A LA BRETELLE


A LA BRETELLE

En faisceau sur l’établi du jour ouvrable quelques fleurs gagnées au couteau

la tierce personne dont on ne connaîtra jamais le nom reste cachée

et la chanson qui commémore sa pensée intime se montre

La place de Furstenberg serre ses bancs pour garder l’amour

les moineaux iront ramasser les miettes

Dans ma tête je dessine un kiosque pour garer l’orgue, laissant l’accordéon sur son tricycle tourner autour

Des volets ouverts tendent leurs jardinières pour mettre de l’odeur dans le vol des pigeons

Elle est allongée sur son tapis, un billet à la main pour n’importe où, le verre est plein de mojito et la radio disperse une vieille histoire sur un air de blues que la trompette bouche à bouche. Il faut laisser les feuilles mortes se faire la pelle, c’est comme ça qu’elles se content Juliette et Miles Davis en toute liberté raciale.

Niala-Loisobleu – 28 Septembre 2020

PANAME A FRESQUE (DIMEY/GRECO)


PANAME A FRESQUE (DIMEY/GRECO)

LE BESTIAIRE DE PARIS

L’encre de Bernard ou la Fontaine des Innocents

La voix manuelle à deux seins de Juliette

et voici que ressurgit l’âme de Paname

l’odeur de ses pieds de cochon

les eaux sales du dégoût

l’enfant qui voit ses premiers poils fauchés sur un trottoir

Les portes des Grands Boulevards, un crime en embuscade

la cuillère percée de l’absinthe qui attend dans le bistro de vous bouffer le foie

Puis l’Eustache du zonard des fortifs finit par aimanter les bourgeois, il fait mouiller les baronnes qui le supplient d’y accoster dans la java

La beauté fera venir des artistes du monde entier, les émigrés des révolutions internationales ont autre chose dans le ventre qu’un envie de croisade de religion

Paris ville -lumière

pas qu’un peu mon Cousin, j’assure que le modèle aura traversé la terre entière pour émanciper le temps d’une courte mais authentique liberté de penser

Niala-Loisobleu – 27 Septembre 2020

A VERSE


A VERSE

Une vendange à la ramasse

court à la montée du rire

pour blanchir un ciel de corps beaux

Avec des sonneurs de cloches à chaque tube des grandes orgues

Notre-Dame rivée à l’oeil

astro-nomme

Comme à déboule de Bonaparte quand on remontaient sa rue en fanfare en sortant des Beaux-Arts

du Sartre plein la marguerite

et du poil à peindre de ton ventre

Rions le temps qui reste en s’aimant d’un pont – à l’autre bateaux-mouches

le noir illuminé d’un fond de cave sans tabous

J’ai envie

en vie de toi nature et sans eau-courante

juste avec un vasistas-soleil à deux pas de la Seine.

Niala-Loisobleu – 24 Septembre 2020

Juliette comme un Gréco


UNSPECIFIED – CIRCA 1949: Juliette Greco (Photo by Jean-Philippe CHARBONNIER/Gamma-Rapho/Getty Images)

Juliette comme un Gréco

j’habite en corps à St-Germain-des-Prés

comme la gare principale de mon grand voyage à visiter des êtres humains

De la place où tu m’apparais nue pour la première fois je tremble de toute la chaleur de ta voix

Le temps voulait se refaire de toute l’atrocité dont il avait souffert

Une expérience impossible à imaginer par d’aucuns qui en faisaient pas partie

Quelques 70 ans et + après , plus que jamais ça restera un secret remis au fond de la pyramide du temps, dans l’avalé des luttes

Toi tu n’as trahi personne

Tu es restée telle que tu suis, fidèle à toi-m’aime comme à ton idéal

Niala-Loisobleu – 24 Septembre 2020

Jean-Paul Sartre: « Gréco a des millions dans la gorge : des millions de poèmes qui ne sont pas encore écrits, dont on écrira quelques-uns. On fait des pièces pour certains acteurs, pourquoi ne ferait-on pas des poèmes pour une voix ? Elle donne des regrets aux prosateurs, des remords. Le travailleur de la plume qui trace sur le papier des signes ternes et noirs finit par oublier que les mots ont une beauté sensuelle. La voix de Gréco le leur rappelle. Douce lumière chaude, elle les frôle en allumant leurs feux. C’est grâce à elle, et pour voir mes mots devenir pierres précieuses, que j’ai écrit des chansons. Il est vrai qu’elle ne les chante pas, mais il suffit, pour avoir droit à ma gratitude et à celle de tous, qu’elle chante les chansons des autres. »

LES MINES AUX TORTS A RAISON 2


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LES MINES AUX TORTS A RAISON 2

 

Déjà décidé à rétablir la vérité, j’entrais à l’Ecole convaincre l’Académie que le bleu c’était pas une couleur froide. Toi tu démontrais ta parfaite connaissance de Marguerite. Ce qui montra immédiatement combien notre communauté solaire n’était pas une de ces idées qu’on se glisse dans la tête. D’ailleurs la tête, mis à part tes passages toro, ça a  jamais été notre lieu de prédilection

Pendant que tu montais le podium, je traînais S’-Germain-des-Prés comme une seconde nature, une même femme en tête de liste dans nos agendas, Barbara qu’à s’appelle toujours, j’y suis passé le premier par son Ecluse. Une vraie forge de Vulcain qui m’a amené à fréquenter des gens très recommandables, Ferré, Brassens, Brel, Reggiani, Bertin et des quantités d’autres, l’Epoque là était pas radine en beauté. Sans compter que le Tabou comme fournisseur c’était haut de gamme. Boris était une sacrée sphère à lui tout seul. Juju avant de se faire refaire le nez avait mis sur la place son né fabuleux, un tablier de sapeur qui lui valut le titre de Miss Vice. Imagines, le vice d’alors comparé à celui d’aujourd’hui

On aimait bien la Rose Rouge aussi. C’était un lieu d’acteurs cinéma et théâtre le fréquentait

Puis clou du spectacle, Char, Camus, Eluard, Breton, le Surréalisme, Sartre, Le Castor, Aragon, Prévert, Cocteau, Picasso, et d’autres comme nourriture difficile de faire mieux

Nos nuit à la Rhumerie et au Babylone ont des oreillers neufs, ont dormait pas

La Ruche, en plein Giacometti, Chagall…

Rien que de voir passer ce tant là, je comprends ta rage à vouloir pas en être écartée. L’amour est fondé en ces lieux

C’est mon Paname au complet réunissant le passé au présent, Montmartre et Montparnasse avant la grande débacle

Et vinrent les années de guerre…

Niala-Loisobleu – 25 Mars 2020

GRANDS FONDS 2 – Juliette Gréco:Jean De La Providence De Dieu


C’était en l’an dix-neuf cent deux
Quand Jean d’ la Providence de Dieu
Ouvrit la porte sans carte blanche
Son front était cuit et recuit
Par le soleil et les soucis
Son sac était lourd sur sa hancheMais la mer du Nord s’engouffra
Dans l’ bar où tenions nos états :
Y avait Machin, Chose et Langlois
Y avait Frances, et c’était moi !

Nous étions tous les cinq à l’aise
Dans le vieux bar de l’Irlandaise !

En ce temps-là, y avait Langlois
Machin et Chose, l’Irlande et moi

Le vent qui soufflait de la mer
Nous a pris dans ses bras de fer
Pour en emporter deux en douce
Il ne resta dans l’ cabaret
Après qu’ils se furent taillés
Car ils avaient l’ diable à leurs trousses
Que Langlois, moi et ce curieux
Jean de la Providence de Dieu !
Y avait donc Jean, et Cætera
Langlois, et la môme qu’était moi
Langlois, très fauché, mit les voiles
Pour retrouver sa bonne étoile
Alors nous ne fûmes plus que deux
Moi et la Providence de Dieu !

On m’ nomme aussi « Saint-Jean bouche d’or »
Me dit ce grand matelot du Nord
Et quand je chante ma complainte
Au petit jour, passé minuit
Ici ou là, comme un défi
Toutes les garces se croient des saintes !

Puis il disparut en chantant
Autant en emporte le vent…
Y avait Machin, Chose et Langlois
Maintenant, il n’y avait plus que moi !

J’étais seule devant les bouteilles
Elles m’offraient d’autres merveilles !
En souvenir de Jean, j’en bus deux
Et tout l’ reste à la grâce de Dieu !

Que sont devenus mes copains ?

À dire vrai, je n’en sais plus rien
L’Irlandaise a fermé boutique
Machin et Chose ont disparu
Dans le décor des inconnus
C’est la faute au vent hystérique :
Il fit entrer ce Jean de Dieu,
Sa Providence et ses bons vœux !

Ah, les bistrots des ports de mer !
Lorsque le vent pleure en hiver
Et vous prend pour toute la vie
Avec ses orgues de Barbarie !
C’était en l’an dix-neuf cent deux
Au Rendez-vous des amoureux

Pierre Mac Orlan

Juliette Gréco – Les Annees d Autrefois


Juliette Gréco – Les Annees d Autrefois

 

Un pont sur la mer
Nos pas sur les canaux
Soleil sur la pierre
Des palais cardinaux
Ta main dans ma main
Le monde dedans tes yeux
Au ciel italien
D’un bleu miraculeux

Dis, t’en souviens-tu
Des années d’autrefois,
Des années perdues
Où nous allions là-bas ?

Un pont sur la Seine
Nos pas sur les pavés
Une chambre d’hôtel
Nos passions apaisées
Ta main sur mon cœur
La pluie sur nos matins
Le goût du bonheur
Ma peur des lendemains

Dis, t’en souviens-tu
Des années d’autrefois,
Des années perdues
Où nous ne dormions pas ?

Un pont sur ma vie
Nos pas dans le silence
Au bout de mes nuits
L’écho de ton absence
La pluie sur les carreaux
Tant d’heures enfuies
Ô mirage des mots !

Dis, t’en souviens-tu
Des années d’autrefois,
Des années perdues
Où nous n’avions pas froid ?

Dis, t’en souviens-tu
De notre histoire d’amour ?
Dis, as-tu perdu
L’espoir au long du jour ?

Dis, as-tu perdu
Nos rires et nos toujours ?
Dis…

 

J’AI LE COEUR AUSSI GRAND


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J’AI LE COEUR AUSSI GRAND

D’abord le galop des garennes

plus sauvages qu’une lampe de civet

près d’un livre pas en corps écrit

c’était lampion de la chanson de rues

le bagout du camelot vendant son sirop d’éternité

l’eau vivante du caniveau entre les jambes des quat’-saisons

bougnat sur façade

contre avaleur de couleuvre et sabreur de ragot

Les feux d’un réverbère prenant la voie fluviale

de l’éclusier

par la direction polaire de sa propre étoile

boussole de rêves boulimiques d’une géographie apprise chez Jules Ferry

entre deux éviers à faire la vaisselle

et un vers vide à remplir

sans jamais que mon coeur ne crise autrement que mis en étroitesse…

Niala-Loisobleu – 7 Décembre 2018