GRANDE MAREE


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GRANDE MAREE

La traversée du jardin sur l’eau ne m’a pas tourné la tête. J’ai laissé cette faculté aux égoutiers. Et oiseau au plumage simple je m’ai lissé le jabot tout heureux de sentir comme dedans tu gonflais de plein le vide d’un monde égaré.Le sanglier je l’aurais. On va pas se laisser détricoter l’haleine sur le do. J’ai pensé au coq, il a une putain de santé, même ce temps pourri ne lui ramolli pas la voie du jour. Le parasite a sa place dans le placard à balai. Le clou du jour c’est l’arrivée du Jardin sous la mer. Belle marée, déjà me vient l’odeur de crevette du pore.

Niala-Loisobleu – 28/11/19

 

https://www.youtube.com/watch?v=ScuDAhCOn6I&list=RDB2ScuWdrgTU&index=6

COMME A TENIR


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COMME A TENIR

Comme ça

couleur tomette

et senteur reste là au coin de la cuisine

à la chaise d’yeux

le chien dans les jambes un penchant anémone

 le né dans l’état-civil de tes seins

simple histoire d’amour dans l’orage d’un soir avant et après

Niala-Loisobleu – 27 Novembre 2019

PAR DES BARREAUX NOUVEAU-NÉS


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PAR DES BARREAUX NOUVEAU-NÉS

Une femme en amour devant une fenêtre vide. Des yeux bleu ardent, bleu lanière. Un corps arqué sur le désespoir de son nom. Dehors le grand tumulte harassé des
étoiles contre le ciel semble ne plus s’ouvrir, ne plus suspendre l’issue de leur perfection qu’à cette véhémence brouillée de larmes puériles, qu’à ce
gémissement, qu’à ce silence.

Jacques Dupin

Au moment où les kiosques à musique lâchent les opérettes en même temps que l’escarpolette, une femme de choeur rassemble ses voies et se met en marche. L’escalier s’est fait mécanique comme dans une histoire de retraite. Du court, déhale un jeune homme aux yeux vers. sorti  d’une pochette surprise. Il les a toutes bleues rien qu’à se dire c’est une française des je comme je veux. Vous avez dit Grenelle ? Non nous parlions de véhémence brouillée, mais c’est pareil. La fenêtre n’est plus vide. La femme vient de la remplir de son corps projeté en exemple. A la saint Décembre il est manifeste qu’Edouard préférera les bleus hardeurs aux gilets jaunes.

« Je suis allé au marché aux esclaves et je ne t’ai pas trouvé mon Amour »

 

Niala-Loisobleu – 27 Novembre 2019

Pourquoi poèmé


Le mur navrant d’une phrase mal taillée contre le départ d’une pensée restent dans la gorge d’un oiseau en cage

Métaphore d’un violoncelle en pvc

Ces faux-seins à qui ont a ôté les cordes vocales

N’est-ce pas l’enfant habillé en grand, défait d’innocence ?

Interdire l’âme au profit de la chair quel bidouillage de mauvaise fée

A l’eau qui remonte le cours d’un mascaret émotif j’embarque

Nu à nu

Touchant pore…

Niala-Loisobleu – 27/11/19

LA VILLE APPELLE HORS DE L’HABITUDE


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LA VILLE APPELLE

HORS DE L’HABITUDE

 

 

Archipel ensanglanté des exils :
La ville appelle – appelle !
Pour ces étrangers :
Pas une île – Pas une aile
Glanant librement !

La nuit siffle ses phares …
Ils affichent leurs faisceaux chronophages
Pour un accueil mort
Quoi ? La ville –
Au seuil
De son océan –
Ne prendrait plus à son compte
La distance que dans
La vitesse
Qui la comble
Mécaniquement

Il faudrait mettre en cage
Le céans de l’éponte
Pour cacher
Accents et
Couleurs
Sous le filon indécent
De l’accumulation-miracle
Où sévit le cénacle
Des usuriers de
La finance !
Plus de futur pour les exilés ?
Plus de futur pour le Nous ?

Les canards à la pensée abjurée
Dodelineraient avec
Les bravos d’une
Claque –
Et banaliseraient
L’injure faite
A l’étranger qui peuple
Le ventre de Paris
Et le fait vivre –
En l’en chassant sans scrupule !

Et nous écouterions la musique
De ces « héros » de
La Nation
Alors qu’ils organisent le chaos
Depuis leur anti-chambre
Où s’enregistre le
Déni des
Simples gens
Avec un tintamarre
Sur la « libre circulation »
Qui brûle et calcine
L’espoir de tout
Exilé et enferme
Notre souveraineté
Et notre quête d’indépendance
Et de liberté
Dans un cloaque de
Corruption par
Et pour les
Puissants de ce monde …

Bouches fermées –
Les cités rongent
Leur frein en
Étouffant
Dans leurs apnées nocturnes
Même la lune louche
Sur ce « Désastre Obscur «

Mais nous entrons dans l’imprévu
Qui arrache au hasard
La conjonction de
La révolte et
De l’amour !
Volte-face contre
Les baisers de l’infâme !
Il reste sur nos lèvres
Une âme
Non-subordonnée
Aux ressentiments du pouvoir

O Toi qui l’entends :
Demeure dans l’alphabet
Des résurrections
Lorsqu’elles
T’octroient jusque dans le murmure
Le chant le plus éloigné
De l’hébétude et …
Accordé à l’orchestre des
Droits restés souverains
Dans les têtes des
Moins que rien

Ce qui dresse la lettre
Hors de l’habitude
C’est ce que l’on peut déceler
Dans le grand livre
Ouvert sur
Les bouches de l’inconnu …
Et bientôt on traduira
Tout ce qui a été bu
Par le paria
Comme ce qui l’a pénétré
En fleuron de
La pensée

On épellera dans toutes les langues
Les doux noms de
La résistance :
Ceux des anonymes
Qui ne haranguent
Que pour l’insistance amicale
A l’originale justice
Celle qui -– comme l’amour –
Allume et attise
Le grand foyer des merveilles
A lier sur cette terre et
Dans ce pays malgré
La bise glaciale
Des puissants
Qui les met sur la paille
Pour les avoir tant
Haïs

Alain Minod

BERGERIES


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BERGERIES

Suppose

Que je vienne et te verse
Un peu d’eau dans la main

Et que je te demande
De la laisser couler

Goutte à goutte
Dans ma bouche.

Suppose

Que le vol d’un oiseau
Nous invite au voyage

Et que je te demande
De nous blottir en lui

Pour avec lui voler

A travers ta pénombre.

Suppose

Que près de toi mes jours
Aient un cours trop rapide

Et que je te demande
De faire de mon temps

Un temps de végétal
Pas pressé de fleurir.

Suppose

Que le bois de la table
Réclame ses racines

Et que je te demande
De nous y prendre ainsi

Qu’il ait surtout besoin
Du toucher de nos mains.

Suppose

Que la fleur soit si drue
Que c’est trop de défi

Et que je te demande

De m’apprendre à la voir

Sans penser que c’est nous
Que sa mort atteindra.

Suppose

Qu’un couple de mésanges
Cogne à notre fenêtre

Et que je te demande
De les laisser cogner

Jusqu’à ce qu’on nous parle
Un langage entendu.

Suppose

Que le ciel de la plaine
Soit jaloux de nous deux

Et que je te demande
Envers lui ce sourire

Qu’il attend de la terre
Depuis les origines.

Suppose

Que le chêne refuse

Nos corps contre son tronc

Et que je te demande
Que nous lui chantonnions

Le chœur de ses racines Étouffé dans ses feuilles.

Suppose

Que dans l’air chaud le blé
Parle encore de toi

Et que je te demande
D’aller lui rapporter

Que j’en sais davantage
Mais que j’aime écouter.

Suppose

Que tu m’ouvres les bras
Pour fêter le matin

Et que je te demande
De ne pas me garder

Tant que je ne sais pas
Cerner mes cauchemars.

Suppose

Que nous ne soyons pas
Si contents de nous-mêmes

Et que je te demande
De rappeler à nous

Ces moments où j’ai lu
La gloire dans tes yeux.

Suppose

Que le ciel soit trop près
De nos corps extasiés

Et que je te demande
De lui faire accepter

Que nous ne voulons pas
L’avoir comme témoin.

Suppose

Que la feuille du chêne
Te réclame auprès d’elle

Et que je te demande
D’y rester jusqu’au jour

Où ce sera mon tour
D’être appelé par elle.

Suppose

Que la rose ait envie
De devenir bluet

Et que je te demande
Que nous nous appliquions

A l’écœurer du bleu
Des mers azuréennes.

Suppose

Que je voie la pervenche
N’en pouvant plus d’attendre

Et que je te demande
De lui annoncer, toi,

Que ce n’est pas la peine,
Qu’il est déjà venu.

Suppose

Que les herbes grandissent
Plus haut que les terrils

Et que je te demande
Que nous sachions en rire

Comme si c’était nous
Qui prenions la revanche.

Suppose

Que la lune apparaisse
Quand nous ne voulons pas

Et que je te demande
De tout accepter d’elle

Pour qu’elle aille sa route
Et nous laisse à nous-mêmes.

Suppose

Que ce soit le rocher

Qui frappe à notre porte

Et que je te demande
De le laisser entrer

Si c’est pour nous conter
Le temps d’avant le temps.

Suppose

Que tout, sous nos regards,
Soit pris d’un tremblement

Et que je te demande
De garder notre calme,

Tout en faisant semblant
De trembler comme eux tous.

Suppose

Que je coupe la terre
En deux parties égales

Et que je te demande
Laquelle tu choisis,

Celle où je sombrerai,
Celle qui voguera.

Suppose

Que la nuit ait envie
De te prendre pour reine

Et que je te demande
De lui faire accepter

Qu’elle ait à se venger
Sur moi de ton refus.

Suppose

Que le feu te raconte
Sur moi des infamies

Et que je te demande
De croire ce qu’il dit

A moins que tu ne t’offres
A l’épreuve du feu.

Suppose

Que la montagne s’ouvre
En s’avançant sur nous

Et que je te demande
Que nous restions à rire

Du mal que l’on se donne
Rien que pour nous gober.

Suppose

Que nous soyons ensemble
A respecter le soir

Et que je te demande
De le couvrir du sang

De la bête qui vient
Nous humer dans la nuit.

Suppose

Que l’horloge s’arrête
En éclatant de rire

Et que je te demande
De lui dire que rien

N’est changé pour cela
A ce que fait le temps.

Suppose

Qu’un cuivre nettoyé

Se transforme en orchestre

Et que je te demande
De lui faire accepter

Que nous aimons bien mieux
L’accord de son silence.

Suppose

Que nos cailloux se mettent
A hurler tous ensemble

Et que je te demande
De les faire se battre

Et de chanter victoire
Avec le survivant.

Suppose

Que tout à coup le mur
S’effondre devant nous

Et que je te demande
De croire que c’est lui

Qui a voulu répondre
A notre vœu secret.

Suppose

Que sans raison la porte
Se fracasse à nos pieds

Et que je te demande
Si ta peur est plus grande

Depuis que le silence
A lâché sa menace.

Suppose

Que l’espace en courroux
Veuille nous séparer

Et que je te demande
De répéter mon nom,

De le crier toujours
Dans le tohu-bohu.

Suppose

Que la pluie te raconte
Qu’elle envahit la terre

Et que je te demande
De voir à travers moi

Que le soleil la gifle
Et la fait remonter.

Suppose

Que le train nous déverse
Dans quelque terrain vague

Et que je te demande
D’effacer de ce ciel

Ce qui se reproduit

Dans tant de cauchemars.

Suppose

Que je n’aie rien à faire
Que d’attendre la nuit

Et que je te demande
De vouloir qu’elle arrive

Avec tout le retard

Que l’on peut mettre à vivre.

Suppose

Que l’univers entier

Ne soit plus que terreur

Et que je te demande
D’user de tes regards

Pour qu’au moins la prairie
Cède à notre sourire.

Suppose

Que pour moi l’étendue
Soit de l’ordre du cri

Et que je te demande
De ramener son règne

A la plainte habitant
Le creux des coquillages.

Suppose

Que la mer ait envie
De nous voir de plus près

Et que je te demande
D’aller lui répéter

Que nous ne pouvons pas
L’empêcher d’être seule.

Suppose

Que près de nous la mer
Se mette à grommeler

Et que je te demande
De n’avoir d’autre peur

Que celle que nous donne
Son silence étranglé.

Suppose

Qu’il n’y ait que le vent
A rencontrer sur terre

Et que je te demande
De souffler à sa place

Et d’agir avec moi
Comme avec un trois-mâts.

Suppose

Que je me laisse un jour
Marcher sur l’océan

Et que je te demande
De m’appeler pour voir

Si ton cri peut changer
Mes rapports avec l’eau.

Suppose

Que la vague et le sable
Jurent de te dissoudre

Et que je te demande

De m’étreindre à ce point

Qu’on ne puisse te prendre
Et me laisser un corps.

Suppose

Que la nuit me rejette
Quand je suis sans refuge

Et que je te demande
De me garder à toi

Pour affronter le noir
Sans redouter sa haine.

Suppose

Qu’il parle trop ce chêne
Où nous avons appui

Et que je te demande
D’obtenir qu’il se charge

Tout seul de son secret,
Pas plus lourd que le nôtre.

Suppose

Que le soleil couchant
S’en aille satisfait

Et que je te demande
D’aller lui réclamer

Ce qu’il doit nous payer
Pour sa journée de gloire.

Suppose

Que cet arbre et ce mur
M’imposent de les voir

Et que je te demande
De me donner la force

De passer devant eux
En ne voyant que toi.

Suppose

Que le jour et la nuit
Confondent leurs horaires

Et que je te demande
De m’aider à trouver

Comment faire un matin
Quand il n’y en a pas.

Suppose

Que le soleil se mette
A envahir la terre

Et que je te demande
D’être avec moi la glèbe,

La mer et le soleil
Pour la dernière fois.

Suppose

Que s’ouvrent sous nos yeux
Tous les toits de la ville

Et que je te demande
De choisir la maison

Où, le toit refermé,
Tu aimeras la nuit.

Suppose

Que nous soyons devant
La bougie allumée

Et que je te demande
Si tu comprends pourquoi

Nous en avons besoin
Pour nous réinventer.

Suppose

Que le lit nous ramène
A nos trois dimensions

Et que je te demande
D’accepter avec moi

Que nous le reprenions
Comme aire de départ.

Suppose

Que je veuille épouser
La plaine et l’océan

Et que je te demande
Que cela se situe

Dans la complicité
De ton corps exaucé.

Suppose

Que je sois fatigué
D’avoir trop travaillé

Et que je te demande
De te pencher sur moi,

De regarder ailleurs
Et d’ouvrir ton corsage.

Suppose

Qu’un oiseau dans l’hiver
Chante comme on triomphe

Et que je te demande
D’accompagner la plaine,

De façon qu’elle aborde
Au niveau de ce chant.

Suppose

Qu’un ange rencontré
Nous offre un paradis

Et que je te demande
Que nous nous écartions

Et le laissions tout seul
Raconter son velours.

 

Eugène Guillevic

L’APPEL ET LE SAUT


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L’APPEL ET LE SAUT

 

Glissant entre les mèches

je dessine d’un doigt  mes premières lettres

dents de peigne démêlent

les formes ondulent en petites maisons debout sur les côtés

la poitrine s’habite ermitage

un cheval bascule à saute-mouton

feulement de levrette

alors que sortant de l’eau un poisson-volant en remontant l’encre lève le voile

Sans queues de sirènes mais à grande échelle

un banc de femmes me met dans le bac à sable complètement en feu

blé en herbe le cheval  vient aux brancards

 

Niala-Loisobleu – 26 Novembre 2019

 

 

JE N’AIME PAS DORMIR


Jean Cocteau

 

 

JE N’AIME PAS DORMIR

 

Je n’aime pas dormir quand ta figure habite,
La nuit, contre mon cou ;
Car je pense à la mort laquelle vient trop vite,
Nous endormir beaucoup

Je mourrai, tu vivras et c’est ce qui m’éveille!
Est-il une autre peur?
Un jour ne plus entendre auprès de mon oreille
Ton haleine et ton coeur.

Quoi, ce timide oiseau replié par le songe
Déserterait son nid !
Son nid d’où notre corps à deux têtes s’allonge
Par quatre pieds fini.

Puisse durer toujours une si grande joie
Qui cesse le matin,
Et dont l’ange chargé de me faire ma voie
Allège mon destin.

Léger, je suis léger sous cette tête lourde
Qui semble de mon bloc,
Et reste en mon abri, muette, aveugle, sourde,
Malgré le chant du coq.

Cette tête coupée, allée en d’autres mondes,
Où règne une autre loi,
Plongeant dans le sommeil des racines profondes,
Loin de moi, près de moi.

Ah ! je voudrais, gardant ton profil sur ma gorge,
Par ta bouche qui dort
Entendre de tes seins la délicate forge
Souffler jusqu’à ma mort.

Quand je te vois sortir plus qu’à moitié du songe,
Et de sa glu tirant un à un tes esprits,
Ayant le vrai mêlé d’ingénieux mensonge,
Et tes membres bougeant, à cette mort repris ;

Je pense aux monstres, fous de ce chant de Trace,
S’ils ne l’eussent lâché sitôt qu’il s’en alla.
Ainsi je voudrais voir suivre dehors ta trace,
Le bétail de ton rêve, étonné d’être là.

Je découvrirai donc ceux qu’en un tour d’horloge,
Inerte à mes côtés, loin de moi tu charmais,
Lorsque tu t’en reviens et que je t’interroge,
Et que tu me réponds : je ne rêve jamais.

Mauvaise compagne, espèce de morte,
De quels corridors,
De quels corridors pousses-tu la porte,
Dès que tu t’endors ?

Je te vois quitter ta figure close,
Bien fermée à clé,
Ne laissant ici plus la moindre chose,
Que ton chef bouclé.

Je baise ta joue et serre tes membres,
Mais tu sors de toi,
Sans faire de bruit, comme d’une chambre,
On sort par le toit.

Lit d’amour, faites halte. Et, sous cette ombre haute,
Reposons-nous : parlons ; laissons là-bas au bout,
Nos pieds sages, chevaux endormis côte à côte,
Et quelquefois mettant l’un sur l’autre le cou.

Rien ne m’effraie plus que la fausse accalmie
D’un visage qui dort ;
Ton rêve est une Egypte et toi c’est la momie
Avec son masque d’or.

Où ton regard va-t-il sous cette riche empreinte
D’une reine qui meurt,
Lorsque la nuit d’amour t’a défaite et repeinte
Comme un noir embaumeur ?

Abandonne , ô ma reine, ô mon canard sauvage,
Les siècles et les mers ;
Reviens flotter dessus, regagne ton visage
Qui s’enfonce à l’envers.

Notre entrelacs d’amour à des lettres ressemble
Sur un arbre se mélangeant.
Et, sur ce lit, nos corps s’entortillent ensemble,
Comme à ton nom le nom de Jean.

Croiriez-vous point, ô mer, reconnaître votre œuvre,
Et les monstres de vos haras,
Si vous sentez bouger cette amoureuse pieuvre
Faite de jambes et de bras.

Mais le nœud dénoué ne laisse que du vide ;
Et tu prends le cheval aux crins,
Le cheval du sommeil, qui, d’un sabot rapide,
Te dépose aux bords que je crains.

Je regarde la mer qui toujours nous étonne
Parce que, si méchante, elle rampe si court,
Et nous lèche les pieds comme prise d’amour,
Et d’une moire en lait sa bordure festonne.

Lorsque j’y veux plonger, son champagne m’étouffe,
Mes membres sont tenus par un vivant métal ;
Tu sembles retourner à ton pays natal,
Car Vénus en sortit sa fabuleuse touffe.

Ce poison qui me glace est un vin qui t’enivre.
Quand je te vois baigner je suis sûr que tu mens ;
Le sommeil et la mer sont tes vrais éléments…
Hélas ! tu le sais trop, je ne peux pas t’y suivre.

Au moment de plonger sous les vagues du songe
Tu sembles hésiter ;
Craindrais-tu, par hasard, qu’à ta suite je plonge
Et du même côté.

Ne crais rien, nos sommeils ont une différence,
Car lorsque je m’endors,
Le cauchemar te mêle aux lieux de mon enfance
Avec mes amis morts.

Tu traverses les bois, les groseilliers, les fermes,
Les routes que j’aimais ;
Tandis qu’en la torpeur profonde où tu t’enfermes,
Je ne marche jamais.

Il me serait bien doux de déranger ton rêve,
De l’habiter longtemps.
Alors je tremblerais que le soleil se lève
Et t’ouvre à deux battants.

Lorsque nous serons tous deux sous la terre,
Plus ou moins dessous,
Un moyen nouveau nous venant extraire
De nos corps dissous ;

Dessous ou dessus (là-bas notre langue
N’ayant plus de cours)
Nous ne serons pas de visage exsangue,
Ni légers, ni lourds.

Tout sera changé de ce que nous sommes,
Oui, tout à l’envers.
Et les murs épais du sommeil des hommes
Nous seront ouverts ;

Si je meurs premier, dans tes rêves j’entre ;
Je verrai comment,
Lorsque je dormais, la main sur ton ventre,
Tu changeais d’amant.

Je peux regarder le soleil en face,
Ton œil ne le peut.
Voilà bien mon tour, c’est la seule place
Où je gagne au jeu.

Lorsque nous devrons aux enfers descendre,
S’il est des enfers,
Nous n’habiterons pas le même scaphandre,
Ni la même mer.

Tu sauras trouver d’autre compagnie
Au séjour des morts.
Ah ! Comment guérir sa folle manie
De m’ôter ton corps ?

Tes rires retroussés comme à son bord la rose,
Effacent mon dépit de ta métamorphose ;
Tu t’éveilles, alors le rêve est oublié.
De nouveau je me trouve à ton arbre lié,
Tu me serres le corps de ta petite force.
Que ne sommes-nous plante, et d’une seule écorce,
D’une seule chaleur, d’une seule couleur,
Et dont notre baiser serait l’unique fleur.

Jean Cocteau

LES CALANQUES


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LES CALANQUES

 

La montagne sort se plonger dans la mer

après s’être roulée sur les seins de la plage

Une banderole publicitaire passe dans le ciel

Salvador Dali conduit Gala au taureau après s’être fait cirer la moustache pour la maintenir en état de raideur

l’indépendance catalane tronche Emmanuel Vals avant la Fête de la Sardine

Où est Miro ?

 

Niala-Loisobleu – 25/11/19