« ALUNAISON » – NIALA 2023 – ACRYLIQUE S/TOILE 73X60


« ALUNAISON »

NIALA 2023

ACRYLIQUE S/TOILE 73X60

Dans le noir abattu sans prévenir

le cheval-rouge

extirpa la lumière..

Niala-Loisobleu.

7 Septembre 2023

Un jour

qu’il faisait nuit

Un jour qu’il faisait nuit
Il s’envola au fond de la rivière.
Les pierres en bois d’ébène, les fils de fer en or et la croix sans branche.
Tout rien.
Je la hais d’amour comme tout un chacun.
Le mort respirait de grandes bouffées de vide.
Le compas traçait des carrés et des triangles à cinq côtés.
Après cela il descendit au grenier.
Les étoiles de midi resplendissaient.
Le chasseur revenait carnassière pleine de poissons
Sur la rive au milieu de la Seine.
Un ver de terre, marque le centre du cercle sur la circonférence.
En silence mes yeux prononcèrent un bruyant discours.
Alors nous avancions dans une allée déserte où se pressait la foule.
Quand la marche nous eut bien reposé
nous eûmes le courage de nous asseoir
puis au réveil nos yeux se fermèrent
et l’aube versa sur nous les réservoirs de la nuit.
La pluie nous sécha.

Robert Desnos

MINOTAURE PAR ROBERT DESNOS


MINOTAURE PAR ROBERT DESNOS

A manger son propre sang
En tartine sur du pain

A boire l’eau de l’étang

Où les morts prennent leur bain

A prononcer des paroles
Nées de cœurs empoisonnés

A fréquenter les écoles
Des esprits emprisonnés

A marcher sur le chemin
Où l’on marche avec les mains

Le
Minotaure a vieilli
Loin des siens et du pays

Il va retrouver les sphinx
Les licornes et les lynx

Qui lui disent il est tard
Déjà l’on ferme l’enceinte

L’homme salera ton lard
Dans un coin du labyrinthe

Mugis encore si tu peux

Minotaure de rien,
Minotaure de peu

La
Reine couchée dans son lit Écoute un rossignol chanter Écoute aussi la sentinelle
Qui fait les cent pas dans la cour

Cent pas par-ci, cent pas par-là
Une reine et un rossignol
Et le soldat qui sent le rhum
Dans la cour du royal palais

Le soldat couché dans son lit
N’écoute pas chanter la
Reine
N’écoute pas le rossignol
Qui fait les cent pas dans la cour

Et le rossignol dans son nid
N’écoute pas la sentinelle
N’écoute pas même la
Reine
Qui fait les cent pas dans la cour

Cent pas par-ci, cent pas par-là
Voilà bientôt quatre cents pas
Avec les cent pas du passant
Dans ce palais extravagant.

Robert Desnos

LE BEAU JARDIN PAR ROBERT DESNOS


LE BEAU JARDIN

PAR ROBERT DESNOS

Au milieu du jardin se dresse la volière où des toucans criards raillent les perroquets et dans la tour en ruine accablée sous le lierre
Les yeux ronds d’un hibou allument des quinquets

Quand il fait jour dans les allées un éléphant
Mécanique s’agite avec des pas d’homme ivre
La biche avec audace y précède son faon
Et l’heure sur l’horloge est lente à se survivre

L’arôme du café flotte dans la cuisine où le feu ronfle et chante au ventre du fourneau où le couteau planté dans le beurre s’incline vers l’oignon parfumé et le
pain de gruau

C’est une carte postale qui arrive de très loin
Voyageur boucle ta malle
Et repars sur ton chemin

adieu volière jardin que l’on parcourut en rêve
Redonnez-moi mon gourdin
Il est l’heure, marche ou crève

Chantant la gloire des blondes s’en vont les gais chemineaux
Les trains sifflent par le monde
Sur la mer vont les bateaux

Mais vous en verrez bien d’autres
Des villes aux toits d’acier
Des vins qui vaudront le nôtre
Flatteront votre gosier

Mais quel est donc votre nom
Ce nom est celui d’une autre ne disant ni oui ni non vous ne saurez pas le nôtre

En arrivant à l’étape
Demandez à l’hôtelier
De vous mettre sur la nappe
Le bon vin de son cellier

Si vous renversez le verre vous en boirez un second
Et quitte à rouler par terre vous viderez le flacon

Tandis que le jardin peuplé de beaux oiseaux
Dormira sous la lune et l’ombre des glycines
En mêlant au parfum des fleurs sous les arceaux
L’arôme du café sortant de la cuisine.

Robert Desnos

au mocassin le verbe par robert desnos


AU MOCASSIN LE VERBE

PAR ROBERT DESNOS

Tu me suicides, si docilement.

Je te mourrai pourtant un jour.

Je connaîtrons cette femme idéale

et lentement je neigerai sur sa bouche.

Et je pleuvrai sans doute môme si je fais tard, même si

je fais beau temps.
Nous aimez si peu nos yeux et s’écroulerai cette larme sans raison bien entendu et sans tristesse.
Sans.

Robert Desnos

l’IRIS PAR ROBERT DESNOS


L’IRIS

PAR

ROBERT DESNOS

L’iris au bord du rivage
Se reflétait dans l’étang,
Bel iris sauvage
Qui rêves au beau temps.
Iris mes beaux yeux
Tu parfumes les draps blancs,
Iris merveilleux,
Iris au bord de l’étang.

Robert Desnos

Recueil : « Chantefleurs »

Et avec ça, Madame ? Robert Desnos


Et avec ça, Madame ?

Robert Desnos

Insiste, persiste, essaye encore.
Tu la dompteras cette bête aveugle qui se pelotonne.
Aujourd’hui des fous et des sots se promènent par la ville.
Parole, on les prend pour des sages.
L’équilibre et la lucidité sont un des cas de la folie humaine.
Insiste, persiste, essaye encore.
Connaissant de ton destin ce qu’homme digne du nom doit en connaître.
Résolu comme un homme digne de ce nom doit être résolu.
Revenu de bien des illusions dans le domaine du rêve et de l’amitié.
Rêvant et aimant autant qu’en ta jeunesse,
Moins la duperie.
Insiste et persiste encore
Capable de parler des étoiles et du ciel et de la nuit et du jour, de la mer,
des montagnes et des fleuves.
Mais plus dupe.
Ni désespéré.
Moins encore résigné.
Dur comme la pierre et t’effritant comme elle.
En marche vers la force dont le chemin est aussi celui de la mort
Mais résolu à aller aussi loin, aussi longtemps que possible.
C’est-à-dire vivre.

Robert Desnos

« LE PASSE-MURAILLE » – NIALA 2022 – ACRYLIQUE S/TOILE 61X50


NIALA

« LE PASSE-MURAILLE »

NIALA 2022

ACRYLIQUE S/TOILE 61X50

Mes mots-peints pour la poésie

pour que rien n’arrête sa joie de vivre

malgré la pauvreté, la tristesse du langage vulgaire

Aimer jusqu’au bout comme le dernier chien sans laisse !!!

Niala-Loisobleu.

24 Août 2022

ART POÉTIQUE

PAR

ROBERT DESNOS

Par le travers de la gueule

Ramassée dans la boue et la gadoue

Crachée, vomie, rejetée —

Je suis le vers témoin du souffle de mon maître —

Déchet, rebut, ordures

Comme le diamant, la flamme et le bleu de ciel

Pas pure, pas vierge

Mais baisée dans tous les coins

baisée enfilée sucée enculée violée

Je suis le vers témoin du souffle de mon maître

Baiseuse et violatrice

Pas pucelle

Rien de plus sale qu’un pucelage

Ouf! ça y est on en sort

Bonne terre boueuse où je mets le pied

Je suis pour le vent le grand vent et la mer

Je suis le vers témoin du souffle de mon maître

Ça craque ça pète ça chante ça ronfle

Grand vent tempête cœur du monde

Il n’y a plus de sale temps

J’aime tous les temps j’aime le temps

J’aime le grand vent

Le grand vent la pluie les cris la neige le soleil le feu et

tout ce qui est de la terre boueuse ou sèche

Et que ça croule!

Et que ça pourrisse

Pourrissez vieille chair vieux os

Par le travers de la gueule

Et que ça casse les dents et que ça fasse saigner les gencives

Je suis le vers témoin du souffle de mon maître

L’eau coule avec son absurde chant de colibris

de rossignol et d’alcool brûlant dans une casserole

coule le long de mon corps

Un champignon pourrit au coin de la forêt ténébreuse

dans laquelle s’égare et patauge pieds nus une femme

du tonnerre de dieu Ça pourrit dur au pied des chênes
Une médaille d’or n’y résiste pas
C’est mou
C’est profond Ça cède

Ça pourrit dur au pied des chênes
Une lune d’il y a pas mal de temps
Se reflète dans cette pourriture
Odeur de mort odeur de vie odeur d’étreinte
De cocasses créatures d’ombre doivent se rouler et se combattre et s’embrasser ici Ça pourrit dur au pied des chênes
Et ça souffle encore plus dur au sommet
Nids secoués et les fameux colibris de tout à l’heure
Précipités

Rossignols époumonés
Feuillage des forêts immenses et palpitantes

Souillé et froissé comme du papier à chiottes

Marées tumultueuses et montantes du sommet

des forêts vos vagues attirent vers le ciel

les collines dodues dans une écume

de clairières et de pâturages veinée de

fleuves et de minerais

Enfin le voilà qui sort de sa bauge

L’écorché sanglant qui chante avec sa gorge à vif

Pas d’ongles au bout de ses doigts

Orphée qu’on l’appelle

Baiseur à froid confident des
Sibylles

Bacchus châtré délirant et clairvoyant

Jadis homme de bonne terre issu de bonne graine par

bon vent
Parle saigne et crève
Dents brisées reins fêles, artères nouées
Cœur de rien

Tandis que le fleuve coule roule et saoule de grotesques épaves de péniches d’où coule du charbon
Gagne la plaine et gagne la mer Écume roule et s’use
Sur le sable le sel et le corail
J’entrerai dans tes vagues
A la suite du fleuve épuisé
Gare à tes flottes!

Gare à tes coraux, à ton sable, à ton sel à tes festins
Sorti des murailles à mots de passe
Par le travers des gueules
Par le travers des dents
Beau temps

Pour les hommes dignes de ce nom
Beau temps pour les fleuves et les arbres
Beau temps pour la mer

Restent l’écume et la boue

Et la joie de vivre

Et une main dans la mienne

Et la joie de vivre

Je suis le vers témoin du souffle de mon maître.

Robert Desnos

LE MIROIR ET LE MONDE


LE MIROIR ET LE MONDE

Chaque jour de ses dents aiguës
Le temps déchire un peu le tain
De ce miroir et restitue
A l’espace un nouveau butin

La lèpre marque le visage
Et masque un retard qui s’éteint
Las et las de se reconnaître
Chaque soir et chaque matin

Le paysage apparaissant
Avec son ciel et son lointain
Libère un reflet et invite
Narcisse à vivre l’incertain
Le limpide, le beau voyage
Entre le soir et le matin

Robert Desnos

Mouvements que la mer tient dans ses filets de pêche à vide et remontée plaine

le chat saute d’une fuite à un retour et la fenêtre troue le mur

la jarre garde son contenu sans le changer pour une proposition de passage

puis dépendu de sa ficelle le géranium quitte l’hiver pour la poterie de soleil au feu d’été

Qu’est -ce qui à part le mensonge ne tient pas la route bien que la prenant à chaque coin du matin ?

Les heures où j’entendais ta plume gratter pendant que tu traversais le noir ont obtenues la lumière méritée

Artiste c’est le seul métier où le tain de Narcisse est d’un pâle létal et pourtant que de cierges s’en allument

Le pied de l’arbre n’a rien perdu de la vigueur que nous lui avons transfusé, à un instant du sourire de la pluie d’aujourd’hui je jurerai qu’il a en corps grossi.

Niala-Loisobleu – 8 Janvier 2022

IDENTITE DES IMAGES


IDENTITE DES IMAGES

Depuis peu de temps peut-être dix heures sont passées l’une après l’autre

Je me bats avec fureur contre des animaux et des bouteilles

La belle nageuse qui avait peur du corail ce matin s’éveille

Le corail couronné de houx frappe à sa porte

Ah! encore le charbon toujours le charbon

Je t’en conjure charbon génie tutélaire du rêve et de ma solitude laisse-moi laisse-moi parler encore de la belle nageuse qui avait peur du corail

Ne tyrannise plus ce séduisant sujet de mes rêves

La belle nageuse reposait dans un
Ut de dentelles et d’oiseaux

Les vêtements sur une chaise au pied du lit étaient illuminés par les lueurs les dernières lueurs du charbon

Celui-ci venu des profondeurs du ciel de la terre et de la mer était fier de son bec de corail et de ses grandes ailes de crêpe

Il avait toute la nuit suivi des enterrements divergents vers des cimetières suburbains

Il avait assisté à des bals dans les ambassades marqué

de son empreinte une feuille de fougère des robes de

satin blanc
Il s’était dressé terrible à l’avant des navires et les navires

n’étaient pas revenus
Maintenant tapi dans la cheminée il guettait le réveil

de l’écume et le chant des bouilloires
Son pas retentissant avait troublé le silence des nuits

dans les rues aux pavés sonores
Charbon sonore charbon maître du rêve charbon
Ah dis-moi où est-elle cette belle nageuse cette nageuse

qui avait peur du corail?
Mais la nageuse elle-même s’est rendormie
Et je reste face & face avec le feu et je resterai la nuit

durant à interroger le charbon aux ailes de ténèbres

qui persiste à projeter sur mon chemin monotone

l’ombre de ses fumées et le reflet terrible de ses

braises
Charbon sonore charbon impitoyable charbon.

Robert Desnos

Ainsi fut ma nuit, anthracite, grisou qui souffle la lampe et asphyxie le poisson à le flotter en surface

Epelant ses trois syllabes à la défense

comme le sabre à amputer la pieuvre au sortir de son trou

parvenu au rivage je ne vois rien de mieux à faire, que citer l’image de Desnos pour projeter le film d’horreur dans son placard

Fracas de tonnerre posés sur les vagues, du brouillard que l’horizon souffle aux vitres j’embarque l’encre à bord

pour rincer les effets détestables des marées noires

afin de repeindre les mots en ambassade de l’amor à l’aide du médium de vie.

Niala-Loisobleu – 14 Septembre 2021