ANOUKIS ET PLUS TARD JEANNE
Je te découvrirai à ceux que j’aime, comme un long éclair de chaleur, aussi inexplicablement que tu t’es montrée à moi, Jeanne, quand, un matin s’astreignant à ton
dessein, tu nous menas de roc en roc jusqu’à cette fin de soi qu’on appelle un sommet. Le visage à demi masqué par ton bras replié, les doigts de ta main sollicitant ton
épaule, tu nous offris, au terme de notre ascension, une ville, les souffrances et la qualification d’un génie, la surface égarée d’un désert, et le tournant
circonspect d’un fleuve sur la rive duquel des bâtisseurs s’interrogeaient. Mais je te suis vite revenu, Faucille, car tu consumais ton offrande. Et ni le temps, ni la beauté, ni le
hasard qui débride le cceur ne pouvaient se mesurer avec toi.
J’ai ressuscité alors mon antique richesse, notre richesse à tous, et dominant ce que demain détruira, je me suis souvenu qui tu étais Anoukis I’Etreigneuse, aussi
fantastiquement que tu étais Jeanne, la sœur de mon meilleur ami, et aussi inexplicablement que tu étais l’Etrangère dans l’esprit de ce misérable carillonneur dont le
père répétait autrefois que Van Gogh était fou.
René Char
Le vent bat contre l’armoire ouverte d’un début de mort qui se tient bras croisés, empilée sur quelques lettres jaunies dans un ruban aux regards des faits
une robe de village blanc tremble à la tringle d’un panorama de sierra, draps tatoués d’encre de marine délavée. J’avais mis des feuilles avant que l’olivier ne pousse, signe indéfectible d’une vision déplacée, l’orage tonne au devant du jour de fête de la femme comme une excision criminelle
Les voix polyphoniques content les moutons, je dors déjà dans un mal que l’oeil maudit tient ouvert. Je me demande si le printemps ne va pas à l’envers du décor, j’ai peur du tant funèbre célébrant un monde des enfoirés.
Niala-Loisobleu – 8 Mars 2019



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