5 réflexions sur “DEBUT ET FIN DE LA NEIGE – YVES BONNEFOY

  1. Un bouleau éclaire
    toute la forêt.

    Un vase noir dans la maison met en deuil le miroir
    Ses reflets se glissent entre le lèvres
    atteignent aux ténèbres du dedans
    Mêlent le marbre et cette chair muette
    Debout
    A l’encoignure.
    Mais sur la vitre
    On tâte
    L’illumination blanche de l’arbre
    Et pour un temps les mots retrouvent leur vitalité.

    Marie-Claire Bancquart.

    Aimé par 1 personne

    • ÉLÉGIE DE MON PÈRE – ÉLÉGIE

      Ce matin je regarde monter la brume dans la couleur jaune des vallons

      Je songe avec l’oiseau dans l’air comme dans la mort

      Je songe à la musique enveloppée de brume dans les pentes

      J’écoute la voix de mon père dans mon corps

      Ce matin je regarde le visage de mon père

      dans la brume dorée et jaune des collines

      J’écoute l’appel d’un unique oiseau à la cime de l’arbre encore emperlé de pluie

      Je vois le visage de mon père aux yeux de ciel

      de juillet et d’éclair métallique avant l’orage

      Son regard aigu et bon sur mes songes

      Ce matin je descends dans l’écorce de l’arbre

      et dans la pierre
      Je ploie à la fraîcheur du vent dans la souple herbe
      Je marche dans cette herbe à côté de mon père
      Puis il s’arrête il approche un visage au front

      ridé et lisse
      Peut-être je touche ses yeux de prairie dans le ciel

      entre les nuages
      Peut-être j’entre dans le lac de verre de ces yeux

      Avec les arbres les nuages la cime des monts
      Peut-être je descends sous la terre du rocher

      avec ces yeux

      Ce matin je ne sais plus si c’est toi qui parles

      ou si c’est moi
      Tellement fort et précise parle ta voix dans ma voix
      Je regarde un paysage d’ombre et d’air
      J’écoute en toi le passage de la rivière

      ô mon père
      Et le vent qui fait bouger tes cheveux

      pas encore blancs

      Ce matin je marche dans l’herbe de jadis avec mon

      père
      Je rêve que je ne verrai jamais ses cheveux blancs
      Ni que j’entendrai la rivière dans le temps

      qui lui reste à vivre
      Ni cet automne qui vient de vallon en vallon avec le

      givre
      Avec le chant de l’oiseau dans cet air jaune
      Ni l’appel au fond de son corps

      plus triste appel
      Que les voix de la forêt, des pentes, des vallons
      Plus triste et mélodieux appel

      que celui de mon cœur mortel 0 si tu dois être mort en moi si longtemps
      Jusqu’à ma mort peut-être si tu dois attendre

      la vraie mort

      Jacques Chessex

      Aimé par 1 personne

Les commentaires sont fermés.