TROIS POEMES POUR ANNABELE LEE
La lune s’attarde au-dessus des collines
Et je sens les lueurs des étoiles sous ta peau
Fleurs de jacaranda et parfum d’aubépine
Dans cet or de la nuit tes cheveux coulent à flots
Les groseilles boréales et les airelles fauves
Au velours de tes lèvres humides et licencieuses
Me laissent dans la bouche un goût de folie mauve
Un arôme estival aux couleurs silencieuses
Annabel Lee
Pas un seul cheveu blanc
N’a poussé sur mes rêves
Annabel Lee
Au roman des amants
Je feuillette tes lèvres
Vapeurs de canneberge oubliées dans la bruine
Et sur les pétroglyphes de tes bleus sanctuaires
L’esprit de la mangrove suit l’ombre de tes djinns
Et dézeste les grumes aux subtils estuaires
Ne laisse pas la peur entrouvrir le passage
Obscur et vénéneux dans l’argent de tes yeux
Mais donne à la lumière tes pensées les plus sages
Pour un instant de calme, de plaisir délicieux
Annabel Lee
Pas un seul cheveu blanc
N’a poussé sur mes rêves
Annabel Lee
Au roman des amants
Je feuillette tes lèvres
Annabel Lee
J’ai dans mes récepteurs
Le parfum de ta voix
Annabel Lee
Je te connais par cœur
Sur le bout de mes doigts
Au loin dans la vallée la brume se mélange
Aux pastels de safran de violette et d’orange
Et j’en vois les reflets dans ton regard voilé
Par des réminiscences d’antiques cruautés
Ne laisse pas les mères de vinaigre envahir
Tes pensées ta mémoire tes rêves et ton sourire
Chasse au loin ta détresse laisse entrer le printemps
Le temps de la tendresse et de l’apaisement
Annabel Lee
Pas un seul cheveu blanc
N’a poussé sur mes rêves
Annabel Lee
Au roman des amants
Je feuillette tes lèvres
Annabel Lee
J’ai dans mes récepteurs
Le parfum de ta voix
Annabel Lee
Je te connais par cœur
Sur le bout de mes doigts
Hubert Félix Thiéfaine


C’était il y a longtemps, très longtemps,
Dans un royaume au bord de l’océan,
y vivait une vierge que vous pourriez connaître
Du nom d’Annabel Lee;
Cette vierge vivait sans autre pensée
Que de m’aimer et d’être mon aimée.
Elle était une enfant et j’étais un enfant,
Dans ce royaume au bord de l’océan,
Mais nous aimions d’un amour
qui était plus que de l’amour
Moi et mon Annabel Lee,
D’un amour tel que les séraphins du Ciel
Nous jalousaient elle et moi.
Et c’est pourquoi, il y a longtemps,
Dans ce royaume au bord de l’océan,
Les vents firent éclater un nuage et glacèrent
Ma toute belle Annabel Lee ;
Si bien que ses nobles parents sont venus
Et l’ont emportée loin de moi
Pour l’enfermer dans un tombeau
Dans ce royaume au bord de l’océan.
Les anges, loin d’être aussi heureux que nous au Ciel,
Nous envièrent elle et moi :
Oui ! C’est pour cela (comme chacun le sait
Dans ce royaume au bord de l’océan)
Qu’une nuit le vent surgit d’un nuage
Et glaça, et tua mon Annabel Lee.
Mais notre amour était beaucoup plus fort que l’amour
De nos aînés, de bien des personnes
Beaucoup plus sages que nous,
Et jamais les anges du Ciel là-haut
Ni les démons au fin fond de l’océan
Ne pourront séparer mon âme de l’âme
De ma toute belle Annabel Lee.
Car la lune ne luit jamais, sans qu’elle me porte
Des rêves d’Annabel Lee, la toute belle,
Et les étoiles ne se lèvent jamais, sans que je sente
Les yeux vifs d’Annabel Lee, ma toute belle,
Ainsi, aux rives de la nuit, je me couche à côté
De ma chérie! Ma chérie, ma vie, ma promise,
Dans son tombeau, là, au bord de l’océan,
Dans sa tombe, à côté de l’océan.
Edgar Allan Poe
Trad. Roseau
Merci Charles
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Ici le bleu n’est plus seulement bleu, il est bleu tout long…merci Sally.
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