai bonheur

Si c’était à recommencer
J’aim’rais aimer les mêmes femmes
Je ne veux pas saouler mon âme
D’autres baisers
Je voudrais qu’il ne manque pas
Une larme, une déchirure
Au revers de mes aventures
Mea culpa

Si c’était à recommencer
J’aim’rais habiter le Midi
Y passer dix ans de ma vie
À tes côtés
Je voudrais avoir cinq enfants
Pas un de plus, pas un de moins
Et les revoir tous un à un
Prendre le vent

Si c’était à recommencer
Je suivrais le même chemin
Je manquerais les mêmes trains
Sans un regret
Je voudrais ne rien effacer
De mes joies, de mes solitudes
Qu’on n’oublie pas une virgule
À mon passé…

Source : LyricFind

Paroliers : Alain GORAGUER / Lebel Sylvain

Serge Reggiani – L’homme fossile


Serge Reggiani – L’homme fossile

V’là trois millions d’années que j’dormais dans la tourbe
Quand un méchant coup d’pioche me trancha net le col
Et me fit effectuer une gracieuse courbe
A la fin de laquelle je plongeai dans l’formol
D’abord on a voulu m’consolider la face
On se mit à m’brosser mâchoire et temporal
Suivit un shampooing au bichromat’ de potasse
Puis on noua un’ faveur autour d’mon pariétal

Du jour au lendemain je devins un’ vedette
Journeaux télévision y’en avait que pour moi
Tant et si bien du rest’ que les autres squelettes
Se jugeant délaissés me battaient un peu froid
Enfin les scientifiqu’s suivant coutumes et us
Voulant me baptiser de par un nom latin
M’ont appelé Pithécanthropus Erectus
Erectus ça m’va bien moi qu’étais chaud lapin

Et ces messieurs savants à bottin’s et pince-nez
Sur le vu d’un p’tit os ou d’une prémolaire
Comprirent que j’possédais de sacrées facultés
Qui me différenciaient des autres mammifères
Ils ont dit que j’étais un virtuos’ du gourdin
Qui assommait bisons aurochs et bonn’ fortune
Que j’étais drôl’ment doué pour les petits dessins
De Vénus callipyg’ aux tétons comm’ la lune

Ils ont dit que j’vivais jadis dans une grotte
Ils ont dit tell’ment d’choses tell’ment de trucs curieux
Qu’j’étais couvert de poils et qu’j’avais pas de culotte
Alors que j’habitais un pavillon d’banlieue
J’étais comm’ tout le mond’ pétri de bonn’s manières
Tous les dimanch’ matins je jouais au tiercé
Je portais des cols durs et des bandag’s herniaires
C’était avant la guerr’ avant qu’tout ait sauté

C’était voilà maint’nant bien trois millions d’années
Vous n’avez rien à craindre y a plus de retombées.