CHANT D’AILES


CHANT D’AILES

Dans l’ombre mise à part, au tapis du chat, la petite flamme sacre la lumière courant d’un bout à l’autre du chant

Epanouie

lascive

la nature tire du sol la métamorphose de son corps en manifestant des orgasmes jaunes, roses, bleus, violets dans sa chaste blancheur

jusqu’aux vieux troncs qui abritent depuis longtemps l’ardeur des chevaux, rassemblent les dernières couvées

Solennel mais sans faste de couronnement

le rituel force le silence

Jeux d’enfants hors de portée d’adultes pédants, la timide herbe fantasme , recevant les yeux allant vers, les culbutes propres aux meules

Intégrale Anima Sacra, s’élève la voie pubère transe gènes.

Niala-Loisobleu – 4 Avril 2021

SORTIR DE SOI POUR S’ÊTRE EN L’ETAT SAUVAGE


SORTIR DE SOI POUR S’ÊTRE EN L’ETAT SAUVAGE

Les conquêtes finissent par faire revenir de loin, tout auprès. La verdeur de l’herbe ne serait pas aussi pure en digressions que concise. Mon Colomb ton oeuf découvre le sens non-détourné du drame antique

Le fil est tendu

balancier ferme

voici la pointe du pied au bord

Celui dont on n’emploiera pas la dénomination « d’autre » en vertu de sa spécificité d’autoportrait

Comme on se parle tout seul cette fois se répondre en un seul morceau. La voici l’impression de suite que le tableau contient. Tout le signifié de la semaille

Au bout d’un chantier la taille de pierre devient son propre outil. L’histoire allait à la recherche de ce qu’elle ne trouva pas sous l’emprunt d’un titre, il lui fallait rester dans sa nature et non papillonner dans un mélange inégal de vrai et de faux.

Autant tique le mot

autant l’histoire roule à contresens

Les luminaires indissociables ne se trompent pas d’Arbre pour la discrétion de leur union

la montagne les hisse en sept branches

seins posés sur l’Axe du candélabre

la peinture sort du ravin où elle cherchait sans s’identifier es-qualité se reconnaissant soie sauvage toutes mues laissées au bord de la route

Niala-Loisobleu – 4 Avril 2021

Guy Béart ; Quand au temple (Stances de Ronsard)


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Pierre de RONSARD
1524 – 1585

Stances

J’ay varié ma vie en devidant la trame
Que Clothon me filoit entre malade et sain,
Maintenant la santé se logeoit en mon sein,
Tantost la maladie extreme fleau de l’ame.

La goutte ja vieillard me bourrela les veines,
Les muscles et les nerfs, execrable douleur,
Montrant en cent façons par cent diverses peines
Que l’homme n’est sinon le subject de malheur.

L’un meurt en son printemps, l’autre attend la vieillesse,
Le trespas est tout un, les accidens divers :
Le vray tresor de l’homme est la verte jeunesse,
Le reste de nos ans ne sont que des hivers.

Pour long temps conserver telle richesse entiere
Ne force ta nature, ains ensuy la raison,
Fuy l’amour et le vin, des vices la matiere,
Grand loyer t’en demeure en la vieille saison.

La jeunesse des Dieux aux hommes n’est donnee
Pour gouspiller sa fleur, ainsi qu’on void fanir
La rose par le chauld, ainsi mal gouvernee
La jeunesse s’enfuit sans jamais revenir.

LE FRONT COUVERT


LE FRONT COUVERT

Le battement de l’horloge comme une arme
La cheminée émue où se pâme la cime
D’un arbre dernier éclair

brisée

L’habituel vase clos des désastres
Des mauvais rêves
Je fais corps avec eux

Des ruines de l’horloge
Sort un animal abrupt désespoir du cavalier
A l’aube doublera
Pécrevisse clouée
Sur la porte de ce refuge

Un jour de plus j’étais sauvé

On ne me brisait pas les doigts

Ni le rouge ni le jaune ni le blanc ni le nègre

On me laissait même la femme

Pour distinguer entre les hommes

On m’abandonnait au dehors
Sur un navire de délices

Vers des pays qui sont
Jes miens
Parce que je ne les connais pas

Un jour de plus je respirais naïvement
Une mer et des cieux volatils
J’éclipsais de ma silhouette
Le soleil qui m’aurait suivi

Ici j’ai ma part de ténèbres

Chambre secrète sans serrure sans espoir

Je remonte le temps jusqu’aux pires absences

Combien de nuits soudain

Sans confiance sans un beau jour sans horizon

Quelle gerbe rognée

Un grand froid de corail

Ombre du cœur

Ternit mes yeux qui s’entr’ouvrent

Sans donner prise au matin fraternel

Je ne veux plus dormir seul
Je ne veux plus m’éveiller
Perclus de sommeil et de rêves
Sans reconnaître la lumière
Et la vie au premier instant.

Paul Eluard

IL EST DES INSTANTS ÉTRANGES, UNIQUES


IL EST DES INSTANTS ÉTRANGES, UNIQUES

Il est des instants étranges, uniques, presque cocasses.
Un homme marche à midi en portant un panier sur sa tête;
le panier lui cache entièrement le visage
comme s’il était sans tête ou déguisé,
portant une tête monstrueuse et sans yeux,
aux yeux innombrables.

Tel autre,qui flâne rêveusement dans le crépuscule,
trébuche quelque part, pousse un juron,
revient sur ses pas, cherche;
— un caillou minuscule; il le soulève; il l’embrasse;
puis il s’inquiète soudain : quelqu’un d’autre a pu le surprendre;
il s’éloigne d’un air coupable.

Une femme met sa main dans sa poche; elle n’y trouve rien;
elle ressort sa main, l’élève, l’observe attentivement :
une main imprégnée de la poussière du vide.

Un garçon de café a refermé sa paume sur une mouche
— il ne la serre pas;
un client l’appelle; il a oublié la mouche;
il desserre sa paume; la mouche s’envole, se pose sur le verre.

Un papier roule dans la rue avec hésitation,
en marquant des temps d’arrêt,
sans attirer l’attention de qui que ce soit, — cela lui plaît.
Pourtant, à chaque instant,
il émet un craquement particulier qui est un démenti;
comme s’il cherchait maintenant
quelque témoin incorruptible de sa marche modeste, mystérieuse.

Et toutes ces choses ont une beauté solitaire, inexplicable,
une peine très profonde venue de nos propres gestes, étrangers et inconnus
— n’est-ce pas?

Yannis Ritsos