Quelqu’un habite en nous
J’ai souffrance beaucoup,
de cœur surtout
J’ai, très fort en moi, angoisse d’être vivant : j’ai !
Chaque naissance m’est blessure et la mienne gît
Quelque part dans une ville qui m’apparaît plus morte
Encore que ce rat dans l’égout – lui, au moins, n’atten-
Dant rien, n’espérant rien – (mais en est-on sûr ?) de
La vie. J’en ai grand angoisse ! J’ai angoisse de cela.
Il reste l’écriture, avec ses soldats, ses hommes par Mil-
Liers : nos libérateurs. Ressentent-ils eux-mêmes cet-
Te sensation ? Être des mots, blessés, qu’angoisse ronge !
Quelqu’un habite en nous
quelqu’un se tient de nuit
lourdement obscur
debout
contre un portail
en fait on ne distingue que ses chaussures noires, leurs lacets élégants
quelqu’un
ça ! il ne laisse rien voir de lui, il
observe les passants, les habitués de la brasserie, il
se tient comme un cavalier de l’Apocalypse dont le cheval se serait noyé Il et Il
ô monde malade, mon devoir est de rendre compte de l’état de tes nerfs
de ta pensée et de certains de tes actes
cet autre moi-même, debout, adossé à la porte, s’y emploie
mais qui est-il vraiment ? double – jumeau − faussaire en identité scabreuse −
on ne voit que ses chaussures, leurs larges lacets élégants, cela suffit
cela suffit pour l’instant
quelqu’un habite en nous : amoureux de la vie, stratège de la mort
qui chaque nuit
dirige la Baraque des rêves ouverte toute l’année
ô monde si peu scrupuleux, si versatile, si mal ouvert aux autres
accepte aussi mon étrange présence
pour en finir jamais
Franck Venaille, Ça, Mercure de France, 2009, pp. 41 et 46

Je t’embrasse dans cette dualité magnifique-là …
J’aimeAimé par 1 personne
Un baiser de tes lèvres aux dix doigts me conte l’aventure sur la ligne de vie qu’on rafistole au jour le jour, mon double, mon autre, je serre ta main d’yeux perçants comme je dis merde à vos bans…
J’aimeAimé par 1 personne
La lumière patiemment
nous a rejoints
dans les silences alternés
de ses jambes de bateau échoué
au bastingage d’un temps enfreint.
Te nommer.
Et demain prendre le large.
Boire le sel dans des gobelets ivres
sur une table de bois flotté et d’ambre.
Prolonger nos mains sages et excessives
au parquet et à l’horizon d’un nuage qui ment.
Caresser la vague de la voie effacée.
Lui offrir le ressac de nos genoux qui tremblent.
Barbara Auzou.
J’aimeAimé par 1 personne
Les lames du pont ruisseau du large piquent la couche
Les oiseaux tournent encore la crécelle du vent à tire-d’aile
A la proue de tes seins lourds je figure…
J’aimeAimé par 1 personne