LA BRICOLE


mjticcino17[1]
LA BRICOLE
Ce matin le tri porteur tousse comme s’il allait foutre le camp de la caisse. Pourvu qu’il ait pas pris une pointe de drapeau dans les rayons; le regard un pneu sorti du sectaire l’empêcherait de fébriler au bon sens du coeur. Mauvais ange in de poitrine ? Attention brouillard en retour des tas d’urgence – ça mue hélas plus souvent mauvais sens – René, que la fréquentation des tranchées et autres poteaux d’exécution et une bonne lecture de Fallet, avaient formatés, me prit par ma petite main d’enfant. Son regard de grand-père dépassant le premier abord.
-Aies pas peur, viens on va s’atteler la bricole, me dit-il de cette voix amortie par les poils de la moustache.
Il ouvrit alors la remise, celle-là où, un jour il m’avait dit qu’avec elle, on ne faisait jamais de marchandage, de tricherie promotionnelle. Du net. Publicité éteinte.
Une voiture à bras se montra. Deux ridelles un hayon, et une paire de brancards prêts à partir me tendant leur longue bricole de cuir à se ceindre la poitrine mieux qu’une écharpe toute neuve d’une quelconque confrérie, fusse-t-elle de toute tolérance prétendue, d’appartenance à la Veuve, la Fraternité genre enseigne au néon club-privé…trois points c’est tout.Celle-là on voyait que le cuir avait une connaissance totale de la sueur.
– T’avais quel âge Loiso ?
– Celui qu’on garde toute sa vie quand ça va mal et qu’au lieu de foutre les harangues dans l’huile sur le feu, on se branche à l’harnois de la bricole pour tirer en fermant sa gueule avant que ça enlise définitif.
Tout en désertant le retour aux négriers et leurs guerres coloniales.
Niala-Loisobleu
15 Novembre 2015
Die andere Seite
 https://www.youtube.com/watch?v=fh-xEitFaWI

IL Y EN A QUI PRIENT, IL Y EN A QUI FUIENT


12241449_10205219784434507_507841730207730096_n

« Il y en a qui prient, il y en a qui fuient »

Il y en a qui prient, il y en a qui fuient,
Il y en a qui maudissent et d’autres réfléchissent,
Courbés sur leur silence, pour entendre le vide,
Il y en a qui confient leur panique à l’espoir,
Il y en a qui s’en foutent et s’endorment le soir
Le sourire aux lèvres.

Et d’autres qui haïssent, d’autres qui font du mal
Pour venger leur propre dénuement.
Et s’abusant eux-mêmes se figurent chanter.
Il y a tous ceux qui s’étourdissent…

Il y en a qui souffrent, silence sur leur silence,
Il en est trop qui vivent de cette souffrance.
Pardonnez-nous, mon Dieu, leur absence.
Il y en a qui tuent, il y en a tant qui meurent.

Et moi, devant cette table tranquille,
Écoutant la mort de la ville,
Écoutant le monde mourir en moi
Et mourant cette agonie du monde.

René Tavernier, paru dans Positions, 1943

Les Poètes de la Résistance

Quitte-on un jour la résistance quand on a traversé sa vie durant la guerre, l’ignominie, la dérive politique, les méfaits du capital ? Non, j’y suis depuis mon enfance et y serais encore après ma mort. Mon regard humaniste a toujours veillé, sachant que pleurer avant que le malheur arrive, a plus de chance d’arroser la paix que de la noyer dans le sang.

Aujourd’hui ce qui arrive n’est que le début d’un drame qui va sévir bien au-delà de la France, faute d’avoir coupé à la racine quand on a regardé que l’intérêt du rapport en lieu et place du prix à payer.

Niala-Loisobleu

14 Novembre 2015

14562990

ETRANGES SONT LES VOIES NOCTURNES DE L’HOMME


15 - 1

ETRANGES SONT LES VOIES NOCTURNES DE L’HOMME

Ce matin me voici à écrire à la mélancolie qui habille un quotidien de tant de circonstances atténuantes, que je la montre pour qu’on sache sa part de vérité. Son juste lamento, sans que je n’ai perdu mes ongles à lacérer le mauvais sort, au nom de ce qui en nous doit vivre au premier rang sans céder à une souffrance indiscutable.

Toi qui a mal je ne t’en aime que davantage. Et moi l’ara-qui-rit, je choisis un des plus noirs oisos qui soient :

Georg Trakl

Poète des lacs sombres, des décadences et des transgressions, Trakl est le poète contemporain le plus dérangeant. Étranges sont ses voies nocturnes, et il reste un étranger pour tous. Maléfique sa poésie, éclatante et perverse son écriture.

« Qui pouvait-il bien être ? » demandera Rilke juste après la mort de Trakl. « Je suis à moitié né, je suis complètement mort », disait lucide Trakl.

Trop de réponses vont tuer la réponse, on peut juste s’approcher un peu de ce poète en éludant sa complexité et son sens du religieux très personnel, Pain et vin, ceux de la religion mais aussi ceux qu’il apportait aux prostituées les soirs d’hiver passent dans son œuvre.

Mais plus encore la neigeuse nuit, est dans ses mots qui sont « une croix de sang dans l’éclat des astres ». Il se voyait comme un pauvre Kaspar Hauser, l’homme sans identité, l’étranger total.

Une poésie noire et glacée

Issue des débris pourrissants de l’Europe austro-hongroise, de la joyeuse apocalypse viennoise, du nihilisme féroce berlinois, une poésie noire et glacée a vu le jour : la poésie expressionniste de langue allemande. Pressentant les bruits terrifiants de la grande « guerre-boucherie » qui s’avance dans les tranchées des têtes, toute une génération de peintres, d’écrivains hurlera avant de disparaître, broyée devant la bêtise coagulée en haine répandue. Il aura retransmis le crépuscule métaphysique de l’Occident.

D’ailleurs « Occident » est l’un de ses plus beaux textes. Il est profondément l’homme du déclin et il n’aura de cesse de décliner.

Trakl est né à Salzbourg le 3 février 1887, il est mort le 3 novembre 1914 à 27 ans.

Il était pharmacien militaire, pour mieux se rapprocher de ses drogues. Sa vision de la boucherie de Grodek, entre le 6 et le 11 septembre 1914, le marqua au tréfonds. Il fera une tentative de suicide pour ne plus voir au fond de lui tous ses corps déchiquetés, ces dormeurs sombres au front fracassé.

Trakl est mort autant d’overdose de cocaïne une nuit de 3 novembre 1914 à l’hôpital psychiatrique de Cracovie que d’overdose du monde en sang. Il demeure, sans doute le plus grand de ces sacrifiés, comme Franz Marc, August Macke, qui surent jusqu’aux bouts des « champs d’horreur » parler de beauté. Nul n’aurait connu sa poésie et son théâtre sans le dévouement de son éditeur Ficker. Et depuis il est le soleil noir de la poésie allemande. En 1925 ses restes sont ramenés en Autriche près d’Innsbruck, pas si loin de vienne qu’il détestait. Une seconde vie commence dans la conscience littéraire européenne. Il devient la voix du malheur dans l’écrin du lyrisme proche de Novalis, avec des formes qui semblent rassurantes, – sonnets, quatrains -, mais qui pervertissent le genre.(Source Esprits Nomades)

Mélancolie

L’âme bleue s’est refermée muette

Dans la fenêtre ouverte tombe la forêt brune

Le silence des bêtes sombres ; dans la profondeur meule le moulin

sur le chemin,, les nuages dévalent,

Ces étrangers dorés. une cohorte de coursiers

jaillit rouge dans le village. Le jardin brun et froid

L’aster tremble de froid, sur la clôture peinte tendrement

l’or des tournesols est déjà presque enfui.

La voix des jeunes filles, la rosée a débordé

dans l’herbe dure et l’étoile blanche et froide.

Au milieu des ombres chères vois la mort peinte

chaque face pleine de larmes et fermée sur elle-même.

Georg Trakl

Je n’ai de mal que d’aimer tant le bonheur passe par la souffrance combattue .

Niala-Loisobleu

13 Novembre 2015

The%20Workshop[1]

https://www.youtube.com/watch?v=qzOmPUu-F_M

COMMUNE PRESENCE


012-quality-photo-manipulations-miraccoon

COMMUNE PRESENCE

Tu es pressé d’écrire
comme si tu étais en retard sur la vie
s’il en est ainsi fais cortège à tes sources
hâte-toi
hâte-toi de transmettre
ta part de merveilleux de rébellion de bienfaisance
effectivement tu es en retard sur la vie
la vie inexprimable
la seule en fin de compte à laquelle tu acceptes de t’unir
celle qui t’es refusée chaque jour par les êtres et par les choses
dont tu obtiens péniblement de-ci de-là quelques fragments décharnés
au bout de combats sans merci
hors d’elle tout n’est qu’agonie soumise fin grossière
si tu rencontres la mort durant ton labeur
reçois-là comme la nuque en sueur trouve bon le mouchoir aride
en t’inclinant
si tu veux rire
offre ta soumission
jamais tes armes
tu as été créé pour des moments peu communs
modifie-toi disparais sans regret
au gré de la rigueur suave
quartier suivant quartier la liquidation du monde se poursuit
sans interruption
sans égarement

essaime la poussière
nul ne décèlera votre union.

René Char

(Commune présence, in Le Marteau sans maître (1934-1935)

2bc7d457f8a466110df1f47cde31be9a (1)

https://www.youtube.com/watch?v=u6bjwZqo8wc

LACRYMALES BLEUES


Alessandra Maria, Thin Lines of Contact _vrouwen66

LACRYMALES BLEUES

Pendant qu’ils avaient

leur do tourné

le tien tout seul a pris toute la gamme

jolie fugue

J’ai posé mes lèvres au sel de tes yeux

larmes bleues

vagues de harpe

cap au large

Un do plus fin que les autres

surgissant de l’ô

a libéré de ta poitrine

les zèles des papillons

Nous voici aux chants d’oiseaux

accordés

une m’aime couleur de plume

à la main

De loin en loin

nous nous rapprochons

à portée

Niala-Loisobleu

12 Novembre 2015

IMG_0192

https://www.youtube.com/watch?v=4uX-5HOx2Wc

A LA GLACIERE


A LA GLACIERE

Quand j’avais ni poils ni tétés
Tous les soirs, l’hiver comm’ l’été,
Je travaillais dans les pissotières
A la Glacière.

Avec un p’ti sourir’ vicieux
J’r’troussais d’vant les vieux messieurs
Mon tablier noir d’écolière
A la Glacière.

Comm’ mon pucelage il était loin,
On m’enfilait dans les p’tits coins
Mais fallait que j’mont’ sur un’ pierre
A la Glacière.

Et pis j’m’en allais sans m’laver
En sentant ma monich’ baver
Tout l’long d’ma cuiss’ dans ma jarr’tière
A la Glacière.

A part ça, j’savais bien sucer,
Mêm’ les vieux qui n’pouvaient plus pisser,
J’avalais ça comm’ de la bière
A la Glacière.

J’avais aussi un aut’ métier,
J’bouffais tout’s les gouss’s du quartier,
La blanchisseuse et l’épicière
A la Glacière.

Quand j’faisais un’ gougnott’ miché
Qui m’enfilait au godmiché,
J’disais toujours : « T’es la première ! »
A la Glacière.

C’est l’jour d’ma premièr’ cummunion
Que j’ai gagné le plus de pognon
Par la bouche et par le derrière
A la Glacière.

Mais jamais d’ma vi’ j’ai tant ri
Qu’en suçant l’membre du jury
Qui m’avait couronné’ rosière
A la Glacière.

Pierre Louys

1905

(parodie de la chanson de Bruant du même titre)

90894637_Natalie_Shau17

https://www.youtube.com/watch?v=qeas4D-VkUU

MI NOCHE TRISTE


Isabel Munoz - Serie Tango -

MI NOCHE TRISTE

L’eau coule par les crevasses du plafond
Aux rides du plancher les pattes d’oie s’envasent
Où est parti le lustre, en boule ?
Vers ce bruit sombre,

peut-être,

cette promesse mensongère,

lumière

qui se balançait aux anneaux d’une chaîne d’amitié ?

Un chat a glissé sa queue entre les moustaches d’un crapaud à franges où le parapluie sommeille, replié sur lui-même. Le vent fait trembler des reflets sur les pavés ardoise des quais, où des herbes brûlées par de l’oxyde de ne pas faire, ont écrit les adieux de la verdure en d’ocres signes de détresse.

Au bout du bassin, une carcasse marine se laisse embarquer par des roulis gardés dans les vertèbres. Les bois blanchis par le sel n’ont rien oublié des étreintes d’un océan en rut, aux chevilles de bas bord, ils courbent l’échine des frôlements de pieds glissant sur le pont , tri bord vers celle dont la figure demeure en proue.

Tango triste, c’est pas nouillard, tango triste c’est pas du sirop, tango triste c’est show de sentiment. C’est l’aime haut ragie. Deux poignets qui se marient au fil du rasoir.Tango c’est la vie rouge noir, tango verse moi en corps à boire.

Tango c’est une mise amor

Chat vire
Chat loupe
Chat rade
Chat touille
Chat gâte
Chatte paires chez
Chat tisse faction
Il pleut dans les yeux
Au port salut. attaches-toi
Chat t’air tonne

Les papillons cognent sous les halos déchirés de rendez-vous manqués
Chat toi ment
Aux pianos les bars sont en bleus de chauffe
Les cous se sucent pendus aux cordes d’un violon
Chatte rit
La contrebasse déchire le haut du pantalon
Chatte à nous gârs
Tango vagine
Tango bande-aux-néons

Tago cyprine
Tango chatte au brillant
Charnel
Tango sangsuel
Tango qui réunit
Tango qui lie
Tango qui noud
Tango qui nous raye unis
Dense étreinte

Les garçons et les filles de mauvaise vie ont bon dos. Mâts, matelots et mate las s’en souviennent. Tango dit toute la vérité, tango vie de merde, tango frénésie, tango mord, tango tord le cou à la mort, tango c’est l’avis de l’amor.

Mi noche triste, ouvre les paupières sur les marchés d’esclaves, ils sont partis, fers, les pas libres.
Mi noche triste cueille la ouate des nuages et tisse le coton des ciels de lit
Mi noche triste hurle sous les coups de l’injustice, poumons cancer
Mi noche triste s’insurge, boulet de la tyrannie quitte mes chevilles
Mi noche triste libère ma tête, coeur ouvert à corps éperdu
Mi noche triste

Mi noche triste est-ce demain le levé du soleil
Tango peau à peau, dévêt la porte de ce drap mortuaire
Tango est-ce tu air
Tango ma chemise colle, desselle l’harnais, saute à cru la haine
Tango pisse, crache, vomis
Tango arrache laid
Tango
Chacun sa peine

Niala-Loisobleu
11Novembre 2015

Isabel Munoz - couple danes cubaine -

https://www.youtube.com/watch?v=08iAnr7I0vY

M’AIME MORT


M’AIME MORT

Et je mords en corps

au point de mes ongles

à étrangler sous mes fa

l’ange

qui me ravit d’ailes

Santos Hu- 021

Seul gardien de mes buts

t’en déplaise

maux dits

J’aimerais oui le j’aimerais tous jours

m’aime mort !

Niala-Loisobleu

10 Novembre 2015