La vérité du drame est dans ce pur espace qui règne entre la stance heureuse et l'abîme qu'elle côtoie : cet inapaisement total, ou cette ambiguïté suprême. Saint-john Perse
Dans la vallée de Gogulcar les norias Tournent à l’antique avec un bouvier et des bœufs. Virgile tout attendri contemple ce tableau, Sourit au temps qui dure et reprend son scooter…
Il vient de loin en loin voir un peu s’il y a Du bonheur en campagne ou de l’aigreur chez ceux Qui restent dans les champs à remuer de l’eau, S’il y a des secrets à ranimer ou taire.
Est-ce un aveuglement que l’harmonie visible?
Les femmes en saris rouges qui ramassent des piments
Ont-elles de la beauté une approche paisible?
Les heures, le labeur, la fatigue, les lourdes charges Répètent la même pièce où l’on ne sait qui ment Dans la lumière poudrée d’un Âge d’Or en marge.
A Moulmein près de la vieille Pagode, regardant la mer à l’est, Est assise une jeune Birmane, et je sais qu’elle pense à moi; Car il y a du vent dans les palmiers, et les clochettes du temple disent: « Reviens-t-en, soldat Britannique; reviens-t-en à Mandalay! » Reviens-t-en à Mandalay, Où la vieille Flottille est en panne: N’entends-tu pas le lourd travail des aubes de Rangoon à Mandalay? Sur la route de Mandalay, Où jouent les poissons volants, Et L’aurore se lève comme l’orage, en Chine, de l’autre côté de la Baie!
Son cotillon était jaune et son petit bonnet était vert, Et son nom était Supi-yaw-lat-, exactement le même que celui de la reine épouse du roi Thibaud, Et la première fois que je la vis, elle fumait dans un fume-cigare blanc, Et gaspillait des baisers chrétiens au pied d’une idole païenne; Idole repue faite de boue_ Qu’ils appelaient le Grand Dieu Boudd_ Brave petite, comme elle s’en souciait des idoles quand je l’embrassais sur place! Sur la route de Mandalay…
Quand la bruine recouvrait les rizières et que le soleil descendait lentement, Elle prenait son petit banjo et elle chantait « Kulla-lo-lo! » Son bras sur mon épaule et sa joue contre ma joue Nous regardions les vapeurs et les hathis* empilant le teck. Elephants empilant le teck Dans la crique boueuse, boueuse, Où le silence pesait si lourd qu’on osait à peine parler! Sur la route de Mandalay…
Mais tout cela, c’est table rase derrière moi. Il y a bien longtemps et c’est très loin, Il n’y a pas de bus entre Bank et Mandalay; Et j’apprends ici, à Londres ce que disent les vétérans: « Si vous avez entendu l’appel de l’Orient, vous n’aurez jamais besoin de rien d’autre » Non!vous n’aurez besoin de rien d’autre Que ses fortes senteurs d’épices, Et du soleil et des palmiers et des clochettes du temple qui tintent Sur la route de Mandalay…
Je suis fatigué d’user mes semelles sur ces pavés râpeux, Et cette fichue bruine Engliche réveille la fièvre dans mes os; Même si je me promène avec cinquante bonnes, de Chelsea au Strand, Elles parlent abondamment d’amour, mais Dieu, qu’en connaissent- elles? Visage bovin, mains sales, A l’Ordre! Qu’en connaissent-elles? J’ai une jeune fille plus nette, plus douce, dans un pays plus propre et plus vert! Sur la route de Mandalay…
Emmène-moi quelque part à l’est de Suez où le meilleur est comme le pire, Où il n’y a pas de dix commandements et où tout homme peut boire jusqu’à plus soif; Car les clochettes du temple appellent, et c’est là-bas que je voudrais être_ A Moulmein près de la vieille Pagode, regardant paresseusement la mer; Sur la route de Mandalay, Où la vieille Flottille est en panne, Avec l’infirmerie sous le taud quand nous allâmes à Mandalay!
O la route de Mandalay, Où jouent les poissons volants, Et l’aurore se lève comme l’orage, en Chine, de l’autre côté de la Baie!Extrait de: 1892, Barrack-Room Ballad.
Rudward Kipling
Sous la grande verrière d’un instant
compas et pointe sèche collent les fumées
arc-en-ciel
entre le mouvement des voyages et le stationnement du souffle
un champignon perce dans le silence automnal
entre-deux d’un passage saisonnier
qui hésite à choisir le bout par lequel commencer ses courses
dans la gare côté départ on est ramené aux quais des arrivées
l’enfant cherche son âge véritable à l’état-civil existentiel
dans un endroit proche de St-Lazare
reviennent les bords de l’Oise où l’oiseau partait peindre
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.