La vérité du drame est dans ce pur espace qui règne entre la stance heureuse et l'abîme qu'elle côtoie : cet inapaisement total, ou cette ambiguïté suprême. Saint-john Perse
Une lampe naquit sous la mer Un oiseau chanta Alors dans un village reculé Une petite fille se mit à écrire Pour elle seule Le plus beau poème Elle n’avait pas appris l’orthographe Elle dessinait dans le sable Des locomotives Et des wagons pleins de soleil Elle affrontait les arbres gauchement Avec des majuscules enlacées et des cœurs Elle ne disait rien de l’amour Pour ne pas mentir Et quand le soir descendait en elle Par ses joues Elle appelait son chien doucement Et disait « Et maintenant cherche ta vie ».
Entre le jour et la nuit il y a l’épaisseur d’un carreau dans lequel la lumière se dresse comme autant de hautes fougères.
Au ras du sol, les feuilles les plus lisses se préparent à recevoir le soleil qui va passer de l’une à l’autre en allumant les fanaux de la rosée.
Les sources se contractent de tout leur ventre
à mesure que le matin marche sur elles
et les herbes fumantes d’aube se séparent
pour mieux sentir le poids de chaque éclat de clarté.
Soudain les oiseaux font une pause
parce que leur cœur bat plus fort que leur chant,
les trains sortent de la nuit
comme de la plus grande gare du monde.
Et c’est le jour porté de hauteur en hauteur, renversé dans les lits de la verdure. Le monde est enfin clair comme une goutte où la lumière tombe, frappée de vertige.
La campagne s’abandonne au premier ruisseau venu. C’est contre ses berges, c’est par-dessus son eau qu’elle arrondit sa pleine poitrine d’herbes, c’est en lui qu’elle se sent la plus nue.
On passerait sa vie à rester immobile
loin des villages caillés, loin des routes trop sûres,
avec la respiration du jour sur le visage,
avec le bleu du ciel dans la bouche entr’ouverte.
On voudrait mourir ici
avec le soleil soudé aux yeux comme une applique, avec la tête prise dans la grande maille de l’espace, avec au cou le collier des moissons.
Mais je reste tout entier dans la pierre que le silence a jetée du haut du monde, retenu seulement par le fil que mon cœur tend à mon poignet.
Dans la clarté d’un soleil plein-phares tout y était, la pinède, les dunes, les cabines à rayures, le rire des enfants, la vigne à piquette et les hanches de la côte-sauvage lui tenant le corps à l’écume
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