Sacre et massacre de l’amour
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I À l’orient pâle où l’éther agonise À l’occident des nuits des grandes eaux Au septentrion des tourbillons et des tempêtes Au sud béni de la cendre des morts Aux quatre faces bestiales de l’horizon Devant la face du taureau Devant la face du lion Devant la face de l’aigle Devant la face d’homme inachevée toujours Et sans trêve pétrie par la douleur de vivre Au cœur de la colombe Du miel du ciel au sel des mers Seul symbole vivant de l’espace femelle Corps d’azur en forme de ciel II Territoire fantôme des enfants de la nuit Comme la caverne des mondes Tout le corps de la femme est un vide à combler III L’aube froide Des courants souterrains de la chair et des astres Au fond des corps de terre Les tremblements de terre Et les failles où vont les volcans du délire Tonner Entez sur le trépied Celle qui hurle La bouche mangée Par l’amertume En flammes du laurier de gloire Écume De la colère des mers La femme à chevelure D’orages Aux yeux d’éclipsé Aux mains d’étoiles rayonnantes À la chair tragique vêtue de la soie des frissons À la face sculptée au marbre de l’effroi Aux pieds de lune et de soleil À la démarche d’océan Aux reins mouvants de vive houle Ample et palpitante Son corps est le corps de la nuit IV Visitation blême au désert de l’amour Aveugle prophétesse au regard de cristal Le grand voile de brume rouge et la rumeur Danse immense des gravitations nuptiales Voici l’appel la trombe et le vol des semences Danseuse unissant la nuit à l’eau-mère V Comme Je viens dans ton sein accomplir le rite Je viens dans ton sein déposer l’offrande Aveugle anéanti dans les caves de l’être VI Mais qui saurait forcer le masque de ta face D’où vient l’espoir désespéré D’amour anéanti dans une double absence Au sommet foudroyé du délire Avant l’hémorragie VII Paroles du Il est dit autrefois Qu’errant éperdue dans l’informe Éparse dans l’obscurité La pauvre ombre sans graisse du mort La bouche pleine de terre Dans le noir sans mémoire tourbillonne il fait froid L’espace ne connaît que le glissement glacé des larves Soudain Si phalène que tente une lueur lointaine Elle aperçoit la caverne enchantée Le paradis illuminé des gemmes chaudes Le règne des splendeurs et des béatitudes Aux confins du désir essentiel Qui jamais satisfait perpétuel se comble À l’appel enivrant d’odeurs vertigineuses Qu’elle y entre Ombre morte Et s’endorme Pour se réveiller à jamais enchaînée Engluée aux racines d’un ventre Fœtus hideux voué pour une vie encore Au désespoir des générations Roulé par la roue de l’horreur de vivre Du vieux fœtus aïeul À notre mère putride La reine démente Qui fait et défait Les destins et les formes Et du corps étoile De l’éternelle femme Livre les ossements à l’honneur de la cendre Impose à l’orgueil de statue des chairs Roger Gilbert-Lecomte
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