L’EVIER BLEU – EDOUARD VUILLARD


L’EVIER BLEU – EDOUARD VUILLARD

Plongée jusqu’à la bonde, la vie écoule ses eaux grasses sur les sécheresses inopportunes en triant ses lentilles

Il y a eu les passages où la laitue croquait entre les dents

aussi les cressonnières entre l’entrée des champs et les dépendances des propriétés de famille dans l’angle d’un rôti pommes-frites du dimanche

les écoles séparant les garçons des filles comme un caleçon long d’un petit-bateau à l’écart de l’eau, recentraient le regard sur les mouvements de jambes de la maîtresse et boostaient les fausses confidences aux récréations

A l’arrière des églises on apprenait à faire du vélo à la fille qu’on avait descendue de balançoire, quelque chose de différent des tournantes d’aujourd’hui au plus profond de la cave

Cet Evier Bleu qu’Edouard a mis sur le gris de sa cuisine me ramène aux Nabis qu’il a créé dans l’extase d’une maturité acquise à l’écoute de la beauté

Je sais que je viens de mourir à la laideur, remis sur les rails de ma traversée

sans compter sur ce qui reste

juste en sortant le rêve des tiroirs, c’est le tout que j’ai bonheur à dire dans ton image qui me saute d’un oeil à l’autre

C’est vrai, j’ai fait ce que je voulais de ma vie.

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Niala-Loisobleu.

9 Janvier 2024

L’ELEGANTE – EDOUARD VUILLARD


L’ELEGANTE – EDOUARD VUILLARD

Aux fenêtres restées à la croisée, l’élégante passe

tirant sur l’obscur actuel une lumière renaissante

Des fruits rouges sortent du sommeil des vergers

pour remettre le goût aux chairs pulpeuses

Aux salons les petites robes noires manifestent l’odeur des cimaises

la couleur éclate aux joues des murs en s’inspirant de l’enfant

Creusant dans la main symbolique de la métaphore

de quoi afficher sa foi particulière

Ô Femme originelle

statuant l’érection de l’Île sur la flaque glauque

tu restes l’ultime creuset de mon ô fourneau

Laisse périr la tendance féministe en voulant supplanter le machisme

sauve ta classe du vulgaire

que je me sente propre à peindre, comme à t’écrire.

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Niala-Loisobleu.

9 Janvier 2024

DANS LE NID DES MURS


EDOUARD VUILLARD

DANS LE NID DES MURS

Sur le tapis-volant de la chambre où tu voyages, les pieds nus, épaule contre épaule

des forêts de pins maritimes, tiennent le sable hors du marchand de sommeil

Une vague au corps souple a mis ton corps à l’amble sur la cadence de l’anémone

et dans le roulement du bas de ton dos, tes seins rattrapent les épices et les ensachent

Le passage en baie est à ce point libre entre nos balises que je garde la chambre sans descendre du train de plaisir

Les bêtes à cornes qui bordent la voie nourrissent un climat onirique propice au lieu qui fait l’herbe douce et grasse

Sur les consoles de l’étable se tisse ce langage des amants que le verbe conduit aux étages de l’érotisme

Edouard est de ces enfants qui saisissent le caractère de l’instant pour l’éternité..

Niala-Loisobleu.

14 Décembre 2023

SANG NOUVELLES


JEAN EDOUARD VUILLARD

SANG NOUVELLES

Penché aux genoux de sa conscience, l’homme note ses instructions pendant que la femme lit les petites-annonces d’emploi du temps pour choisir sa robe du jour

Le paysage est ouvert aux perpectives

des animaux domestiques sont en train de courir sur internet

un oiseau de sa branche, pense aux peintures de son existence, peut-être ira-t-il s’en rapprocher pour ne pas perdre la femme nue qui se tient à sa fenêtre, d’où l’intérêt de vivre.

Niala-Loisobleu – 18 Octobre 2022

Anne Sylvestre – La Marche Nuptiale


Anne Sylvestre – La Marche Nuptiale

Mariage d’amour, mariage d’argent
J’ai vu se marier toutes sortes de gens
Des gens de basse source et des grands de la terre
Des prétendus coiffeurs, des soi-disant notairesQuand même je vivrais jusqu’à la fin des temps
Je garderai toujours le souvenir content
Du jour de pauvre noce où mon père et ma mère
S’allèrent épouser devant Monsieur le MaireC’est dans un char à bœufs, s’il faut parler bien franc
Tirés par les amis, poussés par les parents
Que les vieux amoureux firent leurs épousailles
Après longtemps d’amour, longtemps de fiançaillesCortège nuptiale hors de l’ordre courant
La foule nous couvait d’un œil protubérant
Nous étions contemplés par le monde futile
Qui n’avait jamais vu de noce de ce styleVoici le vent qui souffle emportant, crève-cœur!
Le chapeau de mon père et les enfants de chœur
Voilà la pluie qui tombe en pesant bien ses gouttes
Comme pour empêcher la noce, coûte que coûteJe n’oublierai jamais la mariée en pleurs
Berçant comme une poupée son gros bouquet de fleurs
Moi, pour la consoler, moi de toute ma morgue
Sur mon harmonica jouant les grandes orguesTous les garçons d’honneur, montrant le poing aux nues
Criaient: « Par Jupiter, la noce continue! »
Par les hommes décriés, par les Dieux contrariés
La noce continue et vive la mariée!

INVENTE AIR


INVENTE AIR

Le froid s’est intensifié

j’ouvre grand les fenêtres pour renouveler l’air

Nabi

le mouvement postimpressionniste aspire a plus de clarté

Paul a quitté la France pour les Marquises

Sérusier verdit la ceinture de Paris

Edouard Vuillard pénètre à l’intérieur

et Bonnard chrome solaire d’un jaune la souricière des ténèbres

tout change

je précurse avec art

la Pleine-Lune de ce jour est déménageuse

laisse la mue aux vieilles-peaux et marche

la route est ouverte…

Niala-Loisobleu – 30 Novembre 2020