
TIGANESTI
PAR GREGORY RATEAU
La campagne éteinte
La pluie claque
Souffrent les arbres tordus et suppliants qui,
Dans une diagonale ridicule,
Un dernier sursaut de dignité
S’arrachent de leurs lits pour prendre leur envol
Les animaux aux regards fous
S’exilent vers des déserts hypothétiques
Seule la terre exulte
Elle avale goulument
Une soif impossible à étancher
Au point que la Garla d’habitude plutôt calme et marron claire
Déborde d’agitation et devient couleur de pierre
Refluent à sa surface
Des cadavres de vélos rouillés
Des jouets déréglés
Les seules silhouettes perdues dans le lointain
Plongent dans la brume jusqu’à la taille
Commérages des feux de cheminée
Les fenêtres sont comme des écrans opaques
Ombres gesticulant d’une pièce à l’autre
Buées de souffre et de misère
Ce sont les verres qui claquent à présent
Un tintement continu
Parfois, des voix encore humaines remontent vers le ciel
Et rencontrent l’écho du tonnerre
Les bancs en bois devant les portails sont vides
Leurs pieds sont rongés jusqu’à la moelle
Les mauvaises herbes s’y installent
Se liquéfient les traces de pas
Les chiens errants boivent leurs empreintes
La forêt dévêtue dévisage impuissante
La vie se calfeutrer
Les rires se murer dans l’hiver
Grégory Rateau