La vérité du drame est dans ce pur espace qui règne entre la stance heureuse et l'abîme qu'elle côtoie : cet inapaisement total, ou cette ambiguïté suprême. Saint-john Perse
Quand y’a la mer et puis les ch’vaux Qui font des tours comme au ciné Mais qu’ dans tes bras c’est bien plus beau Quand y’a la mer et puis les ch’vaux Quand la raison n’a plus raison Et qu’ nos yeux jouent à s’ renverser Et qu’on n’ sait plus qui est F patron Quand la raison n’a plus raison Quand on rat’rait la fin du monde Et qu’on vendrait l’éternité Pour cette éternelle seconde Quand on rat’rait la fin du monde Quand le diable nous voit pâlir Quand y’a plus moyen d’ dessiner La fleur d’amour qui va s’ouvrir Quand le diable nous voit pâlir Quand la machine a démarré Quand on n’ sait plus bien où l’on est Et qu’on attend c’ qui va s’ passer
La poignée de cailloux ramassée, dans le vent qui la jette, casse la protection des vitres
Sur l’erre l’horizon dérive
On aurait dit un rire, ce n’est qu’un jappement de hyène qui finit de mordre la vie autour des façades d’un refuge où les langues étrangement se mignotent pour faire semblant d’exercer du sentiment
L’envie de feindre tend la main
Les trottoirs hébergent
Cézanne du haut de la Ste-Victoire aide Zola comme j’accuse
On demande à Gutemberg son impression sans succès
La dépression conduit aux feuilles blanches d’un automne qui ne sait pas comment faire et en corps moins comment dire
Ô soleil couchant les seins tombent dans une dernière prière au père des filles de Lesbos pour implorer un enfant de lui.
Elle naît tout en bas d’un lieu géométrique A la sentir couler, je me crois à la mer Parmi les poissons fous, c’est comme une musique C’est le printemps et c’est l’automne et c’est l’hiver
L’été, ses fleurs mouillées au rythme de l’extase Dans des bras de folie accrochent les amants On dirait que l’amour n’a plus besoin de phrases On dirait que les lèvres n’ont plus besoin d’enfants
Elles coulent les sources, en robe ou en guenilles Celles qui sont fermées, celles qu’on n’ouvre plus Sous des linges qu’on dit marqués du sceau des filles Et ces marques, ça me fait croire qu’il a plu
Qui que tu sois, toi que je vois, de ma voix triste Microsillonne-toi et je n’en saurai rien Coule dans ton phono ma voix de l’improviste Ma musique te prend les reins alors tu viens
Ta dune, je la vois, je la sens qui m’ensable Avec ce va-et-vient de ta mer qui s’en va Qui s’en va et revient mieux que l’imaginable Ta source, tu le sais, ne s’imagine pas
Et tu fais de ma bouche un complice estuaire Et tes baisers mouillés dérivant de ton cygne Ne se retourneront jamais pour voir la Terre Ta source s’est perdue au fond de ma poitrine
J’ai du savon qui lave Les péchés capitaux Un stylo-bille qui grave Le goût d’un apéro Un soutien-gorge à piles Qui ne s’allume qu’aux beaux yeux Un dentifrice habile A blanchir les aveux Un buvard facétieux Qui sèche les chagrins Un oeil pour lire à deux Quand le jour s’est éteint Un violon capital Voilé de Chambertin A faire sonner le mal Plus fort que le tocsin
Si ça ne va pas Tu peux toujours aller la voir Tu demanderas La Poésie On t’ouvrira Même si elle n’est pas là D’ailleurs elle n’est pas là Mais dans la tête d’un fou Ou bien chez des voyous Habillés de chagrin Qui vont par les chemins Chercher leur bonne amie La Poésie
J’ai des bas pour boiteuse A faire boiter l’ennui Et des parfums de gueuse A remplir tout Paris Des pendules à marquer Le temps d’un beau silence Des lassos à lacer Les garces de la chance Des machines à souffler Le vert de l’espérance Et des vignes à chanter Les messes de la démence Des oiseaux-transistors Qui chantent sur la neige Garantis plaqués-or Plaqués par le solfège
Si ça ne va pas Tu peux toujours aller la voir Tu demanderas La Poésie On t’ouvrira Même si elle n’est pas là D’ailleurs elle n’est pas là Mais dans la tête d’un fou Qui se prend pour un hibou A regarder la nuit Habillée de souris Comme sa bonne amie La Poésie
J’ai du cirage blond Quand les blés vont blêmir De la glace à façon Pour glacer les soupirs Des lèvres pour baiser Les aubes dévêtues Quand le givre est passé Avec ses doigts pointus J’ai tant d’azur dans l’âme Qu’on n’y voit que du bleu Quand le rouge m’enflamme C’est moi qui suis le feu J’ai la blancheur du cygne A blanchir tout Saint-Cyr Et sur un de mes signes On meurt pour le plaisir
Si ça ne va pas Tu peux toujours aller la voir Tu demanderas La Poésie On t’ouvrira Des fois qu’elle serait là Elle te recevrait même pas Elle n’est là pour personne Elle n’aime pas qu’on la sonne C’est pas une domestique Elle sait bouffer des briques Mais quand elle veut, Elle crie
Je t’ai rencontrée par hasard Ici, ailleurs ou autre part Il se peut que tu t’en souviennes. Sans se connaître on s’est aimés Et même si ce n’est pas vrai Il faut croire à l’histoire ancienne.
Je t’ai donné ce que j’avais De quoi chanter, de quoi rêver. Et tu croyais en ma bohème Mais si tu pensais à vingt ans Qu’on peut vivre de l’air du temps Ton point de vue n’est plus le même. Cette fameuse fin du mois Qui depuis qu’on est toi et moi Nous revient sept fois par semaine Et nos soirées sans cinéma Et mon succès qui ne vient pas Et notre pitance incertaine. Tu vois je n’ai rien oublié Dans ce bilan triste à pleurer Qui constate notre faillite. » Il te reste encore de beaux jours Profites-en mon pauvre amour Les belles années passent vite. » Et maintenant tu vas partir Tous les deux nous allons vieillir Chacun pour soi, comme c’est triste. Tu peux remporter le phono Moi je conserve le piano Je continue ma vie d’artiste. Plus tard sans trop savoir pourquoi Un étranger, un maladroit Lisant mon nom sur une affiche Te parlera de mes succès Mais un peu triste toi qui sais » Tu lui diras que je m’en fiche… que je m’en fiche… »
Renée Claude est morte l’an dernier. Son album d’hommage à l’œuvre de Léo Ferré, On a marché sur l’amour : Renée Claude chante Léo Ferré, paru au Québec en 1994, est une splendeur d’un bout à l’autre.
Renée Claude (1939-2020) • Y a une étoile. Léo Ferré, paroles & musique. Renée Claude, chant ; Philippe Noireault, piano. Enregistrement : Montréal (Québec), Studio Karisma Audio Post Video & Film, mai-juin 1994. Extrait de l’album On a marché sur l’amour : Renée Claude chante Léo Ferré. Canada, Transit, ℗ 1994.
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Y a une étoile est une chanson de jeunesse de Léo Ferré. Il l’a lui-même enregistrée avec d’autres du même tonneau, en Italie où il résidait, pour son ultime album de studio : Les vieux copains (1990). Il avait alors plus de soixante-dix ans.
Léo Ferré (1916-1993) • Y a une étoile. Léo Ferré, paroles & musique. Léo Ferré, chant, piano ; Orchestre symphonique de la RAI-Milan [Orchestra sinfonica di Milano della RAI] ; Léo Ferré, orchestrations, arrangements & direction musicale. Enregistrement : Milan (Italie), Studio Regson, en octobre 1988, puis du 11 au 13 juillet 1990. Extrait de l’album Les vieux copains / Léo Ferré. France, EPM, ℗ 1990.
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Salut, ma vieille copine la terre ! T’es fatiguée ? Ben nous aussi ! C’est pas des raisons pour faire des manières, Tant qu’y a le soleil qui fait crédit. Salut, ma vieille copine la terre !
Y a une étoile au-dessus de Paris Qui m’a fait de l’œil la nuit dernière, Ma vieille copine la terre ! Et pendant ce temps-là, tu dormais Enroulée dans les bras de ma mélancolie, Pendant que je déambulais Comme un oiseau blessé dans la nuit si jolie.
Salut, ma vieille copine la terre ! Dans tes jardins y a des soucis Qui font de beaux printemps à la misère Et de jolies fleurs pour les fusils. Salut, ma vieille copine la terre !
Y a une étoile au-dessus de Paris Qui m’a fait de l’œil la nuit dernière, Ma vieille copine la terre ! Et toi pendant ce temps, tu peinais À charrier sur ton dos des continents de misère, Pendant que le soleil se dorait Dans sa maison toute bleue pour se refaire une lumière.
Salut, ma vieille copine la terre ! Y a des diamants qui font leur nid En se fichant pas mal de tes frontières, Qu’il fasse jour, qu’il fasse nuit. Salut, ma vieille copine la terre !
Y a une étoile au-dessus de Paris Qui m’a fait de l’œil la nuit dernière, Ma vieille copine la terre ! Si tu voulais bien en faucher deux ou trois, Ça pourrait faire une drôle de lumière Et mettre au front de la société Des diamants qu’on pourrait tailler à notre manière.
Bonjour ma vieille copine la terre ! Je te salue avec mes mains, Avec ma voix, Avec tout ce que je n’ai pas. Léo Ferré (1916-1993). Y a une étoile
Une robe de cuir comme un fuseau Qu’aurait du chien sans l’faire exprès Et dedans comme un matelot Une fille qui tangue un air anglais C’est extra Un moody blues qui chante la nuit Comme un satin de blanc d’marié Et dans le port de cette nuit Une fille qui tangue et vient mouiller
C’est extra C’est extra C’est extra C’est extraDes cheveux qui tombent comme le soir Et d’la musique en bas des reins Ce jazz qui d’jazze dans le noir Et ce mal qui nous fait du bien C’est extra Ces mains qui jouent de l’arc-en-ciel Sur la guitare de la vie Et puis ces cris qui montent au ciel Comme une cigarette qui brille
C’est extra C’est extra C’est extra C’est extra
Ces bas qui tiennent hauts perchés Comme les cordes d’un violon Et cette chair que vient troubler L’archet qui coule ma chanson C’est extra Et sous le voile à peine clos Cette touffe de noir jésus Qui ruisselle dans son berceau Comme un nageur qu’on attend plusC’est extra C’est extra C’est extra C’est extraUne robe de cuir comme un oubli Qu’aurait du chien sans l’faire exprès Et dedans comme un matin gris Une fille qui tangue et qui se tait C’est extra Les moody blues qui s’en balancent Cet ampli qui n’veut plus rien dire Et dans la musique du silence Une fille qui tangue et vient mourir
C’est extra C’est extra C’est extra C’est extra
Es extra Leo Ferre Un vestido de cuero como un huso ¿Qué haría un perro sin hacerlo a propósito? Y por dentro como un marinero Una chica lanzando una melodía inglesa. Es extra Un blues malhumorado que canta en la noche Como un satén blanco nupcial Y en el puerto de esta noche Una chica que lanza y viene mojada Es extra Es extra Es extra Es extra Cabello que cae como la tarde Y música en el fondo de los riñones Este jazz que jazzea en la oscuridad Y este mal que nos hace buenos Es extra Estas manos que tocan el arcoiris En la guitarra de la vida Y luego estos gritos que suben al cielo Como un cigarrillo que brilla Es extra Es extra Es extra Es extra Estas medias que aguantan alto Como las cuerdas de un violín Y esta carne que viene a turbar El arco que fluye mi canción Es extra Y bajo el velo apenas cerrado Este penacho de jesus negro que brota en su cuna Como un nadador que esperamos más Es extra Es extra Es extra Es extra Un vestido de cuero como un descuido ¿Qué haría un perro sin hacerlo a propósito? Y por dentro como una mañana gris Una chica que lanza y que calla Es extra El blues malhumorado que no les importa Este amplificador que ya no significa nada Y en la música del silencio Una niña que lanza y viene a morir Es extra Es extra Es extra Es extra
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